Avis n° 148 (2018-2019) de M. Daniel GREMILLET , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 22 novembre 2018

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N° 148

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2018

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , pour 2019 ,

TOME II

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES (ÉNERGIE)

Par M. Daniel GREMILLET,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas , présidente ; Mme Élisabeth Lamure, MM. Daniel Gremillet, Alain Chatillon, Martial Bourquin, Franck Montaugé, Mmes Anne-Catherine Loisier, Noëlle Rauscent, M. Alain Bertrand, Mme Cécile Cukierman, M. Jean-Pierre Decool , vice-présidents ; MM. François Calvet, Daniel Laurent, Mmes Catherine Procaccia, Viviane Artigalas, Valérie Létard , secrétaires ; M. Serge Babary, Mme Anne-Marie Bertrand, MM. Yves Bouloux, Bernard Buis, Henri Cabanel, Mmes Anne Chain-Larché, Marie-Christine Chauvin, Catherine Conconne, MM. Roland Courteau, Pierre Cuypers, Marc Daunis, Daniel Dubois, Laurent Duplomb, Alain Duran, Mmes Dominique Estrosi Sassone, Françoise Férat, M. Fabien Gay, Mmes Michelle Gréaume, Annie Guillemot, MM. Xavier Iacovelli, Jean-Marie Janssens, Joël Labbé, Pierre Louault, Michel Magras, Jean-François Mayet, Franck Menonville, Jean-Pierre Moga, Mme Patricia Morhet-Richaud, M. Robert Navarro, Mme Sylviane Noël, MM. Jackie Pierre, Michel Raison, Mmes Évelyne Renaud-Garabedian, Denise Saint-Pé, M. Jean-Claude Tissot .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 1255 , 1285 , 1288 , 1302 à 1307 , 1357 et T.A. 189

Sénat : 146 et 147 à 153 (2018-2019)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

L'examen du projet de loi de finances pour 2019 s'inscrit dans un contexte de mobilisation légitime des Français contre la hausse des taxes sur l'énergie .

Votre commission n'a pas attendu cette année pour tirer le signal d'alarme : depuis le premier relèvement de la trajectoire de taxe carbone voté fin 2015, elle dénonce l'absence de véritables mesures de compensation. L'an dernier, avec la double accélération décidée par le Gouvernement, qui portait à la fois sur la trajectoire carbone et sur la convergence - à la hausse - des fiscalités de l'essence et du diesel, elle avait encore alerté sur l'explosion de la fiscalité énergétique et prédit que les Français n'en mesureraient tous les effets que lorsque les prix de l'énergie remonteraient. Nous y sommes, et sans doute pour longtemps car tout indique que nous entrons dans une période durable de pétrole cher .

C'est heureux pour la planète, car un pétrole cher incite à la modération, mais avec la hausse de la taxe carbone subie dans le même temps, c'est la double peine !

L'ampleur du phénomène peut bien sûr s'appréhender au travers des grandes masses : d'ici à 2022, ce sont bien 46 milliards d'euros supplémentaires hors TVA 1 ( * ) qui seront prélevés sur la richesse nationale au titre de la fiscalité énergétique - 33,9 milliards de taxe carbone supplémentaire et 12,1 milliards de rattrapage sur le diesel -, soit en moyenne 9,2 milliards de pression fiscale nouvelle par an sur la période 2 ( * ) . Ces chiffres figuraient du reste très explicitement l'an dernier dans les documents budgétaires 3 ( * ) .

Mais au-delà de ces montants toujours un peu abstraits, votre rapporteur entend rappeler des réalités très concrètes, qui touchent nos concitoyens dans leur quotidien : en 2018, 30 % des Français ont restreint leur consommation de chauffage pour limiter leurs dépenses énergétiques ; depuis le début de l'année, le tarif réglementé du gaz a progressé de 24 % pour les ménages chauffés au gaz ; le prix du fioul a augmenté dans les mêmes proportions puisque fin octobre, il fallait compter près de 250 euros supplémentaires pour remplir une cuve de 1 000 litres ; enfin, pour un ménage consommant 45 litres de carburant par semaine, la hausse intervenue en deux ans équivaut à environ un Smic à l'année.

Cette fiscalité paraît d'autant plus injuste que son produit n'est que très partiellement destiné au financement de la transition énergétique et qu'elle poursuit avant tout un objectif de rendement budgétaire . Sur les 37,7 milliards d'euros de taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE) brute attendus en 2019, seuls 7,2 milliards financeront directement les énergies renouvelables, soit moins d'un cinquième 4 ( * ) . Et sur les 7,2 milliards de hausse de la TICPE prévus entre 2017 et 2019, 82 % iront au seul budget de l'État .

L'an dernier, le Gouvernement avait présenté deux mesures de compensation : un premier élargissement de la prime à la conversion ainsi que la généralisation du chèque énergie, dont il annonçait par ailleurs la revalorisation du montant moyen pour 2019. Même avec les annonces nouvelles de cette année, dont le coût budgétaire et fiscal est estimé par le Gouvernement lui-même à 585 millions, le compte sera très loin d'y être : selon les calculs de votre rapporteur, il restera à la charge des Français environ 3,5 milliards d'euros de pression fiscale supplémentaire en 2018 et à nouveau près de 3 milliards supplémentaires en 2019 au titre de leurs dépenses d'énergie 5 ( * ) .

Si la surprime à la conversion et l'élargissement du chèque énergie vont malgré tout dans le bon sens, votre rapporteur fait deux observations : non seulement l'essentiel des mesures ne bénéficiera pas aux classes moyennes mais une partie d'entre elles revient à faire compenser par d'autres - les collectivités territoriales, les entreprises ou les fournisseurs d'énergie - l'effet des décisions prises par l'État .

En disant préférer taxer la pollution plutôt que le travail, le Gouvernement oublie que les Français ne se déplacent pas pour le plaisir de polluer mais, notamment, pour se rendre au travail ; avec ces taxes supplémentaires, le travail paie donc moins . Quant au bénéfice environnemental d'une telle politique, votre rapporteur s'interroge : se fonde-t-on sur l'analyse du coût environnemental complet du remplacement d'un véhicule déjà amorti par une voiture neuve ? Compare-t-on les coûts complets du thermique et de l'électrique sur l'ensemble du cycle de vie, de la fabrication au recyclage ?

Pour assurer la soutenabilité de la fiscalité énergétique dans un contexte de prix mondiaux de l'énergie durablement élevés, votre rapporteur proposera le gel des taxes à leur niveau de 2018 ainsi que le maintien du taux réduit pour le gazole non routier .

Votre commission a par ailleurs adopté quatre mesures pour redistribuer ou réorienter une partie du produit de la fiscalité énergétique et faire en sorte que la transition énergétique soit à la fois plus efficace, plus juste et plus solidaire : un doublement du montant du chèque énergie lorsqu'il est utilisé pour financer des travaux de rénovation ; une aide aux consommateurs précaires contraints de changer leur chaudière en raison d'un changement de gaz distribué dans le nord de la France ; une nouvelle ligne budgétaire pour indemniser et accompagner la fermeture des quatre dernières centrales à charbon d'ici à 2022 ; enfin, un abondement du fonds chaleur de l'Ademe pour soutenir les énergies renouvelables thermiques.

Sur le plan du budget, votre commission souligne que malgré le dynamisme des dépenses de soutien aux énergies renouvelables (EnR) (7,3 milliards, +7,8 %) et le poids des engagements déjà pris - 121 milliards d'euros courants fin 2017 à payer jusqu'en 2045, hors engagements nouveaux -, la cible des 23 % d'EnR visée en 2020 ne sera sans doute pas atteinte tandis que le bilan industriel reste décevant . Pour repositionner la France dans la chaîne de valeur, votre rapporteur suggère de rééquilibrer les soutiens au profit des EnR thermiques, d'investir dans les filières innovantes et de renforcer les critères environnementaux dans les mécanismes de soutien pour favoriser, indirectement, les industries françaises et européennes.

Cette année encore, votre commission regrette que les mécanismes d'autorisation budgétaire actuels ne permettent pas au Parlement de consentir à l'impôt de façon éclairée : sans loi de programmation, le Parlement en est réduit à approuver, sans pouvoir l'influer, la tranche annuelle d'engagements pluriannuels qui résultent d'un décret, portant programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), à l'élaboration duquel il est très peu associé.

À l'exception des dépenses liées à l'après-mines, qui déclinent logiquement pour des raisons démographiques, les dépenses de solidarité progresseront elles aussi , pour assurer la péréquation tarifaire avec les zones non interconnectées (1,6 milliard, +11,8 % depuis 2017), avec la nécessité d'éviter des surcapacités, et pour protéger les consommateurs en situation de précarité énergétique (794 millions annoncés, +8,4 %), même si la dépense réelle dépendra du taux d'utilisation effectif du chèque énergie : même dans les hypothèses optimistes du Gouvernement, le chèque énergie toucherait en réalité à peine plus de personnes en 2019 que les anciens tarifs sociaux, d'où l'intérêt de son extension annoncée à 2 millions de bénéficiaires supplémentaires.

Enfin, le resserrement du crédit d'impôt transition énergétique (CITE) devrait théoriquement faire refluer les dépenses fiscales en 2019 , à environ 2 milliards ; en réalité, le surcroît de commandes de fenêtres observé jusqu'à la suppression du crédit d'impôt augmentera la dépense d'au moins 400 millions sur 2018 et 2019. De nouvelles dépenses seront éligibles en 2019 sous conditions de ressources mais la transformation du CITE en prime, promise l'an dernier, est reportée à 2020 et ne devrait concerner, contrairement à l'engagement présidentiel, que les ménages les plus modestes.

Au cours de sa réunion du 14 novembre 2018, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les programmes 174 et 345 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et sur les comptes d'affectation spéciale « Transition énergétique » et « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » sous la double réserve :

- du gel de la fiscalité énergétique à son niveau de 2018, en première partie ;

- de l'adoption de ses amendements, en seconde partie.

I. COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « TRANSITION ÉNERGÉTIQUE » : MALGRÉ DES DÉPENSES DE SOUTIEN ÉLEVÉES, LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES RESTE EN DEÇÀ DES OBJECTIFS ET DÉCEVANT SUR LE PLAN INDUSTRIEL

Depuis la budgétisation de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) opérée fin 2015, les charges qu'elle finançait, augmentées de la reprise de la dette contractée auprès d'EDF au titre du soutien passé à l'électricité renouvelable qui ne lui avait pas été compensé (5,9 milliards d'euros), ont été réparties entre un compte d'affectation spéciale et un programme budgétaire :

- le compte d'affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique » (7,3 milliards d'euros en 2019) finance les aides à l'électricité renouvelable, à l'injection de biométhane et à l'effacement de consommation électrique ainsi que le remboursement du capital de la dette due à EDF et, depuis l'an dernier, des projets d'interconnexions pour solder le « contentieux » avec la Commission européenne sur la CSPE au titre de l'année 2016 ;

- le programme 345 « Service public de l'énergie » (3,2 milliards en 2019) couvre quant à lui des charges disparates : solidarité avec les territoires 6 ( * ) et avec les consommateurs en situation de précarité énergétique 7 ( * ) , intérêts liés au défaut de compensation à EDF, soutien à la cogénération et budget du Médiateur de l'énergie et, depuis 2017, dépenses liées à la fermeture de Fessenheim, pour laquelle des premiers crédits de paiement seront décaissés en 2019.

Depuis 2017, tout lien d'affectation entre ces charges et le produit de la CSPE a été supprimé 8 ( * ) : ce dernier est entièrement reversé au budget général , pour un montant (7,8 milliards) qui excède largement les charges financées par le programme 345, tandis que les dépenses du CAS sont couvertes par une fraction des taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles 9 ( * ) (7,2 milliards sur les 17 milliards de TICPE brute perçue par l'État et les 37,7 milliards de TICPE brute totale perçue en 2019 10 ( * ) ) et, depuis l'an dernier mais pour une part marginale, par les revenus tirés de la mise aux enchères des garanties d'origine de l'électricité renouvelable (33 millions).

En 2019, les dépenses de soutien aux énergies renouvelables au titre du présent ou du passé 11 ( * ) continueront de progresser fortement , quoi qu'à un rythme inférieur aux années précédentes : + 7,8 % comparées à la dépense mise à jour pour 2018, à environ 7,3 milliards d'euros, après une hausse de 14,6 % l'an dernier par rapport aux dépenses constatées sur 2017. Neutralisées des variations de l'annuité de remboursement versée à EDF, les dépenses progresseront même de 11,1 % en 2019, contre une hausse de 7,4 % entre 2017 et 2018.

Cette progression des dépenses , que la remontée des prix des marchés et la baisse des coûts ne parviendra qu'à freiner, tient à la fois à la poursuite de l'augmentation des capacités installées et au poids des engagements passés , souscrits dans le cadre de contrats garantissant des prix très élevés sur des durées allant jusqu'à vingt ans, et pour des volumes de production parfois très faibles : l'an dernier 12 ( * ) , la Commission de régulation de l'énergie (CRE) avait ainsi estimé que 94 % des 34,4 milliards d'euros de charges prévisionnelles sur les cinq prochaines années 13 ( * ) étaient d'ores et déjà engagées ; les deux tiers du soutien public actuel résultaient de décisions prises avant 2011 et en 2023, 84 % des charges tiendraient encore aux dépenses engagées avant 2017.

En mars dernier 14 ( * ) , la Cour des comptes soulignait, sur la base des prévisions de la CRE, que les engagements pris jusque fin 2017 représenteront 121 milliards , en euros courants, entre 2018 et l'échéance des contrats et que la charge annuelle culminera à près de 7,2 milliards en 2025 avant de ne diminuer significativement qu'après 2030 pour s'éteindre, sans engagements nouveaux, à l'horizon 2045.

Malgré ces dépenses, il est désormais probable que la France n'atteindra pas l'objectif des 23 % d'énergies renouvelables visé en 2020 ; sur le plan industriel, le bilan n'apparaît pas non plus à la hauteur des subventions versées .

Enfin, si la budgétisation des charges a constitué un premier progrès, elle est notablement insuffisante pour permettre au Parlement de consentir à l'impôt de façon éclairée : sans loi de programmation, ce dernier en est réduit à approuver, sans pouvoir l'influer, la tranche annuelle d'engagements pluriannuels résultant des décisions prises par le Gouvernement dans le cadre d'un décret portant programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) à l'élaboration duquel il est très insuffisamment associé.

Compte d'affectation spéciale
« Transition énergétique » (dépenses)
(en euros)

Autorisations d'engagement
et crédits de paiement

2017

2018

2019

764 - Soutien à la transition énergétique

Soutien aux énergies renouvelables électriques

5 630 300 000
LFI pour 2017

4 581 000 000
constaté CRE 15 ( * )

5 424 947 056
LFI pour 2018
-3,6 %

5 006 000 000
mise à jour CRE
16 ( * )
+9,3 %

5 261 909 997

-3,0 %

+5,1 %

Soutien à l'effacement de consommation électrique

0

17 900 000
LFI pour 2018
-

37 000 000
mise à jour CRE

45 000 000

+151,4 %

+21,6 %

Soutien à l'injection de biométhane

49 900 000
LFI pour 2017

32 800 000
constaté CRE

99 470 167
LFI pour 2018
+99,3 %

63 900 000
mise à jour CRE
+94,8 %

132 090 003

+32,8 %

+106,7 %

Fonds d'interconnexion

-

0

1 400 000

765 - Engagements financiers liés à la transition énergétique

Désendettement vis-à-vis des opérateurs supportant des charges de service public de l'électricité

1 228 000 000

1 622 000 000

+32,1 %

1 839 000 000

+13,4 %

Remboursements et dégrèvements de CSPE (ancien)

0

0

-

Remboursements d'anciens plafonnements de CSPE

75 000 000

20 000 000

-73,3 %

0

Total

6 983 200 000
LFI pour 2017

5 916 800 000
après constats CRE

7 184 317 223
LFI pour 2018
+2,9 %

6 748 900 000
après mises à jour CRE
+14,6 %

7 279 400 000

+1,3 %

+7,8 %

Sources : projets annuels de performances des projets de loi de finances pour 2018 et 2019
et délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018 de la Commission de régulation de l'énergie

A. UNE HAUSSE DES DÉPENSES DE SOUTIEN AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES PORTÉE PAR LE DÉVELOPPEMENT DES FILIÈRES MAIS MODÉRÉE PAR LA REMONTÉE DES PRIX DE MARCHÉ

L'évolution des dépenses de soutien aux énergies renouvelables, qui consistent à financer la différence entre le tarif d'achat ou le tarif de référence du complément de rémunération et le prix de marché 17 ( * ) , dépend de trois variables :

- le niveau du tarif garanti au producteur , qui est fixé pour chaque filière par arrêté, pour les petites installations éligibles au soutien attribué « en guichet ouvert », ou par le producteur à l'issue d'une procédure de mise en concurrence, pour les installations de taille plus importante ;

- le volume d'énergie produit , qui dépend notamment des capacités installées et, s'agissant des énergies intermittentes, des conditions météorologiques ;

- le prix de marché de l'énergie , qui peut être très volatil.

En 2019, la poursuite du développement des filières continuera de jouer à la hausse, même si la remontée des prix de l'électricité sur les marchés de gros permettra d'en modérer l'ampleur : les charges de soutien aux énergies renouvelables électriques devraient ainsi atteindre 5,2 milliards d'euros , soit une hausse de 5 % sur un an et de 20 % sur trois ans, dont près de 2,9 milliards pour la filière photovoltaïque et 1,5 milliard pour la filière éolienne.

Charges
(en millions d'euros)

2016
constaté
en 2017

2017
constaté
en 2018

2018
réévalué
en 2018

2019
prévu
en 2018

Évolution sur 1 an

Évolution sur 2 ans

Évolution sur 3 ans

Soutien aux EnR électriques

4 369,0

4 531,0

4 957,1

5 203,1

+5 %

+15 %

+19 %

dont photovoltaïque

2 694,1

2 774,4

2 738,4

2 878,9

+5 %

+4 %

+7 %

dont éolien

1 008,7

1 108,4

1 430,3

1 486,2

+4 %

+34 %

+47 %

dont autres EnR

666,2

648,2

788,4

838,0

+6 %

+29 %

+26 %

Total EnR électriques
avec coûts de gestion et d'études

4 369,0

4 582,1

5 010,2

5 261,8

+5 %

+15 %

+20 %

dont coûts de gestion de l'année précédente

-

50,1

48,9

49,5

dont frais d'études

-

1

5

9,2

Source : commission des affaires économiques, d'après les projets annuels de performances

1. Les énergies renouvelables électriques : un développement dynamique qui reste très concentré sur l'éolien et le photovoltaïque

En 2019, les capacités installées continueront de progresser , en métropole comme dans les zones non interconnectées, confirmant la dynamique antérieure 18 ( * ) :

- sur le deuxième trimestre 2018, la progression du parc aura été de 575 MW (+35 % par rapport au deuxième trimestre 2017, réalisés à 97 % par les filières solaire et éolienne) et de 2 805 MW sur une année glissante, ce qui constitue un record en termes de puissance raccordée sur douze mois consécutifs ;

- la puissance cumulée des projets en développement atteint 16 575 MW au 30 juin 2018 (+12 % sur les douze derniers moins), dont 55 % pour l'éolien terrestre, 20 % pour le solaire, 18 % d'éoliennes en mer, 6 % d'hydraulique et 1 % de bioénergies.

Ce développement concernera aussi bien les installations sous obligation d'achat 19 ( * ) que celles bénéficiant d'un complément de rémunération, qui poursuivra son déploiement - passant de 0,2 million d'euros en 2017 à 34,4 millions en 2018 et 197,1 millions en 2019 -, surtout dans l'éolien terrestre, où 160 MW par mois devraient être raccordés en tarif d'achat contre 139 MW en complément de rémunération 20 ( * ) .

À l'inverse, la remontée des prix de marché de gros de l'électricité et du gaz déjà observée depuis fin 2016 et qui devrait se confirmer entre 2018 et 2019 devrait freiner la hausse des dépenses, qui y sont très sensibles : l'an dernier, la CRE rappelait qu'une baisse de 1 €/MWh des prix de gros se traduit par une hausse des surcoûts de plus de 50 millions d'euros.

En 2019, le photovoltaïque représentera encore plus de 55 % des coûts de soutien (à 2,9 milliards d'euros) pour seulement 19,4 % de la production soutenue (11,5 TWh sur 59,1 TWh) en raison du poids des contrats passés bénéficiant de tarifs d'achat très élevés 21 ( * ) , tandis que l'éolien comptera pour environ 29 % des aides (1,5 milliard) mais pour plus de 56 % de la production (33,4 TWh). Grâce à ses coûts très compétitifs, la filière hydraulique est aussi très bien placée (3,3 % du surcoût total pour 10,7 % de la production aidée).

Production soutenue
(en TWh)

Surcoût
(en millions d'euros)

Part
dans la production soutenue

Part
dans le surcoût total

Éolien

33,4

1 486,2

56,5 %

28,6 %

Photovoltaïque

11,5

2 878,9

19,4 %

55,3 %

Hydraulique

6,3

172,7

10,7 %

3,3 %

Biomasse

3,7

346,3

6,3 %

6,7 %

Biogaz

2,5

274,6

4,2 %

5,3 %

Incinération d'ordures ménagères

1,6

19,5

2,7 %

3,7 %

Géothermie

0,1

25,0

0,2 %

4,8 %

Petites installations

0,0

0,0

-

-

Bagasse/biomasse

0,0

0,0

-

-

Total

59,1

5 203,1

Source : CRE, délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018

Malgré la baisse continue observée sur les derniers appels d'offres 22 ( * ) , les prix d'achat moyens de l'électricité photovoltaïque restent notablement plus élevés que ceux des autres filières, à plus de trois fois ceux de l'éolien ou deux fois ceux de la biomasse ou du biogaz.

L'explication est encore à trouver du côté des engagements passés : les tarifs d'achat garantis pour le solaire photovoltaïque jusqu'au moratoire de 2010 représenteront un surcoût de l'ordre de 480 euros/MWh, soit 38,4 milliards en cumulé et encore 30 % de l'ensemble des charges annuelles liées aux énergies renouvelables en 2018, pour un productible annuel de 4 TWh, soit environ 0,7 % de la production électrique française .

Dans une moindre mesure, la mise en service, à partir de 2021 ou 2022, des six premiers parcs d'éoliennes en mer devrait aussi faire remonter le surcoût moyen de l'éolien , même si la renégociation des tarifs opérée cette année permettra d'en limiter l'effet : sur les 40,7 milliards de soutien public estimés par la CRE, le Gouvernement évalue à 15 milliards d'euros l'économie liée à la renégociation des tarifs, qui passeront de 203 euros/MWh à 142 euros/MWh. En raison du déport des coûts de raccordement sur le tarif d'utilisation du réseau, pour 1,2 milliard, et de la gratuité décidée pour l'utilisation ou l'occupation du domaine public, qui entraînera une perte de recettes publiques de l'ordre de 360 millions, votre rapporteur estime plutôt l'économie « réelle » à un peu plus de 13 milliards , pour un coût de soutien public après renégociation de l'ordre de 27 milliards sur vingt ans.

Tarif d'achat prévisionnel moyen 23 ( * )

Évolution par rapport au tarif constaté en 2017

Hypothèse de développement du parc sous contrat d'achat
en 2018 et 2019

Photovoltaïque

294 €/MWh

-9,8 %

1 330 MW

Biogaz

156 €/MWh

+6,0 %

70 MW

Biomasse

140,6 €/MWh

nc

170 MW

Éolien

89,4 €/MWh

+1,4 %

4 080 MW

Hydraulique

76,3 €/MWh

nc

30 MW

Centrales d'incinération

57,8 €/MWh

nc

-50 MW

Source : CRE, annexe 1 de la délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018, à partir des hypothèses fournies et justifiées par EDF

Enfin, s'il importe de soutenir la filière émergente de l'éolien flottant pour ne pas manquer le train de l'industrialisation de cette technologie, une vigilance particulière devra être portée sur une baisse significative des coûts avant un déploiement plus significatif soutenu par la puissance publique, comme souligné par la Cour des comptes en mars 2018 : ainsi, les quatre projets lauréats de l'appel à projets lancé par l'Ademe en 2015 pour l'éolien flottant pourraient bénéficier, en plus des soutiens du plan des investissements d'avenir (PIA), d'un contrat d'achat de 220 euros/MWh sur vingt ans, soit un coût total pour les finances publiques d'environ 1,7 milliard pour une puissance installée inférieure à 100 MW, et une production estimée de 370 GWh par an, soit environ 0,07 % de la production électrique française.

Depuis 2017, sont aussi financées au titre du soutien aux énergies renouvelables électriques :

- les charges des opérateurs liées à la conclusion et à la gestion des contrats d'obligation d'achat et de complément de rémunération, qui sont globalement stables (49,5 millions d'euros anticipés pour 2019 contre 50,1 millions constatés en 2017) ;

- les études techniques, juridiques et financières préalables au lancement des appels d'offres et, à compter de 2018, ainsi que les dépenses de contentieux qui pourraient en résulter, dont le coût doublera presque en 2019 (9,2 millions contre 5 millions prévus en 2018).

2. L'injection de biométhane dans les réseaux : un nouveau doublement des volumes attendu en 2019

Même si les volumes de biométhane injecté sont encore faibles (408 GWh en 2017, soit moins de 1 % des 465 TWh de gaz consommés en France 24 ( * ) ), le nombre d'installations, les capacités installées et la production progresse à un rythme très soutenu : le nombre de sites d'injection est ainsi passé de 17 en 2015 à 63 en juillet 2018, la capacité maximale installée a progressé de 279 GWh en 2015 à 791 GWh en mars 2018 et le volume injecté devrait à nouveau doubler en 2018 et être multiplié par dix par rapport à 2015 .

Parmi les 49 installations raccordées au 31 mars 2018 25 ( * ) , on comptait 39 installations agricoles , 7 sites de valorisation des boues de stations d'épuration des eaux usées et 3 installations de stockage de déchets non dangereux. 403 projets étaient en file d'attente , pour une capacité maximale de 8 746 GWh par an, et trois régions concentraient 50 % des capacités installées : Grand Est, Hauts-de-France et Île-de-France 26 ( * ) .

Le soutien à l'injection de biométhane dans les réseaux

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2023

2030

Obligation d'achat biométhane
(en millions d'euros)

7,1

18,6

32,9

99,4
prévu LFI 2018
63,9
actualisé CRE

132,1

-

-

-

Quantité injectée
(en TWh)

0,08
réalisé

0,2
réalisé

0,4
réalisé

0,8
actualisé
LFI 2019
1,7
objectif PPE

1,7

2,5
cible

8
objectif PPE

40
(10 % du
gaz consommé)

Sources : projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2019, CRE, délibérations des 13 juillet 2017 et 12 juillet 2018 et programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE)

Sans retard dans la mise en service des installations, qui ont souvent conduit à actualiser les prévisions à la baisse ces dernières années, le coût du soutien public devrait lui aussi plus que doubler entre 2018 et 2019 , à 132,1 millions d'euros, pour compenser le surcoût du biométhane par rapport au prix moyen du gaz fossile 27 ( * ) , qui reste important malgré la hausse des prix de marché.

Au-delà des tarifs d'achat accessibles en guichet ouvert ou à l'issue d'appels d'offres qui sont financés par le CAS, le biométhane injecté bénéficie aussi, depuis 2017, d'une réduction de 40 % de ses coûts de raccordement aux réseaux de distribution et de transport de gaz (mécanisme dit de « réfaction tarifaire », financé par les autres consommateurs de gaz dans les tarifs d'utilisation du réseau) ainsi que des aides de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), au travers du fonds déchets, qui finance les équipements de traitement spécifique du digestat, et du fonds chaleur, pour l'injection proprement dite dans les réseaux. En 2017, 27 nouveaux projets ont ainsi été subventionnés par l'Ademe, à hauteur de 15 % en moyenne.

Il reste qu'il sera difficile d'atteindre les objectifs ambitieux fixés par la loi « Transition énergétique » et déclinés dans la première programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) - 10 % de gaz renouvelable en 2030 et 8 TWh dès 2023.

Enfin, selon une étude récente commandée par la filière 28 ( * ) , les coûts de production du biométhane pourraient baisser d'environ 30 % d'ici 2025 à 2030 , pour être compris entre 65 euros et 85 euros/MWh. Cette même étude s'est aussi livrée à un recensement des services à la collectivité ou « externalités positives » du biométhane, qu'elle évalue entre 55 et 85 euros/MWh : bénéfices énergétiques (énergie non variable et stockable, renforcement de l'indépendance énergétique, etc.), environnementaux (réduction des émissions de gaz à effet de serre, réduction des pollutions des nappes phréatiques, création de dynamiques d'économie circulaire sur des territoires ruraux, etc.) et économiques (création d'emplois, réduction des coûts de traitement des biodéchets, etc.).

3. L'effacement de consommation électrique : les appels d'offres se poursuivront en 2019 pour développer les capacités

Afin d'encourager le développement de l'effacement de consommation électrique, deux types d'actions ont été mises en oeuvre :

- l'ouverture progressive de l'ensemble des mécanismes de marché aux effacements , à stricte parité avec des capacités de production, qu'il s'agisse de participer au mécanisme d'ajustement, aux services systèmes, au mécanisme de capacité ou d'échanger des volumes d'effacements entre acteurs de marché sur le marché de l'énergie, au même titre que des volumes de production ;

- un soutien public au développement de l'effacement par l'organisation d'appels d'offres réguliers, d'abord sur le fondement de la loi « Nome » 29 ( * ) puis de la loi « Transition énergétique » pour atteindre les objectifs de développement fixés par la PPE - 6 GW en 2023 et 5 GW en 2018, alors que le gisement est aujourd'hui estimé à 2,7 GW 30 ( * ) - et par la mise en place, non effective à ce jour, d'un soutien spécifique aux effacements produisant des économies d'énergies significatives 31 ( * ) .

Initialement prévus pour 2017 mais reportés dans l'attente d'une approbation par la Commission européenne, finalement intervenue en février 2018, les premiers appels d'offres ont permis de soutenir un volume de 733 MW - mais très en deçà du volume visé de 2 200 MW -, pour une rémunération de 11,2 millions d'euros , qui s'ajoutent aux appels d'offres précédents conclus sous l'empire de la loi « Nome ».

Après une dépense réévaluée pour 2018 à 37 millions d'euros, la dépense pour 2019 devrait croitre à 45 millions , avec un nouvel appel d'offres ouvert pour 2 500 MW.

4. Un fonds d'interconnexion pour solder le « contentieux CSPE » avec la Commission européenne

En complément de la suppression du lien d'affectation entre la CSPE 32 ( * ) et le CAS mis en oeuvre à compter de 2017, la Commission européenne a exigé de la France des mesures pour compenser, au titre de l'année 2016, la taxation des énergies renouvelables importées alors que ces dernières ne bénéficiaient pas des mécanismes de soutien français.

Le montant perçu à ce titre ayant été arrêté à 42,7 millions, il a été décidé, pour « solder » le contentieux, d' allouer un montant équivalent à un projet d'interconnexion d'intérêt commun 33 ( * ) : c'est le projet Celtic de ligne de courant continu de 700 MW entre le Finistère et le sud de l'Irlande qui a été retenu. Ce projet, déclaré d'intérêt commun européen, devrait permettre permettra d'évacuer les surplus d'énergies renouvelables vers le continent. Les crédits inscrits en 2019 (1,4 million) serviront à financer les études sous-marines et les procédures en cours.

5. Un échéancier de remboursement qui permettra de solder la dette due à EDF d'ici fin 2020

Faute d'assumer politiquement le coût croissant pour les consommateurs des subventions aux énergies renouvelables électriques, les Gouvernements successifs se sont refusés, à partir de 2009, à relever le montant de la CSPE au niveau des charges qu'elle devait financer 34 ( * ) . Depuis 2003, la part du soutien aux énergies renouvelables électriques dans les charges de service public est ainsi passée de 10 % (à 0,2 milliard d'euros) à 68 % (à 5,3 milliards) sans que la hausse mécanique de la CSPE, bien qu'importante, ne suive la même dynamique (3 € par an et par MWh à partir de 2011, plafonné à 22,5 €/MWh en 2016). Il en a résulté un défaut de compensation pour l'acheteur obligé EDF 35 ( * ) à hauteur de près de 5,8 milliards d'euros .

En 2016, l'État s'est engagé auprès d'EDF sur un calendrier de remboursement avec des annuités croissantes jusqu'en 2019, conduisant à l' apurement total de la dette fin 2020 pour un coût total, intérêts compris, de près de 6,2 milliards .

Ce calendrier a depuis été respecté, tant pour le remboursement du principal que des intérêts de la dette. Conformément à l'échéancier, EDF sera donc remboursé, en 2019, à hauteur d' 1,84 milliard au titre du principal (+13,4 % par rapport à l'an dernier) et de 62,5 millions au titre des intérêts (qui baissent logiquement en fonction du capital restant dû, à 28,3 %).

Comme l'an dernier, votre rapporteur s'étonne toujours que le remboursement du principal et le paiement des intérêts associés soient scindés entre le CAS, pour le principal, et le programme 345, pour les intérêts . Si le Gouvernement justifie cette répartition en assimilant les intérêts à des frais de fonctionnement, la présentation budgétaire gagnerait en clarté et en cohérence à voir ces deux charges regroupées au sein du CAS, dès lors qu'il ne peut être contesté que les intérêts ainsi acquittés sont liés au financement de la transition énergétique.

En outre, le CAS retrace ou retraçait jusqu'à présent deux autres dépenses au titre des engagements financiers liés à la transition énergétique :

- les remboursements et dégrèvements de CSPE à reverser, le cas échéant, au budget général s'il s'avérait que les trop perçus correspondants conduisaient à dépasser la prévision de recettes inscrite au CAS ; cette ligne n'a plus lieu d'être à compter de 2018 en raison de l'affectation non plus de pourcentages mais de montants de taxes affectées ;

- et les remboursements liés aux anciens plafonnements de CSPE sur les consommations des années 2015 et antérieures, pour laquelle 20 millions sont encore inscrits en 2018.

B. UN DÉVELOPPEMENT SIGNIFICATIF MAIS QUI RESTE EN DEÇÀ DES OBJECTIFS ET QUI GÉNÈRE UN FAIBLE CONTENU EN EMPLOIS INDUSTRIELS

1. Des objectifs qui seront difficiles à atteindre

Grâce aux importants soutiens publics dont elle a bénéficié, la production d'énergie renouvelable a connu une progression très significative : entre 2005 et 2016, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie française est ainsi passée de 9,6 % à 16 % 36 ( * ) .

Ce développement reste toutefois en deçà des 18 % prévus par la trajectoire définie pour atteindre les 23 % d'énergies renouvelables visés en 2020 37 ( * ) , objectif déjà ambitieux que la loi du 17 août 2015 a confirmé et prolongé pour viser 32 % en 2030, déclinés en 40 % pour l'électricité, 38 % pour la chaleur, 15 % pour les transports et 10 % pour le gaz. Il est aussi moins rapide que l'évolution constatée sur la même période à l'échelle de l'Union européenne à 28 (passée de 8,5 % à 17 % entre 2005 et 2016) ou des grands autres pays européens 38 ( * ) . La situation varie suivant les secteurs - l'électricité et surtout la chaleur sont en retard sur la trajectoire quand le transport est en avance - et les filières - le solaire photovoltaïque, les pompes à chaleur et les biocarburants sont en avance tandis que l'éolien, le solaire thermique, la géothermie, la biomasse solide et le biogaz chaleur présentent les retards les plus importants 39 ( * ) .

Aussi, malgré l'accélération des raccordements observés, par exemple, pour l'électricité et le gaz renouvelable sur les derniers trimestres, il est désormais probable que les objectifs fixés pour 2020 et 2030 ne pourront être atteints , comme la Cour des comptes l'observait en mars dernier 40 ( * ) . Pour expliquer ces résultats, la Cour pointait en particulier la tendance baissière du prix des énergies fossiles , défavorable aux énergies renouvelables thermiques - mais la taxation du carbone, bénéfique sur ce plan, ne saurait être analysée indépendamment de ses conséquences sur le pouvoir d'achat des ménages et sur la compétitivité des entreprises ( cf. infra ) - ainsi qu' un environnement social et réglementaire contraignant , même si les procédures administratives ont été récemment simplifiées et les délais de recours mieux encadrés.

2. Un bilan industriel insuffisant

Dans son rapport, la Cour des comptes fait aussi le constat de retombées économiques réelles - 21,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2016 toutes activités confondues en incluant le soutien public 41 ( * ) - mais d' un bilan industriel décevant .

Selon les données collectées par la Cour, en particulier auprès de l'Ademe, la valeur des investissements français dans les équipements fabriqués en France ne s'élevait qu'à 1,4 milliard en 2016, soit 6,6 % du chiffre d'affaires total . Dans les énergies renouvelables électriques, les industries françaises couvrent moins de la moitié de la valeur ajoutée des investissements et moins de 25 % de la fabrication. Dans l'éolien terrestre , la France ne compte aucun ensemblier, les turbines installées proviennent de grands constructeurs étrangers, pour l'essentiel européens, et la part de la valeur ajoutée française dans les nouveaux parcs se situerait entre 37 % et 41 % . Cette part est estimée à 44 % dans le solaire photovoltaïque , notamment grâce à des positions favorables dans l'intégration et la gestion des systèmes, les composants électroniques ou les onduleurs et malgré un marché mondial des modules dominé à 90 % par les industriels asiatiques. On notera aussi que malgré le retard observé dans la réalisation des parcs déjà attribués, la France dispose d'une filière et d'usines de production de turbines pour l'éolien en mer mais dont le devenir dépendra de l'engagement de nouveaux projets.

Globalement, la France dispose de nombreuses entreprises exportatrices dans le solaire thermique, le bois énergie ou l'hydroélectricité mais très peu dans l'éolien terrestre ou maritime ou le photovoltaïque.

En termes d'emplois générés, l'Ademe évaluait le nombre d'emplois directs 42 ( * ) liés aux énergies renouvelables hors biocarburants sur le territoire national en 2016 à 79 000 (+ 30 % par rapport à 2006), dont 35 % à 45 % pour la maintenance-exploitation, 25 % à 30 % pour l'installation et 15 % seulement pour la fabrication et l'assemblage, répartis à 42 % dans les énergies renouvelables électriques et à 58 % dans les énergies renouvelables thermiques.

Pour l'avenir, le repositionnement de la France dans la chaîne de valeur passerait, selon la Cour des comptes, par l'investissement dans les technologies innovantes et de rupture , en particulier dans le stockage et la gestion intelligente de l'énergie pour gérer l'intermittence des énergies renouvelables électriques, ou plus ponctuellement par la rénovation des parcs éoliens existants . Votre rapporteur partage cette recommandation.

Parmi les technologies existantes, votre rapporteur en appelle à un rééquilibrage des soutiens publics au profit des énergies renouvelables thermiques qui, outre le fait qu'elles sont globalement plus pourvoyeuses en emplois, ont le mérite d'être pilotables , d' exploiter la forêt française pour le bois-énergie ou de générer des revenus complémentaires pour les agriculteurs s'agissant de la méthanisation.

Dans les filières innovantes, la France a par ailleurs une carte à jouer dans l'éolien flottant même s'il importera d'en maîtriser les coûts avant de passer à la phase industrielle.

Pour accompagner le développement de filières industrielles françaises et comme le suggère à raison le régulateur, votre rapporteur invite enfin le Gouvernement à renforcer le poids des critères environnementaux , tels que le bilan carbone des panneaux photovoltaïques, dans le cadre des appels d'offres, voire à les inclure dans le cadre des arrêtés tarifaires : de tels critères permettraient à la fois de déployer des technologies plus respectueuses de l'environnement et de favoriser indirectement les industries françaises et européennes .

II. UNE FISCALITÉ ÉNERGÉTIQUE EXPLOSIVE QUE LES MESURES ANNONCÉES SERONT TRÈS LOIN DE COMPENSER ET DONT L'AUGMENTATION EN « PILOTAGE AUTOMATIQUE » ABONDE PRINCIPALEMENT LE BUDGET DE L'ÉTAT

A. UNE FISCALITÉ EXPLOSIVE ET DES MESURES DE COMPENSATION TRÈS INSUFFISANTES

1. 46 milliards de prélèvements supplémentaires d'ici à 2022

Sous l'effet de la double accélération décidée par le Gouvernement l'an dernier 43 ( * ) , qui portait à la fois sur la trajectoire de la « taxe carbone » 44 ( * ) et sur la convergence des fiscalités de l'essence et du diesel , l'évolution de la fiscalité énergétique se traduira, en cumulé sur la période 2018-2022 par rapport à 2017, par une augmentation massive de 46 milliards d'euros de la pression fiscale hors TVA, répartie à 60 % sur les ménages et à 40 % sur les entreprises.

Après la hausse de 14,1 euros appliquée en 2018, la valeur de la tonne de carbone progressera chaque année de 10,4 euros , pour atteindre 86,2 euros en 2022, à comparer à la trajectoire précédemment fixée, déjà forte, de hausse annuelle de 8,5 euros par an jusqu'en 2020.

En parallèle, les tarifs de l'essence et du gazole convergeront d'ici à 2021 , à raison d'une hausse annuelle de la part fixe des taxes sur le gazole de 2,6 euros par hectolitre (soit 2,6 centimes par litre) hors TVA, qui s'ajoutera à la hausse de la taxe carbone 45 ( * ) . Cette convergence s'opère donc uniquement à la hausse , contrairement aux étapes précédentes 46 ( * ) .

L'an dernier, le Gouvernement lui-même avait évalué l'impact sur le budget annuel moyen des ménages à 79 euros en 2018 et 313 euros en 2022 , et jusqu'à 136 euros en 2018 et 538 euros en 2022 pour un ménage chauffé au fioul et roulant beaucoup avec un véhicule diesel. Pour attester de cet impact massif sur le pouvoir d'achat, les exemples ne manquent pas : en 2018, 30 % des Français ont été contraints de restreindre leur consommation de chauffage pour limiter leurs dépenses d'énergie 47 ( * ) ; depuis le début de l'année, le tarif réglementé du gaz a progressé de 24 % pour les ménages chauffés au gaz ; le prix du fioul a augmenté dans les mêmes proportions puisque fin octobre, il fallait compter près de 250 euros supplémentaires pour remplir une cuve de 1 000 litres ; enfin, pour un ménage consommant 45 litres de carburant par semaine, la hausse intervenue en deux ans équivaut à environ un Smic à l'année.

Enfin, l'impact sur les entreprises sera encore aggravé , cette année, par la suppression du taux réduit applicable au gazole non routier (GNR). Cette mesure, décidée de façon brutale et sans concertation avec les professionnels concernés, alourdira de près d'1 milliard d'euros les charges annuelles de secteurs tels que l'industrie extractive ou le bâtiment et les travaux publics (BTP), déjà souvent en difficulté et qui n'ont à ce jour que peu ou pas d'alternatives à l'utilisation de machines ou d'engins de chantier fonctionnant au GNR ; à supposer qu'ils puissent répercuter cette charge dans leurs prix, ce sont leurs clients, dont les collectivités publiques, qui en souffriront, avec un risque de contraction globale de l'activité, en particulier dans le secteur de la construction.

2. Des mesures de compensation très insuffisantes

L'an dernier , le Gouvernement avait mis en avant deux mesures pour compenser les effets de la fiscalité énergétique pour les particuliers : le renforcement de la prime à la conversion - 1 000 euros attribués sans conditions de ressources, et 2 000 euros pour les ménages non imposables, pour aider au remplacement d'une vieille voiture par un modèle neuf ou d'occasion moins polluant - et la généralisation du chèque énergie à l'ensemble du territoire pour aider au paiement des factures, mesure qui était en réalité déjà prévue dans la foulée de l'expérimentation réalisée en 2016 et 2017 dans quatre départements. À l'époque, le surcoût pour l'État de ces deux mesures pouvait être estimé à environ 180 millions d'euros 48 ( * ) .

Cette année , face à la très forte mobilisation des Français contre la hausse des taxes sur l'énergie, le Gouvernement a été contraint d'élaborer, dans l'urgence, une série de mesures complémentaires dont le détail n'est pas toujours connu :

- l'extension du chèque énergie à 2 millions de bénéficiaires supplémentaires ( cf. infra ) ;

- la création d'une surprime à la conversion de 4 000 euros pour les 20 % de Français les plus modestes, avec un objectif de primes distribués relevé de 500 000 à 1 million sur le quinquennat (environ 300 000 primes auront été attribuées en 2018, d'où un coût réévalué à 510 millions d'euros) ;

- l'élargissement de l'indemnité kilométrique aux petites cylindrées pour les grands rouleurs (entre 60 et 70 kilomètres par jour) ;

- le renforcement de la prime à la conversion des chaudières au fioul , dans l'objectif annoncé de prendre en charge environ un tiers des dépenses et de mettre fin au chauffage au fioul domestique d'ici dix ans ;

- la défiscalisation d'aides que pourraient mettre en place les collectivités territoriales et des versements décidés par les employeurs dans le cadre du forfait mobilité dont l'entrée en vigueur serait avancée au 1 er janvier 2019,

le tout pour un coût estimé par le Gouvernement lui-même autour de 500 millions , auxquels il faut encore ajouter environ 85 millions au titre de nouvelles dépenses éligibles au crédit d'impôt transition énergétique (CITE) ( cf. infra ).

Ces annonces appellent trois observations de votre rapporteur.

Si la surprime à la conversion et l'élargissement du chèque énergie vont dans le bon sens et permettront d'aider les Français les plus modestes, les classes moyennes seront les grandes oubliées car elles ne pourront en bénéficier - pas plus que de la prime au remplacement des chaudières fioul ou de l'extension du CITE, eux aussi soumis à conditions de ressources.

Certaines des mesures annoncées consistent en réalité à faire payer par d'autres l'effet des décisions prises par l'État : ce sera le cas pour les aides des collectivités ou des employeurs , où la participation de l'État se limitera à défiscaliser les montants versés, mais aussi de la prime au remplacement des chaudières fioul , qui est financée par les vendeurs d'énergie dans le cadre des certificats d'économie d'énergie (CEE) et dont ils répercutent le coût, d'une façon ou d'une autre, sur les consommateurs.

Enfin, et surtout, l'addition de ces différentes mesures sera très loin de compenser l'explosion de la fiscalité énergétique : selon les calculs de votre rapporteur présentés dans le tableau ci-après, il restera à la charge des Français environ 3,5 milliards d'euros de pression fiscale supplémentaire en 2018 et à nouveau près de 3 milliards supplémentaires en 2019 au titre de leurs dépenses d'énergie.

Effets de la fiscalité énergétique et des mesures de compensation 49 ( * )

Évolution par rapport à l'année N-1
(en millions d'euros)

2018

2019

I. Fiscalité énergétique

1. TICPE hors TVA 50 ( * )

+3 700

+2 900

2. Suppression du taux réduit sur le GNR 51 ( * )

-

+ 980

3. TVA sur la fiscalité énergétique 52 ( * )

+377

+329

Fiscalité énergétique totale (1+2+3)

+4 077

+4 209

II. Mesures de compensation

1. Chèque énergie avant extension 53 ( * )

-60

-290

2. Prime à la conversion avant surprime 54 ( * )

-480

-346

3. Mesures nouvelles annoncées par le Gouvernement 55 ( * )

-

-585

Total (I + II)

+3 537

+2 958

Commission des affaires économiques, d'après les documents budgétaires et les réponses du Gouvernement aux questions du rapporteur

B. UNE FISCALITÉ QUI ALIMENTE LE BUDGET DE L'ÉTAT AVANT DE FINANCER LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

L'an dernier, le Gouvernement indiquait très explicitement poursuivre, avec la hausse de la fiscalité énergétique, un « objectif de rendement budgétaire » et que le rythme de la trajectoire carbone était « déterminé au regard des objectifs de recettes » 56 ( * ) . Depuis, la communication a été un peu amendée - il est question d'un « objectif de rendement budgétaire, de renforcement de la lutte contre le changement climatique et de visibilité pour les acteurs économiques » 57 ( * ) - mais le fond reste le même.

Chiffres à l'appui, il apparaît ainsi clairement que l'essentiel de la hausse de la fiscalité énergétique est captée par l'État pour réduire le déficit budgétaire ou compenser des baisses de prélèvements décidées par ailleurs : sur les 7,2 milliards de hausse de la TICPE prévus entre 2017 et 2019, 82 % iront au seul budget de l'État , soit 5,9 milliards ; à l'opposé, en 2019, seuls 178 millions supplémentaires iront aux infrastructures de transport et 80 millions au soutien des énergies renouvelables, même si 1,1 milliard de recettes supplémentaires avaient été affectées à ces dernières en 2018.

En outre, sur un produit total de 37,7 milliards d'euros de TICPE brute attendus en 2019, seuls 7,2 milliards financeront directement les énergies renouvelables, soit moins d'un cinquième du produit total .

Évolution du produit de la TICPE et de sa répartition

(en milliards d'euros)

Exécution 2017

Prévision 2018

Prévision 2019

TICPE brute 58 ( * ) État

11,1

13,3
+ 2,2 Mds

+ 19,8 %

17,0
+ 3,7 Mds

+ 27,8 %

Transfert aux collectivités locales (régions et départements)

12,1

12,3

12,3

Transfert au CAS
« Transition énergétique »

6,1

7,2

7,2

+ 80 millions

Transfert à l'AFITF
(infrastructures de transport)

1,1

1,0

1,2

+ 178 millions

TICPE brute totale

30,5

33,8
+ 3,3 Mds

+ 10,8 %

37.7
+ 3,9 Mds

+ 11,5 %

+ TVA supplémentaire perçue par l'État

+ 0,181

+ 0,377

+ 0,329

Recette totale brute État

11,3

13,7

+ 2,4 Mds

+ 21, %

17,3

+ 3,6 Mds

+ 26,3 %

Source : évaluation des voies et moyens, tome I, annexé au projet de loi de finances pour 2019

Votre rapporteur souligne par ailleurs que depuis la budgétisation de la CSPE déjà évoquée, cette taxe, dont les deux tiers du produit finançaient jusque-là directement les énergies renouvelables (pour environ 5 milliards), alimente désormais le budget général. En d'autres termes, l'État renonce chaque année à environ 7 milliards de TICPE pour financer les énergies renouvelables mais récupère 5 milliards de CSPE précédemment destinés au même usage ; l'effort budgétaire supplémentaire n'est donc que d'environ 2 milliards par an.

Au-delà de son poids en valeur absolue, c'est donc aussi en raison d'une affectation principale au budget général que la fiscalité énergétique est désormais perçue comme injuste et de moins en moins consentie.

C. LA NÉCESSITÉ DE REVENIR SUR UNE FISCALITÉ EN « PILOTAGE AUTOMATIQUE » POUR GELER LES TAXES EN 2019

La fixation d'une trajectoire d'évolution de la fiscalité sur plusieurs années - ici, une hausse continue et massive de la taxe carbone - présente certes l'avantage théorique de donner de la visibilité aux agents économiques pour leur permettre d'adapter leurs comportements (consommation, investissement) - dans le cas présent, en fonction du prix donné au carbone.

Trois objections majeures peuvent cependant lui être opposées, comme l'illustre précisément la situation actuelle.

En premier lieu, pour qu'une taxe dite « de comportement » puisse effectivement influer sur les comportements sans prendre en otage ceux auxquels elle s'applique, encore faut-il que les ménages et les entreprises disposent d'alternatives qui leur permettent, dans le cas de la taxe carbone, de se passer des énergies carbonées. Or, ces alternatives restent aujourd'hui peu sinon pas disponibles dans les zones rurales et périurbaines ni pour certains types d'usages professionnels, par exemple pour les engins de chantier.

En deuxième lieu, lorsqu'elle inverse totalement le signal donné aux acteurs économiques après des décennies de discours publics et d'incitations fiscales en faveur du diesel 59 ( * ) , comme c'est le cas ici, il importe qu'une telle trajectoire fixe des hausses raisonnables d'une année sur l'autre pour organiser une transition plus progressive : de ce point de vue, l'accélération forte décidée l'an dernier apparaît difficilement soutenable.

Enfin, dans la mesure où le signal prix sur le carbone dépend essentiellement de deux variables, la fiscalité et les cours mondiaux des énergies fossiles, la puissance publique ne doit pas s'interdire d'ajuster la première en fonction de la seconde, sauf à ne viser que la sécurisation des recettes , sans considération de l'évolution des prix finaux et de leur soutenabilité pour les acteurs économiques.

Dans le contexte actuel de pétrole cher, une pause dans la hausse des taxes maintiendrait un signal prix à la fois suffisamment puissant pour inciter les acteurs économiques à basculer, lorsqu'ils le peuvent, vers des modes de consommation ou de production plus propres, mais qui reste néanmoins soutenable. Au contraire, le Gouvernement entend maintenir la trajectoire fixée jusqu'en 2022 qui s'appliquera en mode « pilotage automatique » chaque année, sans prise en compte du contexte et au mépris, du reste, du principe d'annualité budgétaire qui veut que le Parlement consente chaque année à l'impôt.

Pour tous ces motifs, votre rapporteur propose 60 ( * ) de geler, à titre conservatoire et pour tenir compte du prix élevé des énergies fossiles, la fiscalité énergétique à son niveau de 2018 .

Le signal prix actuel apparaît en effet déjà suffisant et la hausse des taxes prévue en 2019 - 6,5 centimes supplémentaires par litre de gazole et 2,9 centimes pour l'essence au 1 er janvier prochain - n'aurait d'autre effet que de peser sur les ménages et sur les entreprises, et donc sur la croissance.

Une telle pause ne remettrait pas en cause le principe de la taxe carbone , qui est bon ; du reste, avec la hausse accélérée appliquée en 2018, le prix de la tonne carbone est déjà, à peu de choses près, celui qui était prévu pour 2019 61 ( * ) avec la trajectoire précédente qui amenait jusqu'à 100 euros la tonne en 2030.

III. PROGRAMME 345 « SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE » : LES DÉPENSES DE SOLIDARITÉ PROGRESSENT EN RAISON NOTAMMENT DE LA REVALORISATION DU CHÈQUE ÉNERGIE ET LES PREMIERS DÉCAISSEMENTS POUR ACCOMPAGNER LA FERMETURE DE FESSENHEIM SONT PROGRAMMÉS

Programme 345 « Service public de l'énergie »
(en euros)

Autorisations d'engagement (AE)
et crédits de paiement (CP)

2017

2018

2019

Solidarité avec les zones non interconnectées au réseau métropolitain

1 380 300 000
LFI pour 2017

1 426 900 000
constaté CRE

1 506 778 171
LFI pour 2018

+9,2 %

1 538 600 000
mise à jour CRE
+ 7,8 %

1 594 851 669

+5,8 %

+3,6 %

Protection des consommateurs en situation de précarité énergétique

AE et CP :

496 900 000

459 800 000
après constats CRE

AE et CP :

753 639 487

+51,7 %

732 450 000
après mise à jour CRE
+59,3 %

AE :

794 167 607

+5,4 %

CP :

740 024 476

-1,8 %

AE :
+8,4 %
CP :
+ 1,0 %

Soutien à la cogénération

562 600 000
LFI pour 2017

526 300 000
constaté CRE

691 467 824

LFI pour 2018
+22,9 %

641 400 000
mise à jour CRE

+ 21,9 %

725 167 607


+5,0 %

+13,1 %

Frais de support (intérêts de la dette due à EDF)

99 870 000

87 238 970

-12,6 %

62 613 832

-28,2 %

Médiateur de l'énergie

5 330 000

4 796 000

-10,0 %

5 000 000

+4,3 %

Fermeture de la centrale de Fessenheim 62 ( * )

-

AE et CP :

0

AE :

0

CP :

91 000 000

2017

2018

2019

Total

AE et CP :
2 545 000 000



2 555 300 000
après constats CRE

AE et CP :
3 043 920 452
+19,6 %



3 025 674 457
après mises à jour CRE
+18,4 %

AE :
3 182 503 669
+ 4,6 %

CP :
3 219 360 538
+ 5,8 %

+ 5,8 % en AE
+ 6,4 % en CP

Sources : projets annuels de performances des projets de loi de finances pour 2018 et 2019
et délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018 de la Commission de régulation de l'énergie

Après la forte progression attendue en 2018 (+18,4 %) liée, pour l'essentiel, à la généralisation du chèque énergie, les dépenses de solidarité progresseront encore en 2019 quoiqu'à un rythme moins soutenu : +6,4 % en crédits de paiement, à 3,2 milliards d'euros , compte non tenu de l'extension annoncée à 2 millions de personnes supplémentaires du chèque énergie dont le coût reste à évaluer (sans doute autour d'une centaine de millions supplémentaires en première analyse, cf. infra ).

La progression des crédits en loi de finances initiale tiendra, en particulier, au relèvement de 50 euros du montant moyen du chèque énergie - même si le niveau « réel » des dépenses renvoie au taux d'utilisation effectif du chèque - ainsi qu'à des dépenses de péréquation avec les zones non interconnectées et de soutien à la cogénération qui resteront dynamiques .

L'année 2019 sera par ailleurs marquée par un premier décaissement de 91 millions d'euros, sur les 446 millions autorisés fin 2016, de crédits destinés à accompagner la fermeture de la centrale de Fessenheim .

A. LE DYNAMISME DES SURCOÛTS LIÉS À LA PÉRÉQUATION TARIFAIRE APPELLE DE NOUVEAU À LA VIGILANCE

Les dépenses de solidarité avec les zones non interconnectées au réseau métropolitain (ZNI) 63 ( * ) permettent à ces territoires de bénéficier d'une électricité à des tarifs identiques à ceux du continent malgré des coûts d'approvisionnement nettement plus élevés , les surcoûts des opérateurs historiques 64 ( * ) étant compensés par l'État au titre de la péréquation tarifaire. Ces surcoûts comprennent les surcoûts liés aux installations de ces opérateurs ainsi que les surcoûts d'achats d'électricité auprès de producteurs tiers liés par contrat aux opérateurs historiques.

Entre 2017 et 2019, le coût de la péréquation tarifaire devrait progresser de 11,8 %, pour atteindre près d' 1,6 milliard d'euros , en raison de plusieurs facteurs :

- la hausse des prix à terme observés sur le marché des matières premières et des coûts d'acquisition des quotas d'émissions de gaz à effet de serre , qui augmente le coût des combustibles et que le moindre recours voire la mise à l'arrêt de certains moyens thermiques de production ne compensent pas ;

- la mise en service de nouveaux moyens de production renouvelable dans ces territoires (centrale bagasse/biomasse en Martinique, parcs éoliens en Guadeloupe et en Martinique, installations photovoltaïques, etc.) ;

- une hausse de la consommation dans certains territoires (+ 3,4 % entre 2017 et 2019 en moyenne dans les territoires desservis par EDF, + 10,8 % pour EDM) malgré l'augmentation des actions de maîtrise de la demande , dont les surcoûts sont aussi compensés ;

- l'élargissement progressif , depuis le 1 er juillet 2016, de la péréquation tarifaire aux îles Wallis-et-Futuna ;

- enfin, des facteurs plus ponctuels tels que l'augmentation des frais de déconstruction de centrales EDF mises à l'arrêt.

Si les surcoûts liés à la péréquation sont sensibles à des facteurs exogènes parfois très volatils - cours des matières premières ou des quotas de CO 2, taux de change, conditions d'hydraulicité, etc. -, les dépenses resteront durablement orientées à la hausse dans les années à venir , en particulier du fait de la construction de nouveaux moyens de production telle qu'elle est prévue dans les programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE) de ces territoires.

Après avoir estimé que la péréquation tarifaire mobiliserait, entre 2018 et 2022, 9,9 milliards d'euros, la CRE avait appelé, l'an dernier, à la vigilance sur l'évolution des charges et souligné le risque de surcapacités qui pourraient générer d'importants coûts échoués. Votre rapporteur s'associe à cet appel : la péréquation tarifaire est un bien précieux , qui matérialise la solidarité entre tous les territoires de la République, mais elle ne saurait justifier un surdimensionnement des capacités installées au regard des besoins réels. De ce point de vue, sans doute gagnerait-on à associer davantage le régulateur à la rédaction des PPE des ZNI.

Votre rapporteur se satisfait en revanche de ce que le Gouvernement finalise enfin la révision du taux de rémunération des capitaux dont bénéficiaient les projets dans les ZNI, établi à 11 % et inchangé depuis 2006. Le nouveau taux de rémunération devrait être plus conforme aux réalités de financement actuelles et sera modulé en fonction notamment des technologies retenues, de la spécificité de chaque territoire ou du respect d'un régime de production optimisé.

B. MALGRÉ UNE REVALORISATION BIENVENUE EN 2019 ET DANS L'ATTENTE DE L'ÉLARGISSEMENT ANNONCÉ, LE CHÈQUE ÉNERGIE N'ATTEINT QUE PARTIELLEMENT SES OBJECTIFS TANDIS QUE LES AFFICHEURS DÉPORTÉS SE FONT ATTENDRE

1. Une dépense réelle très dépendante du taux d'utilisation effectif du chèque énergie

Les ménages en situation de précarité énergétique, dont le nombre varie selon les critères retenus mais pourrait atteindre jusqu'à 6 millions de ménages (soit 12 millions d'individus et près d'un français sur cinq) 65 ( * ) , peuvent bénéficier de plusieurs dispositifs d'aides : certificats d'économies d'énergie (CEE) dédiés à ces ménages depuis 2016 (400 TWh cumac sur les 1 600 de la quatrième période 2018-2020) et « coups de pouce économies d'énergie » 66 ( * ) financés par les fournisseurs d'énergie , aides de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) 67 ( * ) , ainsi que les trois dispositifs financés par le présent programme :

- le chèque énergie , qui a remplacé au 1 er janvier 2018 les anciens tarifs sociaux - « tarif de première nécessité » (TPN) en électricité et « tarif spécial de solidarité » (TSS) ;

- le fonds de solidarité logement (FSL), dont les aides permettent de financer des dépenses liées à l'entrée ou au maintien dans le logement (factures d'énergie, loyers, etc.) et pour lequel les contributions versées par les fournisseurs d'énergie leur sont partiellement compensées par l'État ;

- enfin, les afficheurs déportés de la consommation d'énergie, exprimée en euros, et en temps réel pour l'électricité, que les fournisseurs doivent mettre à la disposition des consommateurs en situation de précarité énergétique équipés d'un compteur communicant.

Évolution du coût des dispositifs sociaux financés par le programme 345
(en millions d'euros)

2017

2018

2019

Tarifs sociaux de l'énergie
dont tarif de première nécessité (TPN)
dont tarif spécial de solidarité (TSS)

366,7
273,9
92,8

123,9
87
36,9

0,1
0,1
0

Fonds de solidarité logement (FSL)

27,9

27,3

25,2

Chèque énergie

LFI 2017 : 56,7

LFI 2018 : 581,1

AE : 764,6
CP : 710,5

Afficheur déporté

LFI 2017 : 8,5
CRE 68 ( * ) : 0

LFI 2018 : 0,1
CRE 2 : 0,15

4,3

Total
(charges constatées pour 2017 et charges prévisionnelles pour 2018 et 2019)

459,8
(LFI 2017 : 496,9)

732,45
+ 59,3 %

AE : 794,2
+8,4 %
CP : 740,0
+1,0 %

Sources : projets annuels de performances des projets de loi de finances pour 2018 et 2019
et délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018 de la Commission de régulation de l'énergie et annexes

À mesure de leur extinction progressive, le coût des tarifs sociaux sera logiquement passé de 366,7 millions d'euros en 2017 à 123,9 millions en 2018 et 0,1 million en 2019 , ce dernier montant correspondant au maintien, par exception, des tarifs sociaux de l'électricité à Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

À l'inverse, après la phase d'expérimentation dans quatre départements pilotes en 2016 et 2017, la dépense liée au chèque énergie devrait être multipliée par plus de dix en 2018 du fait de sa généralisation à l'ensemble du territoire. Elle progressera à nouveau en 2019 d'environ 180 millions d'euros (+22,2 %) en raison de la revalorisation du montant moyen du chèque énergie , qui sera porté de 150 euros à 200 euros et est présentée comme une mesure de compensation de la hausse de la fiscalité énergétique. On observera cependant que cette revalorisation sera presque intégralement compensée, sur l'exercice 2019, par l'extinction quasi intégrale des tarifs sociaux , la dépense totale restant globalement stable par rapport à 2018 en crédits effectivement décaissés (+ 1 %), compte tenu du report d'une partie des consommations sur 2020.

Au total, le remplacement des tarifs sociaux par le chèque devrait occasionner un surcoût « théorique » - sous l'hypothèse, non vérifiée dans les faits, d'une utilisation de 100 % des chèques distribués - de l'ordre de 120 millions d'euros en 2018 et de 330 millions en 2019 en autorisations d'engagement par rapport à 2017, et un surcoût « réel » - selon les hypothèses d'utilisation retenues par le Gouvernement lui-même - de l'ordre de 60 millions en 2018 et de 290 millions en 2019 , le tout pour un montant d'aides moyen supérieur aux tarifs sociaux - mais avec certains perdants - et pour un nombre de bénéficiaires supplémentaires qui resterait faible , même dans les hypothèses d'utilisation les plus favorables.

(en millions d'euros pour les coûts
et en millions pour les bénéficiaires)

Tarifs sociaux 69 ( * )

Chèque énergie
avant revalorisation
(2018)

Chèque énergie
après revalorisation
(2019)
(périmètre LFI avant extension)

Coût sous l'hypothèse d'une utilisation de 100% des chèques énergie distribués

430

550

760

Coût avec les taux d'utilisation du chèque énergie visés par le Gouvernement (90 % en 2018 et 95 % en 2019)

490

720

Coût avec le taux d'utilisation constaté jusqu'à présent (85 %) 70 ( * )

470

640

Nombre de bénéficiaires hypothèse 100 % d'utilisation du chèque énergie

3,3

3,6

3,7

Nombre de bénéficiaires effectifs avec les taux d'utilisation visés par le Gouvernement)

3,24

3,5

Nombre de bénéficiaires avec un taux d'utilisation de 85 %

3,06

3,15

Commission des affaires économiques, d'après les réponses du Gouvernement aux questions du rapporteur

2. Un chèque énergie qui n'atteint que partiellement ses objectifs

La mise en place du chèque avait pour objectifs d' atteindre davantage de publics cibles , d'attribuer des aides identiques quelle que soit l'énergie utilisée pour se chauffer, d' augmenter si possible le montant des aides versées et, enfin, de traiter les causes plutôt que les symptômes de la précarité énergétique , en permettant de financer des travaux d'économies d'énergie plutôt que d'aider uniquement à payer des factures.

Près d'un an après sa généralisation et à la lumière de l'évaluation de son expérimentation 71 ( * ) , le chèque énergie a-t-il atteint ses objectifs ?

• En termes de nombre de bénéficiaires, il apparaît que le chèque énergie permet effectivement de toucher, en nombre de chèques distribués, plus de ménages que les tarifs sociaux par l'adoption d'un critère d'éligibilité plus efficace 72 ( * ) : 173 000 chèques distribués sur la première année d'expérimentation dans les quatre départements concernés contre 131 000 bénéficiaires des tarifs sociaux, 3,6 millions de chèques émis en 2018 et 3,7 millions attendus par le Gouvernement en 2019, à rapporter aux 3,3 millions pour les tarifs sociaux en 2016 et à l'objectif de 4 millions visés initialement.

Ces chiffres doivent toutefois être nettement relativisés :

- d'une part parce que malgré leurs imperfections, les tarifs sociaux n'avaient cessé de monter en charge entre 2011 et 2016 , passant de 600 000 bénéficiaires à 3,3 millions, grâce notamment à l'élargissement des critères d'éligibilité, au croisement de fichiers et à l'automatisation de leur attribution ;

- d'autre part, et surtout, parce que le nombre de bénéficiaires effectifs dépend non pas du nombre de chèques distribués mais du nombre de chèques effectivement utilisés : sur la première année d'expérimentation , le taux d'utilisation (77,9 %) n'aura permis d'atteindre que quelques milliers de bénéficiaires supplémentaires (135 000 environ contre 131 000), même si une faible part a aussi pu être reportée sur 2017 ; dans le cadre de la généralisation, le Gouvernement table sur un taux d'usage global de 90 % en 2018 (dont 80 % consommés en 2018 et 10 % en 2019 73 ( * ) ) pour 3,6 millions de chèques émis, puis de 95 % en 2019 (85 % sur 2019 et 10 % sur 2020) pour 3,7 millions de chèques distribués, ce qui amènera à moins de 3,3 millions de bénéficiaires effectifs en 2018 et 3,5 millions en 2019, soit un peu moins puis à peine plus qu'avec les tarifs sociaux , à comparer à la cible des 5,6 millions de ménages cités par l'Observatoire national de la précarité énergétique. Dans une intervention récente 74 ( * ) , le ministre chargé du budget évoquait le chiffre de 560 000 personnes n'encaissant pas le chèque , soit un taux d'utilisation qui n'atteindrait en réalité qu'environ 85 % et attesterait des difficultés d'appropriation du dispositif par un nombre important de ménages éligibles ; avec un tel taux, le chèque énergie bénéficierait aujourd'hui à 300 000 personnes de moins que les anciens tarifs sociaux...

• En termes d'équité, le chèque énergie a bien permis d'attribuer un montant d'aide identique quelle que soit l'énergie de chauffage utilisée (électricité, gaz, fioul, etc.), là où le niveau d'aide dans le cadre des tarifs sociaux pouvait varier du simple au triple et favorisait les ménages chauffés au gaz, qui cumulaient les aides pour l'électricité et le gaz.

Le bilan sur le niveau des aides rapporté à celui des tarifs sociaux doit aussi être nuancé . Sur la première année d'expérimentation, le Gouvernement faisait état d'« une aide en général supérieure aux tarifs sociaux pour les ménages les plus modestes, sauf pour les ménages chauffés au gaz » 75 ( * ) . Ce caractère globalement défavorable au chauffage au gaz a ensuite été confirmé par les différents cas-types présentés l'an dernier par le ministère, qui faisaient ressortir un gain net pour certains - notamment pour les personnes chauffées à l'électricité jusqu'à 6 000,  7 500 ou 11 000 euros de revenu fiscal selon les configurations familiales, ainsi que pour les familles chauffées au fioul, au GPL ou au bois - mais une perte nette pour d'autres , en particulier pour les couples avec ou sans enfant chauffés au gaz et ce quel que soit leur revenu de référence.

Si la revalorisation de 50 euros du montant annuel moyen du chèque permettra de réduire l'écart avec les anciens tarifs sociaux pour ces profils de consommation, il restera, en 2019, des ménages chauffés au gaz qui perdront au passage des tarifs sociaux au chèque énergie.

• S'agissant enfin du financement de travaux de rénovation énergétique , la première année d'expérimentation a montré que le chèque énergie avait de ce point de vue totalement raté sa cible : sur les plus de 170 000 chèques émis, seuls 63 avaient été utilisés afin de financer des travaux 76 ( * ) . Ce résultat était prévisible dès lors que le montant du chèque, même cumulable sur trois ans à cette fin, reste trop faible comparé au coût des travaux et ne peut suffire à lui seul à déclencher une opération de rénovation . Qui plus est, votre rapporteur regrette qu'il faille toujours échanger son chèque contre un autre pour pouvoir le cumuler sur trois ans et observe qu'après une première utilisation pour payer les factures, la pré-affectation automatique au même usage l'année suivante, bien que de nature à simplifier les démarches, incitera encore moins à envisager une utilisation à des fins de travaux.

3. L'élargissement annoncé à 2 millions de bénéficiaires supplémentaires

Le 14 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé l'extension de la distribution du chèque énergie aux 20 % de Français aux revenus les plus modestes , soit environ 2 millions de bénéficiaires supplémentaires et 5,7 millions au total.

Au vu de la difficulté à augmenter significativement le nombre de bénéficiaires effectifs et des hausses de fiscalité subies par ailleurs, cette annonce est évidemment bienvenue , même si votre rapporteur rappelle à nouveau la nécessité de distinguer le nombre de chèques distribués du nombre de chèques effectivement utilisés. Dans les faits, il est en effet très probable que le nombre de bénéficiaires réels n'atteindra pas les 5,7 millions.

Il importe désormais d'attendre le relèvement des plafonds de ressources par voie réglementaire pour juger, sur pièce, du respect des engagements gouvernementaux. Le coût de cette extension devra par ailleurs être précisé : en première analyse, votre rapporteur estime le surcoût théorique - au taux d'utilisation de 100 % - de l'ordre d'une centaine de millions d'euros 77 ( * ) .

4. La mise à disposition d'un premier afficheur déporté se fait toujours attendre, de même que l'aide aux ménages précaires impactés par le changement de gaz distribué dans le nord

Alors que 8,6 millions d'euros ont été inscrits en lois de finances pour 2017 et 2018, qu'EDF déclare avoir dépensé 8,2 millions pour la conception et le développement du dispositif entre 2016 et 2018 et que le projet de loi de finances pour 2019 prévoit à nouveau 4,3 millions d'euros supplémentaires, aucun afficheur déporté n'a à ce jour été installé faute de fixation par le Gouvernement des modalités de compensation des coûts correspondants pour les fournisseurs .

Le principe de la mise à disposition gratuite de ces afficheurs déportés aux consommateurs en situation de précarité énergétique équipés d'un compteur communicant a pourtant été décidé en 2015, dans la loi « Transition énergétique » 78 ( * ) , tandis qu'un décret paru en novembre 2016 prévoyait une entrée en vigueur du dispositif au 1 er janvier 2018 . En outre, à considérer que plus de 13,5 millions de compteurs Linky sont déjà installés et que 2,2 millions de compteurs Gazpar devraient l'être d'ici à la fin de l'année, c'est sans doute près de 2 millions de ménages précaires énergétiquement 79 ( * ) qui sont déjà équipés d'un compteur intelligent et qui devraient donc pouvoir disposer dès à présent d'un afficheur déporté. L'information pourrait du reste être délivrée soit par le biais d'un appareil spécifique, soit par une application accessible depuis un appareil existant - smartphone, tablette ou autre -, ce qui réduirait d'autant les coûts.

En mai dernier, à l'occasion de son rapport annuel sur l'application des lois, les services du ministère avaient indiqué à votre commission que les deux arrêtés relatifs à la compensation des coûts faisaient encore l'objet de réflexions afin de garantir un déploiement à un coût maîtrisé pour la collectivité et susceptible d'apporter des bénéfices énergétiques et industriels. À nouveau interrogé par votre rapporteur dans le cadre du présent projet de loi, le Gouvernement a indiqué que ces modalités étaient toujours à l'étude . Pour estimer les charges correspondantes pour 2019, la CRE indique avoir retenu, faute de parution des arrêtés, un plafond conservatoire de compensation de 100 euros par dispositif.

Votre rapporteur juge cette situation inacceptable . Il rappelle, du reste, qu' une autre mesure à destination des consommateurs en situation de précarité énergétique, certes plus ponctuelle, n'a toujours pas été prise : c'est celle qui consisterait à aider financièrement les consommateurs aux revenus modestes qui seraient contraints de remplacer un équipement en cas de changement de la nature du gaz distribué , comme ce sera le cas très prochainement dans une partie du nord de la France ; or, le Gouvernement n'a à ce jour pas même remis au Parlement le rapport attendu depuis février sur ce sujet 80 ( * ) . Votre commission a donc déposé un amendement pour prévoir une aide dès 2019.

C. UN SOUTIEN À LA COGÉNÉRATION QUI CONTINUE DE PROGRESSER MALGRÉ LA BAISSE DES TARIFS DE SOUTIEN

En combinant production de chaleur 81 ( * ) et d'électricité, les installations de cogénération, qu'elles utilisent le gaz naturel ou la biomasse comme combustible, présentent de meilleurs rendements énergétiques que les centrales électriques classiques. Lorsqu'elles alimentent des sites consommant de la chaleur en continu, elles présentent un profil de production d'électricité prévisible et régulier qui facilite l'équilibrage de l'offre et de la demande pour le système électrique et peuvent aussi contribuer à la sécurité d'approvisionnement électrique en produisant à la pointe. Elles contribuent enfin à réduire les émissions de CO 2 , y compris lorsqu'elles fonctionnent au gaz du fait de leur meilleur rendement, lorsqu'elles se substituent à un autre moyen de production fossile.

La cogénération biomasse contribuant au surplus au développement des énergies renouvelables , il a été décidé dans le cadre de l'actuelle programmation pluriannuelle de l'énergie d' encourager par appels d'offres le remplacement des cogénérations gaz par des cogénérations biomasse et de ne pas fixer d'objectif quantitatif de développement de nouvelles capacités fonctionnant au gaz.

Depuis l'expiration, fin 2016, de la prime transitoire rémunérant la disponibilité des installations de plus de 12 MW jusqu'à la mise en place du marché de capacité, le soutien public à la cogénération se décline donc désormais en :

- un arrêté tarifaire - guichet ouvert en obligation d'achat - pour les installations de cogénération à partir de gaz naturel de moins de 1 MW (pour un coût estimé à 160,6 millions d'euros en 2019, pour 7 015 GWh) ;

- un guichet ouvert pour les installations de méthanisation de moins de 500 MW (155,6 millions en 2019 pour 2 334 MWh) dont le seuil devrait être relevé à 1 GW ;

- un appel d'offres cogénération biogaz d'un volume de 10 MW pour les installations de puissance comprise entre 0,5 et 5 MW (900 000 euros pour 11,3 GW en 2019) qui devrait prochainement être supprimé ;

- un appel d'offre cogénération biomasse à hauteur de 50 MW par an, pour les installations de puissance comprise entre 0,3 et 25 MW dont 10 MW réservés à des projets de moins de 3 MW (459,1 millions pour 3 264 GWh en 2019).

En 2019, les dépenses continueront de progresser fortement (+13,1 % à 725 millions d'euros, après +21,9 % en 2018 et +18,1 % en 2017) alors qu'une stabilisation était attendue du fait de l'arrivée progressive à échéance des contrats les plus coûteux car bénéficiant d'un ancien régime tarifaire plus favorable et de la fin de la prime transitoire. L'évolution de la charge en 2019 s'expliquera en réalité par :

- la mise en service de nouvelles installations , à hauteur de 150 MW estimés pour l'hiver 2018/2019, qui fera plus que compenser la fin de près de 100 MW de contrats d'achat et dont l'ampleur est liée à un pic de demandes en 2016, par anticipation de l'évolution du mécanisme de soutien vers un dispositif de complément de rémunération, à un tarif moins avantageux ;

- une hausse de la rémunération moyenne de la filière (+12 % par rapport au coût moyen constaté en 2017, à 161 €/MWh estimés en 2019) qui tient notamment à l'augmentation du niveau de la taxe intérieure de consommation sur le gaz (TICGN) et des prix du gaz et du CO 2 , dont le mécanisme de soutien neutralise les effet pour les producteurs.

D. DES FRAIS DE SUPPORT EN BAISSE CORRESPONDANT AUX INTÉRÊTS DE LA DETTE DE CSPE DUE À EDF

Alors que le remboursement du principal est retracé dans le CAS « transition énergétique », le paiement des intérêts la dette de CSPE due à EDF , bien que résultant lui aussi d'engagements passés liés à la transition énergétique, est lui financé par le budget de l'État, au sein d'une action baptisée « frais de support » du programme 345 dont il constitue la quasi-totalité des crédits : 62,5 millions d'euros en 2019 (sur les 62,6 millions inscrits), une centaine de milliers d'euros servant à couvrir les frais de gestion facturés par la Caisse des dépôts et consignations pour les opérations de compensation des charges de service public.

Conformément à l'échéancier défini, les intérêts payés en 2018 diminueront de 12,6 %, à 87,2 millions d'euros , jusqu'à leur extinction prévue en 2020 .

E. MÉDIATEUR DE L'ÉNERGIE : UNE SUBVENTION EN LÉGÈRE HAUSSE DANS UN BUDGET TOUJOURS CONTRAINT

En 2019, la dotation versée par l'État au Médiateur national de l'énergie connaîtra une légère hausse , à 5 millions d'euros (subvention brute) ou 4,85 millions après déduction de la réserve de précaution (subvention nette) 82 ( * ) , soit +4,3 % par rapport à 2018.

Comme l'an dernier, un prélèvement sur le fonds de roulement , à hauteur de 470 000 euros contre 750 000 en 2018 83 ( * ) , sera nécessaire pour assurer l'équilibre global du budget du Médiateur, qui baissera néanmoins de 4 % , pour s'établir à 5,32 millions d'euros.

Dans ce contexte budgétaire contraint, le Médiateur devra poursuivre ses efforts de productivité - avec un plafond d'emplois stabilisé à 41 équivalents temps plein travaillés depuis 2014 - pour répondre à un champ d'intervention et à une activité qui vont croissant .

Depuis sa création en 2006, le Médiateur, doté du statut d'autorité administrative indépendante depuis 2017, a en effet vu ses compétences élargies progressivement au traitement des litiges des petites et moyennes entreprises, à ceux liés à l'exécution des contrats conclus avec un gestionnaire de réseau de distribution 84 ( * ) - et plus uniquement aux contrats de fourniture - ainsi qu'à la consommation de toutes les énergies domestiques 85 ( * ) , en plus de l'électricité et du gaz.

Après trois années de baisse, l'activité du Médiateur a connu en forte hausse en 2017 : le nombre de litiges traités s'est établi à près de 15 000, soit une augmentation de 19 % par rapport à 2016, et la tendance se confirme en 2018 , avec un volume de litiges enregistrés fin octobre au niveau de l'année 2017 et un nombre de litiges recevables pour une médiation déjà en hausse de 40 %. Sur les 4 000 requêtes jugées recevables en 2017, 3 700 médiations ont été menées à leur terme, l'avis du Médiateur étant suivi par les opérateurs dans 81 % des cas. La majorité de ces litiges concerne les particuliers, près de la moitié ont trait aux niveaux de consommation facturés et un quart à l'établissement de la facturation et à son paiement.

Avec l'intensification de la concurrence sur les marchés de l'énergie et la suppression annoncée des tarifs réglementés de vente du gaz, il est probable que l'activité du Médiateur augmente encore dans les années à venir, ce qui posera inévitablement la question de moyens humains supplémentaires .

F. L'INDEMNISATION ET L'ACCOMPAGNEMENT DE LA FERMETURE DES CENTRALES NUCLÉAIRES ET THERMIQUES

1. Un premier décaissement pour la fermeture de la centrale de Fessenheim

Suite à la négociation, entre l'État et EDF, d'un projet de protocole d'indemnisation pour la fermeture anticipée de la centrale de Fessenheim, 446 millions d'euros d'autorisations d'engagements ont été inscrits en loi de finances pour 2016.

Ces 446 millions correspondent en réalité à un montant minimal : lors de son audition par votre commission en novembre 2016, la ministre avait fait état du versement de « 96 millions d'euros à la fermeture de la centrale, 350 à 390 millions d'euros , selon les modalités de paiement, en 2021, ainsi que, jusqu'en 2041, une part variable reflétant le manque à gagner pour EDF, le cas échéant, qui sera déterminée en fonction de l'évolution des prix et de la production constatée du parc de centrales 900 MW hormis Fessenheim ». L'an dernier, le Gouvernement avait confirmé à votre rapporteur que l'indemnisation comporterait :

- une part fixe anticipant les coûts de fermeture (dépenses liées à la reconversion du personnel, au démantèlement, à la taxe sur les installations nucléaires de base [INB] ainsi qu'à la « post-exploitation ») ;

- et une part variable donnant lieu, le cas échéant, à des versements ultérieurs , reflétant le manque à gagner pour EDF jusqu'en 2041.

Jusqu'à présent, aucun crédit de paiement n'avait été versé à l'exploitant bien qu'une nouvelle action budgétaire intitulée « Fermeture de la centrale de Fessenheim » ait été créée l'an dernier au sein du programme 345 pour les retracer.

C'est sur cette ligne budgétaire qu'est inscrit, en 2019, un premier versement de 91 millions d'euros de crédits de paiement au titre de la part fixe initiale.

Pour mémoire, et bien qu'aucune centrale ne fut nommément citée, le plafonnement par la loi de la capacité de production totale d'électricité nucléaire à 63,2 GW a eu pour effet de lier juridiquement, de fait, la fermeture de la centrale de Fessenheim à la mise en service de l'EPR de Flamanville , cette dernière devant, à l'époque, intervenir fin 2018 ou début 2019.

Après que la détection d'écarts de qualité sur des soudures a conduit au report d'un an du raccordement au réseau de l'EPR , désormais attendu au premier trimestre 2020, le ministre a fait état de sa volonté de découpler les deux dossiers . En octobre, EDF a indiqué à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) 86 ( * ) qu'il n'envisageait pas de réaliser les travaux nécessaires à la prolongation des réacteurs de la centrale au-delà de leurs quatrièmes réexamens périodiques , prévus en septembre 2020 pour le réacteur 1 et en août 2022 pour le réacteur 2, ce qui acterait donc leur arrêt définitif au plus tard à ces échéances.

Bien que la fermeture de la centrale de Fessenheim soit désormais inéluctable, votre rapporteur ne peut s'empêcher de souligner :

- d'une part, le jugement porté par le président de l'ASN sur la sûreté de la centrale, selon lequel « Fessenheim est la centrale d'EDF qui présente les meilleurs résultats en termes de sûreté d'exploitation » 87 ( * ) ;

- d'autre part, l'annulation par le Conseil d'État 88 ( * ) du décret d'avril 2017 89 ( * ) par lequel le Gouvernement avait entendu, pour afficher le respect de l'engagement électoral d'une fermeture avant la fin du précédent quinquennat, abroger l'autorisation d'exploiter la centrale de Fessenheim sans attendre que son titulaire en ait fait la demande , et dont votre rapporteur avait dénoncé, avec d'autres, le caractère d'« OVNI juridique » sans portée opérationnelle.

2. La création d'un fonds de compensation des pertes fiscales : une péréquation entre collectivités sans aide supplémentaire de l'État

Pour répondre « notamment » aux importantes pertes de recettes fiscales pour les collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés par la fermeture de la centrale de Fessenheim et, d'ici à 2022, par celles des quatre dernières centrales thermiques à charbon, l'article 25 du présent projet de loi de finances prévoit trois mesures :

- la modernisation du mécanisme existant de perte de bases de contribution économique territoriale (CET), qui passera entre autres par la suppression d'une disposition spécifique pour les collectivités appartenant à un pôle de conversion industrielle, un versement de la compensation la même année que la constatation de la perte, à compter de 2020, et une compensation des pertes exceptionnelles 90 ( * ) de recettes fiscales étendue à cinq ans au lieu de trois ans ;

- la création d'un mécanisme analogue de perte de bases d'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER) ;

- et la création d'un fonds de compensation horizontale pour l'accompagnement à la fermeture des centrales électriques nucléaires et thermiques , qui serait alimenté par un prélèvement annuel de 2 % sur le produit de l'IFER applicable aux centrales nucléaires ou thermiques perçu par les communes et les EPCI et qui compenserait les bénéficiaires sur dix ans, de façon intégrale pendant les trois premières années, puis dégressive.

Ce mécanisme de péréquation reviendra donc à organiser, non pas une véritable solidarité nationale où l'État - à l'origine de ces décisions - prendrait sa part, mais une solidarité entre les seules collectivités disposant sur leur territoire de centrales nucléaires ou thermiques , les collectivités conservant leur centrale devant compenser les pertes de celles qui les perdront. L'exposé des motifs de l'article le dit d'ailleurs très clairement puisqu'il est question d'un « fonds de compensation entre les communes et les EPCI bénéficiaires de l'IFER applicable aux installations de production d'énergie d'origine nucléaire et thermique à flamme ».

Dans l'évaluation préalable de l'article, il est indiqué que l'alimentation du fonds par la création d'un prélèvement sur les recettes de l'État a été écartée au motif qu'elle « conduirait l'État, seul, à supporter financièrement la compensation des pertes de recettes fiscales des communes et des EPCI » alors que la solution retenue permettrait « la création d'un dispositif de compensation équilibré, partagé entre l'État et les collectivités locales », « le fonds de compensation horizontal e [permettant] de compléter l'effort financier de l'État réalisé au titre du mécanisme de perte de bases ».

Or, il ressort précisément de cette évaluation préalable que le niveau d'effort de l'État restera, en dépit des apparences, inchangé, voire même diminuerait de quelques centaines de milliers d'euros : la suppression de la disposition sur les pôles de conversion permettrait « une économie de 500 000 euros par an » dès cette année, quand l'extension de la compensation à l'IFER « ne coûterait rien à l'État en 2019 et 300 000 euros par an à compter de 2020 » et la concomitance entre la constatation de la perte et le versement de la compensation n'aurait pour effet que de décaler la charge, avec un surcoût de 15 millions jusqu'en 2022 strictement compensé par « une économie de même montant » entre 2023 et 2025.

À l'inverse, les collectivités disposant d'une centrale sur leur territoire contribueront collectivement à hauteur de 2,4 millions d'euros au fonds de compensation sur la base des données de 2017 (122 millions d'IFER perçus, pour des montants individuels compris entre 81 726 euros et 8,2 millions). En fonction des décisions de fermeture supplémentaires qui interviendront dans les prochaines années, le fonds et le prélèvement devraient être redimensionnés à la hausse : toutes les collectivités concernées seront donc solidairement perdantes.

3. Des contrats de transition écologique volontaristes mais sans moyens supplémentaires à ce jour

Présentés comme des « contrats “sur mesure” pour engager concrètement la transition dans les territoires », les contrats de transition écologique (CTE), qui devaient initialement être expérimentés dans vingt territoires en 2018, procèdent certes d'une démarche volontariste destinée à impliquer tous les acteurs autour d'un projet de territoire.

Le 11 octobre dernier, le premier CTE a ainsi été signé avec la Communauté urbaine d'Arras ; il prévoit de mobiliser « 48 millions d'euros pour 40 actions concrètes sur 4 ans ». Le 7 novembre, un deuxième contrat a été signé avec le territoire de la Sambre-Avesnois ; il vise cette fois 19 actions pour un « montant global de 38 millions d'euros » financé par les intercommunalités, les communes et les syndicats intercommunaux, pour 9 millions, le département, pour 2,1 millions, la région, pour 11,2 millions, l'État, pour 12,5 millions, et le secteur privé, pour 3,2 millions.

Si la démarche partenariale et l'adaptation aux réalités locales mise en oeuvre par les CTE mérite d'être saluée, votre rapporteur note que l'objectif de 20 CTE signés fin 2018 ne sera pas atteint , pas plus que sur le début d'année 2019 - cinq contrats devraient être signés d'ici à la fin de l'année et huit autres ont été initiés, dont quatre concerneront les territoires impactés par la fermeture des centrales à charbon.

Surtout, il observe qu' aucun moyen supplémentaire n'est à ce jour dédié aux CTE , qui consistent à mobiliser des fonds existants autour de projets locaux. Or, au moins pour les territoires concernés par la fermeture de sites énergétiques importants, des moyens dédiés seront indispensables.

4. La nécessité d'accompagner dès à présent la fermeture des quatre dernières centrales à charbon

Sur le modèle du dispositif dédié à la fermeture de la centrale de Fessenheim, qui a fait l'objet d'autorisations d'engagements dès 2016 pour une fermeture envisagée, à l'époque, fin 2018 ou début 2019, votre rapporteur juge nécessaire de créer dès cette année une nouvelle ligne budgétaire pour accompagner la fermeture des quatre dernières centrales électriques au charbon : il est en effet impératif d' engager dès à présent la transition industrielle des sites concernés.

Cette ligne nouvelle pourrait être dotée de 40 millions d'euros en autorisations d'engagement - même si l'évaluation des sommes requises devrait être affinée - et de 2 millions d'euros en crédits de paiement décaissables dès l'an prochain pour financer les premières études de faisabilité des projets.

Le fonds proposé financerait l' aide à la reconversion industrielle des sites, l'accompagnement social des salariés dans des bassins d'emplois déjà sinistrés et l'indemnisation des exploitants concernés pour la fermeture anticipée d'actifs industriels sur décision de l'État. Il complèterait ainsi l'article 25 du présent projet de loi de finances, qui ne traite aujourd'hui que de la compensation des pertes fiscales liées à ces fermetures, et pourrait être mis au service des actions identifiées dans les CTE de ces territoires .

IV. PROGRAMME 174 « ÉNERGIE, CLIMAT ET APRÈS-MINES » : UN BUDGET DE L'APRÈS-MINES QUI POURSUIT SA BAISSE ET UNE DÉPENSE FISCALE QUI REFLUE SOUS L'EFFET DU RESSERREMENT DU CRÉDIT D'IMPÔT TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Dédié à près de 90 % à la gestion de « l'après-mines » , le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » voit logiquement ses crédits diminuer chaque année à mesure de la baisse régulière du nombre de ses bénéficiaires, les anciens mineurs et leurs ayants droit.

En 2019, la démographie du régime de l'après-mines se traduira par une nouvelle contraction des crédits du programme (-5,9 % après -6,3 % en 2018) quand les autres actions résiduelles financées (« Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l'air », « Politique de l'énergie » et dépenses de soutien) verront, comme l'an dernier, leur enveloppe augmenter ; votre rapporteur déplore à cet égard une régression dans l'information fournie au Parlement , les documents budgétaires ne présentant plus la ventilation indicative des crédits par sous-action pour ces trois actions 91 ( * ) .

De façon plus étonnante et dans des conditions très insatisfaisantes sur lesquelles votre rapporteur est déjà revenu en détail l'an dernier, le programme 174 a aussi été abondé à trois reprises en lois de finances rectificatives pour 2015, 2016 et 2017 pour alimenter l'« enveloppe spéciale transition énergétique » (ESTE) destinée à financer des projets portés par les collectivités territoriales. En réponse aux questions de votre rapporteur, le Gouvernement a réaffirmé son intention d'honorer tous les engagements pris , ce qu'il appartiendra de vérifier sur le terrain.

Enfin, le programme 174 a pour autre particularité de se voir rattachées des dépenses fiscales dont le montant excède très largement ses crédits budgétaires : en 2019, ces dernières devaient, selon les estimations initiales du Gouvernement, refluer de plus de  20 % et atteindre environ 2 milliards d'euros en raison du resserrement intervenu l'an dernier du crédit d'impôt transition énergétique (CITE), qui constitue l'un des deux postes principaux de dépenses avec les taux réduits en faveur des industries intensives en énergie.

Dans les deux cas, votre rapporteur observe toutefois la très grande difficulté à chiffrer les coûts de ces dispositifs , dont les dépenses constatées dévient souvent largement des prévisions, à la hausse comme à la baisse. S'agissant en particulier du CITE, ces écarts renvoient plus généralement aux difficultés de pilotage dont le dispositif a fait l'objet, avec des modifications très régulières dont les effets sur le volume des travaux engagés sont parfois très brutaux. En réponse à la hausse des taxes sur l'énergie et dans l'attente de sa transformation en prime reportée à 2020, de nouveaux changements pourraient par ailleurs être annoncés.

Programme 174
« Énergie, climat et après-mines »
(en euros)

Autorisations d'engagement

2017

2018

2019

Gestion économique et sociale
de l'après-mines

422 907 573

-10,8 %

390 642 250

-7,6 %

360 137 300

-7,8 %

Lutte contre le changement climatique
et pour la qualité de l'air

27 425 762

-1,9 %

30 321 257

+10,6 %
-7,7 % à
iso-périmètre

33 885 000

+11,8 %

Politique de l'énergie

3 983 900

-3,9 %

4 356 501

+9,4 %

5 256 757

+20,7 %

Soutien

1 126 563

-2,2 %

1 200 000

+6,5 %

1 900 000

+ 58,3 %

Total

455 443 798

-10,2 %

426 520 008

-6,4 %

401 179 057

-5,9 %

Sources : projets annuels de performances des projets de loi de finances pour 2018 et 2019

A. LA DÉMOGRAPHIE DÉCLINANTE DE L'APRÈS-MINES EXPLIQUE CETTE ANNÉE ENCORE LA BAISSE DES CRÉDITS

1. Gestion de l'après-mines : une baisse cohérente avec l'évolution de la démographie
a) Les dispositions sociales

En 2019, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) sera dotée d'environ 322 millions d'euros (contre 351 millions en 2018) répartis en 13 millions de dépenses de fonctionnement et 309 millions de dépenses d'intervention pour financer ses deux missions principales :

- verser les avantages en nature (chauffage et logement) prévus par le statut du mineur, à hauteur de 258,9 millions prévus en 2019 (contre 274,5 millions en budget initial pour 2018), ainsi que les prestations de préretraite et prestations assimilées , pour 42 millions (53 millions en 2018) ;

- remplir les obligations de l'employeur qu'elle assume depuis 2008 auprès des anciens salariés des Charbonnages de France (CdF) qui sont encore sous contrat de travail, soit 94 agents fin 2017 dont 60 seulement sont encore en situation d'activité professionnelle, pour un coût estimé à 8,1 millions en 2019 (9,4 millions en budget initial 2018).

Au 31 décembre 2017, l'ANGDM gérait les droits de 109 802 personnes (contre 116 709 un an plus tôt) dont l'âge moyen était de 76 ans pour les ayants-droit et 84 ans pour les conjoints survivants.

Dans son volet social, l'action finance aussi :

- les dépenses de retraites anticipées acquittées par la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines (CANSSM) pour le compte de l'État aux anciens mineurs dans le cadre des plans sociaux mis en place lors des fermetures de CdF, des Mines de potasse d'Alsace (MDPA) et des mines de Salsigne, pour 3 millions en 2019 (contre 4,8 millions en 2018) ;

- les pensions des agents français des établissements publics, offices et sociétés concessionnaires de services publics d'Algérie, du Maroc et de Tunisie versées par la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG), pour encore 7,6 millions en 2019 (8,4 millions en 2018).

b) La liquidation des mines de potasse d'Alsace

En 2019, les dépenses destinées à couvrir les coûts de la structure de liquidation, l'entretien des bâtiments de surface et des installations souterraines des Mines de potasse d'Alsace (MDPA) atteindront 22,8 millions , contre 21,8 millions en 2018 et 17,5 millions deux ans plus tôt.

Cette croissance s'explique par les difficultés rencontrées dans la fermeture du site de stockage de déchets ultimes de Stocamine : après la fin du déstockage des déchets mercuriels et phytosanitaires en novembre 2017 ayant conduit à retirer 95 % des déchets de mercures, le Gouvernement a missionné, en avril 2018, le Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) pour expertiser le délai et les conditions d'un déstockage supplémentaire.

c) Les contentieux sociaux de Charbonnages de France

L'action couvre enfin le coût, dont l'estimation est inchangée en 2019 à 4,25 millions d'euros , des contentieux sociaux des Charbonnages de France (CdF) qui ont été transférés à l'État après la liquidation définitive intervenue au 31 décembre 2017 et qui sont pour l'essentiel liés à la reconnaissance de maladies professionnelles .

2. « Lutte contre le changement climatique » : une dotation en hausse mais une absence de transparence sur l'affectation des crédits

En 2019, l'action « Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l'air » verrait ses crédits augmenter en 2019 de près de 12 % , à 33,9 millions d'euros. Comme évoqué plus haut, en l'absence de détail de l'usage de ces sommes sous-action par sous-action, votre rapporteur n'est pas en mesure d'en analyser précisément l'évolution . Il rappelle par ailleurs qu'en dépit des engagements climatiques affichés par le précédent Gouvernement, les derniers exercices budgétaires avaient été marqués par une forte baisse des crédits (- 20,6 % entre 2015 et 2017) et que la hausse observée en 2018 (+10,6 %) tenait en réalité à l'ajout d'une nouvelle mission , la surveillance du marché automobile (pour 5 millions d'euros), dont l'objet est autant de s'assurer du respect des normes de sécurité que de celles applicables en matière d'émissions de polluants ; à périmètre constant, la baisse était encore de 7,7 % .

Pour mémoire, l'action a pour objet principal de financer le dispositif national de surveillance de la qualité de l'air composé, au niveau local, des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air et, au plan national, du Laboratoire central de surveillance de la qualité de l'air et du Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique.

Enfin, comme les années précédentes, votre rapporteur s'étonne toujours que l'indicateur de performance retenu pour mesurer l'efficacité de cette politique se limite aux émissions de gaz à effet de serre par habitant - qui du reste ont augmenté en 2016 et à nouveau en 2017 - et n'évalue pas la réduction d'autres polluants atmosphériques (particules fines ou dioxyde d'azote notamment) pour lesquels les valeurs limites sont régulièrement, et alors même que le Gouvernement entend lutter contre les vieilles motorisations diesel émettrices de ce type de polluants.

3. « Politique de l'énergie » : des dispenses limitées et disparates

Malgré un intitulé très ambitieux, l'action « Politique de l'énergie » finance des dépenses disparates et qui restent limitées dans leur montant quoi qu'en forte hausse pour 2019 : + 20,7 % à 5,3 millions d'euros, soit 1,3 % du programme.

Selon les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteur, cette hausse tiendra pour l'essentiel à la très forte augmentation des crédits destinés à la réalisation d'études , qui feront plus que doubler (1 million, contre 470 000 euros en autorisations d'engagements l'an dernier) à raison, en particulier, des études liées à la préparation de la PPE, d'études nouvelles programmées dans le domaine nucléaire ou de la poursuite de projets déjà engagés - éolien, assistance à maîtrise d'ouvrage pour un projet de gazoduc en Corse, etc.

Les autres montants seront globalement stables, à l'exception de la subvention versée à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), qui progressera de 200 000 euros, à 2,8 millions mais qui ne constitue qu'une très faible part de ses ressources.

B. UN REFLUX ATTENDU DE LA DÉPENSE FISCALE LIÉ AU RESSERREMENT DU CRÉDIT D'IMPÔT TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

En 2019, les dépenses fiscales associées au programme 174 devraient reculer, selon les prévisions du Gouvernement, de 21,1 %, à 2 milliards d'euros , sous l'effet de la réforme du crédit d'impôt transition énergétique (CITE) votée l'an dernier pour exclure les portes, fenêtres et chaudières au fioul au 30 juin 2018.

Ces estimations ne tiennent cependant pas compte du surcroît de commandes observé fin 2017 et début 2018 , avant la suppression du crédit d'impôt sur ces équipements ; celui-ci devrait conduire, sur l'exercice 2018, à un dérapage de la dépense fiscale associée de plus de 16 % (à près de 2 milliards d'euros pour le seul CITE) et, sur 2019, à un coût supplémentaire pour le budget de l'État d'au moins 120 millions. Ce n'est alors qu'en 2020 que la dépense fiscale liée au CITE reviendrait à son niveau de 2015, malgré le resserrement opéré. De même, il n'est pas tenu des nouvelles dépenses éligibles sous conditions de ressources (dépose des cuves à fioul et main d'oeuvre pour les installations de chaleur renouvelable) ajoutées par voie d'amendement gouvernemental à l'Assemblée nationale, et dont le coût peut être estimé à 85 millions.

Surtout, votre rapporteur regrette que le Gouvernement ait décidé de reporter d'une année supplémentaire la mise en oeuvre de la promesse présidentielle d'une conversion du CITE en prime ; selon les informations dont il dispose, la réforme aurait désormais lieu en 2020 mais seuls les ménages les plus modestes pourraient bénéficier d'une prime immédiatement perceptible, restriction que ne prévoyait pas l'engagement du Président de la République.

Au-delà du CITE, le « coût » 92 ( * ) des réductions de taxes intérieures de consommation pour les industries intensives en énergie , qui sont le second poste de dépenses fiscales associées au programme, continuera mécaniquement d'augmenter en 2019 (+ 27,3 %, à un peu plus de 630 millions d'euros) en raison de la hausse continue de la taxe carbone.

La même mécanique jouera logiquement sur les taux réduits sur le gazole dont bénéficient le transport routier de marchandises et le transport public en commun de voyageurs, qui sont les principales autres dépenses fiscales de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » (4,1 milliards d'euros au total) et sont portées par le programme 203 « Infrastructures et services de transports » ; le coût théorique de ces tarifs réduits augmentera encore, en 2019, de 39,4 %, à plus d'1,7 milliard d'euros .

À l'inverse, le projet de loi de finances pour 2019 propose la suppression des tarifs réduits sur les carburants non routiers, sauf pour les entreprises des secteurs agricole et ferroviaire , ce qui occasionnera un gain pour l'État de près d'1 milliard d'euros et un coût équivalent pour les secteurs impactés , en particulier pour le bâtiment et les travaux publics, ou pour leurs clients, à commencer par les collectivités publiques , si ces hausses de coûts peuvent leur être répercutées. Les dépenses fiscales correspondantes sont aujourd'hui rattachées à la mission « Agriculture » 93 ( * ) , pour plus de 2 milliards d'euros, à l'exception du tarif réduit sur le gaz de pétrole liquéfié (GPL) utilisé comme carburant non routier, qui relève du programme 174 et qui serait donc supprimé.

Enfin, on rappellera que bien qu'il vise, comme le CITE, à réduire la consommation énergétique des bâtiments, le taux réduit de TVA sur les travaux de rénovation (1,1 milliard d'euros en 2019) reste rattaché à la mission « Logement » 94 ( * ) .

Principales dépenses fiscales 95 ( * ) rattachées à titre principal au programme 174

(en millions d'euros)

Chiffrage pour 2017

Chiffrage pour 2018

Chiffrage pour 2019

Chiffrage
pour 2020

Logements

Crédit d'impôt transition énergétique (CITE)

Objectif : diminuer la consommation énergétique des logements

1 682

+0,4 %

1 675
(PAP)
-0,4 %

1 954
(presse)
+16,2 %

879
(PAP)
-47,5 %

1 000
(presse)
-48,8 %

1 150
(QP)

865
(EP)
-1,6 %

Dégrèvement égal au quart des dépenses à raison des travaux d'économie d'énergie sur la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour les organismes HLM et les SEM

Objectif : aider le secteur immobilier public pour des travaux d'économies d'énergie

52

nc

nc

Industries intensives en énergie

Taux réduit de TICPE, TICGN et TICC au profit des installations intensives en énergie et soumises au régime des quotas d'émission de gaz à effet de serre de la directive 2003/87/CE (SCEQE)

Objectif : éviter la double taxation du carbone

307
+34,6 %

487
+58,6 %

620
+27,3 %

Chiffrage pour 2017

Chiffrage pour 2018

Chiffrage pour 2019

Industries intensives en énergie (suite)

Taux réduit de TICPE, TICGN et TICC au profit des installations intensives en énergie et exerçant une activité considérée comme exposée à un risque important de fuite de carbone

Objectif : éviter les délocalisations

8

11
+37,5 %

14
+27,3 %

Carburants

Réduction de taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel à l'état gazeux destiné à être utilisé comme carburant

Objectif : aider le développement du carburant-gaz

156
+0,6 %

165
+5,8 %

171
+3,6 %

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur le gaz de pétrole liquéfié (butane et propane) utilisé comme carburant non routier

Objectif : favoriser les économies d'énergie

102
=

104
+2,0 %

Suppression proposée
par l'article 19 du PLF pour 2019

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur le super sans plomb 95-E10 (incorporant jusqu'à 10 % de biocarburants)

Objectif : aider le développement des biocarburants

79

79
=

79
=

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur le gaz de pétrole liquéfié (GPL)

Objectif : aider le développement du GPL

66

67
+1,5 %

68
+1,5 %

Tarif réduit sur le superéthanol E85 (carburant essence comprenant entre 65 % et 85 % d'éthanol)

Objectif : aider le développement des biocarburants

66
-

67
+1,5 %

67
=

Réseaux d'énergie renouvelable

Taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 5,5 % pour la fourniture par réseaux d'énergie d'origine renouvelable

Objectif : augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation

57

57
=

57
=

Coût total toutes dépenses fiscales incluses 96 ( * )

2 599

2 799
(PAP)
+7,7 %
3 078
(presse)
+18,4 %

2 049
(PAP)
-21,1 %
2 170
(presse)
-16,5 %

Sources : projet annuel de performances (PAP) et évaluations préalables (EP) des articles
du projet de loi de finances pour 2019 et réponses au questionnaire budgétaire (QP)

1. Le crédit d'impôt transition énergétique : après une réforme contestable qui n'a pas produit les économies escomptées, la promesse présidentielle d'une conversion en prime se fait attendre et devrait n'être que partiellement tenue
a) Un resserrement du crédit d'impôt contestable qui n'a pas produit les économies escomptées

L'an dernier, le Gouvernement avait justifié l'exclusion des portes, volets isolants, fenêtres et chaudières fioul à haute performance énergétique par la nécessité, pour les ouvrants, de recentrer le crédit d'impôt sur les travaux et équipements jugés les plus efficients et au meilleur rapport coût-bénéfice et, pour les chaudières fioul, de ne plus soutenir l'énergie fossile la plus carbonée.

Votre commission avait doublement contesté cette décision , sur la forme et sur le fond. Sur la forme, la réforme n'avait fait l'objet d'aucune concertation et devait initialement être mise en oeuvre dans des délais très courts , dès le 27 septembre 2017. Sur le fond, votre commission avait certes convenu de la nécessité d'optimiser le rapport coût-bénéfice du crédit d'impôt - les ouvrants représentant plus de la moitié des dépenses éligibles - mais avait plaidé pour une solution plus modulée atteignant le même objectif :

- une exclusion des portes d'entrée , au regard du faible gain énergétique obtenu par leur remplacement ;

- l'instauration de taux réduits pérennes , à 15 % contre 30 % précédemment, pour les fenêtres sous condition de remplacement d'un simple vitrage et pour les chaudières fioul à haute performance .

La pérennisation de taux réduits pour ces équipements aurait en effet permis :

- en divisant par deux le taux du crédit d'impôt, de réduire son coût pour les finances publiques, à volume d'équipements identique, de 435 millions d'euros ;

- en maintenant une réduction d'impôt, d' éviter que les ménages ne se précipitent pour changer leurs équipements avant la suppression de l'avantage fiscal ;

- surtout, de maintenir une incitation à des gestes qui restent malgré tout vertueux sur le plan environnemental : même s'il génère moins d'économies d'énergie que d'autres travaux plus importants, le remplacement d'un simple vitrage par un double ou triple vitrage améliore l'efficacité énergétique du bâti et constitue souvent un point d'entrée dans un parcours de travaux ; de même, le maintien d'un taux réduit pour les chaudières fioul à haute performance aurait permis de poursuivre le renouvellement d'un parc vieillissant et d'orienter des ménages sans autre alternative 97 ( * ) vers les appareils à condensation les plus performants.

Bien qu'adopté au Sénat, le principe de taux réduits pérennes n'a finalement pas été retenu, le Gouvernement lui préférant une sortie en sifflet, au taux réduit de 15 % jusqu'au 30 juin 2018, et une exclusion définitive au-delà.

Comme c'était prévisible, l'annonce de l'exclusion à venir de ces équipements a conduit un grand nombre de ménages à anticiper leur renouvellement, et donc à majorer le coût du CITE d'environ 400 millions d'euros au total sur les exercices 2018 et 2019 , ce que n'intègrent pas les estimations figurant dans les documents budgétaires. À l'inverse, dans les réponses adressées au questionnaire de votre rapporteur, le Gouvernement tablait sur une dépense fiscale d'1,15 milliard en 2019, contre 879 millions estimés dans le « bleu » budgétaire.

Ce dérapage de la dépense fiscale , lié au manque de préparation de la réforme, est d'autant plus dommageable qu'au-delà de l'objectif affiché d'un recentrage sur les travaux et équipements jugés les plus efficients, le Gouvernement cherchait aussi à réduire la voilure du CITE pour financer la promesse présidentielle d'une conversion en prime immédiatement perceptible : l'année de sa mise en oeuvre, l'État devra à la fois financer la prime versée pour les travaux de l'année et rembourser les crédits d'impôts associés aux dépenses de l'année précédente. Avec les importantes difficultés techniques à résoudre, cette « année double » sur le plan budgétaire explique en partie le report de la réforme , désormais promise pour 2020 ( cf. infra ).

b) Un outil qui reste insuffisant pour atteindre les objectifs de réduction de la consommation énergétique et de l'empreinte carbone des logements

Même si les instruments mobilisés pour réduire la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre des bâtiments sont nombreux 98 ( * ) , le CITE est, avec le taux réduit de TVA sur les travaux de rénovation, le principal dispositif d'aide publique en termes de coût .

Or, ainsi que le notait l'an dernier la revue de dépenses sur les aides à la rénovation énergétique des logements privés 99 ( * ) , « au regard de l'effort financier réalisé, les résultats de la politique de soutien à la rénovation énergétique paraissent modestes ».

Bien que le Gouvernement estime 100 ( * ) que la mise en oeuvre du CITE aurait « permis la rénovation d'environ 15 millions de logements entre 2005 et 2018 » et évité sur la période 2008-2013 « plus de 6 millions de tonnes de gaz à effet de serre par an à l'horizon 2020 », le bilan des rénovations énergétiques reste en effet bien loin des objectifs affichés , à la fois en termes d'émissions de gaz à effet de serre et de consommation énergétique 101 ( * ) :

- alors que le bâtiment représente 20 % des émissions et plus de 40 % de la consommation finale d'énergie, le secteur a dépassé le budget carbone indicatif fixé dans la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) de 11 % en 2016 et 22 % en 2017 ;

- les gains d'efficacité énergétique restent plus faibles qu'attendu , la consommation des bâtiments diminuant seulement de 2 % entre 2012 et 2016, pour un objectif de réduction fixé à 18 % entre 2012 et 2023 dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ;

- le rythme de rénovation du parc est enfin très en deçà des objectifs , avec 288 000 rénovations énergétiques performantes conduites entre 2012 et 2014 et achevés en 2014 102 ( * ) contre une cible de 500 000 logements rénovés par an, et seuls 2,3 % des logements seraient actuellement aux normes « bâtiment basse consommation » (BBC) 103 ( * ) , là où la loi a fixé l'objectif d'un parc entièrement rénové BBC d'ici 2050.

c) Un nouveau report de la promesse présidentielle de conversion en prime qui devrait n'être que partiellement tenue

Alors que le Gouvernement avait indiqué l'an dernier que la transformation du CITE en prime aurait lieu en 2019, le projet de loi de finances pour 2019 se contente de proroger d'un an le crédit d'impôt, à périmètre inchangé, la conversion en prime étant renvoyée à 2020 .

Si votre rapporteur ne mésestime pas les difficultés budgétaires et techniques d'une telle réforme, qu'il avait déjà pointées l'an dernier 104 ( * ) , il regrette qu'après douze mois de réflexion, le Gouvernement n'ait pas réussi à les surmonter pour tenir la promesse du Président de la République dès l'an prochain, à laquelle il adhère sur le principe : en levant partiellement la contrainte d'avance des fonds, la prime devrait non seulement faciliter l'accès au dispositif des ménages aux revenus les plus modestes mais aussi avoir un effet plus incitatif que le crédit d'impôt, y compris parmi les ménages plus aisés, le tout pour un coût approchant pour les finances publiques.

Selon les éléments transmis par le Gouvernement à votre rapporteur, la réforme envisagée pour 2020 comporterait en réalité deux aspects principaux et ne mettrait que partiellement en oeuvre l'engagement présidentiel .

En premier lieu, le montant de l'aide publique ne serait plus déterminé en fonction du prix des travaux, mais fixé de façon forfaitaire , par type d'équipement ou de prestation, en fonction des économies d'énergie ou de la production de chaleur ou de froid renouvelables atteintes.

Si un tel mécanisme aurait le mérite d'orienter vers les dépenses les plus efficaces tout en évitant les effets inflationnistes parfois associés au CITE actuel, il importera de bien calibrer le montant des aides forfaitaires , en concertation avec les acteurs de la filière, et de s'assurer que le dispositif reste suffisamment compréhensible pour que les ménages se l'approprient, tout en préservant a minima le niveau global du soutien public .

En second lieu, et contrairement à la promesse présidentielle qui ne distinguait pas entre les ménages selon leurs revenus, le Gouvernement prévoirait de ne verser cette aide sous forme de prime qu'aux ménages éligibles aux aides de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), soit des ménages dont les ressources n'excèdent pas un seuil fixé, par exemple, à 27 200 euros pour un ménage composé de 2 personnes hors Île-de-France 105 ( * ) .

Pour les autres ménages, l'aide serait maintenue sous la forme d'un crédit d'impôt, remboursé avec un an de décalage . Outre qu'il déplore le non-respect de la parole présidentielle , votre rapporteur observe que :

- l'avance totale des frais peut constituer un frein, matériel voire psychologique, bien au-delà des ménages aux revenus les plus modestes ;

- combinée à la fixation d'une grille forfaitaire d'aides en euros en fonction du type de travaux, la distinction entre les modalités de versement selon les ressources du bénéficiaire viendra complexifier le dispositif, alors que l'efficacité des aides aux particuliers dépend de leur lisibilité ;

- a contrario , le versement d'une prime à tous les ménages ne coûterait pas plus cher ou guère plus pour le budget de l'État 106 ( * ) , pour un effet d'entraînement bien supérieur .

d) Deux nouvelles dépenses éligibles dès 2019 mais sous conditions de ressources

Afin d'« inciter les ménages modestes à se chauffer par le biais d'énergies renouvelables en lieu et place des énergies fossiles », le Gouvernement a ajouté, à l'Assemblée nationale, deux nouvelles dépenses éligibles au CITE :

- les coûts de main d'oeuvre pour l'installation d'équipements de chaleur renouvelable , pour un coût estimé à 75 millions d'euros , alors que le crédit d'impôt ne portait jusqu'à présent que sur le prix des équipements ou matières premières ;

- la dépose des cuves à fioul , au taux de 50 % au lieu de 30 %, pour un coût de l'ordre de 10 millions.

Il reste que :

- d'une part, et même cumulé avec le renforcement annoncé de la prime à la conversion des chaudières au fioul, le reste à charge restera très significatif compte tenu du coût important des équipements de chaleur renouvelable 107 ( * ) ;

- d'autre part, alors que le CITE était jusqu'alors sans conditions de ressources, l'éligibilité de ces deux nouvelles dépenses sera conditionnée au respect de plafonds de ressources , identiques à ceux retenus pour bénéficier des aides de l'Anah. Les classes moyennes ne pourront donc en bénéficier ; quant aux ménages aux revenus modestes, ils ne toucheront leur crédit d'impôt qu'au mieux un an après avoir réglé les travaux.

Par ailleurs, le Gouvernement avait indiqué à votre rapporteur réfléchir à deux autres pistes, l'une pour 2019 - porter à 50 % le taux du crédit d'impôt pour les audits énergétiques, jugés clés pour déclencher des travaux de qualité -, l'autre pour 2020 - élargir le CITE aux propriétaires bailleurs pour faciliter l'évolution vers des logements locatifs de qualité ; aucune de ces réflexions n'a pour le moment été concrétisée ou officialisée.

Enfin, alors qu'il semble en avoir été question, l'hypothèse de réintégrer les fenêtres dans le champ du crédit d'impôt en cas de remplacement d'un simple vitrage aurait été écartée .

2. La dépense fiscale en faveur des industries intensives en énergie reste mécaniquement portée par la hausse de la taxe carbone
a) Le coût des taux réduits de taxes intérieures de consommation suit mécaniquement la hausse de la taxe carbone

Les industries grandes consommatrices d'énergie bénéficient de deux taux réduits de taxes intérieures de consommation 108 ( * ) destinés à préserver leur compétitivité :

- le premier concerne les installations déjà soumises au marché européen d'échange de quotas d'émissions : pour éviter une double taxation de leurs émissions, le taux applicable à ces installations a été gelé à son niveau de 2013, ce qui les exonère de la taxe carbone ;

- le second vise les installations qui exercent une activité considérée comme exposée à un risque important de fuite carbone , c'est-à-dire à une forte concurrence internationale et à un risque de délocalisations vers des pays aux législations environnementales moins exigeantes. Afin de ne pas les dispenser de toute contribution carbone mais d'en limiter la charge, le taux qui leur est appliqué a été gelé à son niveau de 2014, incluant une taxe carbone de 6,50 euros la tonne de CO 2 .

À mesure que la taxe carbone intégrée aux « taux pleins » augmente, le coût théorique de ces deux taux réduits - soit l'écart entre les recettes qu'aurait pu percevoir l'État sans les réductions accordées et les recettes effectivement perçues - augmente mécaniquement, et dans les mêmes proportions .

Ainsi, de même que la taxe carbone croît à un rythme accéléré - et encore amplifié par le Gouvernement l'an dernier -, la dépense fiscale correspondante aura été multipliée par six entre 2015 et 2019 , passant d'une centaine de millions d'euros à 634 millions . Votre rapporteur constate par ailleurs la difficulté à anticiper la dépense , qui fait régulièrement l'objet de réévaluations importantes : ainsi, le coût estimé du taux réduit appliqué aux activités exposées à un risque de fuite de carbone pour 2018 est divisé par deux par rapport au coût projeté fin 2017 (de 22 à 11 millions).

Les autres taux réduits subissent logiquement le même effet lié à la hausse de la taxe carbone, dont ils attestent « en creux » du caractère massif et très rapide , qu'il s'agisse de ceux applicables au gazole routier pour le transport de marchandises (coût plus que triplé entre 2016 et 2018, de 425 millions à plus d'1,5 milliard), le transport en commun de voyageurs (plus que doublé, de 84 à 220 millions) ou les taxis (presque doublé, de 29 à 54 millions), ou au gazole non routier , dont le présent projet de loi de finances propose du reste la suppression hors secteur agricole et ferroviaire .

On peut d'ailleurs craindre que cette première suppression en appelle d'autres dans les années à venir, autant pour des considérations dites environnementales que purement budgétaires. Compte tenu de la fragilité des secteurs concernés, votre rapporteur appelle à la plus grande prudence et rappelle que le droit européen admet parfaitement de telles exonérations, totales ou partielles, à raison, notamment, « des risques de perte de compétitivité au niveau international ou de considérations sociales » 109 ( * ) .

Enfin, s'agissant des taux réduits applicables aux industries intensives en énergie, votre rapporteur tient à alerter sur la situation particulière d'un secteur de niche, celui la déshydratation de légumes , qui, bien qu'étant énergo-intensif 110 ( * ) et exposé à un risque de fuite carbone, ne peut bénéficier aujourd'hui d'un taux réduit faute d'inscription sur la liste européenne des secteurs reconnus comme exposés au risque de fuite carbone, une telle inscription supposant paradoxalement le soutien de leurs principaux concurrents européens, qui n'y ont pas intérêt. Or, sans gel de leur taxation au niveau de 2018, plusieurs des entreprises concernées sont condamnées à très brève échéance , avec autant d'emplois supprimés et de fuites carbone à la clé, alors que le mécanisme des taux réduit a précisément été mis en place pour ce type de situation . Votre rapporteur entend donc déposer 111 ( * ) un amendement pour y remédier.

b) Des dispositifs de soutien multiples qu'il est toujours aussi difficile d'appréhender dans leur globalité

Si l'objectif poursuivi, consistant à préserver la compétitivité des industries intensives en énergie et à éviter les délocalisations, est parfaitement légitime, votre rapporteur regrette, comme l'an dernier, que les nombreux dispositifs de soutien dont elles bénéficient ne soient recensés dans aucun document budgétaire transverse et que leur évaluation varie parfois fortement d'une année sur l'autre.

Outre les taux réduits rattachés au programme 174 (634 millions), ces aides comprennent :

- la « compensation carbone », qui compense à hauteur de 80 % 112 ( * ) et jusqu'en 2021 le coût du carbone inclus dans le prix de l'électricité à raison de l'existence du marché de quotas européen, pour une dépense budgétaire de 106,7 millions d'euros en 2019 (contre 99,9 millions en 2018) qui est portée par le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de mission « Économie » ;

- les trois taux réduits de contribution au service public de l'électricité (CSPE) créés lors de la budgétisation de la CSPE en remplacement de plafonnements antérieurs et rattachés au même programme 134, soit :

• 1 milliard d'euros en 2019 au titre du taux réduit de CSPE « de base » pour l'électricité consommée sur des sites ou par des entreprises industrielles électro-intensives (dépense non évaluée l'an dernier pour 2018 et estimée à 320 millions deux ans plus tôt pour 2017) ;

• 198 millions en 2019 au titre du taux réduit CSPE « majoré » pour les entreprises soumises à forte concurrence internationale, alors que l'estimation de l'an dernier était de 297 millions pour 2016, 2017 et 2018 ;

• 104 millions en 2019 au titre du taux « super-réduit » de CSPE pour les entreprises considérées comme « hyper électro-intensives » (HEI), contre 110 estimés l'an dernier.

- la réduction du tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) en contrepartie d'engagements de performance énergétique (195 millions en 2019 113 ( * ) ) et son équivalent en gaz , qui n'est pas en place à ce jour mais dont le coût était estimé par le Gouvernement à 35 millions par an pour les sites raccordés au réseau de transport 114 ( * ) ;

- la participation aux mécanismes d' interruptibilité électrique ( 96 millions estimés en 2019 115 ( * ) ) et gazière ( 12,5 millions par an 116 ( * ) , non mise en oeuvre à ce jour), pour laquelle les industries grandes consommatrices qui acceptent de voir leur alimentation coupée en cas de crise d'approvisionnement sont rémunérés ;

- enfin, la participation aux appels d'offres d' effacement de consommation électrique (22,5 millions estimés en 2019 117 ( * ) ).

Au total, l'ensemble des aides versées aux industries intensives en énergie représenterait en 2019, selon les estimations de votre commission, un coût total de près de 2,4 milliards d'euros - contre 1,3 milliard en 2017 et 1,7 milliard en 2018 -, répartis entre dépenses budgétaires (pour environ 130 millions), moindres rentrées fiscales (pour près de 2 milliards) et financements par les tarifs d'utilisation des réseaux acquittés par les autres consommateurs (pour environ 300 millions).

Au vu de l'importance des sommes en cause, comme des enjeux pour le maintien de ces industries en France, votre rapporteur réitère auprès du Gouvernement son souhait d'une analyse globale des effets de ces dispositifs , ne serait-ce qu'en termes d'emplois créés ou sauvegardés.

c) Un nouveau tarif réduit pour les data center

On signalera enfin la création, à l'Assemblée nationale, d' un nouveau tarif réduit de CSPE sur l'électricité consommée par les centres de stockage de données , sur le modèle de ceux dont bénéficient aujourd'hui les industries électro-intensives. Ce tarif réduit, fixé à 12 euros par MWh, s'appliquera au-delà d'un GWh de consommation et pour les centres pour lesquels le montant de CSPE due excèderait 2,25 % de la valeur ajoutée créée.

Si ce taux paraît justifié au regard des enjeux de souveraineté attachés à l'hébergement des données, votre rapporteur observe que son impact sur le tarif payé par les autres utilisateurs du réseau n'a pas été évalué et que ce taux réduit n'est pas conditionné à des efforts de réduction de la consommation, même si le Gouvernement a dit en séance qu'il s'attacherait à vérifier que les entreprises du secteur tiendront les engagements pris en la matière.

LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE

Le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (FACÉ) soutient pour l'essentiel les travaux de renforcement, d'enfouissement et de sécurisation des réseaux électriques engagés par les autorités organisatrices de la distribution d'électricité (AODE) (communes, établissements publics de coopération intercommunales, syndicats d'électricité) qui en ont conservé, en zone rurale, la maîtrise d'ouvrage.

En recettes , le compte est alimenté par une contribution versée par les gestionnaires de réseaux de distribution (Enedis et les entreprises locales de distribution), répercutée in fine sur les consommateurs finals d'électricité, et dont le taux, révisé annuellement par arrêté pour couvrir les charges, est modulé suivant la taille de la commune pour assurer une péréquation entre communes urbaines et rurales .

En dépenses , les crédits sont répartis en deux programmes d'importance très inégale :

- le programme 793 « Électrification rurale » (près de 99 % des crédits) consacré au renforcement des réseaux, à leur extension, à l'enfouissement et à la pose en façade des lignes ainsi qu'à la sécurisation des réseaux aériens nus ;

- le programme 794 « Opérations liées à la demande ou à la production d'électricité » (à peine plus d'1 % des crédits) qui finance l'installation d'unités de production décentralisée à partir d'énergies renouvelables dans des sites isolés, notamment en outre-mer, et des actions de maîtrise de la demande d'énergie.

Alors que le montant global des aides accordées était reconduit à l'identique jusqu'en 2017 , à 377 millions malgré une sous-consommation importante des crédits observée jusque fin 2014, la loi de finances pour 2018 l'avait ramené à 360 millions , soit une baisse de 4,5 %.

Ce montant global est conservé pour 2019 , 2,4 millions d'euros étant transférés du programme 794 vers le programme 793 pour tenir compte de la moindre consommation du premier et optimiser encore la consommation globale des autorisations d'engagements sur le prochain exercice.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 14 novembre 2018, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2019.

Mme Sophie Primas , présidente . - Nous examinons à présent le rapport pour avis sur les crédits « Énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

EXAMEN DU RAPPORT

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » . - L'examen des crédits « Énergie » du projet de loi de finances s'inscrit cette année dans le contexte particulier de la hausse des taxes sur l'énergie et de ses conséquences sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens et la compétitivité de nos entreprises. Si la mobilisation sur le sujet est nouvelle, je veux rappeler que nous n'avons pas attendu cette année pour tirer le signal d'alarme : depuis le vote fin 2015 du premier relèvement de la trajectoire carbone programmé pour 2017, notre commission dénonce l'absence de véritables mesures de compensation ; l'an dernier, avec la double accélération décidée par le Gouvernement, qui portait à la fois sur la taxe carbone et la convergence essence-diesel, nous avions encore alerté sur l'explosion de la fiscalité énergétique et prédit que les Français n'en mesureraient les effets que lorsque les prix de l'énergie remonteraient. Nous y sommes, et sans doute pour longtemps, car malgré les baisses de ces dernières semaines, tout indique que nous entrons dans une période durable de pétrole cher. C'est heureux pour la planète, car un pétrole cher incite à la modération, mais, avec la hausse de la taxe carbone, c'est la double peine !

Face à la colère légitime des Français, que répondent le Président de la République, le Gouvernement et la majorité ? D'abord, que ce ne serait pas la faute de l'exécutif : la hausse des prix viendrait, pour environ deux tiers, de l'évolution des cours mondiaux et pour un tiers seulement de la hausse des taxes. C'est exact, mais cela n'empêche pas d'agir sur ce tiers et je rappelle au passage que les taxes comptent déjà pour les deux tiers du prix à la pompe. Ils nous disent ensuite que tous les candidats à l'élection présidentielle de 2007 avaient accepté le principe d'une taxe carbone et que c'est le Gouvernement précédent qui, le premier, l'avait mise en oeuvre. Certes, mais ce n'était ni dans les mêmes proportions ni dans les mêmes conditions de compensation - les quatre premiers milliards de taxe carbone avaient ainsi été compensés par le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) et par des taux réduits de TVA. Le Sénat lui-même avait fait adopter, dans la loi de transition énergétique, le principe d'une trajectoire carbone jusqu'en 2030, mais plus progressive et surtout conditionnée à l'exigence d'une stricte compensation par la baisse d'autres taxes.

C'est donc bien le Gouvernement actuel qui a décidé l'accélération très puissante de la trajectoire l'an dernier, et qui annonce des mesures de compensation insuffisantes, quand il ne présente pas la baisse des cotisations ou celle de la taxe d'habitation comme la contrepartie de ces hausses. Au total, selon une étude récente, la politique fiscale du Gouvernement fera au moins deux catégories de perdants : les 20 % de ménages les plus modestes et les retraités des deux derniers déciles, sans compter les classes moyennes rurales ou périurbaines dont les dépenses de carburant sont plus élevées que la moyenne, voire les fonctionnaires qui ne gagneront pas à la baisse des cotisations.

Pour mesurer l'ampleur du phénomène, on peut bien sûr évoquer les grandes masses : d'ici à 2022, ce sont 46 milliards d'euros supplémentaires de fiscalité énergétique qui seront prélevés sur la richesse nationale, soit en moyenne 9,2 milliards d'euros par an, sans compter le milliard supplémentaire lié à la suppression du taux réduit du gazole non (GNR) prévue cette année. Mais au-delà de ces chiffres toujours un peu abstraits, il y a surtout des réalités très concrètes : en 2018, 30 % des Français ont restreint leur consommation de chauffage pour limiter leurs dépenses énergétiques ; depuis le début de l'année, le tarif réglementé du gaz a progressé de 24 % pour les ménages chauffés au gaz, avec une taxe en hausse de 44 % ; le prix du fioul a augmenté dans les mêmes proportions. Pour un ménage consommant 45 litres de carburant par semaine, la hausse intervenue en deux ans équivaut à environ un Smic à l'année.

On voudrait parfois réduire l'affaire à une question de ressenti, mais les chiffres sont là. Il serait commode de n'y voir, de Paris, que le mécontentement d'une France périphérique et rurale peuplée d'adeptes forcenés du diesel, insensibles aux enjeux environnementaux ou sanitaires. Nous savons qu'il n'en est rien, car lorsqu'on leur propose des alternatives crédibles, les Français s'en saisissent : le succès massif de la prime à la conversion le prouve.

Cette fiscalité est d'autant plus perçue comme injuste que son produit n'est que partiellement destiné au financement de la transition énergétique : sur les 37 milliards de TICPE attendus en 2019, 7 milliards financeront directement les énergies renouvelables et un peu plus d'1 milliard les infrastructures de transport. Sur les plus de 7 milliards de hausse intervenus depuis 2017, 82 % iront au budget de l'État tandis que la part transférée aux collectivités locales restera globalement stable. Nous serons nombreux à soutenir la proposition, déjà adoptée par le Sénat l'an dernier, d'affecter une part de taxe carbone aux collectivités locales ; encore faudra-t-il s'assurer qu'elle est bien destinée à financer des actions de transition énergétique, pour ne pas suivre le mauvais exemple donné par l'État.

L'an dernier, le Gouvernement n'avait pas caché son « objectif de rendement budgétaire » et n'avait présenté comme mesures de compensation que le renforcement de la prime à la conversion et la généralisation du chèque énergie. Dans leur périmètre actuel, ces mesures laisseraient à la charge des Français 3,1 milliards de pression fiscale supplémentaire au titre de leurs dépenses d'énergie en 2018, et près de 5,9 milliards sur 2018 et 2019.

Cette année, le Gouvernement a d'abord revu sa communication, en insistant tantôt sur l'objectif de lutte contre le changement climatique, tantôt sur l'enjeu de santé publique, puis en rapportant ces hausses à d'autres grandes masses : parfois à l'ensemble des baisses décidées par ailleurs, d'autres fois à l'ensemble des mesures de soutien à la transition, y compris celles qui préexistaient ou dont le Gouvernement a réduit la voilure, comme le crédit d'impôt transition énergétique (CITE). Constatant que ces explications étaient sans effet sur l'opinion, l'exécutif a fini par envisager des mesures de compensation nouvelles dont le détail s'est fait attendre et dont on sait un peu plus depuis ce matin. Il est désormais question d'une surprime à la conversion de 4 000 euros pour les 20 % de Français les plus modestes, d'un élargissement de l'indemnité kilométrique aux petites cylindrées, d'une extension du chèque énergie à 2 millions de personnes supplémentaires, d'un renforcement de la prime à la conversion des chaudières fioul ou encore de défiscaliser les aides des collectivités ou d'accélérer la mise en place du forfait mobilité versé par les employeurs.

Si l'analyse méritera d'être affinée, je pense que la surprime à la conversion et l'extension du chèque énergie vont dans le bon sens, mais que ces mesures, dont le coût budgétaire annoncé est de 500 millions d'euros, restent loin de couvrir l'explosion des taxes, qui se poursuivrait du reste l'an prochain. J'ajoute que certaines des mesures annoncées consistent à faire payer par d'autres l'effet des décisions prises par l'État : ce sera le cas de la prime renforcée à la conversion des chaudières fioul, qui renvoie en fait au dispositif des coups de pouce liés aux certificats d'économies d'énergie (C2E) financés par les vendeurs d'énergie, et qui sont d'une façon ou d'autre répercutés sur les consommateurs, mais aussi des aides des collectivités ou du forfait mobilité. Quant à l'indemnité kilométrique, son effet restera modeste.

Je déborde sans doute du cadre budgétaire, mais en répondant de façon trop timide à la colère des Français, le Gouvernement prend deux risques : un risque économique - les hausses de taxes auront des conséquences sur le moral des ménages, et donc sur la croissance - et un risque politique, lié à la montée des tensions dans le pays et aux tentatives de récupération du mouvement de contestation par les extrêmes.

Les choses ne sont d'ailleurs pas aussi simples que le Gouvernement le dit sur deux points. Lorsqu'il affirme vouloir taxer la pollution plutôt que le travail, il oublie que les Français ne se déplacent pas pour le plaisir de polluer, mais, notamment, pour se rendre au travail ; avec ces taxes supplémentaires, le travail paie donc moins. En outre, le bénéfice environnemental de cette politique n'est pas avéré : se fonde-t-on sur l'analyse du coût environnemental complet du remplacement d'un véhicule déjà amorti par un nouveau, sans compter qu'un ancien diesel consomme généralement moins qu'une essence, même récente ? Compare-t-on les coûts complets du thermique et de l'électrique sur l'ensemble du cycle de vie, de la fabrication au recyclage ? Les réponses apportées par le Gouvernement me permettent d'en douter.

Que pouvons-nous faire de notre côté ? Il ne s'agit pas de revenir sur le principe même de la taxe carbone, qui est bon, mais de constater que le signal prix est déjà suffisant pour faire changer les comportements quand on dispose d'alternatives ; je rappelle d'ailleurs qu'avec la hausse accélérée appliquée cette année, le prix de la tonne de carbone est déjà en 2018, à peu de choses près, celui qui était prévu pour 2019. L'enjeu n'est donc pas de revenir sur les hausses déjà appliquées, mais de geler, compte tenu de la hausse des cours mondiaux, la fiscalité énergétique à son niveau de 2018. Sans cela, 6,5 centimes supplémentaires par litre de gazole et 2,9 centimes par litre d'essence s'appliqueront au 1 er janvier prochain.

Tel est le sens de l'amendement que je présenterai en première partie, en mon nom puisque la commission n'en est pas saisie pour avis, sachant que le rapporteur général de la commission des finances devrait défendre la même position. Je proposerai aussi le maintien du taux réduit pour le GNR, car sa disparition alourdirait de près d'1 milliard les charges de secteurs tels que l'industrie extractive ou le BTP, qui n'ont à ce jour que peu ou pas d'alternative ; du reste, s'ils parviennent à les répercuter dans leurs prix, ce sont leurs clients, dont les collectivités publiques, qui en souffriront. En lien avec le poids croissant de la fiscalité énergétique, je vous proposerai aussi plusieurs mesures d'accompagnement et d'aide à la transition pour nos concitoyens, pour les secteurs économiques et les territoires les plus impactés.

J'en viens aux crédits « Énergie ». Je rappellerai d'abord que le budget n'épuise pas les sujets énergétiques. En dépit de la budgétisation de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) votée fin 2015, il reste des dispositifs extrabudgétaires, à commencer par les C2E, qui représenteront 9 milliards d'euros entre 2018 et 2020 et se retrouvent dans les prix - ils comptent déjà, par exemple, pour 3 centimes par litre de carburant. Ensuite, les outils de programmation qui déclinent les objectifs fixés par la loi ne relèvent pas du législateur et se déploient aussi au niveau local, en particulier au travers des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), voire des zones à faible émission (ZFE) que les collectivités peuvent décider de mettre en place. Le bannissement des vieilles voitures annoncé dans le Grand Paris en témoigne. Enfin, des mesures énergétiques sont disséminées au gré des textes législatifs.

En 2019, les dépenses de soutien aux énergies renouvelables (EnR) continueront de progresser fortement, avec une hausse de 7,8 %, pour atteindre environ 7,3 milliards d'euros ; 5,2 milliards seront consacrés aux EnR électriques et 1,8 milliard au remboursement de la dette de CSPE vis-à-vis d'EDF, pour financer ces énergies. Cette progression tiendra bien sûr à la poursuite du développement des filières mais aussi au poids des engagements passés : l'an dernier, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) avait calculé que les deux tiers du soutien public actuel résultaient de décisions prises avant 2011, en particulier avant le moratoire sur le photovoltaïque. Cette année, elle estime que les engagements pris jusqu'à la fin 2017 représenteront 121 milliards d'euros, en euros courants, entre 2018 et l'échéance des contrats ; sans engagements nouveaux, la charge annuelle culminera en 2025 et ne baissera significativement qu'après 2030, pour s'éteindre à l'horizon 2045.

Je veux dire un mot sur le biométhane injecté : même si les volumes sont encore modestes - moins de 1 % du gaz consommé en 2017 -, ils ont été multipliés par dix depuis 2015 et les soutiens devraient encore doubler en 2019 pour atteindre environ 130 millions d'euros. Quant aux dépenses de cogénération, elles continueront également de progresser et atteindront 725 millions d'euros en 2019, du fait de nouvelles capacités installées et des hausses de taxes sur le gaz et des prix de marché.

Il reste que, malgré les investissements consentis et le développement très significatif observé au cours des dernières années, la part des ENR dans la consommation d'énergie, passée de 9,6 % à 16 % entre 2005 et 2016, reste en deçà de la trajectoire requise pour atteindre la cible de 23 % fixée pour 2020, qui ne sera probablement pas atteinte.

Sur le plan industriel, le bilan ne paraît pas non plus à la hauteur des subventions versées, comme la Cour des comptes l'a récemment souligné. Si les EnR ont des retombées économiques réelles - 21,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2016, toutes activités confondues, en incluant le soutien public -, la valeur des investissements français dans les équipements fabriqués en France n'était que de 1,4 milliard d'euros en 2016, soit 6,6 % du chiffre d'affaires total. Dans les EnR électriques, les industries françaises couvrent moins de la moitié de la valeur ajoutée des investissements et moins de 25 % de la fabrication.

En 2016, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) évaluait le nombre d'emplois directs liés aux EnR, hors biocarburants, à 79 000, dont 35 % à 45 % pour la maintenance et l'exploitation, 25 % à 30 % pour l'installation et 15 % seulement pour la fabrication et l'assemblage. Ces emplois étaient répartis à 42 % dans les EnR électriques et à 58 % dans les EnR thermiques.

Pour repositionner la France dans la chaîne de valeur, plusieurs pistes doivent à mon sens être explorées : dans les filières existantes, les soutiens publics devraient être rééquilibrés au profit des énergies renouvelables thermiques qui, outre le fait qu'elles sont globalement plus pourvoyeuses en emplois, ont de plus le mérite d'être pilotables, d'exploiter la forêt française pour le bois-énergie ou de générer des revenus complémentaires pour les agriculteurs au travers de la méthanisation. Je vous proposerai d'ailleurs d'augmenter le Fonds chaleur de l'Ademe et de réduire la TVA sur le bois-énergie de qualité. Dans les filières innovantes, la France a une carte à jouer à la fois dans les technologies de rupture, notamment en matière de stockage ou de gestion intelligente de l'énergie, et dans l'éolien flottant, même s'il importera d'en maîtriser les coûts.

Plus généralement, les critères environnementaux, tels que le bilan carbone des panneaux photovoltaïques, devraient être renforcés dans les appels d'offres, voire étendus aux arrêtés tarifaires, parce qu'ils permettent de déployer des technologies plus respectueuses de l'environnement tout en favorisant, indirectement, les industries françaises et européennes.

Pour conclure cette partie sur les EnR, je rappelle que les mécanismes actuels d'autorisation budgétaire ne permettent pas au Parlement de consentir à l'impôt de façon éclairée ; sans loi de programmation, nous en sommes réduits à approuver, sans pouvoir l'influencer, la tranche annuelle d'engagements pluriannuels qui résultent d'un décret portant programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), à l'élaboration duquel le Parlement est très peu associé.

J'en arrive aux dépenses de solidarité en direction, à la fois, des bénéficiaires du régime de l'après-mines, des zones non interconnectées (ZNI) ou des consommateurs en situation de précarité énergétique. Je ne dirai qu'un mot de l'après-mines, dont l'enveloppe, fixée à 360 millions d'euros en 2019, décline logiquement, avec une baisse de 7,8 %, à mesure de la disparition progressive des anciens mineurs et de leurs ayants droit.

Les dépenses liées à la péréquation tarifaire pour les ZNI sont très dynamiques : entre 2017 et 2019, elles devraient progresser de 11,8 % et atteindre près de 1,6 milliard d'euros, du fait de la hausse des prix des matières premières et des quotas de dioxyde de carbone (CO 2 ), de la mise en service de nouveaux moyens de production renouvelable et d'une augmentation de la consommation dans certains territoires. En raison des investissements prévus par les PPE de ces territoires, les dépenses devraient rester durablement orientées à la hausse, d'où l'appel à la vigilance du régulateur pour éviter d'éventuelles surcapacités.

Les dépenses de protection des consommateurs précaires, après avoir connu une hausse de près de 60 % l'an dernier, liée à la généralisation du chèque énergie, se stabiliseraient à 740 millions d'euros en crédits de paiement, compte non tenu de l'extension annoncée ce matin, qu'il nous faudra chiffrer ; la revalorisation du montant moyen du chèque à hauteur de 50 euros serait compensée sur l'année par l'extinction des tarifs sociaux, même si l'évaluation des coûts est en réalité très dépendante du taux d'utilisation effectif du chèque énergie.

Ainsi, selon les hypothèses optimistes d'utilisation du chèque énergie retenues par le Gouvernement - 90 % en 2018 et 95 % en 2019, contre moins de 78 % lors de l'expérimentation -, le chèque énergie représenterait, dans son périmètre actuel, un surcoût par rapport aux tarifs sociaux de l'ordre de 60 millions d'euros en 2018 et de 260 millions en 2019, le tout pour un montant d'aides moyen supérieur, bien qu'il y ait des perdants, principalement les ménages chauffés au gaz. Le nombre de bénéficiaires supplémentaires resterait faible, même en retenant ces hypothèses favorables - 3,3 millions en 2018, soit autant que les tarifs sociaux avant leur disparition, et 3,5 millions en 2019 -, et encore ne retient-on pas le chiffre de 560 000 personnes n'encaissant pas le chèque évoqué par le ministre chargé du budget lui-même, soit un taux d'utilisation de 85 %. L'extension annoncée à 2 millions de personnes supplémentaires paraît donc plus que nécessaire...

Au-delà des difficultés d'appropriation par les ménages, le chèque énergie comporte un autre écueil, celui de ne pas aider au financement de travaux de rénovation énergétique : durant l'expérimentation, sur les 170 000 chèques distribués, moins d'une centaine avaient été utilisés à cette fin. Il est très probable qu'il en sera de même à l'échelle de tout le territoire, car le montant du chèque, même cumulable sur trois ans, reste trop faible pour déclencher, à lui seul, une opération de rénovation. C'est pourquoi je vous proposerai de doubler le montant du chèque énergie pour travaux.

Je signale par ailleurs l'absence très dommageable de deux dispositifs d'aide. Le premier, les afficheurs déportés, devrait pourtant être en vigueur depuis le 1 er janvier dernier, mais aucun n'a été déployé à ce jour, faute de décision du Gouvernement sur les modalités de compensation des fournisseurs. Le second, sur lequel le Gouvernement n'a même pas remis le rapport demandé par le Sénat, vise les ménages précaires dont la chaudière ne pourra être adaptée au changement de gaz distribué dans le nord de la France ; là aussi, je vous proposerai un amendement pour y remédier.

L'année 2019 sera aussi marquée par un premier décaissement de 91 millions d'euros pour couvrir les coûts de la fermeture de Fessenheim, sur les 446 millions d'euros déjà budgétés mais non encore dépensés. Plus la fermeture sera retardée, moins l'État aura à dépenser pour compenser le manque à gagner pour EDF. Le projet de loi de finances crée par ailleurs un fonds de compensation des pertes fiscales liées aux fermetures de centrales nucléaires et thermiques, qui organise en réalité une péréquation entre collectivités ayant de telles centrales sur leur territoire. En d'autres termes, celles qui les conservent paieront pour celles qui les perdent, et aucune aide supplémentaire de l'État n'est prévue par rapport au mécanisme de perte de base actuel.

De plus, alors que les quatre dernières centrales à charbon fermeront d'ici à 2022, aucune ligne budgétaire comparable à celle prévue pour Fessenheim n'existe aujourd'hui pour indemniser et accompagner ces fermetures, alors que les projets de revitalisation industrielle des sites doivent se penser dès maintenant ; je vous proposerai donc de la créer.

Quant aux dépenses fiscales, elles devraient théoriquement refluer en 2019 pour atteindre environ 2 milliards d'euros, en raison du resserrement du CITE décidé l'an dernier. En réalité, le surcroît de commandes de fenêtres observé jusqu'à la suppression du crédit d'impôt augmentera la dépense d'au moins 400 millions d'euros en 2018 et en 2019. Quant à la transformation, promise l'an dernier, du CITE en prime, elle est désormais reportée à 2020 et, surtout, contrairement à l'engagement présidentiel, elle ne devrait concerner que les ménages les plus modestes, sans doute sous la forme d'une bonification des aides de l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Les autres ménages devraient toujours faire l'avance des frais, le tout prenant la forme de montants forfaitaires selon les économies réalisées ; la réforme s'annonce donc bien complexe...

Pour 2019, le Gouvernement dit toujours travailler à plusieurs pistes, dont on attend toujours la concrétisation et qui n'ont pas toutes été abordées ce matin : il envisage de rendre éligibles la dépose des cuves à fioul et la main d'oeuvre pour les installations de chaleur renouvelable ou de porter à 50 % le taux du crédit d'impôt pour les audits énergétiques, le tout pour une dépense supplémentaire inférieure à 100 millions d'euros, voire de réintroduire les fenêtres dans le dispositif en cas de remplacement d'un simple vitrage, ce que le Sénat avait proposé l'an dernier et que le Gouvernement avait à l'époque refusé...

Je veux dire quelques mots pour finir des dispositifs de soutien aux industries intensives en énergie ; ceux-ci excèdent largement les seuls tarifs réduits de taxes intérieures de consommation financés par la mission à hauteur de 634 millions d'euros. Ils représenteraient près de 2,4 milliards d'aides sous des formes diverses. Je signale qu'un tarif réduit pour l'électricité consommée par les data centers a été ajouté à l'Assemblée et j'en profite pour alerter sur la situation particulière d'un secteur de niche, celui de la déshydratation de légumes, qui concerne quatre entreprises et au moins un millier d'emplois en France. Bien qu'étant intensif en énergie et exposé à un risque de fuite de carbone, ce secteur ne bénéficie aujourd'hui d'aucun tarif réduit, faute d'être inscrit sur la liste européenne des secteurs protégés. Or, sans gel de leur taxation au niveau de 2018, plusieurs des entreprises concernées sont condamnées à très brève échéance. Je déposerai donc un amendement pour les défendre.

Sous la réserve, forte, de l'adoption du gel de la fiscalité énergétique et de ces mesures de compensation supplémentaires, je vous propose d'adopter les crédits de la mission.

M. Roland Courteau . - Je constate la stabilité générale des crédits et quelques légères hausses. Compte tenu de la tragédie écologique à laquelle nous commençons d'assister, on aurait pu s'attendre à un budget plus ambitieux.

La fiscalité écologique est nécessaire à la transition, mais je déplore l'insuffisance des mesures de compensation pour les ménages ne pouvant se passer de voiture ou de chauffage par énergie fossile. La transition énergétique doit être socialement inclusive. Nous déposerons un amendement tendant à instaurer une TICPE flottante pour compenser la hausse du cours du pétrole, et un amendement visant à rendre le chèque énergie plus consistant. Sous la pression des événements, le Gouvernement a proposé des mesures que le Sénat suggérait voilà quelques semaines. Cela dit, malgré ces annonces, le compte n'y est pas.

Je m'interroge sur l'utilisation des prélèvements écologiques supplémentaires. Même s'il ne s'agit pas de taxes affectées, il serait logique que ces crédits soient fléchés vers l'environnement et la transition plutôt que vers le budget général.

L'augmentation du Fonds chaleur de l'Ademe a été annoncée ; confirmez-vous cette annonce, monsieur le rapporteur ? Si c'est le cas, j'espère que cela ne se fera pas au détriment des autres fonds de l'Ademe. Pouvez-vous me rassurer à cet égard ?

La hausse des crédits relatifs à la qualité de l'air ne nous permettra pas d'atteindre nos objectifs, alors que de nombreux citoyens meurent prématurément à cause de cela.

Je regrette aussi l'inéligibilité au CITE des portes, fenêtres et volets isolants, ainsi que l'absence de transformation de ce crédit d'impôt en prime, qui aurait permis aux ménages modestes de rénover leur logement. Il y a huit millions de logements passoires aujourd'hui ; flécher les recettes de la taxation du carbone vers un CITE pour tous n'aurait été que justice.

Si l'autoconsommation se développe fortement, il faudra réformer le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE), en augmentant la part puissance et en diminuant la part énergie, faute de quoi la charge sera trop élevée pour ceux qui utiliseront uniquement l'électricité du réseau. Attention, à cet égard, à ne pas tuer la péréquation et la solidarité entre territoires, quand certains rêvent d'autarcie énergétique.

Autre déception, la diminution des soutiens publics à la recherche sur le stockage de l'électricité. Je souhaite aussi que le Parlement contrôle la mise en oeuvre des certificats d'économie d'énergie et le suivi des dépenses induites. Enfin, pourquoi ne pas inviter le Gouvernement à lancer un nouvel appel à projets de territoires à énergie positive, puisque le précédent a montré son efficacité ?

M. Joël Labbé . - La situation que nous connaissons est prévue depuis plus de vingt ans. De nombreuses personnes ont tiré la sonnette d'alarme sur le tout-voiture, le tout-diesel. Nous sommes en situation d'urgence sociétale. Je m'inquiète du mouvement de samedi prochain, de ce soulèvement populaire.

Le Gouvernement annonce d'autres mesures complémentaires. La fiscalité carbone est nécessaire et elle ne diminuera pas. La consommation des énergies fossiles doit baisser drastiquement et rapidement, c'est une nécessité vitale pour tous. Je suis effaré de la quantité de publicités pour les voitures ; pourquoi ne pas taxer ces publicités ?

Par ailleurs, il faut envoyer des signaux de justice aux gens qui souffrent. On ne parle pas du kérosène, qui concerne les déplacements des classes aisées ; toute une partie de la population ne prendra jamais l'avion, pourquoi ne pas taxer le kérosène ?

Il en va de même avec le fioul lourd des bateaux de croisière et des porte-conteneurs. On se dirige vers une relocalisation de l'économie, donc taxer le fioul lourd serait une bonne mesure. De même, la question des fenêtres touche beaucoup la population.

M. Laurent Duplomb . - Notre système purement français d'écologie punitive monte les gens les uns contre les autres, et, maintenant, on a peur que cela déborde. Il faut avoir une politique juste et de long terme. Comment expliquer que l'on taxe plus le diesel aujourd'hui alors qu'on a encouragé pendant des années à acheter des voitures diesel ? Comment expliquer qu'une si faible part des taxes perçues aille vers la transition énergétique ? Comment expliquer que la moitié des aides à la transition énergétique aient été supprimées ?

Je le rappelle : la France est responsable de 0,9 % des émissions de CO 2 sur la planète, et ses émissions ont baissé de 14 % entre 1990 et 2015. La Chine émet 29,7 % du CO 2 de la planète et ses émissions ont augmenté de 355 % sur la même période.

Enfin, dernier chiffre, sur le continent asiatique, on enregistre 2,58 naissances à la seconde. Alors, montons-nous les uns contre les autres, n'écoutons pas la colère des Français, et on aboutira à une situation bien pire.

Mme Anne-Catherine Loisier . - La fiscalité écologique cible toujours les mêmes et je suis d'accord avec M. Labbé sur la fiscalité du kérosène et du fioul lourd. Pourquoi les activités portuaires et aéroportuaires ne participent-elles pas à l'effort de fiscalité écologique ? Les ressources considérables induites permettraient d'aider les particuliers, en particulier pour se rendre au travail. Par ailleurs, l'indexation du prix du gaz sur le pétrole est-elle toujours pertinente ?

M. Robert Navarro . - Monsieur Duplomb, vous parlez de monter les Français les uns contre les autres, mais je vous renvoie à votre intervention d'hier dans l'hémicycle réclamant plus de crédits pour les pompiers volontaires. Vous demandez plus d'argent alors que l'on sait que le principal problème de notre pays réside dans ses finances. Je regrette que l'on demande toujours plus d'argent à tout sujet. Que l'on ait des différences d'approche, certes, mais il faut arrêter de jeter l'opprobre en affirmant que tel ou tel a complètement tort ; la vérité est toujours relative et éphémère. Nous devons construire un objectif commun pour notre pays. Je demande donc de la modération dans les interventions.

M. Fabien Gay . - Je veux réagir à ce que vient de dire M. Navarro. Pour moi, ce budget éclaire les choix politiques du Gouvernement. On ne peut pas dire que l'on manque d'argent quand on tape les familles populaires d'une fiscalité maquillée en vert. Moins de 20 % seulement de la fiscalité est consacrée à l'écologie. Je ne déconnecte pas cette mission du reste du budget, partie recettes comprise. Sous prétexte de transition énergétique - le Gouvernement se moque bien de l'écologie -, on taxe l'essence, le gaz, le fioul domestique. Je le rappelle, 13 % de personnes sont en difficulté énergétique ; augmenter le prix du gaz va les mettre encore plus dans l'embarras. Je suis d'accord, on doit taxer davantage le kérosène, les croisiéristes, Total. Ce sont des choix de société.

18 millions de citoyens vivent en zone blanche de transport public, non seulement dans les territoires ruraux mais aussi en Seine-Saint-Denis. On a fait le choix politique de ne pas développer les transports publics ; le pacte ferroviaire a conduit à la fermeture de petites gares. Certains collègues l'ont soutenu mais ont défendu dans leur territoire le maintien du guichet dans leur petite gare. Il faut être cohérent...

Mme Sophie Primas , présidente . - On doit raisonner à l'échelle européenne sur la fiscalité pour ne pas mettre la France en difficulté par rapport à ses voisins européens.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - Sur le Fonds chaleur de l'Ademe, je suis d'accord avec M. Courteau, il ne faut pas que l'abondement du fonds se fasse par le recyclage d'autres moyens. C'est précisément la raison pour laquelle je vous propose d'abonder le budget de l'Ademe de 100 millions d'euros supplémentaires.

Il me semble que notre commission, notamment lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, a été visionnaire sur la stratégie énergétique et sur les attentes de nos concitoyens, notamment sur la rénovation énergétique des logements.

Sur l'autoconsommation, je suis là aussi parfaitement d'accord. Si l'on s'engouffre dans cette pratique sans l'encadrer, c'est la solidarité territoriale qui sera menacée, alors qu'elle est exemplaire et précieuse - où que l'on se trouve sur le territoire, on bénéficie du même tarif - et qu'il faut la préserver. Il faudra sans doute en passer par une réforme du TURPE.

Sur l'idée consistant à relancer un appel à projets de territoires à énergie positive, soyons prudents et faisons déjà en sorte que les projets déjà engagés soient bien financés. L'an dernier, nous n'avions pas cette certitude...

Monsieur Labbé, il faut faire attention à ne pas se faire trop plaisir. On peut faire baisser le budget carbone en France mais si c'est au prix d'une explosion du carbone importé, ce sera un jeu de dupes.

Monsieur Duplomb, je suis d'accord, prenons garde à cette écologie punitive.

Madame Loisier, la question de la taxation du kérosène est stratégique mais elle ne peut être abordée qu'à l'échelon mondial. Il ne faudrait pas détourner le trafic aérien du territoire français. Ayons au moins une réflexion européenne.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Même les États-Unis taxent leur trafic intérieur.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - Monsieur Gay, je partage votre constat. L'énergie est un tout. Elle influe sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens et sur la performance économique du pays. Derrière le dossier énergétique, il y a la balance commerciale et l'emploi. Et je rappelle que beaucoup de personnes n'ont aujourd'hui pas d'autre choix que le véhicule individuel pour se déplacer et pour aller travailler, y compris en milieu urbain. Pensons aussi à eux.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 39

ÉTAT B

M. Daniel Gremillet rapporteur pour avis . - L'amendement AFFECO.1 propose d'augmenter de 100 millions d'euros le budget du Fonds chaleur de l'Ademe, ce qui le porterait à 315 millions en 2019.

M. Roland Courteau . - Nous voterons pour cet amendement.

L'amendement AFFECO.1 est adopté.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - L'amendement AFFECO.2 est relatif aux fermetures de centrales thermiques ; quatre d'entre elles fermeront très prochainement. Je propose de créer une ligne relative à l'accompagnement de ces fermetures, dotée de 40 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 2 millions d'euros en crédits de paiement pour 2019, afin d'engager la reconversion de ces sites dès maintenant.

Mme Sophie Primas , président e. - Ces crédits sont très importants ; pour l'avoir vécu, je peux dire que ces fermetures représentent des drames territoriaux.

L'amendement AFFECO.2 est adopté.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - L'amendement AFFECO.3 concerne le nord de la France, où les chaudières des gaz datant d'avant 1993 doivent être remplacées, car elles ne seront plus compatibles avec le gaz fourni - c'était jusqu'à présent du gaz venu des Pays-Bas qui était distribué. Je vous propose de prévoir 26 millions d'euros de crédits supplémentaires pour aider les ménages en situation de précarité énergétique à remplacer les appareils non adaptables.

L'amendement AFFECO.3 est adopté.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - Enfin, l'amendement AFFECO.4 entend doubler le montant du chèque énergie lorsqu'il est utilisé pour financer des travaux, ce qui, cumulé sur trois ans et sur la base de son montant moyen, le porterait à 1 200 euros. Le chèque est en effet très peu consommé aujourd'hui pour cet usage, car son montant est trop faible par rapport au coût des travaux.

M. Roland Courteau . - Nous voterons pour cet amendement. Nous proposerons un amendement procédant de la même démarche mais allant un peu plus loin. Nous pensons que le seuil d'éligibilité est trop faible ; il faut l'augmenter.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - Votre demande devrait être satisfaite, puisque le Gouvernement a proposé ce matin d'élargir l'accès au chèque énergie. On devrait ainsi atteindre 2 millions de bénéficiaires supplémentaires.

L'amendement AFFECO.4 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sous réserve de l'adoption de ses amendements.

M. Daniel Gremillet , rapporteur pour avis . - Je rappelle que notre commission n'est saisie pour avis et ne peut amender que la deuxième partie du projet de loi de finances. Je déposerai des amendements sur la première partie en mon nom propre et proposerai bien entendu à ceux qui le souhaitent de les cosigner. Il s'agira en particulier du gel des taxes en 2019 et du maintien du taux réduit sur le GNR.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mercredi 31 octobre 2018 :

- Primagaz : MM. Steven Sels , directeur général, et Ludovic Pero , directeur des affaires publiques ;

- Daregal et Sodeleg : MM. Charles Darbonne , président-directeur général de Daregal, et Jean-Xavier Lévêque , directeur général de Sodeleg, Mmes Karima Kaci , secrétaire générale de l'Association des entreprises de produits alimentaires élaborés, et Ludivine Dolignon , responsable énergie de Sodeleg, et M. Pierre-Damien Grosjean , consultant senior chez Atlas Public Affairs ;

- Shell : M. Cédric Thoma , responsable des relations institutionnelles, et Mme Chantal Soubigou , responsable GTL.

Mercredi 7 novembre 2018 :

- EDF Énergies renouvelables : MM. Bruno Bensasson , directeur exécutif Groupe Énergies renouvelables, et Bertrand Le Thiec , directeur des affaires publiques ;

- Groupe Avril : MM. Stéphane Yrles , secrétaire général, et Maxime Sagot , consultant chez GPLUS ;

- Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) : M. Laurent Michel , directeur général.

Jeudi 8 novembre 2018 :

- Syndicat des énergies renouvelables (SER) : MM. Jean-Louis Bal , président, et Alexandre Roesch , délégué général, Mme Delphine Lequatre , responsable du service juridique, et M. Alexandre de Montesquiou , consultant ;

- Union française des industries pétrolières (Ufip) : MM. Francis Duseux , président, et Bruno Ageorges , directeur des relations institutionnelles et des affaires juridiques ;

- Commission de régulation de l'énergie (CRE) : MM. Jean-Louis Carenco , président, Christophe Leininger , directeur du développement des marchés et de la transition énergétique, Brieuc Petit , chargé de mission, et Mme Olivia Fritzinger , chargée des relations institutionnelles ;

- Fédération des services énergie environnement (FEDENE) : MM. Pascal Roger , président, Frédéric Gharbi-Mazieux , responsable des affaires institutionnelles, juridiques et territoriales, et Nicolas Trouvé , associé cofondateur de Cilab ;

- Association française indépendante de l'électricité et du gaz (Afieg) : M. Marc Boudier , président, Mmes Clémentine Pinet , secrétaire générale, et Emmanuelle Carpentier , présidente du collège Production, Uniper, et M. Paul Fouan , Collège gaz, Endesa.


* 1 Qui représente environ 300 millions de recettes supplémentaires chaque année du fait de la hausse de la TICPE sur laquelle elle est prélevée.

* 2 Sans compter les 980 millions supplémentaires liés à la suppression du taux réduit sur le gazole non routier (GNR) prévue cette année.

* 3 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2018, article 9, p. 70.

* 4 Votre rapporteur rappelle par ailleurs que depuis 2017, le budget général de l'État est abondé par une autre taxe, la contribution au service public de l'énergie (CSPE), dont les deux tiers du produit finançaient jusque-là directement, pour environ 5 milliards, les énergies renouvelables. En d'autres termes, l'État renonce à environ 7 milliards de TICPE pour financer les énergies renouvelables mais récupère 5 milliards de CSPE précédemment destinés au même usage.

* 5 Pour le détail du calcul, se reporter au II du présent rapport.

* 6 Péréquation tarifaire électrique avec les zones non interconnectées.

* 7 Chèque énergie, pour l'essentiel.

* 8 À la demande de la Commission européenne, qui jugeait que la CSPE perçue sur l'électricité importée mais finançant uniquement l'électricité renouvelable française était assimilable à un droit de douane incompatible avec les traités car favorisant les produits nationaux.

* 9 Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE, ex-TIPP) et, résiduellement, taxe intérieure de consommation sur le charbon (TICC) pour 1 million.

* 10 Dont le produit est donc ainsi réparti : 17 milliards pour l'État, 12,3 pour les collectivités territoriales, 7,2 milliards pour le CAS « transition énergétique » et 1,2 pour l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

* 11 Financement de projets nouveaux et tranche annuelle des subventions versées aux projets existants sous contrats d'achat ou de complément de rémunération, pour le présent ; remboursement du défaut de compensation à EDF et engagements pris auprès de la Commission européenne au titre de l'année 2016, pour le passé.

* 12 CRE, délibération n° 2017-169 du 13 juillet 2017.

* 13 Incluant les dépenses de soutien aux énergies renouvelables et à la cogénération.

* 14 Cour des comptes, enquête sur le soutien aux énergies renouvelables, mars 2018.

* 15 Charges constatées par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) au titre de 2017.

* 16 Charges prévisionnelles mises à jour par la CRE au titre de 2018.

* 17 Dans le cas d'un contrat d'obligation d'achat, l'acheteur obligé est compensé pour la différence entre le coût d'achat de l'énergie et le coût qui lui est évité par l'acquisition de cette énergie sur le marché ; dans le cas du complément de rémunération, où le producteur commercialise directement son énergie sur le marché, c'est l'écart entre le revenu tiré de cette vente et le niveau de rémunération de référence qui est compensé par le versement d'une prime.

* 18 Panorama de l'électricité renouvelable au 30 juin 2018, RTE, SER, Enedis et ADEeF.

* 19 À l'exception des centrales d'incinération.

* 20 CRE, annexe 1 de la délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018, à partir des hypothèses fournies et justifiées par EDF en métropole continentale.

* 21 En 2014, la CRE rappelait que le parc photovoltaïque installé à fin 2013 représenterait le quart des 100 milliards de surcoûts cumulés entre 2014 et 2025.

* 22 Encore attestée par le résultat de l'appel d'offres multi-technologique annoncé le 6 novembre 2018 : alors qu'étaient mis en concurrence les grandes centrales solaires au sol et les projets éoliens terrestres, l'ensemble des projets lauréats sont des centrales solaires photovoltaïques, plus compétitives que les projets éoliens déposés ; au total, 202,5 MW ont été attribués, pour un prix moyen de 54,94 euros par MWh.

* 23 Les tarifs d'achat prévisionnels moyens et les hypothèses de développement sont ceux retenus par EDF en métropole continentale.

* 24 Source : Bilan gaz 2017, GRTgaz.

* 25 À rapporter aux 592 unités de méthanisation en France au 31 décembre 2017.

* 26 Sources : Panorama du gaz renouvelable 2017, GRTgaz, Tableau de bord : biométhane injecté dans les réseaux de gaz, service de la donnée et des études statistiques (SDES), mai 2018, et site injectionbiomethane.fr.

* 27 En 2017, le prix moyen d'achat du biométhane injecté était de 100 euros/MWh PCS (pouvoir calorifique supérieur) contre un prix moyen du gaz naturel sur les marchés français de 18 euros/MWh PCS.

* 28 Source : Renforcer la compétitivité de la filière biométhane française, cabinet Enea, synthèse, octobre 2018.

* 29 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité.

* 30 Selon les réponses du Gouvernement au questionnaire budgétaire de votre rapporteur.

* 31 Ce dispositif, défini par décret en mars 2017, requérant toujours l'approbation de la Commission européenne au titre de son contrôle des aides d'État.

* 32 Et la TICGN.

* 33 Le renforcement des interconnexions facilitant l'importation d'énergies renouvelables étrangères.

* 34 À défaut d'arrêté ministériel, le montant unitaire de la CSPE était automatiquement reconduit d'une année sur l'autre puis, à compter de 2011, majoré d'au plus 3 euros par MWh et par an sur la base du montant proposé par la CRE.

* 35 Les autres acheteurs obligés (entreprises locales de distribution et Électricité de Mayotte) ayant été compensés en priorité et pour l'intégralité de leurs charges.

* 36 Source : Chiffres clés des énergies renouvelables édition 2018, SDES, mai 2018, et Eurostat.

* 37 Objectif fixé au plan national par la loi « Pope » du 13 juillet 2005 et repris au niveau européen comme objectif pour la France par la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009.

* 38 L'Allemagne est passée de 6,7 % à 14,8 %, l'Espagne de 8,5 % à 17,3 %, l'Italie de 7,5 % à 17,4 % et le Royaume-Uni de 1,3 % à 9,3 %, source : Eurostat.

* 39 Source : Chiffres clés des énergies renouvelables, précité.

* 40 Cour des comptes, enquête précitée.

* 41 Ce total inclut toutes les activités liées au développement des énergies renouvelables, y compris les importations et exportations et la vente de l'énergie produite, soutien public compris, source : étude Ademe, Marchés et emplois dans le domaine des énergies renouvelables, juillet 2017, citée par la Cour.

* 42 Ne sont pas comptabilisés les emplois liés à la production des composants des équipements et aux consommations d'intrants agricoles ou forestiers notamment ni les emplois induits, source : Ademe, étude précitée.

* 43 Pour une présentation plus complète, se reporter au rapport pour avis n° 109 (2017-2018), tome II.

* 44 Depuis 2014, les taxes intérieures de consommation (TIC) sur les énergies fossiles comportent une part fixe et une part variable, dite « contribution climat-énergie » (CCE) et plus communément désignée sous le nom de « taxe carbone », qui est proportionnelle au contenu en carbone émis lors de l'utilisation des produits taxés et fonction de la valeur donnée à la tonne de carbone.

* 45 Bien qu'une voiture diesel émette moins de CO 2 qu'une voiture essence du fait d'une moindre consommation, la taxe carbone impacte davantage le gazole que l'essence compte tenu de la plus forte densité énergétique de ce carburant.

* 46 +1 centime par litre sur le gazole et -2 centimes sur l'essence en 2015, +2 centimes sur le gazole et -2 centimes sur l'essence en 2016. Seule la hausse spécifique décidée en 2015 pour compenser la suppression de l'« écotaxe poids lourds » avait fait exception (+2 centimes sur le gazole).

* 47 Source : étude commandée par le Médiateur national de l'énergie, citée dans un communiqué de presse du 30 octobre 2018.

* 48 Environ 100 millions supplémentaires pour la prime à la conversion avec une cible de 100 000 primes distribuées, selon l'évaluation du Gouvernement, et 80 millions de surcoût par rapport aux anciens tarifs sociaux pour le chèque énergie, selon les calculs de votre commission.

* 49 Les « + » correspondent à des rentrées fiscales supplémentaires pour l'État et donc à des prélèvements supplémentaires sur les ménages et sur les entreprises ; les « - » correspondent à des dépenses supplémentaires pour l'État (ou à de moindres rentrées fiscales) et donc à des mesures de transfert au bénéfice des ménages (hors effets indirects sur les entreprises du secteur automobile ou des travaux, en particulier).

* 50 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2018, article 9, p. 70 et rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2019 (p. 95).

* 51 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2019, article 19, p. 193.

* 52 Évaluations des voies et moyens annexés aux projets de loi de finances pour 2018 (p. 44) et 2019 (p. 42).

* 53 D'après les réponses du Gouvernement à votre rapporteur (pour le détail, se reporter à la partie du présent rapport consacrée au chèque énergie).

* 54 D'après les réponses du Gouvernement à votre rapporteur, sur la base d'un coût de la prime à la conversion de 30 millions en 2017, 510 millions en 2018 et 346 millions en 2019 hors surprime.

* 55 Sur la base des estimations du Gouvernement.

* 56 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2018, article 9, pp. 65 et 67.

* 57 Cf. par exemple la page du site du ministère sur la fiscalité des énergies.

* 58 Hors remboursements et dégrèvements de TICPE tels que les remboursements sectoriels aux taxis, exploitants agricoles, véhicules routiers, etc.

* 59 Fiscalité avantageuse sur le carburant, déductibilité de la TVA longtemps réservée au diesel pour les flottes d'entreprises ou bonus-malus assis sur les émissions de CO 2 qui reste à ce jour, à raison de leurs moindres émissions, favorable ou moins défavorable aux véhicules diesel.

* 60 En son nom propre, la commission n'étant pas saisie pour avis de la première partie du projet de loi de finances.

* 61 44,6 euros la tonne contre 47,5 euros.

* 62 446 millions d'euros d'autorisations d'engagement ont été ouverts en loi de finances rectificative pour 2016.

* 63 Corse, Martinique, Guadeloupe, La Réunion, Guyane, Mayotte, Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre et Miquelon, Saint Martin, Saint Barthélémy, les îles bretonnes de Molène, d'Ouessant, de Sein, l'archipel des Glénan et l'île anglo-normande de Chausey. Les collectivités territoriales autonomes de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie ne sont pas assimilées aux ZNI.

* 64 EDF Systèmes électriques insulaires (EDF SEI), Électricité de Mayotte (EDM) et Électricité et Eau de Wallis-et-Futuna (EEWF).

* 65 Source : Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE), « La précarité énergétique à la lumière de l'enquête nationale logement 2013 », 2016. Sur le seul critère du taux d'effort énergétique (consacrer plus de 10 % de son revenu aux dépenses d'énergie pour le logement), 3,8 millions de ménages peuvent être considérés comme précaires sur le plan énergétique, selon l'Ademe.

* 66 Lancé en février 2017 pour une durée d'un an puis reconduit jusque fin 2020, ce dispositif permet d'accorder, sous condition de ressources, des primes pour la réalisation de certains travaux d'économies d'énergie. Ces primes sont financées par les entreprises obligées signataires de la charte. Depuis février 2018, les « coups de pouce » sont recentrés sur le remplacement d'une chaudière fioul par un équipement utilisant des énergies renouvelables (chaudière biomasse, pompe à chaleur air/eau, eau/eau ou hybride, système solaire combiné, raccordement à un réseau de chaleur) - jusqu'à 3 000 euros pour un ménage aux revenus très modestes et pour une chaudière biomasse - et sur l'isolation des combles - jusqu'à 15 euros par mètre carré pour ce même type de ménage.

* 67 L'Anah est financée par la vente aux enchères des quotas carbone (336,7 millions d'euros en 2018), une contribution du budget de l'État relevant de la mission « Logement » (110 millions), une contribution des fournisseurs d'énergie au programme « Habiter mieux » en contrepartie de la délivrance de CEE (58,1 millions), la taxe sur les logements vacants (21 millions) et une contribution versée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (20 millions).

* 68 En l'absence de déploiement effectif des afficheurs déportés et de parution de l'arrêté devant fixer le montant unitaire maximal par ménage de la compensation versée au fournisseur, la CRE n'intègre pas encore les coûts liés à la conception et au développement du dispositif déclarés par EDF au titre des années 2016 (0,9 million), 2017 (2 millions) et 2018 (5,3 millions), soit 8,2 millions au total.

* 69 Coût moyen des tarifs sociaux par an sur 2016 et 2017, dont environ 30 millions au titre de l'expérimentation du chèque énergie. Les coûts indiqués dans ce tableau sont des ordres de grandeur.

* 70 Selon les chiffres annoncés par le ministre chargé du budget (cf. infra).

* 71 Dont le Gouvernement a remis au Parlement le rapport d'évaluation en décembre 2017.

* 72 Celui du revenu fiscal de référence, qui est connu de l'ensemble des ménages, là où les tarifs sociaux retenaient deux critères : l'éligibilité à la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) ou à l'aide pour une complémentaire santé (ACS) et le revenu fiscal de référence. Le montant du chèque est modulé selon le niveau de revenu et la composition du ménage.

* 73 Cet échelonnement des demandes de remboursement sur plus d'une année expliquant la différence entre les autorisations d'engagement de l'année et les crédits de paiement effectivement décaissés.

* 74 M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, LCI, 6 novembre 2018.

* 75 Évaluation de l'expérimentation du chèque énergie, p. 8.

* 76 Et quelques centaines de chèques encore en circulation étaient susceptibles de l'être, sans que l'on sache si cela fut effectivement le cas.

* 77 En touchant des personnes dont le revenu fiscal de référence sera mécaniquement plus important que celui des bénéficiaires actuels, le montant moyen du chèque, qui dépend des ressources, devrait diminuer, ce qui explique que la dépense ne soit pas proportionnelle au nombre de bénéficiaires.

* 78 Articles 28 et 201 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

* 79 Calcul approximatif, en rapportant la proportion de bénéficiaires attendus du chèque énergie (3,7 millions) sur le nombre total de ménages en France (28,5 millions) au nombre de compteurs Linky installés.

* 80 En application de l'article 16 de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017.

* 81 En général utilisée par injection dans un réseau de chaleur ou pour un processus industriel.

* 82 Rapport sur les autorités administratives et publiques indépendantes, annexe au projet de loi de finances pour 2019.

* 83 En fin d'année, le fonds de roulement atteindrait 1,23 million d'euros. Source : Médiateur national de l'énergie.

* 84 Contrats de raccordement par exemple.

* 85 Fioul, GPL, bois énergie, réseaux de chaleur, etc.

* 86 Projet de décision de l'ASN modifiant certaines décisions applicables à la centrale nucléaire de Fessenheim exploitée par EDF, soumise à la consultation du public le 22 octobre 2018.

* 87 M. Pierre-Franck Chevet, entretien au Figaro, 26 octobre 2018.

* 88 Conseil d'État, décision n° 410109 du 25 octobre 2018.

* 89 Décret n° 2017-508 du 8 avril 2017 portant abrogation de l'autorisation d'exploiter la centrale nucléaire de Fessenheim.

* 90 Perte supérieure à 30 % par rapport à l'année précédente, représentant plus de 10 % des recettes fiscales.

* 91 Le Gouvernement justifie cette disparition par la nécessité de préserver la fongibilité des crédits et d'éviter la préemption de certaines lignes.

* 92 Ce coût est en réalité largement théorique puisqu'il revient pour l'État à renoncer à des recettes supplémentaires potentielles, en exonérant certains redevables d'une hausse de la fiscalité, et non à supprimer des recettes fiscales préexistantes.

* 93 Programme 149 de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

* 94 Programme 135 de la mission « Égalité des territoires et logement ».

* 95 Soit les dépenses fiscales sur impôts d'État ou sur impôts locaux prises en charge par l'État dont le coût est supérieur à 50 millions d'euros.

* 96 Ce total intègre toutes les dépenses fiscales pour lesquelles une évaluation est disponible dans les documents budgétaires, et non uniquement celles détaillées dans le tableau.

* 97 Car n'ayant pas d'accès au réseau de gaz naturel et n'ayant souvent pas les moyens de financer le surcoût d'une installation de chaleur renouvelable.

* 98 Réglementations thermiques pour les bâtiments neufs, taxation du carbone, certificats d'économies d'énergie, éco-prêt à taux zéro, aides du programme « Habiter mieux » de l'Anah pour les ménages aux revenus modestes, pour l'essentiel.

* 99 Inspection générale des finances (IGF) et Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), avril 2017.

* 100 Dans les réponses au questionnaire budgétaire adressé par votre rapporteur.

* 101 Cf. notamment « Évaluation de l'état d'avancement de la transition bas-carbone en France », Institut du développement durable et des relations internationales, octobre 2018, ainsi que la revue de dépenses précitée.

* 102 Enquête Open (Observatoire permanent de l'amélioration énergétique du logement) 2015, Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), 2016. Selon cette méthodologie, une rénovation est dite « performante » si deux postes parmi les cinq suivis (chauffage, eau chaude sanitaire, fenêtres, murs, toiture et combles) sont traités à un niveau performant.

* 103 Revue de dépenses précitée.

* 104 Financement de « l'année double », désignation de l'organisme chargé du versement, mise en place d'une infrastructure informatique, contrôle renforcé des dépenses éligibles, communication sur le nouveau dispositif.

* 105 Pour un ménage aux ressources qualifiées de « modestes » ; les ménages aux ressources « très modestes », dont le plafond est encore plus restrictif, peuvent voir leur taux d'aide majoré. Les plafonds de ressources varient suivant la composition du ménage et la région (Île-de-France et autres régions.

* 106 Hors le coût supérieur de l'année de bascule, qui ne vaudrait qu'une fois, et les frais supplémentaires éventuels liés à la gestion d'un nombre plus important de primes à verser, qui seraient pérennes mais resteraient modestes selon toutes hypothèses.

* 107 Environ 12 000 euros pour une pompe à chaleur air/eau ou jusqu'à 30 000 euros pour certaines chaudières biomasse.

* 108 Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), sur le gaz naturel (TICGN) et sur les charbons (TICC).

* 109 Directive 2003/96/CE du Conseil du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité.

* 110 À raison d'un montant de taxes énergétiques supérieur ou égal à 0,5 % de leur valeur ajoutée.

* 111 En son nom propre, la commission n'étant pas saisie pour avis de la première partie du projet de loi de finances.

* 112 Soit le niveau du plafond fixé par la Commission européenne.

* 113 Délibération de la CRE du 17 novembre 2016 portant décision sur les tarifs d'utilisation des réseaux publics d'électricité dans le domaine de tension HTB.

* 114 Délibération de la CRE n° 2017-160 du 5 juillet 2017.

* 115 Même si la dépense effective aura été, en 2017, de 74,7 millions selon la CRE (délibération n° 2018-104 du 17 mai 2018).

* 116 Délibération de la CRE n° 2017-165 du 5 juillet 2017.

* 117 Soit, par approximation, la moitié du montant prévisionnel retenu par la CRE pour l'appel d'offres au titre de l'année 2019 visant à développer les capacités d'effacement, qu'il soit résidentiel, tertiaire ou industriel (45 millions, délibération n° 2018-156 du 12 juillet 2018).

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