EXAMEN DES ARTICLES
TITRE II
ALIMENTATION
EN EAU ET ASSAINISSEMENT
CHAPITRE
PREMIER
ASSAINISSEMENT
Article 22
(art. L. 1331-1, L. 1331-4,
L. 1331-10 et L. 1331-11
du code de la santé
publique)
Contrôle par les communes des raccordements des immeubles
aux égouts, des déversements d'eaux usées et des
installations
d'assainissement non collectif
Cet article a pour objet de modifier les articles L. 1331-1, L. 1331-4, L. 1331-10 et L. 1331-11 du code de la santé publique, afin de renforcer les prérogatives des communes en matière de contrôle des raccordements des immeubles aux égouts pour l'évacuation des eaux usées domestiques, des déversements d'eaux usées non domestiques et des installations d'assainissement non collectif.
1. Le contrôle des raccordements des immeubles aux égouts pour l'évacuation des eaux domestiques
Aux termes de l'article L. 1331-1 du code de la santé publique, le raccordement des immeubles aux égouts disposés pour recevoir les eaux usées domestiques et établis sous la voie publique à laquelle ces immeubles ont accès soit directement, soit par l'intermédiaire de voies privées ou de servitudes de passage, est obligatoire dans un délai de deux ans à compter de la mise en service de l'égout.
Toutefois, pour certaines catégories d'immeubles déterminées par un arrêté interministériel 2 ( * ) , un arrêté du maire peut accorder :
- des prolongations de délais d'une durée maximale de dix ans ; peuvent en bénéficier les immeubles construits depuis moins de dix ans et équipés d'une installation d'assainissement non collectif ;
- des exonérations ; peuvent en bénéficier les immeubles non habitables et les immeubles difficilement raccordables dotés d'une installation d'assainissement non collectif aux normes.
Il et prévu que l'arrêté du maire doit être approuvé par le représentant de l'Etat dans le département. Cette disposition, obsolète depuis les lois de décentralisation et la disparition de la tutelle préfectorale sur les actes des collectivités territoriales, devrait être supprimée par voie d'ordonnance.
L'article L. 1331-4 du code de la santé publique met à la charge exclusive des propriétaires la réalisation des ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement et confie à la commune le soin de contrôler la conformité des installations.
Selon les renseignements communiqués à votre rapporteur pour avis, 23,5 millions de logements soit environ 82 % du total des logements , y compris les résidences secondaires, sont raccordés à un réseau public de collecte des eaux usées . Les autres immeubles sont assujettis à l'obligation de disposer d'un dispositif d'assainissement non collectif à la charge des propriétaires du logement. Une petite partie d'entre eux est desservie par un collecteur d'eaux usées auquel ils auraient dû se raccorder.
Le 1° du présent article a pour objet de compléter l'article L. 1331-1 du code de la santé publique, afin de prévoir que la commune peut fixer des prescriptions techniques pour la réalisation des raccordements des immeubles aux égouts .
Le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau, adopté par l'Assemblée nationale en janvier 2002 mais jamais inscrit à l'ordre du jour du Sénat, tendait à compléter l'article L. 1331-4 du code de la santé publique afin de prévoir que : « la commune peut fixer des prescriptions techniques afin d'assurer la collecte des eaux usées des immeubles raccordés ».
La rédaction retenue par le présent article est plus large : en figurant à l'article L. 1331-1 du code de la santé publique, elle permet d'englober non seulement la partie privative mais également la partie publique du branchement au réseau .
Cette mesure semble nécessaire . Les règles de l'art peuvent faire l'objet d'interprétations. La fixation de prescriptions techniques devrait permettre de limiter les contestations . Les communes pourront ainsi préciser les types de matériaux à utiliser, les diamètres des tuyaux, le type de regard, de boîte de branchement... Le renchérissement du coût des ouvrages devrait être peu fréquent, la plupart des entreprises respectant les normes existantes. Selon les indications communiquées à votre rapporteur pour avis, le coût de la partie du branchement située sur le domaine public serait compris, en moyenne, entre 500 et 1.500 euros toutes taxes comprises ; quant au coût de la partie du branchement située sur le domaine privé, il est très variable car il dépend de la configuration du bâtiment, du terrain...
En conséquence, votre commission vous soumet deux amendements ayant simplement pour objet :
- de substituer les termes de « réseau public de collecte des eaux usées » à celui d'« égouts » afin d'unifier la terminologie en vigueur ;
- de préciser que les groupements de collectivités territoriales compétents en matière d'assainissement collectif peuvent, à l'instar des communes, fixer des prescriptions techniques pour la réalisation des raccordements des immeubles à ce réseau.
Le 2° du présent article tend à modifier l'article L. 1331-4 du code de la santé publique, afin de préciser :
- d'une part, que les ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement doivent être maintenus en bon état de fonctionnement par leurs propriétaires ;
- d'autre part, que la commune en contrôle la qualité d'exécution et peut également contrôler leur maintien en bon état de fonctionnement .
Ces dispositions ont pour objet d'assurer la qualité et la pérennité des branchements , qui ne sont parfois pas entretenus par les particuliers, en donnant aux communes les mêmes compétences de contrôle des ouvrages privatifs d'assainissement collectif que celles qui sont prévues pour les ouvrages relevant de l'assainissement non collectif, dont l'entretien doit être contrôlé régulièrement.
Les moyens dont disposent les communes pour exercer cette mission de contrôle seraient renforcés .
L'article L. 1331-11 du code de la santé publique permet déjà aux agents du service d'assainissement d'accéder aux propriétés privées pour l'exercice de cette mission. Le 4° du présent article tend à instituer de nouvelles sanctions financières à l'encontre des propriétaires qui y feraient obstacle.
L'article L. 1331-6 du même code prévoit que la commune peut procéder d'office et aux frais de l'intéressé aux travaux indispensables.
En outre, l'article 26 du présent projet de loi tend à modifier l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, afin de permettre à la commune, à la demande des usagers ou des propriétaires, d'assurer les travaux de mise en conformité des ouvrages, tandis que son article 27 vise à insérer un article L. 2224-12-2 dans le même code, afin de préciser que les frais entraînés par ces travaux, diminués des subventions éventuellement obtenues, doivent être intégralement remboursés par les propriétaires.
2. Le contrôle des déversements des eaux usées autres que domestiques
Les communes ne sont pas tenues de recevoir les eaux usées autres que domestiques. Elles peuvent donc édicter toute prescription nécessaire à cette fin, refuser un déversement ou ne l'accepter que sous réserve d'un traitement préalable.
Le 3° du présent article a pour objet de réécrire l'article L. 1331-10 du code de la santé publique, afin de renforcer les moyens de contrôle des communes sur les déversements d'eaux usées autres que domestiques .
Actuellement, tout déversement d'eaux usées autres que domestiques dans les égouts publics doit être préalablement autorisé par la collectivité à laquelle appartiennent les ouvrages qui seront empruntés par ces eaux usées avant de rejoindre le milieu naturel.
Cette disposition, qui a pour but de permettre aux collectivités de contrôler les effluents déversés pour protéger leurs stations d'épuration, se révèle en pratique inadaptée. En effet, dans certains cas, les effluents transitant par le réseau d'une collectivité peuvent être déversés dans le réseau d'une autre collectivité avant de parvenir à la station d'épuration d'une troisième et, enfin, d'être rejetés dans le milieu naturel. Ces phénomènes « en cascade » ne sont pas pris en compte par le dispositif actuel et ne permettent pas aux communes de contrôler effectivement les effluents empruntant leurs réseaux respectifs. Par ailleurs, toutes les collectivités ne sont pas propriétaires du réseau situé sur leur territoire.
Aussi le premier alinéa du texte proposé par le présent article tend-il à prévoir que l'autorisation préalable émane de la collectivité chargée de la collecte des eaux usées à l'endroit où a eu lieu le déversement , ce qui devrait permettre d'assurer un contrôle plus strict des effluents. Par ailleurs, afin d'unifier la terminologie, il ne serait plus fait référence aux égouts publics mais au réseau public de collecte des eaux usées.
Le deuxième alinéa prévoit en outre que cette autorisation ne peut être délivrée qu'après avis des collectivités intervenant en aval dans la collecte, le transport et l'épuration des eaux ainsi que l'élimination des boues . Elles auraient ainsi un droit de regard sur les effluents empruntant leur réseau, qui semble nécessaire en raison des risques pour le traitement en station et pour la qualité des boues, notamment si ces dernières doivent être épandues sur des terrains agricoles. Afin d'éviter tout blocage institutionnel, l'avis serait réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois.
Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 1331-10 du code de la santé publique prévoit que l'autorisation préalable fixe , suivant la nature du réseau à emprunter ou des traitements à mettre en oeuvre, les caractéristiques que doivent présenter les eaux usées pour être reçues . Le troisième alinéa du texte proposé par le présent article la charge de fixer en outre sa durée et, en tant que de besoin, les conditions de surveillance .
En exigeant que la durée de l'autorisation soit limitée, le projet de loi vise à donner à la commune les moyens :
- de ne pas la renouveler, si le responsable du rejet ne se conforme pas aux prescriptions ;
- ou d'opter pour une autre solution que le rejet dans le réseau, en cas de changement d'activité ou d'augmentation des restrictions sur les rejets d'eaux usées non domestiques, s'il s'est avéré que le traitement en station ou la qualité des boues ne répondent pas aux obligations réglementaires du fait de ces rejets.
Les conditions de surveillance des eaux usées déversées consistent généralement à exiger des analyses des eaux usées avant leur déversement dans le réseau. Ces dernières ne doivent notamment ni être une source de danger pour les agents chargés de l'entretien des ouvrages ni mettre en cause le fonctionnement de la station ni la qualité des boues issues du traitement.
Le quatrième alinéa du texte proposé reprend la disposition selon laquelle l'autorisation préalable peut être subordonnée à la participation de l'auteur du déversement aux dépenses de premier établissement entraînées par la réception des eaux .
La commune ou le groupement doit en effet souvent réaliser des travaux pour renforcer le réseau ou élargir la gamme des traitements réalisés par la station d'épuration pour pouvoir accepter le déversement. Le coût de ces dépenses est variable ; il est moindre lorsque le demandeur réalise un traitement préalable des eaux usées ou met en place un dispositif de stockage permettant de réguler le flux déversé.
Le texte proposé par le présent article ne fait plus mention d'une participation aux dépenses d'entretien et d'exploitation entraînées par la réception des eaux usées. L'auteur du déversement serait , en effet, soumis au paiement de la redevance d'assainissement , dont le régime serait encadré par les articles L. 2224-12-2 et L. 2224-12-3 que l'article 26 du présent projet de loi tend à insérer dans le code général des collectivités territoriales.
Enfin, le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 1331-10 du code de la santé publique reprend, en l'étendant, la disposition selon laquelle cette participation aux dépenses de premier établissement entraînées par la réception des eaux usées s'ajoute :
- aux redevances d'assainissement (article L. 2214-12-2 du code général des collectivités territoriales) ;
- au remboursement des travaux effectués par la commune sur les parties des branchements situées sous la voie publique (article L. 1331-2 du code de la santé publique) ;
- au remboursement des travaux de réalisation par la commune de la partie du réseau de collecte sous voie privée (article L. 1331-3 du code de la santé publique) ;
- au remboursement des travaux de mise aux normes des ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement et de mise hors d'état de servir ou de créer des nuisances des fosses et autres installations de même nature (article L. 1331-6 du code de la santé publique) ;
- au paiement d'un « droit d'entrée » sur le réseau , facultativement demandé par la commune et dont le montant est très variable, généralement compris entre 1.000 et 1.500 euros pour une maison individuelle (article L. 1331-7 du code de la santé publique) ;
- à la sanction financière pouvant être imposée aux propriétaires d'immeubles édifiés postérieurement à la mise en service de l'égout auquel ces immeubles doivent être raccordés (article L. 1331-8 du code de la santé publique).
3. Un droit d'accès des agents du service d'assainissement aux propriétés privées
L'article L. 1331-11 du code de la santé publique reconnaît aux agents du service d'assainissement un droit d'accès aux propriétés privées pour :
- contrôler la conformité des ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement en application de l'article L. 1331-4 du code de la santé publique ;
- exécuter d'office les travaux nécessaires à la mise aux normes de ces ouvrages en application de l'article L. 1331-6 du même code ;
- assurer le contrôle des installations d'assainissement non collectif et leur entretien si la commune a décidé sa prise en charge par le service.
La périodicité des contrôles effectués sur les installations des particuliers est en général de quatre ans ; elle correspond à la période de vidange des fosses. L'arrivée des agents doit être précédée d'un avis de visite adressé aux propriétaires dans un délai raisonnable. Toutefois, si le propriétaire refuse de laisser accéder les agents du service d'assainissement à son domaine, ces derniers ne peuvent entrer par la force dans la propriété car aucune mesure d'exécution d'office n'est prévue .
Un rapport de visite établi par ces agents peut conduire le maire à utiliser ses pouvoirs de police pour faire cesser les atteintes à la sécurité et à la salubrité publique. En cas d'urgence, il peut même recourir à la force publique pour faire cesser les atteintes à la salubrité publique. Mais, de façon moins radicale, l'article L. 1312-2 du code de la santé publique prévoit l'application de sanctions dissuasives pour les personnes refusant l'accès de leurs terrains privés aux agents assermentés chargés de constater les infractions à la législation sur l'assainissement et la santé : trois mois d'emprisonnement et 3.750 euros d'amende.
Le 4° du présent article tend à réécrire l'article L. 1331-11 du code de la santé publique afin :
- d'une part, de prévoir que les agents du service d'assainissement ont également accès aux propriétés privées pour assurer le contrôle des déversements d'eaux usées autres que domestiques ;
- d'autre part, d'instituer une sanction financière , égale à celle pouvant être imposée aux propriétaires d'immeubles édifiés postérieurement à la mise en service de l'égout auquel ces immeubles doivent être raccordés en application de l'article L. 1331-8 du code de la santé publique, en cas d'obstacles mis à l'accomplissement des missions de contrôle dévolues aux agents.
L'entretien étant une prestation facultative que les communes peuvent proposer aux usagers de l'assainissement non collectif, il est peu probable que les agents du service d'assainissement ne puissent accéder aux propriétés concernées. Telle est la raison pour laquelle aucune sanction financière n'est prévue dans cette hypothèse. Des conventions seront signées avec les usagers qui souhaiteront bénéficier de la prestation ainsi proposée par la commune. Si un usager ne souhaitait plus en bénéficier, il mettrait fin à la convention.
4. Un diagnostic du respect des prescriptions techniques applicables aux installations d'assainissement non collectif avant la vente d'un immeuble à un acquéreur non professionnel
Votre commission vous soumet un amendement ayant pour objet de compléter le présent article par un nouveau paragraphe et d'insérer un article L. 1331-11-1 dans le code de la santé publique, afin de prévoir que toute promesse de vente, tout acte authentique de vente de tout ou partie d'un immeuble à usage d'habitation à un acquéreur non professionnel comprend un diagnostic du respect par cet immeuble ou cette partie d'immeuble des prescriptions techniques applicables aux installations d'assainissement non collectif . Ce diagnostic devra avoir été établi depuis moins d'un an à la date de la promesse de vente ou de l'acte authentique de vente. Il s'agit :
- d'une part, d'apporter des garanties supplémentaires aux acquéreurs non professionnels, étant rappelé que le coût d'une installation d'assainissement non collectif s'élève à environ 8.000 euros ;
- d'autre part, de faciliter l'exercice de la mission de contrôle des installations d'assainissement non collectif dévolue aux communes et aux groupements de collectivités territoriales.
En pratique, de tels diagnostics sont d'ores et déjà souvent demandés par les notaires lors des ventes d'immeubles en milieu rural.
Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 22 ainsi modifié .
Article 23
(section 14 nouvelle du chapitre III du titre III du livre
III
de la deuxième partie et art. L. 2333-92 et L. 2333-93
nouveaux
du code général des collectivités
territoriales)
Taxe sur les eaux pluviales et de ruissellement
Cet article a pour objet de permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'instituer une taxe sur le volume des eaux pluviales et de ruissellement susceptibles de pénétrer dans les installations destinées à assurer la collecte, le transport, le stockage et le traitement de ces eaux.
A cette fin, il tend à créer une section 14, intitulée « taxe pour la collecte, le stockage et le traitement des eaux pluviales et de ruissellement », au sein du chapitre III (« taxes, redevances, ou versements non prévus par le code général des impôts ») du titre III (« recettes ») du livre III (« finances communales ») de la deuxième partie (« la commune ») du code général des collectivités territoriales, comprenant deux articles numérotés L. 2333-92 et L. 2333-93.
Votre commission des Affaires économiques devrait vous proposer de réparer l'omission de la référence au transport des eaux pluviales et de ruissellement dans l'intitulé de cette nouvelle section.
1. Le droit en vigueur
Alors que la collecte, l'acheminement et le traitement des eaux usées relèvent du service public d'assainissement, dont les coûts doivent être couverts par l'usager, la gestion des eaux pluviales et de ruissellement relève en principe du budget général de la commune financé par le contribuable local .
Lorsque les contraintes d'un réseau unitaire conduisent à mêler eaux usées et eaux de ruissellement, si le service d'assainissement est appelé à gérer l'ensemble de ces flux, il ne peut en imputer la charge que sur ses seuls usagers. Le traitement des eaux pluviales nécessitant un financement par le budget général de la collectivité, ce dernier verse alors une participation lorsque le réseau est unitaire ou que le service d'assainissement est chargé d'exploiter le réseau des eaux pluviales en sus de celui des eaux usées.
Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport public particulier sur la gestion des services d'eau et d'assainissement paru en décembre 2003 : « il est cependant souvent malaisé d'estimer avec précision le montant de cette participation qui peut conduire à majorer ou au contraire minorer anormalement la charge imputable aux usagers. Il en résulte des disparités tarifaires importantes selon la pratique adoptée par les collectivités 3 ( * ) . »
Les réseaux séparatifs, distinguant eaux usées et eaux pluviales, se rencontrent plus particulièrement dans les zones d'urbanisation récente. Dans la plupart des villes, où les réseaux ne sont pas séparés, il est toutefois difficilement concevable d'établir un nouveau réseau destiné au seul recueil des eaux pluviales et de ruissellement , sauf à accepter un coût prohibitif en zone d'urbanisation dense.
Selon les renseignements communiqués à votre rapporteur pour avis, il y a actuellement, en matière de collecte, 78.800 kilomètres de collecteurs exclusivement pluviaux, 93.400 kilomètres de collecteurs unitaires et 156.000 kilomètres de collecteurs recevant uniquement des eaux usées. 8.800 communes sont équipées exclusivement d'un réseau séparatif, tandis que 7.300 ont à la fois sur leur territoire un réseau séparatif et un réseau unitaire . On dénombre par ailleurs environ 26.000 déversoirs d'orage, 6.100 bassins d'orage et 4.600 bassins de rétention pluviale.
Le coût de ces équipements varie en fonction de la complexité du dispositif d'assainissement pluvial. Il peut représenter plus de 50 % du coût de création et d'exploitation des réseaux unitaires. Rapporté au logement desservi, le coût annuel de la collecte d'eau pluviale peut être compris dans une fourchette de 20 à 200 euros .
2. Le dispositif proposé
Le présent article a pour objet, comme le souligne l'exposé des motifs du projet de loi, d'opérer une « clarification juridique pour éviter les contentieux ou des difficultés au stade du contrôle de légalité ».
Il tend à permettre le financement de la création, de l'exploitation, de l'entretien, du renouvellement et de l'extension des installations de collecte, de transport, de stockage et de traitement des eaux pluviales et de ruissellement par une taxe spécifique et, ainsi, à alléger la redevance demandée aux consommateurs d'eau potable.
Selon le texte proposé pour insérer un article L. 2333-92 dans le code général des collectivités territoriales, cette nouvelle taxe serait facultative . Elle pourrait être instituée par les collectivités territoriales ou les groupements ayant réalisé ou réalisant des installations destinées à assurer la collecte, le transport, le stockage et le traitement des eaux pluviales et de ruissellement.
La référence aux collectivités territoriales et non aux seules communes s'explique par les compétences des départements en région Ile-de-France. La réorganisation de la région parisienne par la création de huit nouveaux départements à partir de ceux de la Seine et de la Seine-et-Oise a conduit à répartir la compétence en matière d'assainissement entre trois niveaux de collectivités. Si les communes restent chargées de la collecte des eaux usées, quatre départements - Paris, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne - ont hérité des égouts départementaux gérés par l'ancien département de la Seine. Le Syndicat interdépartemental d'assainissement de l'agglomération parisienne (SIAAP) a été constitué en 1970 par les quatre départements précités pour prendre la suite de l'ancien département de la Seine dans la gestion des grands ouvrages de transport et d'épuration des eaux usées. Cet établissement public local a le statut d'entente interdépartementale.
La taxe aurait pour assiette le volume maximal des eaux susceptibles de pénétrer dans ces installations par des branchements. Il est précisé que les caractéristiques des branchements, la superficie et la nature des terrains et des bâtiments dont proviennent les eaux ainsi que l'existence d'aménagements ou d'équipements en limitant le volume doivent être pris en compte dans son calcul.
Force est de reconnaître que les dispositions proposées ne permettent pas de se faire une idée claire de l'assiette envisagée. Elle serait précisée par voie réglementaire . Selon les renseignements communiqués à votre rapporteur pour avis, le volume maximal auquel il est fait référence serait calculé à partir de la capacité hydraulique du branchement corrigée, en cas de branchement manifestement surdimensionné, en fonction du volume maximal d'eau que peut recueillir la parcelle desservie.
Le taux de la taxe serait fixé par l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou l'organe délibérant du groupement dans la limite d'un plafond fixé à 0,30 euro par mètre cube .
Selon les indications communiquées à votre rapporteur pour avis, son rendement « dépendra du taux qui sera arrêté par la commune. Si on le rapporte à la surface imperméabilisée faisant l'objet d'une collecte, cette redevance devrait atteindre au maximum 1 à 2 euros par mètre carré . »
La taxe serait perçue chaque année auprès des propriétaires des branchements . Elle serait assise, liquidée et recouvrée par la collectivité territoriale, le groupement de collectivités territoriales, leur délégataire ou, à défaut, le représentant de l'Etat dans le département, selon les mêmes garanties et sanction qu'en matière d'impôts directs.
Cette disposition reprend celle régissant le recouvrement de la taxe sur les abattoirs publics sous réserve de l'extension au délégataire du service d'assainissement de la possibilité de percevoir la taxe. On notera cependant que les délégataires des services de distribution d'eau assuraient le recouvrement de la taxe sur les consommations d'eau perçue par le Fonds national pour le développement des adductions d'eau avant sa suppression par la loi de finances rectificative pour 2004.
Le texte proposé pour l'article L. 2333-93 du code général des collectivités territoriales prévoit que le produit de la taxe doit être affecté à la création, à l'exploitation, au renouvellement, à l'extension des installations de collecte, de transport, de stockage et de traitement des eaux pluviales et de ruissellement et à l'entretien des ouvrages .
Sur le plan comptable, la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales aurait ainsi la possibilité :
- soit d'affecter le produit de la taxe au budget général en l'imputant pour partie sur la section fonctionnement et pour partie sur la section investissement ;
- soit de créer un état annexé au budget général permettant de mettre en regard des recettes les dépenses qu'elles servent à financer ;
- soit de créer un budget annexe spécifique.
Un décret en Conseil d'Etat devrait préciser les modalités techniques de fixation de l'assiette, celles de recouvrement, ainsi que la répartition de la taxe lorsque l'assainissement pluvial est délégué pour partie par la commune à un groupement de collectivités territoriales.
3. La position de la commission
Votre commission constate que la création d'une taxe spécifique supportée par les propriétaires des branchements de déversement d'eau pluviale répond au souhait de nombreuses collectivités de disposer d'une source de financement spécifique permettant d'alléger la redevance demandée aux consommateurs d'eau potable.
Ce nouvel outil devrait également inciter les propriétaires des branchements à utiliser les techniques alternatives d'évacuation par les réseaux publics de collecte des eaux usées puisque la redevance devrait être fonction du débit maximal rejeté dans chaque branchement. Les propriétaires créant leurs propres dispositifs de stockage et d'infiltration pourraient ainsi bénéficier d'une redevance réduite ou même nulle s'ils n'effectuaient plus aucun rejet. Cette taxe devrait s'avérer particulièrement incitative pour les propriétaires disposant de grandes surfaces imperméabilisées dont les eaux de ruissellement concourent à l'aggravation de la saturation des réseaux et aux inondations.
Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 23.
* 2 Arrêté du 19 juillet 1960 complété par un arrêté du 28 février 1986.
* 3 Rapport public particulier sur la gestion des services d'eau et d'assainissement - décembre 2003 - page 27.