III. LA CONFORTATION DE L'INDÉPENDANCE DE LA STATISTIQUE PUBLIQUE

1. La mise en place de l'Autorité de la statistique publique

L'article 144 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie dispose que « La conception et la diffusion des statistiques publiques sont effectuées par le service statistique public en toute indépendance professionnelle ». Pour veiller au respect de ce principe, cette même loi a créé une Autorité de la statistique publique composée de neuf membres.

Les personnalités suivantes ont été nommées le 27 mai 2009 :

- M. Paul Champsaur, président, nommé par un décret du 25 mars 2009 ;

- M. Francis Mer, désigné par le président de l'Assemblée nationale ;

- M. Yves Fréville, désigné par le président du Sénat ;

- M. Philippe Le Clézio, désigné par le président du Conseil économique, social et environnemental ;

- M. Jean Gaeremynck, président du comité du secret statistique, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;

- M. François Ecalle, nommé par le premier président de la Cour des comptes ;

- M. Philip Dane, nommé par le chef du service de l'inspection générale des finances ;

- M. Pascal Penaud, nommé par le chef de l'inspection générale des affaires sociales ;

- M. Bruno Durieux, nommé par le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

L'Autorité de la statistique publique a été installée par le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi le 8 juin 2009, et s'est engagée dans la définition de son programme de travail.

2. L'organisation ternaire de la statistique publique française

La gouvernance de la statistique publique française repose désormais sur une organisation ternaire :

- le Conseil national de l'information statistique (CNIS), qui est chargé de recueillir la demande sociale en matière de travaux statistiques, par concertation entre ses producteurs et ses utilisateurs ;

- le service statistique public, qui exécute le programme de travail statistique, à la lumière des avis émis par le CNIS ;

- l'Autorité de la statistique publique, qui veille au respect des bonnes pratiques dans la conception, la production et la diffusion des statistiques publiques, notamment en matière d'indépendance professionnelle.

IV. LA DÉLOCALISATION DE L'INSEE À METZ : UNE OPÉRATION À RISQUES

1. Les raisons de l'implantation de services de l'INSEE en région

Le Président de la République a souhaité relancer une politique d'implantation d'emplois publics en région afin d'apporter de l'emploi à des territoires qui en ont besoin, de réduire le coût de gestion des administrations, en particulier en matière immobilière, et de réaliser des synergies permettant une meilleure efficacité des services publics.

Compte tenu de la restructuration des forces armées, il a souhaité que cette politique s'applique prioritairement à l'agglomération de Metz : la proximité de cette ville avec l'Office statistique européen ainsi que sa desserte TGV ont conduit le Gouvernement à retenir l'implantation de services statistiques publics en Moselle.

Soucieux de préserver la qualité de la production du service statistique public, le Gouvernement a demandé à M. Jean-Pierre Duport, vice-président du Conseil national de l'information statistique, et à M. Jean-Philippe Cotis, directeur général de l'INSEE, de dessiner les contours d'un centre statistique implanté à Metz qui apporte une valeur ajoutée au fonctionnement des administrations en exploitant toutes les synergies possibles.

MM. Jean-Pierre Duport et Philippe Cotis ont remis leur rapport au Premier ministre en décembre 2008, et le Gouvernement a décidé de retenir pour le centre statistique de Metz l'architecture qu'ils proposent, autour de quatre piliers : statistiques sociales et locales, produits de diffusion, ressources humaines, informatique. D'ici 2013, 625 postes seront implantés, dont 500 en provenance du service statistique public.

2. L'état d'avancement du projet de délocalisation

Le rythme annuel d'implantation des emplois tient compte des nécessités fonctionnelles de l'INSEE. La montée en puissance du centre de Metz sera répartie dans le temps, selon le calendrier suivant :

CALENDRIER D'IMPLANTATION DES EMPLOIS A METZ

2010

2011

2012

2013

2010/2013

Nombre d'emplois

15

200

205

205

625

Les agents qui rejoindront Metz seront issus de différentes origines : agents du système statistique public (de statut INSEE ou non), nouveaux admis aux concours de l'INSEE, personnels détachés, emplois réservés...

Il n'y aura pas de départ contraint à Metz et le Gouvernement prétend se donner les moyens de susciter des volontaires par un ambitieux plan d'accompagnement, et de faire en sorte que les agents qui feraient le choix de rester sur place, alors que leur activité serait en tout ou partie transférée à Metz, se voient proposer de nouvelles fonctions au sein du système statistique public et ne soient affectés ni dans leur situation statutaire ni dans leur rémunération.

Votre rapporteure pour avis souligne que les ajustements de personnels pendant cette période transitoire justifient une inflexion dans le rythme de baisse du plafond d'emplois de l'INSEE, voire un relèvement.

En matière immobilière, l'INSEE poursuit la recherche d'une solution offrant les meilleures caractéristiques d'accessibilité et de fonctionnalité, avec l'appui de la direction des personnels et de l'adaptation de l'environnement professionnel (DPAEP) et en concertation étroite avec les ministères du budget et de la défense, et en association avec la municipalité de Metz.

En matière d'organisation, l'INSEE mettra en place une structure projet chargée de la conduite de ce chantier. Cette structure devra permettre de préparer toutes les mesures utiles destinées à organiser les transferts d'activité vers Metz, à faciliter et accompagner les mobilités géographiques des agents, et à accompagner les reconversions professionnelles de ceux dont l'emploi se trouverait modifié. Au-delà du dialogue social institutionnel, un comité de suivi paritaire sera mis en place auprès du directeur général de l'INSEE.

3. De réels inconvénients

Comme le soulignent MM. Jean-Pierre Duport et Philippe Cotis dans leur rapport au Premier ministre, « les délocalisations de structures administratives sont sources de coûts élevés et débouchent souvent, si l'on n'y prend garde, sur des échecs » . Les expériences récentes de délocalisations ont montré que 10 % seulement des effectifs concernés tendent en moyenne à suivre le mouvement. Il en résulte alors des coûts élevés, qu'il s'agisse des coûts de recrutement et de formation des nouveaux personnels ou du coût qualitatif que représente la perte du savoir-faire des personnels d'origine .

En outre, les gains à attendre d'une telle opération pour le réseau statistique régional sont peu probants. Il faut noter que 70 % des effectifs du service statistique public sont d'ores et déjà localisés en dehors de la région Ile-de-France, ainsi qu'environ la moitié des personnels d'encadrement. Paradoxalement, le regroupement à Metz des personnels chargés de l'enquête sur l'emploi et des statistiques sur le tourisme aura pour effet de les rendre moins proches du terrain qu'ils ne le sont actuellement dans chacune des régions.

MM. Jean-Pierre Duport et Philippe Cotis n'hésitent donc pas à écrire que « dans un contexte où, par ailleurs, l'Institut s'est engagé dans une réduction programmée des effectifs en application de la RGPP, le risque d'un trop grand étirement territorial des agents de l'INSEE se précise et l'opportunité d'ouvrir une nouvelle implantation territoriale en Moselle ne va pas nécessairement de soi ».

Pour sa part, votre rapporteure pour avis estime que cette délocalisation administrative hâtivement décidée, dans un contexte de stagnation des crédits et de diminution des emplois de l'INSEE, est de nature à compromettre le bon fonctionnement de l'Institut.

Elle rappelle que la nécessaire indépendance du service public de la statistique ne saurait reposer uniquement sur la conscience professionnelle des agents de l'INSEE, mais dépend aussi concrètement des moyens que le Gouvernement veut bien lui accorder.

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