N° 166
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME I
ACTION EXTÉRIEURE DE
L'ÉTAT :
ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE
MONDE
Par M. Christian CAMBON et Mme Leila AÏCHI,
Sénateurs.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Mmes Nathalie Goulet, Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Emorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, MM. Gaëtan Gorce, Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Jean-Vincent Placé, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk, Raymond Vall . |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602
Sénat : 163 et 164 à 170 (2015-2016)
PRINCIPALES PROPOSITIONS
1.- Le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde », qui finance les contributions internationales dues par notre pays, le réseau diplomatique et l'administration centrale du ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI), représente près d'un tiers des crédits et plus de la moitié des emplois dont dispose ce ministère. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une augmentation de ses crédits de paiement de 10 % ramenée à 1,73 % hors effet de change , soit 1,9 milliard d'euros . La non-couverture du risque de change représente un surcoût pour le programme estimé par la Cour des Comptes à 145 millions d'euros en 2015, 150 millions d'euros en 2016 et 140 millions d'euros en 2017 . Il est indispensable de mettre en oeuvre les réformes nécessaires pour professionnaliser et couvrir le risque de dépréciation de l'euro . Plus largement, la gestion des contributions internationales et opérations de maintien de la paix doit être dynamisée , les reliquats au sein des trésoreries d'organisations internationales doivent être rappelés, les modifications des barèmes de cotisation et de quotes-parts doivent être anticipées afin d'optimiser les économies potentielles. 2.- Pour le reste, la prévision budgétaire du programme 105 témoigne d' efforts que vos rapporteurs pour avis jugent inégalement pertinents . D'un côté, les efforts de sécurisation du réseau diplomatique auquels sont alloués 55,80 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement en 2016 sont indispensables. D'un autre côté, se poursuit la regrettable diminution des crédits de la coopération de sécurité et de défense , utilisée comme variable d'ajustement budgétaire (la prévision de 87,84 millions d'euros affectés à cette action pour l'année prochaine marque une baisse de 6,3 % par rapport à 2015, et fait suite à une baisse déjà constatée à hauteur de 3,6 % cette année par rapport à l'année dernière). Cette orientation ne paraît pas cohérente avec les ambitions de la politique étrangère française et les opérations extérieures (OPEX) de nos forces dans la bande sahélo-saharienne. Vos rapporteurs jugent également critiquable le modèle de gestion immobilière mis en oeuvre par le MAEDI. Cette gestion fait dépendre l'entretien normal des bâtiments des recettes exceptionnelles de cessions d'immeubles . Elle repose sur un modèle économique non vertueux et, de plus, en voie d'essoufflement dans la mesure où, même si d'importants produits de cession sont encore escomptés à court terme, les ventes « faciles » auront bientôt toutes été réalisées. A minima , cette gestion doit viser la rationalisation des implantations, leur mutualisation avec nos partenaires européens et l'identification forte de notre pays, en particulier là où la réduction du format des postes diplomatiques est prévue. En tout état de cause, le besoin de financement pour l'entretien des bâtiments, voire certains investissements doit être étudié afin d'être programmé . L'allocation de 12 millions d'euros, en 2016, pour l'entretien du parc situé à l'étranger reste insuffisant face un besoin certes mal connu, mais probablement compris entre 15 millions d'euros et 30 millions d'euros. Vos rapporteurs pour avis appellent à une « re-budgétisation » de ces crédits, assortie de dotations à la hauteur des besoins . 3.- Enfin, le PLF 2016 préserve les moyens de fonctionnement du réseau diplomatique à l'étiage . C'est une orientation qu'approuvent entièrement vos rapporteurs, de nature à permettre à celui-ci de poursuivre la mue en cours, qu'il s'agisse du « recalibrage » des postes ou du redéploiement géographique . Cette dernière réforme, bien que lente, s'avère indispensable pour adapter notre outil diplomatique aux évolutions stratégiques , notamment dans les pays émergents. Vos rapporteurs pour avis estiment que la transformation, annoncée pour la fin de l'année 2015, de l'ASEAN en véritable communauté justifie la création d'une représentation dédiée qu'ils appellent de leurs voeux depuis plusieurs années. La même évolution leur paraît souhaitable auprès de l'Union africaine. Vos rapporteurs pour avis seront très attentifs au bilan des postes à présence diplomatique qui doit être présenté au Parlement avant la fin de l'année. Ils souhaitent que les colocalisations , notamment avec nos partenaires européens et avec les services extérieurs de l'Union européenne renforcent ces postes à format réduit, afin que la politique menée ne se limite pas à une politique d'influence mais assure le rayonnement de la France. Enfin, vos rapporteurs pour avis saluent le développement de la diplomatie économique, novatrice , comme en témoigne la mise en place des « rencontres expresses » ou « speed dating » lors de la semaine des ambassadeurs afin de permettre à toute entreprise le demandant de rencontrer l'ambassadeur à Paris. Sur le fond, ils estiment que cette politique reste à consolider au moyen, notamment, d'une réflexion sur la formation des diplomates , du redimensionnement du réseau des services économiques , d'une amélioration de l'organisation des visites officielles à l'étranger, et - ce dernier point leur paraît déterminant - d'un renforcement de l' implication des régions françaises. Enfin, la culture de l'évaluation de la performance des politiques menées doit se renforcer au MAEDI, en créant les nécessaires objectifs et indicateurs de performance permettant d'évaluer la diplomatie économique . Sous le bénéfice de ces observations, vos rapporteurs pour avis émettent une appréciation positive sur les crédits inscrits dans le PLF 2015 pour le programme 105. À l'issue de sa réunion du mercredi 18 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat ». |