B. UNE ÉVOLUTION DIFFÉRENCIÉE DES CRÉDITS DES ACTIONS DU PROGRAMME : UN BUDGET MARQUÉ PAR LA SANCTUARISATION DES CRÉDITS DE L'ACSÉ ET LA MONTÉE EN PUISSANCE DU DISPOSITIF DES « EMPLOIS FRANCS »

1. Une légère augmentation des crédits de l'action « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville » : la sanctuarisation des crédits de l'ACSé


• L' action « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville » regroupe plus des deux tiers des crédits du programme 147 .

En 2014, les crédits de cette action augmentent légèrement, de 0,1 %, soit environ 500 000 euros.

Cette action regroupe l'ensemble des crédits gérés par l'Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) à destination des quartiers de la politique de la ville dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale et des dispositifs spécifiques en lien avec ceux-ci, tels que le programme de réussite éducative, le dispositif des adultes-relais, les opérations « ville vie vacances », les internats d'excellence et les écoles de la deuxième chance (E2C).

Votre rapporteur pour avis se réjouit de l'augmentation des crédits de cette action, ce qui permet la sanctuarisation des crédits destinés à des dispositifs qui ont fait la preuve de leur utilité sur le terrain .


• S'agissant du programme de réussite éducative , votre rapporteur pour avis note que 76 millions d'euros sont prévus pour 2014.

Institué par la loi du 18 janvier 2005 pour la cohésion sociale 4 ( * ) , dont l'article 128 dispose que « les dispositifs de réussite éducative mènent des actions d'accompagnement au profit des élèves du premier et du second degrés et de leurs familles, dans les domaines éducatif, périscolaire, culturel, social et sanitaire », ce programme prévoit le soutien de l'État au financement d' équipes pluridisciplinaires chargées de mettre en place, pendant et hors temps scolaires, un accompagnement social, éducatif et culturel, individuel des enfants et de leur famille , afin de prévenir des situations de rupture ou d'échec scolaire et de repérer et d'accompagner les enfants en difficulté et leurs familles, en complémentarité avec les mesures mises en place par le ministère de l'éducation nationale.

Sur l'année scolaire 2012-2013, 518 projets de réussite éducative ont été actifs et financés par l'ACSé. 115 000 enfants environ en ont été bénéficiaires, dont plus de 71 000 dans le cadre d'un parcours individualisé.

Votre rapporteur pour avis note plusieurs évolutions positives :

- l'augmentation du taux d'individualisation des parcours , qui atteint désormais près de 62 % ;

- la poursuite de la diminution de la part des financements octroyés à des actions de soutien à la scolarité , désormais prises en charge par le ministère de l'éducation nationale. Cette évolution permet le financement d'autres types d'actions complémentaires, comme le soutien à la scolarité des adolescents et la lutte contre le décrochage scolaire.

Votre rapporteur pour avis estime qu'il convient de poursuivre le rééquilibrage de la prise en charge des actions de réussite éducative entre le ministère de la ville et le ministère de l'Éducation nationale.

- l'augmentation du cofinancement, en particulier des communes et de leurs groupements, qui a atteint 37 millions d'euros en 2011.

Votre rapporteur pour avis note que si les crédits destinés au financement des programmes de réussite éducative diminuent en 2014, cette évolution constitue un simple ajustement au niveau de l'exécution constatée , comme l'a confirmé Mme Laurence Girard, directrice générale de l'ACSé, lors de son audition par votre rapporteur pour avis.


• Votre rapporteur pour avis souhaite s'intéresser plus spécifiquement au dispositif des adultes-relais , suite aux engagements pris par le Président de la République à Auch le 3 août 2013 de créer 500 postes supplémentaires.

79,5 millions d'euros devraient être consacrés en 2014 à ce dispositif, soit une augmentation de 3,5 millions d'euros par rapport à 2013.

Le dispositif des « adultes-relais » a été mis en place par le Comité interministériel des villes (CIV) du 14 décembre 1999. Il vise à favoriser le lien social par des actions de médiation sociale, culturelle, de prévention de la délinquance et de tranquillité de l'espace public dans les quartiers de la politique de la ville.

Les actions menées par les adultes-relais consistent ainsi à faciliter localement l'accès des habitants des quartiers de la politique de la ville aux services publics et à améliorer les rapports sociaux dans les espaces publics ou collectifs de ces quartiers.

Votre rapporteur pour avis estime que ce dispositif est particulièrement intéressant et regrette que les collectivités territoriales ne s'en soient pas davantage saisies. Il salue donc l'engagement du Président de la République de créer 500 postes supplémentaires en 2014.

D'après les informations transmises par le Gouvernement, ces nouveaux postes répondront à trois priorités :

- l'accès à l'emploi : il s'agit rapprocher les jeunes du service public de l'emploi. Près de 11 % des jeunes ne sont ni en emploi, ni en formation, ni inscrits au chômage dans les zones urbaines sensibles (ZUS) contre 5,5 % au niveau national. Les adultes-relais peuvent jouer un rôle essentiel de repérage pour permettre aux différents dispositifs de toucher leur cible ;

- la tranquillité publique : une priorité est donnée aux actions relevant de la gestion urbaine de proximité, de la médiation de nuit et de l'amélioration du dialogue entre police et population ;

- la participation citoyenne : il s'agit de renforcer les centres sociaux qui participeront à la mise en place de conseils de citoyens.

Votre rapporteur pour avis salue par ailleurs les initiatives prises par l'ACSé pour améliorer la professionnalisation des adultes-relais . L'Agence a mis en place en 2009 un plan d'accompagnement professionnel des adultes relais : 70 % des adultes-relais en poste ont ainsi bénéficié d'au moins une formation en 2011, ces formations portant principalement sur la gestion des conflits (35 %) ou l'accueil des publics (28 %).

Au cours de son audition par votre rapporteur pour avis, Mme Laurence Girard, directrice générale de l'ACSé, a évoqué les travaux en cours avec le ministère des affaires sociales en vue de la reconnaissance du métier de médiateur et indiqué qu'un million d'euros serait consacré en 2014 à la formation des adultes-relais.

Votre rapporteur pour avis, conscient du rôle essentiel de la médiation dans les quartiers de la politique de la ville, se réjouit de la poursuite de ce plan de formation des adultes-relais et estime qu'il conviendrait qu'une véritable filière de formation en matière de médiation puisse émerger.

2. Les crédits de l'action « Revitalisation économique et emploi » sont en diminution sensible, sous l'effet de la diminution des crédits destinés à la compensation des exonérations de charges sociales en zone franche urbaine (ZFU)


• L' action « Revitalisation économique et emploi », qui regroupe 27,4 % des crédits du programme 147, voit ses crédits diminuer de 4,5 % en AE et de 14,5 % en CP .

Cette action regroupe :

- les crédits dédiés à la compensation des exonérations de charges sociales en zones franches urbaines (ZFU) et en zones de redynamisation urbaine (ZRU) , soit 87,5 millions d'euros en AE et en CP en 2014 ;

- la subvention pour charges de service public de l'établissement public d'insertion de la défense (EPIDe), soit 22,1 millions d'euros en AE et en CP ;

- les crédits destinés aux « emplois francs » , soit 25,5 millions d'euros en AE et 11,3 millions d'euros en CP.


• Votre rapporteur pour avis note que la diminution des crédits de cette action est liée à la forte réduction du coût des zones franches urbaines (ZFU) .

Les crédits destinés à la compensation des exonérations de charges sociales en ZFU et en ZRU diminuent en effet de près de 30 millions d'euros en 2014.

Cette réduction s'explique par la dégressivité de l'exonération en fonction de la rémunération, instituée en 2009, et par les sorties des bénéficiaires au bout de la durée maximale du dispositif.

Votre rapporteur pour avis rappelle que le dispositif des ZFU expire au 31 décembre 2014 .

Il note que le Premier ministre a saisi le Conseil économique, social et environnemental (CESE) pour conduire un bilan des ZFU et proposer une évolution du dispositif au-delà de 2014. Ce rapport est, d'après les informations transmises à votre rapporteur pour avis, attendu pour décembre 2013.

Votre rapporteur pour avis souligne que les handicaps des quartiers de la politique de la ville persistent et qu'il conviendra donc de trouver de nouveaux dispositifs de soutien à l'activité économique .


• Votre rapporteur pour avis note que le dispositif des « emplois francs », créé à l'occasion de la loi de finances pour 2013, monte en puissance en 2014 : les crédits sont multipliés par dix en autorisations d'engagement et par quatre en crédits de paiement , passant ainsi à 25,5 millions d'euros en AE et 11,3 millions d'euros en CP.

Les deux tiers de la baisse tendancielle des exonérations sociales en ZFU et en ZRU sont donc redéployés vers les « emplois francs » .

Votre rapporteur pour avis avait eu l'occasion de se réjouir de la mise en place de ce dispositif novateur en matière d'emploi à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2013.

La Cour des comptes avait en effet souligné dans son rapport de juillet 2012 que « [la] politique de l'emploi (...) ne cible pas les quartiers prioritaires » 5 ( * ) ou que « à la sortie des études, un jeune des quartiers de la politique de la ville a entre 1,7 et 1,8 fois moins de chances de trouver un emploi qu'un jeune n'y résidant pas » 6 ( * ) .

Le dispositif des emplois francs vise à inciter le secteur marchand à embaucher de jeunes diplômés des zones urbaines sensibles (ZUS) en allégeant les cotisations patronales sur ces emplois 7 ( * ) . La logique est donc inversée par rapport à celle des ZFU : l'exonération n'est pas attachée au lieu d'implantation de l'entreprise concernée mais au lieu de résidence du salarié.

Une aide forfaitaire de 5 000 euros est ainsi accordée par Pôle emploi, en deux versements, à l'entreprise concernée pour chaque création d'un « emploi franc », sous contrat à durée indéterminée (CDI) et à temps plein.

Une expérimentation de trois ans a débuté en juillet 2013 , avec la création de 2 000 emplois dans les ZUS de dix intercommunalités : Amiens, Clichy-sous-Bois/Monfermeil, Fort-de-France, Grenoble, Lille/Roubaix, Marseille, Perpignan, Saint-Quentin, Sarcelles et Toulouse.

Le 3 août dernier, le Président de la République a relevé les objectifs de 2 000 à 5 000 emplois pour 2014. L'expérimentation a été étendue à 33 sites supplémentaires à l'automne 2013 .

Votre rapporteur se félicite de cette décision qui confirme la volonté du Gouvernement d'apporter des réponses aux difficultés d'accès à l'emploi dans les quartiers de la politique de la ville . Il note que la généralisation du dispositif à l'ensemble du territoire pourra être envisagée par le Gouvernement au vu des résultats de l'expérimentation.

3. L'évolution des deux dernières actions du programme : « Stratégie, ressources et évaluation » et « rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie ».

Les actions « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville » et « Revitalisation économique et emploi » concentrent près de 95 % des crédits du programme 147. Le reste des crédits du programme sont répartis dans deux actions.


• L' action « Stratégie, ressources et évaluation » ne concentre que 5,1 % des crédits du programme 147. Ses crédits diminuent de 10,5 % en AE et de 3,1 % en CP en 2014.

Cette action, qui « sert de cadre à l'ensemble des fonctions d'animation de la politique de la ville » 8 ( * ) , finance notamment :

- le fonctionnement du secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV) ;

- la subvention pour charges de service public de l'ACSé , qui regroupe près de 60 % des crédits de cette action ;

- les 19 centres de ressources , structures support de la politique de la ville, qui participent à l'animation de la politique de la ville dans les régions, en diffusant l'information ou en formant les acteurs ;

- le fonctionnement de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS) ;

- les crédits d'animation de la politique de la ville qui regroupent les financements accordés aux associations « têtes de réseau » ou aux fédérations nationales.


• L' action « Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie » ne comporte, en 2014, plus de crédits en AE et 2,9 millions d'euros en CP .

Cette action finance, à hauteur de 1,6 million d'euros, un dispositif de rénovation des collèges les plus dégradés, dans le cadre d'une circulaire du 5 mars 2009 du ministre de l'éducation nationale et de la secrétaire d'État à la politique de la ville, ainsi que, à hauteur de 1,3 million d'euros, un programme exceptionnel d'investissements sportifs en Seine-Saint-Denis.


* 4 Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

* 5 « La politique de la ville. Une décennie de réformes », Ibid., p. 118.

* 6 Ibid., p. 118.

* 7 Le dispositif concerne ainsi les jeunes âgés de moins de 30 ans, diplômés ou non diplômés, qui résident en ZUS depuis au moins six mois consécutifs et qui font état d'une durée de recherche d'emploi d'au moins douze mois au cours des dix-huit derniers mois.

* 8 Projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014, p. 163.

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