B. L'AMPLEUR DES CRÉDITS REPORTÉS PÈSE SUR LES PROGRAMMES D'ÉQUIPEMENT

La remarquable préservation des crédits d'équipements disponibles sur les trois premières annuités de la loi de programmation n'a pas été suivie d'une consommation intégrale de ces crédits.

Aux reports de crédits hérités de la précédente loi de programmation, qui s'élevaient à 800 millions d'euros, se sont ajoutés, en deux années, 2 milliards d'euros de crédits reportés supplémentaires, c'est-à-dire de crédits non consommés. Au total, l'exercice 2005 a débuté avec un montant considérable de 2,8 milliards d'euros de crédits reportés .

L' amplification des reports de crédits trouve son origine dans deux facteurs. La mise à disposition tardive d'une partie des crédits d'équipements, en fin d'année, si bien qu'ils ne peuvent matériellement être consommés avant la fin de l'exercice. C'est le cas des crédits rétablis en collectif budgétaire après avoir été annulés pour gager le décret d'avance de financement des surcoûts des opérations extérieures. Le deuxième facteur est plus global et tient à la norme de dépense imposée aux ministères pour que les paiements de l'exercice n'excèdent pas les crédits ouverts en loi de finances, et ce pour ne pas accentuer le déséquilibre des finances publiques.

A ces crédits de report correspondent des reports de charges eux aussi très élevés puisqu'ils atteignaient 3 milliards d'euros en début d'exercice 2005. Les retards de paiement représentent 38 % de la totalité des reports de charges (soit 1,15 milliards d'euros). Les intérêts moratoires du ministère de la défense à l'égard de ses fournisseurs sont ainsi passés de 21,5 à 28,9 millions d'euros de 2003 à 2004, soit une augmentation d'un tiers d'un exercice à l'autre. Ils devraient être, en toute logique, beaucoup plus élevés encore en 2005.

Face à cette situation, plusieurs éléments nouveaux sont intervenus.

Premièrement, ainsi que votre rapporteur l'a déjà indiqué, le financement du surcoût des opérations extérieures de 2005 par une annulation non compensée de crédits d'équipement conduit à minorer mécaniquement de plus de 600 millions d'euros le volume des crédits de report. Celui-ci devrait être voisin de 2 milliards d'euros fin 2005.

Deuxièmement, un régime dérogatoire par rapport à la limite de 3 % des crédits initiaux fixée par la LOLF pour le montant des crédits reportables a été prévu par l'article 57 de la loi de finances. Il vise à permettre la poursuite de la réalisation de la loi de programmation militaire.

Enfin, un arbitrage rendu au plus au niveau de l'Etat autorise le ministère de la défense à dépenser des crédits supérieurs à ceux inscrits en loi de finances initiale jusqu'à la fin de l'actuelle loi de programmation militaire, en vue de résorber progressivement ces reports.

Au-delà de la problématique immédiate des reports de crédits, la tension est également perceptible au regard de la montée des besoins financiers au fil de l'avancement de la réalisation physique de la loi de programmation . Ceux-ci correspondent au renouvellement concomitant, dans les cinq à dix prochaines années, d'un très grand nombre de nos équipements majeurs. Les uns correspondent à des programmes anciens qui ont été excessivement différés, comme le Rafale, et les autres à des programmes plus récents qu'il est difficile de retarder, car ils doivent pourvoir au remplacement de matériels vieillissants et de moins en moins disponibles. Enfin, dans le même temps, le maintien en condition opérationnelle mobilise des moyens financiers de plus en plus lourds.

A travers ce constat est posée la question de la prochaine loi de programmation militaire dont l'examen interviendra au-delà de l'actuelle législature. Il est clair que la réalisation de notre modèle d'armée, même décalée par rapport à l'objectif 2015, ne pourra être envisagée sans une nouvelle progression du budget d'équipement militaire.

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