D. LE RACHAT D'ANNÉES D'ÉTUDES : UNE POSSIBILITÉ COMMUNE À TOUS LES RÉGIMES

Le présent projet de loi offre une possibilité nouvelle aux assurés de tous les régimes de racheter des années d'études, afin de permettre aux assurés qui seraient rentrés tardivement sur le marché du travail ou qui n'auraient pas pu valider quatre trimestres au cours de certaines années de partir plus tôt en retraite.

1. Un régime actuel dépassé

Une faculté de rachat existe déjà dans le régime général et a été conçue dans le souci de préserver les droits à retraite de personnes qui auraient dû légitimement relever d'un régime d'assurance vieillesse mais qui en ont été empêchées, soit en raison de l'absence d'un régime de base obligatoire ou d'un régime volontaire d'assurance vieillesse, soit en raison de l'impossibilité d'adhérer à un régime de base du fait de l'exercice d'une activité professionnelle à l'étranger.

Seules cinq catégories de personnes 18 ( * ) peuvent actuellement racheter des années d'études et elles n'utilisent guère cette possibilité : d'après les chiffres fournis par la CNAVTS, 7.938 demandes de rachat seulement ont été formulées, pour un effectif total de cotisants de 15 millions de personnes, ce qui représente 0,05 % ! Cette situation s'explique par la disparition des catégories de personnes initialement bénéficiaires du dispositif (personnes atteintes de la tuberculose, assurés dont l'affiliation a été rendue obligatoire après 1930...), mais également par le durcissement des conditions de rachat au fil du temps, qui ont rendu le dispositif plus coûteux pour les assurés 19 ( * ) . D'autre part, le développement de l'assurance vieillesse volontaire, a permis à des catégories d'assurés entrant dans le champ de ce dispositif d'améliorer leurs droits à la retraite et a ainsi contribué à réduire la portée du rachat.

2. Un mécanisme justifié par l'allongement de la durée d'assurance, mais dont le coût pour les assurés ne doit pas être sous-estimé

Dans la mesure où la durée d'assurance nécessaire pour l'obtention d'une pension de retraite à taux plein a déjà été allongée et va progressivement être portée à 42 ans à l'horizon 2020 d'après les dispositions de l'article 5 du présent projet de loi, votre rapporteur pour avis approuve l'idée de permettre aux assurés de remplir cette condition par un rachat volontaire de périodes n'ayant pas donné lieu à un versement de cotisations ou ayant donné lieu à un versement insuffisant et relève que de tels mécanismes existent dans plusieurs autres pays européens

Il faut toutefois bien analyser la portée de cette mesure. Si elle constitue un progrès pour les personnes, elle n'est guère compatible avec les règles de bonne gestion d'un régime par répartition, qui s'accommode mal de mesures facultatives.

Surtout, le rachat tel qu'il est envisagé par le présent projet de loi doit être effectué dans des conditions de nature à être financièrement neutres pour les régimes concernés. Ce point est très important pour deux raisons : d'une part, cette mesure, qui offre une liberté supplémentaire aux assurés, ne doit pas dégrader l'équilibre financier des régimes ; d'autre part, elle ne doit pas favoriser implicitement les personnes qui ont suivi des études supérieures, ce qui serait le cas si le coût n'était pas actuariellement neutre.

Les modalités d'application de ce dispositif seront précisées par décret et dépendront notamment de l'âge à partir duquel il interviendra : l'opération sera d'autant plus coûteuse qu'elle sera tardivement effectuée . Le rachat portera à la fois sur la part salariale et sur la part patronale, lesquelles devraient être déterminées sur une assiette compatible avec l'équilibre financier des régimes.

Même en cas d'étalement des paiements, votre rapporteur pour avis tient à souligner l'importance du coût du rachat pour les assurés. Le calcul est difficile à effectuer et dépend de nombreux paramètres, mais il est possible de donner un ordre de grandeur de ce coût. D'après les estimations effectuées par le COR, un rachat en début de vie active devrait coûter ente 2.300 euros et 7.600 euros par année achetée, pour atteindre entre 15.000 euros et 23.000 euros environ en fin de vie active. Encore faut-il mentionner que ces estimations seraient plutôt des planchers que des plafonds.

Le tableau suivant retrace règles prévues par le présent projet de loi en matière de rachat d'années d'études pour les régimes autres que ceux de la fonction publique, en tenant compte des modifications apportées au texte initial par l'Assemblée nationale, modifications que votre rapporteur pour avis approuve.

Votre rapporteur pour avis vous proposera un amendement tendant à permettre d'utiliser les sommes épargnées sur un compte épargne-temps pour racheter des années d'études ou des années incomplètes.

Le rachat d'années

Eléments communs à tous les régimes : limite de rachat fixée à 12 trimestres sans limite d'âge ; versement de cotisations fixées dans des conditions définies par décret garantissant la neutralité actuarielle ; application à compter du 1 er janvier 2004.

Périodes de rachat

Régime général (RG) (art. 20)

- Périodes d'études supérieures n'ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d'assurance vieillesse lorsque le RG est le premier régime d'affiliation après lesdites études

- années civiles ayant donné lieu à affiliation au RG, au titre desquelles il a été retenu un nombre de trimestres inférieur à 4

Artisans, industriels et commerçants (art. 20)

- Périodes d'études supérieures et n'ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d'assurance vieillesse lorsque le régime d'assurance vieillesse des professions artisanales (CANCAVA) ou celui des professions industrielles et commerciales (ORGANIC) est le premier régime d'affiliation après lesdites études,

- années civiles ayant donné lieu à affiliation à la CANCAVA ou à l'ORGANIC, au titre desquelles il a été retenu un nombre de trimestres inférieur à 4

Professions libérales (art. 65)

- Périodes d'études supérieures n'ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d'assurance vieillesse lorsque le régime d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) est le premier régime d'affiliation après lesdites études

- années civiles ayant donné lieu à affiliation à la CNAVPL, au titre desquelles il a été retenu un nombre de trimestres inférieur à 4

Exploitants agricoles (art. 74)

- Périodes d'études supérieures n'ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d'assurance vieillesse lorsque le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles est le premier régime d'affiliation après lesdites études

* 18 Il s'agit des anciens titulaires de l'indemnité de soins aux tuberculeux pour les périodes de versement de cette indemnité ne pouvant pas faire l'objet d'une validation gratuite ; des personnes dont l'affiliation au régime général, au régime des salariés agricoles ou au régime algérien a été rendue obligatoire à une date postérieure au 1 er juillet 1930 (catégorie incluant les rapatriés) ; des détenus ayant exercé un travail pénal antérieurement au 1 er janvier 1977 et les personnes qui ont fait l'objet d'une détention provisoire non imputable sur la durée de la peine ; des Français ou ressortissants communautaires ayant exercé une activité professionnelle, pour les premiers, hors de France et, pour les seconds, hors de France et de leur pays d'origine ; des personnes qui, sans recevoir de rémunération, ont rempli les fonctions de tierce personne auprès d'un membre de leur famille infirme ou invalide.

* 19 A compter du 1er janvier 1992, le taux de cotisation est passé de 9 % à 15,9 % et le montant des cotisations dues en cas d'échelonnement du paiement a été majoré de 10 %.

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