II. UNE AUGMENTATION SIGNIFICATIVE DES DÉPENSES DE LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE QUE LA HAUSSE DE LA DOTATION OCTROYÉE NE FINANCE QUE PARTIELLEMENT

La dotation demandée pour la présidence de la République est en hausse de 4,90 % par rapport à celle de l'exercice précédent (110,46 millions d'euros en 2023 contre 105,3 millions d'euros en 2022). Elle est marquée par des mesures structurelles affectant les dépenses de personnel et un niveau soutenu d'investissements afin d'entretenir et de moderniser les emprises.

Malgré l'augmentation envisagée de la dotation pour 2023, celle-ci ne permet pas de couvrir l'intégralité des dépenses de la présidence de la République, évaluées à 114,4 millions d'euros. L'équilibre budgétaire n'est atteint qu'au prix d'un important prélèvement sur disponibilités de 2,37 millions d'euros, auquel s'ajoutent des recettes propres pour un montant de 1,6 million d'euros. Comme les années précédentes, cela interroge sur la pérennité de la structure du budget à moyen terme, et ce d'autant plus que certaines dépenses en lien avec la politique d'investissement de la présidence pèseront sur le budget des exercices ultérieurs.

A. UNE HAUSSE DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET DE PERSONNEL RÉSULTANT DU NIVEAU D'ACTIVITÉ SOUTENU ET D'ALÉAS EXOGÈNES DIFFICILEMENT MAÎTRISABLES

La présidence de la République applique depuis le 1 er janvier 2017 un règlement budgétaire et comptable , signé le 29 novembre 2016 et actualisé le 29 mars 2019, qui reprend en grande partie les normes applicables à la gestion publique, notamment les dispositions du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP).

Ce règlement fixe un cadre budgétaire et comptable formalisé qui préserve le principe général d'autonomie financière des pouvoirs publics constitutionnels, rappelé par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 juillet 2001.

La présentation du budget décline les crédits sous la forme d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement, s'appuyant sur la destination de la dépense qui relève :

• soit de l'action présidentielle , qui correspond aux crédits permettant d'assurer les fonctions de représentation ainsi que les missions militaires et diplomatiques attachées au chef de l'État : déplacements internationaux et nationaux, organisation des réceptions au palais de l'Élysée ;

• soit de l'administration de la présidence , qui concerne la gestion des personnels, l'administration générale, la gestion immobilière, les moyens généraux, les télécommunications et l'informatique, la sécurité ainsi que l'action sociale interne.

Évolution des dépenses de la présidence de la République
entre 2021 et 2023

(en euros)

Source : Annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2023

Les dépenses de la présidence de la République augmentent en 2023 sous l'effet d'une hausse des dépenses de fonctionnement, dans un contexte inflationniste, après une période de ralentissement due à la crise sanitaire. Les dépenses de personnel sont affectées par la revalorisation du point d'indice de la fonction publique à compter du 1 er juillet 2022.

1. Des dépenses de déplacements présidentiels en hausse, révélatrices d'une activité intense, dans le contexte de la guerre en Ukraine

L'enveloppe consacrée aux déplacements du président de la République augmente de 6,67 % par rapport à 2022 et s'élève à 16 millions d'euros . Celle-ci est affectée par le contexte de la guerre en Ukraine et par l'inflation internationale, particulièrement notable aux États-Unis et en Asie.

Par comparaison, les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2020, avant le début de la crise sanitaire, représentaient 15,7 millions d'euros.

2. Des dépenses d'investissement contenues

Les dépenses d'investissement diminuent de 7,7 % entre 2022 et 2023. Ces dépenses s'élèvent à 6,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, contre 6,24 millions d'euros en autorisations d'engagement et 7,05 millions d'euros en crédits de paiement en 2022. Elles représentent 5,68 % du budget total , soit un pourcentage quasiment équivalent à celui de l'exercice précédent 4 ( * ) , et se décomposent en trois postes de dépenses.

En premier lieu, 2,45 millions d'euros en autorisations d'engagement et le même montant en crédits de paiement seront affectés aux télécommunications, à l'informatique, au numérique et aux moyens audiovisuels de communication.

Dépenses prévisionnelles relatives aux télécommunications, à l'informatique, au numérique et aux moyens audiovisuels

(en euros)

Source : Annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2023

En deuxième lieu, 1,78 million d'euros en autorisations d'engagement et le même montant en crédits de paiement ont pour objet de financer plusieurs projets de gestion immobilière.

Il est ainsi prévu d'engager en 2023 des travaux de géothermie sur l'hôtel d'Évreux , pour réduire l'empreinte carbone de la présidence et baisser sa consommation de fluides (gaz et électricité) soumis à une très forte tension sur les prix. Dès l'année prochaine, la mise en place de ce système pourrait permettre de réduire de 80 % les émissions de gaz à effet de serre. À terme, le recours à cette installation pour rafraîchir les bureaux en été est envisagé. La réalisation d'un audit énergétique des emprises a également été décidée, afin de définir une stratégie pluriannuelle de travaux en matière de performance énergétique 5 ( * ) .

Dépenses relatives à la gestion immobilière

(en euros)

Source : Annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2023

Enfin, une enveloppe, dont on peut regretter que le montant n'ait pas été précisé au sein de l'annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2023, sera dédiée, comme les années précédentes, à l'adaptation et au renforcement des moyens de protection mis à la disposition du personnel de la direction de la sécurité de la présidence de la République (DSPR), ainsi qu'à l'amélioration de la sûreté des différentes résidences présidentielles.

3. Une hausse significative des dépenses de fonctionnement dont les justifications demeurent trop imprécises

Les dépenses de fonctionnement, qui représentent 18 millions d'euros en 2023 , connaissent une augmentation significative de 12,61 % par rapport à l'exercice précédent. La hausse est particulièrement concentrée sur les dépenses relatives à l'administration de la présidence (+ 13,96 %), celles concernant l'action présidentielle présentant une évolution plus contenue (+ 5,71 %).

Parmi les dépenses d'administration, le poste relatif à la sécurité augmente de 54,1 % entre 2022 et 2023, celui concernant la gestion immobilière de 28,28 % et celui relatif aux moyens généraux de 13,29 %.

Pour justifier une hausse des crédits de fonctionnement de plus de 2 millions d'euros entre 2022 et 2023, la présidence de la République avance les éléments suivants :

• tout d'abord, l' évolution des outils numériques conduit à un accroissement des dépenses informatiques, par l'acquisition de nouvelles licences, par la réalisation d'un plus grand nombre d'opérations de maintenance préventive et par le recours plus régulier aux services support des développeurs ;

• ensuite, les opérations de travaux visant à garantir la sécurité des emprises se poursuivent en 2023. À ce titre, la troisième tranche de l'opération de purge des réseaux électriques (identification de nombreux câbles accumulés dans les sous-sols et dépose de ceux qui ne sont plus utiles, nettoyage des supports, remplacement des câbles endommagés), indispensable à la sécurité des emprises, se traduit par une dépense exceptionnelle de 0,6 million d'euros 6 ( * ) ;

• par ailleurs, l' inflation d'ores et déjà constatée affecte toutes les dépenses de fonctionnement, quelle qu'en soit leur nature (fluides, denrées alimentaires, coût des matériaux de construction etc.). En ce qui concerne les fluides, les projections pour 2023 appellent à une vigilance particulière. La présidence de la République est rattachée au marché interministériel de la direction des achats de l'État (DAE) pour le gaz et l'électricité. Or, cette dernière prévoit une hausse substantielle et imprévisible de ce poste de dépense incompressible en 2023 7 ( * ) .

Le rapporteur relève toutefois que, si la dynamique inflationniste actuelle est de nature à justifier une revalorisation de l'enveloppe affectée aux dépenses de fonctionnement, l'ampleur de celle-ci excède largement le niveau de l'inflation constatée qui s'élève, sur un an, à 5,6 % 8 ( * ) . En outre, les éléments complémentaires apportés par la présidence de la République pour expliquer cette évolution - « un recalibrage réaliste devenu indispensable permettant de faire face aux coûts de gestion courante » 9 ( * ) - apparaissent abscons et trop imprécis pour être pleinement satisfaisants . Il y a là une vraie question qui reste posée .

Enfin, l'analyse de l'exécution budgétaire au cours des cinq dernières années révèle une sur-exécution récurrente des crédits de fonctionnement , exception faite de 2020, qui interroge sur l'efficacité des « actions pérennes de maîtrise [de ces dépenses] » mises en oeuvre « pour respecter cette enveloppe » 10 ( * ) . À ce titre, l'exécution budgétaire pour 2021 fait apparaître un écart significatif de 2,1 millions d'euros, les dépenses de fonctionnement exécutées s'élevant à 17,4 millions d'euros contre 15,3 millions d'euros prévisionnels en loi de finances initiale.

Évolution des dépenses de fonctionnement de la présidence de la République depuis 2017

(en euros)

Source : Annexes « Pouvoirs publics » au projet de loi de règlement depuis 2017

4. Des mesures structurelles affectant les dépenses de personnel

Pour 2023, les dépenses de personnel, qui représentent 65 % du budget de la présidence de la République, connaissent une hausse de 3,90 % par rapport au projet de loi de finances pour 2022. Cette augmentation de 2,77 millions euros par rapport à l'exercice précédent s'explique principalement par la prise en compte de la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires de 3,5 % à compter du 1 er juillet 2022 , dont l'effet, en année pleine, ne pourra être mesuré qu'en 2023.

À cette mesure structurelle s'ajoute la mise en place progressive de la nouvelle politique de rémunération des militaires , qui a une incidence directe sur l'enveloppe des dépenses de personnel compte tenu de la part importante de cette catégorie dans les effectifs mis à disposition de la présidence, et de la prise en charge partielle de la complémentaire santé des agents publics.

Malgré les efforts engagés par la présidence de la République pour parvenir à un pilotage plus fin de la masse salariale (maîtrise des effectifs et des rémunérations au recrutement, respect du plafond d'emploi fixé à 825 équivalents temps plein, définition d'un schéma d'emplois par grades et par fonctions pour chaque direction), l'hypothèse d'une évolution des dépenses de personnel à hauteur de 3,3 % pour 2024 a jusqu'à présent été privilégiée. Cet indice, communiqué par la direction du budget, correspond à celui retenu par l'ensemble des ministères.


* 4 En 2022, les dépenses d'investissement représentaient 5,76 % du budget total.

* 5 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 6 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 7 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 8 Projection de l'INSEE en septembre 2022.

* 9 Annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2023.

* 10 Annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2023.

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