- L'ESSENTIEL
- I. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 144 PROGRESSERONT
DE 5,5 % EN 2025
- II. RENSEIGNEMENT : UN BUDGET 2025 EN
PROGRESSION POUR LA DGSE ET LA DRSD DANS UN CONTEXTE GÉOPOLITIQUE DE
CONFLICTUALITÉ ACCRUE ET DE RÉFORME DE LEURS SERVICES
- III. UN EFFORT CONSACRÉ À
L'INNOVATION QUI SERA POURSUIVI L'AN PROCHAIN
- A. DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX
ÉTUDES AMONT DONT LE MONTANT SERA SUPÉRIEUR AU MILLIARD D'EUROS
- 1. Un niveau de crédits d'études
amont hors dissuasion légèrement supérieur à ce qui
était prévu en LPM
- 2. Une enveloppe consacrée au financement de
grands démonstrateurs qui s'élèvera à
118 M€ en 2025
- 3. Des innovations relatives aux organisations
bienvenues
- a) 4 « partenariats
d'innovation » sont en cours de mise en place
- b) Perseus, une démarche vertueuse
d'expérimentation de technologies en conditions réelles
initiée par la marine nationale et reprise par l'État-major des
armées dans le cadre d'IDEM
- c) La mise en place d'un commandement du combat
futur au sein de l'état-major de l'armée de Terre : une
« innovation » récente mais prometteuse
- a) 4 « partenariats
d'innovation » sont en cours de mise en place
- 1. Un niveau de crédits d'études
amont hors dissuasion légèrement supérieur à ce qui
était prévu en LPM
- B. LE FONDS EUROPÉEN DE DÉFENSE
(FED) : UN DISPOSITIF UTILE MAIS DONT L'ACCÈS DEMEURE
COMPLEXE
- C. L'ONERA, UN CHAMPION EUROPÉEN QUI DOIT
ÊTRE SOUTENU
- A. DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX
ÉTUDES AMONT DONT LE MONTANT SERA SUPÉRIEUR AU MILLIARD D'EUROS
- IV. LA PROBLÉMATIQUE DE L'ACCÈS AU
FINANCEMENT PRIVÉ DES ENTREPRISES DE LA BITD : QUOUSQUE TANDEM
ABUTERE PATIENTIA NOSTRA ?
- V. UNE HAUSSE DES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX RELATIONS INTERNATIONALES ET À LA DIPLOMATIE DE DÉFENSE
PRINCIPALEMENT LIÉE À LA RENÉGOCIATION DU TRAITÉ DE
COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉFENSE AVEC LA
RÉPUBLIQUE DE DJIBOUTI
- I. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 144 PROGRESSERONT
DE 5,5 % EN 2025
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
N° 146 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024 |
AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des affaires
étrangères, de la défense |
TOME V DÉFENSE Environnement et prospective de la politique de
défense |
Par M. Pascal ALLIZARD et Mme Gisèle JOURDA, Sénateur et Sénatrice |
(1) Cette commission est composée de :
M. Cédric Perrin, président ; MM. Pascal
Allizard, Olivier Cadic, Mmes Hélène Conway-Mouret,
Catherine Dumas, Michelle Gréaume, MM. Joël Guerriau,
Jean-Baptiste Lemoyne, Akli Mellouli, Philippe Paul, Rachid Temal,
vice-présidents ; M. François Bonneau, Mme Vivette
Lopez, MM. Hugues Saury, |
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8 Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025) |
L'ESSENTIEL
En 2025, le programme 144 sera doté de 2,1 Mds€ en crédits de paiement (CP), soit une progression de 5,5 % par rapport à 2024. Cette évolution est conforme à la trajectoire fixée en loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030.
Avec 508 M€ de crédits de paiement dédié en 2025 à l'action n° 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France » (contre 476 M€ en 2024), le budget de fonctionnement, d'investissement et d'intervention de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) progressent conformément à l'objectif fixé par la LPM de doublement des crédits en 2030 par rapport à 2017. Les effectifs vont également progresser de 7 652 ETPT en 2024 à 7 814 ETPT en 2025, correspondant à 735 M€ de crédits de paiement de titre 2 relevant du programme 212 « Soutien de la politique de défense ». Ce sont donc au total sur les programmes 144 et 212 près de 1,25 milliard d'euros consacrés à la fonction de renseignement extérieur, de sécurité et de défense.
S'agissant de la prospective de défense, les rapporteurs saluent le choix du Gouvernement de poursuivre l'effort consacré à l'innovation. Les crédits d'innovation atteindront ainsi 1,3 Md€ (+ 43M€), soit un niveau supérieur à ce qui était prévu dans la LPM 24-30 (1,2 Md€).
De même, hors dissuasion, les crédits d'études amont s'établiront à 832 M€ en 2025, soit un montant supérieur de 68 M€ à ce qui était prévu en LPM. Ce niveau de crédits devrait permettre de répondre globalement aux besoins. Cet effort en faveur de l'innovation ne doit pas être relâché, celle-ci contribuant de manière décisive au maintien de la supériorité opérationnelle de nos armées.
Une partie des crédits d'études amont (118 M€ en autorisations d'engagement) sera consacrée au financement des grands démonstrateurs prévus en LPM. Le schéma de financement de certains d'entre eux repose sur une part d'autofinancement, en particulier lors des premières phases de développement. Si une telle situation n'est pas anormale, un équilibre entre autofinancement et crédits étatiques est nécessaire afin de ne pas aggraver les difficultés d'accès aux financements privés rencontrées par certaines entreprises et de ne pas conduire à rigidifier les dispositions contractuelles relatives à la propriété intellectuelle.
Plusieurs innovations, dont certaines étaient appelées de ses voeux par la commission, sont à saluer : recours au partenariat d'innovation, destiné à faciliter le passage à l'échelle, poursuite et extension de la démarche Perseus (tests de technologies en conditions réelles) initiée par la marine nationale, ou encore mise en place d'un commandement du combat futur au sein de l'état-major de l'armée de Terre.
Si des avancées ont eu lieu sur la question de l'accès au financement des entreprises de la BITD, cette problématique demeure d'actualité. C'est pourquoi il faut des initiatives gouvernementales rapides sur ce sujet, le cas échéant sous la forme d'une reprise des propositions de loi dont l'examen avait été interrompu à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale.
I. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 144 PROGRESSERONT DE 5,5 % EN 2025
A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS DU P. 144 CONFORME À LA TRAJECTOIRE FIXÉE EN LPM
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 prévoit une dotation pour le programme 144 s'élevant à 2,1 Mds€, soit une progression de 5,5 % par rapport à 2024. Cette progression est conforme à la trajectoire fixée en loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030.
Dans le détail, les crédits relatifs au renseignement passeront de 476 M€ en 2024 à 508 M€ en 2025 (cf. infra).
Ceux destinés à la prospective de défense ainsi qu'aux relations internationales et à la diplomatie de défense progresseront de 77 M€, passant de 1,5 Md€ à 1,6 Md€.
B. UNE ANNULATION DE 33 M€ PRÉVUE EN 2024 QUI NE SERA PAS SANS CONSÉQUENCE SUR 2025
Le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 prévoit une annulation de 33 M€ des crédits du P. 144.
Interrogé sur le schéma de fin de gestion par les rapporteurs, le Délégué général pour l'armement1(*) s'est voulu rassurant, indiquant que « l'annulation de 33 millions d'euros de crédits en fin de gestion n'aura pas d'effet sur les opérateurs puisqu'elle concerne les études amont, elle se traduira par un retard de quelques mois sur des études ».
Pour autant, certaines personnes entendues en audition ont indiqué que cette annulation de crédits ne serait pas indolore dans la mesure où les dépenses reportées entameront d'autant celles qui étaient prévues en 2025.
II. RENSEIGNEMENT : UN BUDGET 2025 EN PROGRESSION POUR LA DGSE ET LA DRSD DANS UN CONTEXTE GÉOPOLITIQUE DE CONFLICTUALITÉ ACCRUE ET DE RÉFORME DE LEURS SERVICES
A. UNE ALLOCATION DE CRÉDITS CONFORME AUX BESOINS PROGRAMMÉS
Avec 508 M€ de crédits de paiement dédié en 2025 à l'action n° 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France » (contre 476 M€ en 2024), le budget de fonctionnement, d'investissement et d'intervention de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) progressent conformément à l'objectif fixé par la LPM de doublement des crédits en 2030 par rapport à 2017. Cette budgétisation s'inscrit dans la trajectoire visant un total de 5 Mds€ de crédits de renseignement sur la période de la LPM 2024-2030.
Les effectifs vont également progresser de 7 652 ETPT en 2024 à 7 814 ETPT en 2025, correspondant à 735 M€ de crédits de paiement de titre 2 relevant du programme 212 « Soutien de la politique de défense ». Ce sont donc au total sur les programmes 144 et 212 près de 1,25 milliard d'euros consacrés à la fonction de renseignement extérieur, de sécurité et de défense.
Ces moyens évoluent différemment pour les deux directions :
· Pour la DGSE, le renforcement des moyens est global tant hors titre 2 (479 M€) que pour les crédits de titre 2 (586 M€), soit pour la première fois un budget total supérieur à 1 milliard d'euros. Cette augmentation coïncide avec le lancement effectif des travaux de construction au Fort neuf de Vincennes du futur siège du service pour un coût global de 1,3 Md€ en vue d'une livraison en 2030 et une entrée en service en 2031.
Le budget de la DGSE en 2025
Crédits hors titre 2 (P144) |
Crédits de titre 2 (P212) |
Plafond d'emplois |
Contre 425 M€ en 2024 |
Contre 562 M€ en 2024 |
Contre 5987 ETPT en 2024 |
Sources : annexe au PLF 2025
· Pour la DRSD, la livraison en 2025 du bâtiment 2 bis - en référence au 2 bis avenue de Tourville, siège historique du contre-espionnage militaire- qui accueillera le siège de la DRSD dans son site du Fort de Vanves marque l'aboutissement d'un financement qui aura débuté en 2021 pour un coût total de 91 M€. Après une bosse de dépense en 2023 (59,2 M€), le budget a été ramené à 50,9 M€ de dotation en CP pour 2024, dont 27 M€ dédiés aux travaux. Si les crédits de paiement pour 2025 s'établissent facialement en baisse à 28,5 M€, c'est que le financement de l'opération immobilière sera arrivé à son terme. Au total, avec 149 M€ de crédits de titre 2, le budget de la DRSD pour 2025 s'établit à 177,5 M€ au lieu de 197 M€ pour les raisons précédemment évoquées.
Le budget de la DRSD en 2025
Crédits hors titre 2 (P144) |
Crédits de titre 2 (P212) |
Plafond d'emplois |
Contre 50,9 M€ en 2024 |
Contre 146 M€ en 2024 |
Contre 1665 ETPT en 2024 |
Sources : annexes au PLF 2025
Ce mouvement croisé de croissance et de décrue des crédits de la DGSE et de la DRSD corresponde à une année charnière pour chacun de ces services.
B. 2025, UNE ANNÉE CHARNIÈRE POUR LA TRANFORMATION DU RENSEIGNEMENT INTÉRESSANT LA SÉCURITÉ DE LA FRANCE
Le futur déménagement de la DGSE au Fort neuf de Vincennes comme la livraison du nouveau siège de la DRSD ne se limitent pas à des opérations immobilières. Celles-ci, de par leur contenu technologique et de nouvelles architectures de travail collaboratif, vont contribuer, pour la DRSD, à transformer dès la fin du premier semestre 2025 les méthodes de travail, à améliorer l'attractivité du recrutement et contribuer à la création d'un centre de formation, allant de pair avec la livraison d'un nouveau système d'information de renseignement et de contre ingérence de défense (SIRCID).
Programmes immobiliers de la DGSE et de la DRSD
Esquisse du futur siège de la DGSE au Fort neuf de
Vincennes |
Visite de chantier du siège de la DRSD au Fort de Vanves |
Le périmètre d'activité de la DRSD a été étendu en 2024 à deux nouveaux domaines : les enquêtes administratives préalables aux recrutements des civils de la défense (évolution réglementaire de début 2024 qui prévoit ce cas) et le Computer Emergency Response Team des entreprises de défense (CERT-[ED] 2(*)), créé en octobre 2023, dont le déploiement se poursuit en 2025 au profit des PME-TPE de la BITD française, pour celles qui ne relèvent pas de la compétence directe de l'agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI). Le Directeur du renseignement et de la sécurité de défense, le Général Philippe Susnjara, a souligné l'évolution du nouveau système d'information basé sur l'analyse de sources ouvertes (pour un investissement initial de 3 M€ et un coût de MCO à 0,6 M€ pour 2025 pour de nouvelles fonctionnalités), destiné à améliorer la chaîne de traitement des enquêtes administratives dont le nombre, établi à 467 000 enquêtes administratives en septembre 2024, devrait dépasser le nombre de 480 000 enquêtes effectuées en 2023 contre 390 000 en 2022.
S'agissant de la DGSE, l'attention des rapporteurs a été attirée sur les effets d'une conflictualité accrue sur l'ensemble du spectre des missions du service tant sur les théâtres d'opération que sur la montée en gamme des menaces cyber et informationnelles, avec la nécessité de renforcer la sécurité opérationnelle de l'ensemble des postes et des agents. Dans ce contexte, l'accroissement des moyens est justifié par plusieurs priorités :
· Le démarrage des travaux du Fort neuf de Vincennes porte sur une emprise de 20 hectares où seront construits et aménagés 130 000 mètres carrés de plancher et 6 000 postes de travail dont l'objet est de profondément moderniser les méthodes de travail. Le marché principal a été attribué en mars 2024 à un groupement conduit par la société Vinci. Inauguré le 12 novembre dernier, le chantier devrait être livré en 2030 ;
· le renforcement des capacités techniques interministérielles qui doivent accompagner la montée en puissance de la cybermenace, la mission d'imputation des acteurs étrangers, la cryptologie, les traitement des données de surveillance internationale, l'intelligence artificielle (IA) sans créer de doublon avec la nouvelle Agence ministérielle pour l'IA de défense (Amiad), le quantique et le newspace ;
· la réforme du service lancée en novembre 2022 sur le principe de centres de missions, d'une refonte en 2025 de la direction technique et de l'innovation et d'une organisation fondée sur les cibles ;
· la bascule d'effort du service vers l'Indopacifique, avec un retour en Europe orientale, sans délaisser ni l'Afrique, ni le Moyen-Orient ;
· le développement des capacités d'entraves et d'influence, cette dernière constituant une fonction nouvelle à articuler avec le nouveau service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) et le ministère de l'Europe et des affaires étrangères ;
· enfin, l'enjeu du recrutement et de la fidélisation dont l'objectif est un accroissement net de 700 postes au terme de la période de la LPM 2024-2030. Il s'agit d'un traitement de masse puisqu'en fonction des départs, le service procède à environ 450 entrées nouvelles par an, dont le traitement requière l'analyse de près de 900 curriculum vitae par semaine. Il s'agit d'un volet majeur de la politique de ressources humaines du service qui fait appel aux plateformes de recrutement en ligne (LinkedIn, Indeed, etc.), à certaines adaptations statutaires (grille de rémunération de la Direction du numérique [Dinum], règles de transformation des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée, parcours de formation).
La question de la réserve opérationnelle a été soulevée par vos rapporteurs dans l'optique de son objectif de doublement à l'horizon 2030. Ce sujet est de nature à répondre aux besoins d'expertises ponctuelles ou requérant des compétences se trouvant dans des secteurs de recherche académique, de l'analyse géopolitique, des langues, etc.
III. UN EFFORT CONSACRÉ À L'INNOVATION QUI SERA POURSUIVI L'AN PROCHAIN
Le PLF pour 2025 prévoit une progression des crédits consacrés à l'innovation3(*) de 43 M€. 1,3 Mds€ sont ainsi inscrits à ce titre au sein du programme 144, soit un niveau supérieur à ce qui était envisagé dans la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030.
En Mds€ |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Total 24-30 |
Inscrits en LFI 2024, prévus au PLF 2025 et envisagés pour les années suivantes |
1,219 |
1,262 |
1,353 |
1,290 |
1,408 |
1,654 |
1,960 |
10,146 |
Prévus en LPM |
1,215 |
1,223 |
1,308 |
1,303 |
1,413 |
1,681 |
2,023 |
10,165 |
Source : Agence de l'innovation de défense (AID), réponse au questionnaire des rapporteurs
A. DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX ÉTUDES AMONT DONT LE MONTANT SERA SUPÉRIEUR AU MILLIARD D'EUROS
Des crédits consacrés aux études amont s'élevant à |
Contre |
Soit une progression de |
En 2025 |
En 2024 |
Entre 2024 et 2025 |
1. Un niveau de crédits d'études amont hors dissuasion légèrement supérieur à ce qui était prévu en LPM
Hors dissuasion, les crédits d'études amont s'établiront à 832 M€ en 2025, soit un montant supérieur de 68 M€ à ce qui était prévu en LPM.
En M€ |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Total 24-30 |
Inscrits en LFI 2024, prévus au PLF 2025 et envisagés pour les années suivantes |
795 |
832 |
852 |
820 |
945 |
1 181 |
1 477 |
6 902 |
Prévus en LPM |
765 |
764 |
843 |
855 |
950 |
1 208 |
1 540 |
6 925 |
Source : Agence de l'innovation de défense (AID), réponse au questionnaire des rapporteurs
Les rapporteurs se félicitent du choix du ministère de consentir un effort supérieur à la trajectoire définie en LPM dès les premières années de sa mise en oeuvre. Celui-ci présente en effet un double avantage : d'une part, il permet de limiter les effets de l'inflation, et d'autre part, il donne de la visibilité aux entreprises, notamment les PME et ETI, en sécurisant d'emblée une partie de leurs financements étatiques.
En audition, plusieurs points de vigilance ont cependant été soulevés par les groupements d'industriels. En particulier, selon le groupement des industries françaises de la défense et de la sécurité terrestres et aéroterrestres (GICAT), la poursuite du développement de certaines munitions de nouvelle génération et le développement de munitions dédiées à la lutte anti-drones, qui ne pourront être financées cette année faute de budgets d'études disponibles, pourraient être menacés.
Aussi, les rapporteurs appellent à ne pas relâcher l'effort engagé au cours des dernières années en matière d'innovation, celle-ci concourant directement au maintien de la supériorité opérationnelle de nos armées.
L'effort en faveur de l'innovation ne doit pas être relâché, celle-ci concourant directement au maintien de la supériorité opérationnelle de nos armées.
2. Une enveloppe consacrée au financement de grands démonstrateurs qui s'élèvera à 118 M€ en 2025
Source : MINARM, réponse au questionnaire des rapporteurs
Les crédits d'études amont permettront notamment le financement des grands démonstrateurs prévus dans le cadre de la LPM 24-30. Les principaux projets qui seront financés en 2025 sont rappelés dans le tableau ci-après.
118 M€ (AE) sont ainsi prévus à ce titre en PLF 2025. Ce montant représente une baisse de 12 M€ par rapport à 2024, qui a vu la livraison de deux démonstrateurs importants : un démonstrateur opérationnel de laser anti-drone déployé pour la protection des Jeux Olympiques de Paris 2024 et un premier démonstrateur d'arme électro-magnétique.
En audition, les groupements d'industriels ont rappelé que certains démonstrateurs avaient été, au moins pour partie, autofinancés. L'exemple du démonstrateur de drone sous-marin (UCUV) de Naval group a par exemple été mentionné (photo ci-contre).
En audition, le directeur de l'AID a indiqué que la participation financière des industriels, notamment les grands groupes, aux premiers stades de développement était encouragée dans la mesure où celle-ci témoignait de l'intérêt porté par ces industriels aux technologies, équipements et matériels qu'ils développent.
Si les rapporteurs estiment que demander un engagement financier des industriels n'est pas anormal, ils relèvent que cette exigence peut être de nature à aggraver les difficultés de financement rencontrées par certaines entreprises (cf. infra).
Ils considèrent en outre que l'autofinancement par les industriels des premiers stades de développement d'une technologie ne doit pas conduire à des difficultés en matière de propriété intellectuelle, en complexifiant ou rendant impossible toute utilisation ou modification de cette technologie par la suite.
Un équilibre entre autofinancement et crédits étatiques est nécessaire afin de ne pas aggraver les difficultés d'accès au financement privé rencontrées par certaines entreprises et de ne pas conduire à rigidifier les dispositions contractuelles relatives à la propriété intellectuelle.
3. Des innovations relatives aux organisations bienvenues
a) 4 « partenariats d'innovation » sont en cours de mise en place
Dans leur avis budgétaire de l'an dernier4(*), les rapporteurs appelaient à faciliter le recours au « partenariat d'innovation » afin de pallier les difficultés structurantes des marchés d'innovation qui imposent une remise en concurrence à l'issue de la phase de recherche et développement pour pouvoir acquérir les travaux qui en résultent. Ce dispositif, qui figure à l'article L. 2172-3 du code de la commande publique, permet en effet à l'acheteur public de mettre en place un partenariat structuré de long terme couvrant à la fois la phase de recherche et de développement ainsi que l'achat ultérieur des produits, services ou travaux en résultant, sans remise en concurrence, sous réserve que ces derniers répondent à un besoin ne pouvant pas être satisfait en ayant recours à l'offre disponible sur le marché.
Les rapporteurs se félicitent que, dans le prolongement de cette recommandation, 4 « partenariats d'innovation » soient en cours de mise en place par l'AID :
- un premier projet baptisé DANAE (drone naval de surface armé), partenariat innovant lancé en septembre 2024, avec l'envoi d'une lettre de candidature à 10 industriels français ciblés et une notification de la première phase prévue mi 2025 ;
- trois autres partenariats d'innovation en cours de rédaction qui ont trait aux cibles sous-marines, à un kit d'adaptation pour protections balistiques dédié aux femmes et à la détection de mines.
Dans le cadre de leurs travaux à venir, les rapporteurs s'attacheront à établir un bilan de la mise en oeuvre de cette facilité prévue par le code de la commande publique, qu'il s'agisse de ses apports mais également, le cas échéant, les difficultés qu'elle peut soulever ou auxquelles elle est confrontée (telles que la durée de mise en place d'un partenariat d'innovation, qui est importante pour la définition des critères et l'analyse du paysage industriel).
b) Perseus, une démarche vertueuse d'expérimentation de technologies en conditions réelles initiée par la marine nationale et reprise par l'État-major des armées dans le cadre d'IDEM
Dans un rapport de 20235(*), la commission relevait le caractère vertueux de la démarche Perseus « engagée par la marine nationale et la DGA, qui vise à rapprocher les industriels, la DGA et les unités, et qui permet de tester en conditions réelles des innovations prometteuses lors d'exercices ou de déploiements » considérant que de telles démarches « devraient être encouragées, dans la mesure où celles-ci contribuent à favoriser l'innovation continue et à en accélérer le déploiement ».
Les rapporteurs constatent avec satisfaction que cette recommandation a été mise en oeuvre par l'état-major des armées, l'exemple de Perseus ayant été repris dans le cadre de la démarche « IDEM » (innovation destinée aux exercices militaires).
La démarche « innovation destinée aux exercices militaires » (IDEM) de l'état-major des armées
L'objectif de cette initiative est de créer des passerelles entre le tissu industriel français, en particulier les petites entreprises et start-ups innovantes, et les forces armées. Ces entreprises, qui développent des solutions à fort potentiel pour la défense, doivent être accompagnées dans leur compréhension des spécificités et des exigences de cet environnement.
Pour répondre à ce besoin, des partenariats pilotés principalement par l'Agence de l'Innovation de Défense (AID) sont mis en oeuvre dans une approche globale et coordonnée par le ministère des armées. Cette démarche mobilise plusieurs entités clés : les états-majors, l'État-Major des Armées (EMA), la direction générale de l'armement (DGA), l'AID et le secrétariat général pour l'administration (SGA).
Processus de sélection et d'évaluation des solutions innovantes
- sélection : les solutions innovantes proposées par les entreprises sont évaluées sur la base de critères prédéfinis, notamment leur degré de maturité technologique.
- test opérationnel : une fois sélectionnée, la solution est testée par une unité des forces armées, désignée comme « sponsor », afin d'évaluer ses performances en conditions réelles.
- test en exercice majeur : si les résultats s'avèrent conformes aux attentes, la solution est intégrée dans un exercice d'envergure pour confirmer son utilité opérationnelle.
- attribution d'un label : en cas de succès, un label de reconnaissance est décerné à l'entreprise, attestant de la valeur de sa solution. Ce label constitue un atout pour sa communication externe et sa stratégie marketing. Il convient toutefois de noter qu'aucune garantie de contractualisation avec le Minarm n'est associée à cette démarche.
Un cadre sans rémunération directe mais gagnant-gagnant
Si les entreprises participantes ne sont pas rémunérées, elles bénéficient néanmoins d'avantages significatifs :
- l'accès à un cadre expérimental et opérationnel unique pour tester et affiner leurs innovations
- l'accompagnement des experts du minarm et l'accès aux équipements des forces armées ;
- la récupération de données issues des tests pour améliorer leurs produits ;
- le label obtenu peut être valorisé dans leur communication pour renforcer leur crédibilité auprès de clients et partenaires.
Du côté du ministère des armées, cette démarche offre également plusieurs bénéfices :
- le renforcement des liens avec les PME et start-ups innovantes sur tout le territoire, favorisant un maillage efficace ;
- une capacité à détecter en continu des solutions prometteuses, grâce à des partenariats à l'échelle nationale et régionale ;
- un meilleur repérage des innovations de rupture, contribuant à maintenir un avantage stratégique.
Source : état-major des armées, réponses au questionnaire des rapporteurs
c) La mise en place d'un commandement du combat futur au sein de l'état-major de l'armée de Terre : une « innovation » récente mais prometteuse
L'état-major de l'armée de Terre a lancé une initiative originale en 2023 avec la création d'un grand commandement dédié à la préparation de l'avenir : le commandement du combat futur (CCF), qui s'inspire du army futures command américain.
Le CCF assure trois grandes fonctions6(*) :
- assurer la responsabilité de la dynamisation de la transformation des capacités et de la cohérence de la transformation de la doctrine de l'armée de terre. À cet effet, le COMCCF assume les responsabilités de directeur des fonctions opérationnelles de l'armée de terre et tête de chaine de la doctrine et du retour d'expérience (RETEX) ;
- éclairer l'armée de terre et animer les échanges avec les acteurs stratégiques du monde civil et militaire (centres de réflexion, universités, etc.) ;
- capter, concevoir, expérimenter et mettre à disposition de l'armée de terre les innovations et doctrines associées, permettant de s'adapter aux combats futurs.
Le commandant du combat futur (COMCF)7(*) est ainsi officier général innovation de l'armée de Terre et directeur des fonctions opérationnelles. À ce titre, le CCF supervise les processus « innovation » et « opérations futures » de l'armée de Terre tout en jouant un rôle clé dans la prospective.
Le CCF, dans sa partie centrale, est constitué de 136 militaires et civils de la défense. Ses effectifs sont complétés de 63 réservistes et d'une dizaine d'apprentis ou stagiaires permettant notamment de disposer de certaines expertises indispensables (linguistique, IA, etc.). Le CCF intègre en outre la Section technique de l'armée de Terre (STAT), composée de 642 militaires et civils de la défense et 85 réservistes.
Sur le plan budgétaire, le CCF dispose d'un budget « organique » (4 M€ en 2025) et d'un droit de tirage de 60 M€ sur la période 2024-2030 (dont 10 M€ pour 2025) au titre de l'innovation.
Source : état-major de l'armée de terre, réponses au questionnaire des rapporteurs
S'agissant plus spécifiquement de l'innovation, le CCF comprend un « laboratoire du combat futur » (LCF) qui a pour mission : i) de contribuer à l'accélération de l'innovation tactico-opérationnelle prioritairement dans le terme 0-5 ans, ii) de développer des réflexions conceptuelles et doctrinales exploratoires pour en faciliter l'appropriation dans les forces ; iii) d'assurer les expérimentations et les évaluations tactiques nécessaires aux réflexions sur les adaptations capacitaires ; iv) de favoriser l'appropriation par les forces terrestres des innovations et nouvelles opérations d'armement et iv) en tant que référent du domaine pour l'armée de Terre, de diffuser la pratique du jeu de guerre.
Comme il a été rappelé supra, le CCF intègre en outre la STAT, laquelle est en lien direct avec les forces pour traiter de sujets d'expérimentations. Elle coordonne notamment l'innovation capacitaire ouverte au profit de l'armée de Terre et travaille en lien étroit avec l'AID sur les différents projets d'innovation (participatifs ou émanant directement de la STAT).
En 2024, le CCF a remis au chef d'état-major de l'armée de terre une proposition de rééquilibrage du modèle de l'armée de terre à l'horizon 3 ans permettant d'identifier des manques possibles dans certaines fonctions opérationnelles. Le CCF travaille en outre sur le projet ATHENA (accélération de la transformation à hauteur des engagements de l'avenir) qui vise à créer des écosystèmes capables d'accélérer la transformation de l'armée de terre en s'appuyant sur 4 axes : éclairer le besoin, intégrer l'innovation, accélérer l'appropriation par les forces et une armée de terre tournée vers l'avenir.
Les rapporteurs saluent la création du CCF qui devrait se traduire par une prise en compte encore accrue de l'innovation au sein de l'armée de terre. Si l'année écoulée a vu la conception de l'organisation du CCF et sa montée en puissance, rendant l'établissement d'un bilan prématuré, les rapporteurs s'attacheront à évaluer l'action de ce nouveau commandement dans le cadre de leurs travaux futurs.
B. LE FONDS EUROPÉEN DE DÉFENSE (FED) : UN DISPOSITIF UTILE MAIS DONT L'ACCÈS DEMEURE COMPLEXE
1. Depuis sa création, le FED a bénéficié à la BITD française
Le fonds européen de défense (FED) vise à renforcer l'innovation, la compétitivité et la capacité de l'industrie de défense européenne. Il soutient des projets de recherche et de développement en favorisant les coopérations entre au moins trois entités de différents États membres de l'Union européenne. Ce fonds est doté d'un budget de 8 Mds€ pour la période 2021-2027, réparti entre la recherche (2,7 Mds€) et le développement des capacités (5,3 Mds€). Depuis son lancement, il a financé 157 projets pour un montant de plus de 3 Mds€, dont 0,9 Md€ pour la recherche et 2,1 Mds€ pour le développement.
L'industrie française s'est positionnée au premier rang des trois appels à projets déjà passés, avec un fort taux de réussite, supérieur à la moyenne européenne (près de 50 % en 2023 contre une moyenne de 33 % au niveau européen). Au bilan, le FED a permis d'encourager de nombreuses coopérations européennes, en imposant que les résultats des projets soient protégés des influences extérieures et que les ressources utilisées soient exclusivement situées en Europe ou dans les pays associés.
2. Un dispositif dont l'accès demeure complexe, une stratégie d'articulation avec les financements nationaux qui devrait être plus clairement définie
Si, au cours des auditions, les personnes entendues ont globalement porté un regard positif sur le FED, son accès a cependant été présenté comme complexe.
La question des critères d'éligibilité a ainsi pu être soulevée. Le fait que les projets doivent être présentés dans le cadre d'un consortium réunissant des entreprises de plusieurs États membres peut en effet être pénalisant pour certaines entreprises qui ne remplissent pas formellement ce critère même si elles réunissent en leur sein des entités issues de plusieurs États européens.
L'AID a par ailleurs admis que des simplifications et des clarifications étaient nécessaires, notamment en ce qui concerne la protection des informations classifiées, la sous-traitance et le financement des projets pour une meilleure adoption par les États membres.
Enfin, il a été rappelé en audition que la France souffrait d'une absence d'articulation entre les financements européens et les financements nationaux. L'exemple d'industriels ayant obtenu des crédits européens au titre d'un projet et s'étant entendu dire par la suite que ce projet n'intéressait pas le MINARM a ainsi été cité en audition. Les rapporteurs estiment par conséquent nécessaire que la France se dote d'une véritable stratégie visant à réellement interfacer les financements européens et les financements nationaux.
C. L'ONERA, UN CHAMPION EUROPÉEN QUI DOIT ÊTRE SOUTENU
Au cours de son audition, le président de l'ONERA a présenté une situation encourageante sur les perspectives de l'opérateur, avec un carnet de commandes, notamment étrangères, en forte augmentation.
Évolution du montant des commandes (en M€)
Source: ONERA
L'année 2023 s'est ainsi traduite par un niveau record de commandes (177 M€), porté par la DGA, la DGAC et les industriels.
Si la France demeure le principal client de l'opérateur, la Belgique, les Pays-Bas mais également l'Inde et les États-Unis représentent une part non négligeable (de l'ordre de 15 %) du carnet de commandes de l'opérateur.
Plusieurs évènements intervenus en 2024 (réduction de la subvention pour charges de service public et de la subvention pour charges d'investissement, décalage de notification, réduction de produits) sont cependant de nature à fragiliser certaines actions mises en oeuvre par l'ONERA. En particulier, la baisse de la subvention pour charges d'investissement liée au projet immobilier PRISME (regroupement et modernisation des emprises en Ile-de-France) conduit à des tensions sur la poursuite de cet ambitieux projet déjà engagé.
De manière plus structurelle, l'activité de l'ONERA est confrontée à différents freins qu'il conviendrait de lever.
En premier lieu, la prise en compte dans le plafond d'emplois des doctorants au prorata du montant de la rémunération financée par l'opérateur est source de tension sur ses ressources humaines. Cette situation se traduit par une possible concurrence entre doctorants et salariés en CDI, une « externalisation » de la rémunération des doctorants conduisant, à terme, à priver l'opérateur de la maîtrise de la stratégie scientifique et un moindre attachement du doctorant à l'ONERA, alors que les doctorants constituent le premier vivier de recrutement des scientifiques employés par l'Office. Les rapporteurs renouvellent donc leur recommandation de revoir cette règle de prise en compte des doctorants dans les effectifs de l'ONERA en les comptabilisant en « hors plafond ».
En deuxième lieu, si des efforts ont été consentis en matière salariale, les niveaux de rémunération proposés par l'opérateur demeurent inférieurs à ceux du secteur privé, ce qui n'est pas sans conséquence sur la fidélisation.
Enfin, en troisième et dernier lieu, les souffleries nécessitent d'importants investissements, que la subvention pour charges d'investissement ne permet de financer que partiellement.
IV. LA PROBLÉMATIQUE DE L'ACCÈS AU FINANCEMENT PRIVÉ DES ENTREPRISES DE LA BITD : QUOUSQUE TANDEM ABUTERE PATIENTIA NOSTRA ?
A. UNE ACTION PARLEMENTAIRE QUI NE DOIT PAS RESTER LETTRE MORTE...
Les difficultés d'accès au financement privé des entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD) étaient un sujet peu abordé avant la crise du Covid, qui a mis en exergue les fragilités spécifiques de ces entreprises.
Une première alerte a été lancée par notre commission dans un rapport de juillet 2020 « L'industrie de défense dans l'oeil du cyclone »8(*). Par la suite, le Délégué général pour l'armement d'alors, Joël Barre, avait admis, au Sénat, l'existence d'une « frilosité bancaire », ouvrant la voie à différents travaux parlementaires rappelés ci-après.
Source : commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat
Les personnes entendues en auditions - industriels comme DGA ou AID - ont toutes salué le rôle positif joué par le Parlement dans l'amélioration de la visibilité de ce sujet.
Pour autant, en dépit d'avancées incontestables, grâce notamment à une action volontariste de la DGA (cf. encadré ci-après), les entreprises de la BITD continuent de rencontrer des difficultés de financement émanant des banques, des investisseurs mais également de certains assureurs (cf. infra).
Actions mises en oeuvre par la DGA pour lever les freins à l'accès au financement privé des entreprises de la BITD
Depuis 2023, la DGA a pris une série de mesures visant à lever un certain nombre de freins qui se sont articulées autour de trois axes :
Accès au crédit
- Mise en place d'un réseau de référents défense dès 2023 au sein des grandes banques françaises et installation, en miroir, d'une « médiatrice des banques » à la DGA ;
- Renforcement du prêt DEF'FI : dédié aux entreprises de la sphère « défense » et opéré par Bpifrance, ce prêt a fait l'objet d'une promotion renforcée auprès des entreprises. La mise en oeuvre d'un taux bonifié de 50 pdb sera effective dès janvier 2025 afin de soutenir la BITD dans un contexte de taux bancaires toujours élevés.
Accès aux fonds propres
Début 2024, la DGA a entrepris la constitution d'un réseau de partenaires financiers de confiance - pour l'essentiel, des fonds français de private equity, mais aussi des fintechs comme Kriptown qui ambitionne de faciliter l'introduction en bourse des PME. Ce dispositif, qui compte désormais plusieurs dizaines de sociétés de gestion, permettra de faciliter l'accès des entreprises de défense à des capitaux compatibles avec les impératifs de la BITD (provenance des fonds, durée de détention du capital, crédibilité des investisseurs). Il vient s'ajouter aux deux véhicules d'investissement publics existants, Definvest (100 M€) et le Fonds Innovation Défense (200 M€).
Actions d'influence
La DGA conduit des échanges récurrents avec les acteurs privés (Fédération bancaire française, banques commerciales, fonds d'investissement...) et publics (direction générale du Trésor, Bpifrance, Banque européenne d'investissement...). Ces actions permettent de veiller à la bonne prise en compte, par les parties prenantes, de la nécessité pour la BITD française et européenne de disposer de financements suffisants, en particulier dans le contexte de la guerre en Ukraine. Ainsi, la DGA a mené une veille active sur les politiques d'exclusion défense et est désormais consultée par les acteurs concernés, dont certains ont mis à jour leur doctrine afin notamment d'éviter l'emploi du terme d'« armes controversées ».
C'est pourquoi il est regrettable qu'en dépit d'un accord transpartisan et entre les deux chambres, les initiatives parlementaires de nature législative, qui prévoyaient le fléchage d'une partie de l'encours du livret A et de livret de développement durable et solidaire (LDDS), non destiné au financement du logement social, vers la BITD n'aient pas abouti du fait d'une censure des dispositifs inscrits dans la LPM 24-30 et dans le PLF 2024 par le Conseil constitutionnel ou de la non-inscription des propositions de loi9(*) qui reprenaient ces dispositifs à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
B. ...ALORS QUE LES DIFFICULTÉS PERSISTENT, EN DÉPIT D'UNE COMMUNICATION GOUVERNEMENTALE QUI SE VEUT RASSURANTE
Lors de l'audition du ministre des armées et des anciens combattants devant la commission, M. Jean-Louis Thiériot, ministre délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants, a indiqué10(*) : « Chacun sait désormais que la défense est la condition de tout le reste, et la situation s'améliore. Dans ce contexte, notre réflexion doit porter sur les financements bancaires - bien que les entreprises aient moins de mal à obtenir un prêt qu'il y a deux ans -, mais surtout sur le financement en capital. Nous devons essayer de dupliquer les réussites de fonds privés tels que Tikehau ou Weinberg Capital Partners, à l'échelle tant nationale qu'européenne, notamment au travers de la Banque européenne d'investissement (BEI) ».
Au cours des auditions, un tableau nettement moins favorable a cependant été présenté. Des exemples ont ainsi été cités d'entreprises s'étant vu refuser des financements du seul fait de leur activité dans le secteur de la défense ou ne parvenant pas à obtenir des garanties bancaires pour des opérations d'export.
Dans ses réponses au questionnaire de vos rapporteurs, la DGA indique qu'une vingtaine de cas ont fait l'objet d'un traitement spécifique par la médiatrice des banques. Si ce chiffre peut sembler faible, il ne représente que la partie émergée de l'iceberg. Des motifs liés à la situation de l'entreprise ou à la solidité projet pour lequel elles sollicitent un financement sont souvent avancés pour justifier un refus. Par ailleurs, les entreprises sont peu enclines à faire remonter les difficultés qu'elles rencontrent avec des établissements avec lesquels elles entretiennent une relation parfois ancienne. Enfin, les entreprises concernées peuvent avoir des réticences à attirer l'attention de leur donneur d'ordre (AID ou DGA) sur leurs difficultés financières.
Les difficultés d'accès aux financements peuvent en outre être plus pénalisantes pour les entreprises de la BITD que pour celles d'autres secteurs compte-tenu de leurs spécificités. En audition, la DGA a présenté les conclusions d'une étude sur la situation financière des PME et ETI du secteur de la défense réalisée au 2e trimestre 2024 par la direction générale du Trésor et le ministère des armées. Portant sur la période 2016-2021, elle confirme que ces entreprises disposent d'une structure financière plus risquée que leurs équivalentes civiles, du fait d'un endettement supérieur et d'une capacité moindre à dégager des marges et à les intégrer à leurs capitaux propres. Elle pointe également des délais de paiements plus importants de la part des donneurs d'ordre, dans la chaîne de valeur, par rapport aux secteurs civils équivalents.
Ces handicaps structurels peuvent en outre être renforcés par l'effort demandé par le ministère des armées en matière d'autofinancement (cf. supra) et par la remontée en puissance engagée depuis 2022 qui s'accompagne de nouveaux besoins d'investissement que la commande publique ne peut satisfaire à elle-seule.
Les rapporteurs ne peuvent par conséquent qu'appeler à des initiatives gouvernementales rapides sur ce sujet, le cas échéant sous la forme d'une reprise des propositions de loi dont l'examen avait été interrompu à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale (cf. supra).
S'agissant des points de vigilance identifiés au niveau européen, si certaines avancées, concernant par exemple les projets de taxonomie, sont à noter, tout danger n'est pas définitivement écarté.
Ainsi, la BEI devrait prochainement revoir sa doctrine d'investissement, ce qui répond à une demande de notre commission. Si les critères ne sont pas encore définitivement arrêtés, il semble acté que le seuil de 50 % de chiffre d'affaires provenant d'activités civiles sera supprimé. La BEI sera donc susceptible d'investir dans une entreprise faiblement duale. En revanche, le financement des entreprises produisant de l'armement létal devrait être exclu (avec une distinction possible entre le létal offensif et défensif). Cette situation n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle reviendrait à exclure de facto une partie significative des matériels et équipements militaires.
L'exclusion envisagée par la BEI du financement des entreprises produisant de l'armement létal n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle reviendrait à exclure de facto une partie significative des matériels et équipements et matériels militaires.
Par ailleurs, certaines initiatives prises par d'autres instances européennes sont à surveiller. L'Autorité européenne des marchés financiers a ainsi publié des lignes directrices sur la dénomination des fonds en matière environnementale, sociale et de gouvernance (ESG), qui étend la définition des armes controversées au nucléaire. En audition, la DGA s'est voulue rassurante, indiquant : « La DG Trésor est alignée avec la position du ministère des armées, donc il est probable qu'une solution satisfaisante soit trouvée », mais ce sujet devra faire l'objet d'une surveillance attentive.
L'Autorité européenne des marchés financiers a publié des lignes directrices sur la dénomination des fonds ESG, qui étend la définition des armes controversées au nucléaire.
V. UNE HAUSSE DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX RELATIONS INTERNATIONALES ET À LA DIPLOMATIE DE DÉFENSE PRINCIPALEMENT LIÉE À LA RENÉGOCIATION DU TRAITÉ DE COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉFENSE AVEC LA RÉPUBLIQUE DE DJIBOUTI
Le Traité de coopération en matière de défense (TCMD), conclu pour une période de 10 ans, a pris fin le 30 avril 2024. Bien que sa reconduction automatique fût possible, la France et Djibouti souhaitaient renforcer leur partenariat stratégique en en actualisant les termes pour deux décennies à venir.
Des discussions préliminaires ont eu lieu en février 2021, lors de la visite du président djiboutien à Paris, afin de cerner les ajustements nécessaires. Ces échanges ont mené à une déclaration d'intention commune sur le partenariat de défense, signée par les présidents français et djiboutien, jetant les bases des futures négociations.
Les pourparlers pour la révision du TCMD ont débuté lors d'une rencontre au format « 2+2 » entre les ministres de la défense et des affaires étrangères des deux pays, tenue à Paris le 30 mai 2023. Trois séries de réunions bilatérales ont suivi, d'abord à Djibouti en juin, puis à Paris en septembre, et à nouveau à Djibouti en novembre 2023. Une nouvelle rencontre au format « 2+2 » s'est ensuite tenue à Djibouti le 14 décembre 2023, réunissant les ministres des deux nations. Par la suite, les présidents français et djiboutien ont donné leur aval pour une signature prévue pour l'été 2024.
Le traité révisé, conclu pour 20 ans contre 10 ans dans le cadre du précédent traité, a ainsi été signé à Paris le 24 juillet 2024 par les deux chefs d'État, prévoyant une augmentation de la contribution financière de la France envers Djibouti.
À la suite de la renégociation du TCMD, les crédits inscrits pour 2025 au titre de la contribution forfaitaire versée à la République de Djibouti connaîtront une augmentation de 56,5 M€ et seront portés à 85 M€.
Les rapporteurs estiment qu'il était indispensable d'aboutir à un accord avec la République de Djibouti au regard de son positionnement stratégique bien identifié par nos alliés mais aussi par nos compétiteurs.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours de sa réunion du mercredi 27 novembre 2024, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Cédric Perrin, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » de la mission Défense.
M. Pascal Allizard, rapporteur pour avis. - Le programme 144 porte les crédits consacrés au renseignement et à la prospective du ministère des armées.
Le projet de budget qui nous est présenté respecte les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030, qui fixe un haut niveau d'ambitions en la matière.
Le programme 144 sera ainsi doté de 2 milliards d'euros l'an prochain, soit une progression de près de 6 % par rapport à 2024.
Je me concentrerai sur les moyens qui seront consacrés à l'innovation et à la prospective ainsi que sur les questions relatives à l'accès au financement des entreprises de la base industrielle et technologique de défense, et Gisèle Jourda évoquera les crédits du renseignement.
Mes chers collègues, la LPM prévoyait un effort historique en faveur de l'innovation de défense, avec des besoins inscrits au titre du « patch » innovation s'élevant à plus de 10 Mds€ sur la période 24-30.
Le PLF pour 2025 va au-delà de la trajectoire prévue en LPM en fixant un niveau de crédits dédiés à l'innovation s'élevant à près de 1,3 milliard d'euros contre un peu plus de 1,2 milliard d'euros envisagés dans la LPM.
Hors dissuasion, les crédits d'études amont s'établiront ainsi à 832 millions d'euros, soit un montant supérieur de 68 millions d'euros à l'annuité 2025 de la LPM.
Nous considérons que cet effort consenti dès les premières années de mise en oeuvre de la loi de programmation militaire va dans le bon sens pour deux raisons.
D'abord, parce que cela limite les effets de l'inflation, un euro d'aujourd'hui valant plus qu'un euro de demain.
Ensuite, et c'est une stratégie délibérée de l'agence de l'innovation de défense, car contractualiser rapidement avec les entreprises, en particulier les petites et les moyennes, permet de leur donner de la visibilité sur leurs financements étatiques.
Cette situation est-elle pour autant idyllique ? Pas tout à fait. Si les armées affirment n'avoir identifié aucune impasse dans les études qui seront lancées au cours des prochaines années, les industriels ont mis en avant un certain nombre de points de vigilance. Pour ne citer qu'un exemple, dans le domaine terrestre, le développement de certaines munitions de nouvelle génération et de munitions dédiées à la lutte anti drones pourrait être entravé faute de budgets suffisants.
Par ailleurs, les conséquences de l'annulation de 33 millions d'euros prévue en 2024, qui touchera principalement les crédits dédiés à l'innovation, ne sont pas encore connues. Il n'est pas à exclure que cette coupe dans les moyens du programme 144 nécessitera de reporter certaines opérations dont le lancement était prévu en 2025.
J'ajoute que les crédits consacrés au financement des grands démonstrateurs prévus dans la LPM diminueront de 12 millions d'euros, pour atteindre 118 millions d'euros.
Nous appelons à ce que cette baisse des crédits consacrés aux démonstrateurs ne soit pas compensée par une augmentation excessive de la part d'autofinancement de certains projets par les industriels. En effet, si nous considérons qu'il n'est pas anormal que les entreprises, en particulier les grands groupes, prennent une part de risque qui témoigne de l'intérêt qu'elles portent au projet, nous estimons qu'un équilibre doit être trouvé afin, d'une part, d'éviter d'aggraver les difficultés d'accès aux financements privés qui peuvent être rencontrées par certaines entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD) et, d'autre part, de ne pas rigidifier les dispositions contractuelles relatives à la propriété intellectuelle et industrielle, rendant difficiles ou impossibles les adaptations devenues nécessaires des matériels et équipements une fois acquis par les armées.
J'en viens à la question de l'accès au financement des entreprises de la BITD. Au cours de son audition devant notre commission, le ministère délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants, qui connaît bien cette question pour avoir beaucoup travaillé sur cette question lorsqu'il était parlementaire, s'est voulu optimiste sur l'évolution de la situation. J'ai d'ailleurs noté que le ministre avait laissé son ministre délégué répondre à ma question et avait « savouré » la réponse. Ce tableau est pourtant très éloigné de celui qui nous est présenté par les acteurs du secteur. Si des avancées peuvent être notées, grâce notamment aux alertes lancées par le Parlement et au volontarisme de la délégation générale de l'armement, force est de constater que des entreprises de la BITD continuent de rencontrer des difficultés d'accès au financement bancaire et aux investissements.
Certes, les cas remontés sont peu nombreux, mais s'élevaient tout de même à une vingtaine l'an dernier. Il faut être conscient que ces cas ne représentent que la partie émergée de l'iceberg. On peut comprendre que les entreprises préfèrent préserver leurs relations avec leurs banques et éviter d'exposer leurs difficultés de financement à leur donneur d'ordre. Nombre d'entreprises se voient ainsi refuser un prêt, un financement export, une garantie d'emprunt au seul motif que leur activité concerne la défense, ce qui est inacceptable dans un contexte où l'on parle d'économie de guerre. Par ailleurs, certains grands assureurs adopteraient ces mêmes restrictions. Loin d'une amélioration de la situation, nous constatons donc une forme d'aggravation.
C'est pourquoi nous appelons à des initiatives rapides de la part du Gouvernement sur ce sujet. Les propositions existent : il suffit de relancer les initiatives parlementaires suspendues depuis la dissolution !
J'ajoute et conclurai sur ce point que toute menace en provenance de certaines institutions européennes n'est pas écartée, comme en témoignent les lignes directrices de l'autorité européenne des marchés financiers sur la dénomination des fonds ESG, qui étend la définition des armes controversées au nucléaire.
Mes chers collègues, sous bénéfice de ces observations et celles de Gisèle Jourda, je vous proposerai d'adopter sans modification les crédits du programme 144.
Mme Gisèle Jourda, rapportrice pour avis. - Je m'attacherai à présenter la part des crédits du programme 144 consacrée au renseignement intéressant la sécurité de la France.
Concrètement, il s'agit des crédits de fonctionnement, d'investissement et d'intervention de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD).
Avec 508 millions d'euros de crédits de paiement en 2025 contre 476 millions d'euros en 2024, le budget de ces deux services progresse conformément à l'objectif fixé par la LPM de doublement des crédits en 2030 par rapport à 2017. Les effectifs vont également progresser de 7 652 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2024 à 7 814 ETPT en 2025, correspondant à 735 millions d'euros de crédits de paiement de titre 2 relevant du programme 212 « Soutien de la politique de défense ».
Ce sont donc au total sur les programmes 144 et 212 près de 1,25 milliard d'euros consacrés à la fonction de renseignement extérieur, de sécurité et de défense.
Il s'agit d'une année charnière particulière pour la DGSE qui vient de lancer le 12 novembre dernier les travaux du Fort neuf de Vincennes qui devront être livrés en 2030 pour une entrée en service en 2031. Nous avions d'ailleurs été convié à l'inauguration par le ministre de la défense, mais nous étions retenus par d'autres obligations. Cela fera certainement l'objet d'une visite prochaine à organiser avec le service.
L'année 2025 marquera également pour la DRSD une étape très importante de sa transformation. J'ai pu visiter avec le général Susnjara le nouveau bâtiment construit au coeur du fort de Vanves qui accueillera les systèmes et les équipes dans un nouvel environnement technologique et ergonomique de travail.
Au-delà du constat que l'allocation de crédit est conforme aux besoins programmés (les deux services ont exprimé leur satisfaction ce qui n'est pas courant en ce moment) je voudrais rappeler qu'elle s'inscrit donc dans la trajectoire visant un total de 5 milliards d'euros de crédits de renseignement sur la période de la LPM 2024-2030. C'est, je le rappelle encore, un des motifs qui avait conduit mon groupe à voter cette LPM.
Quelques observations tout de même :
- Je voudrais en effet souligner que le futur déménagement de la DGSE au Fort neuf de Vincennes comme la livraison du nouveau siège de la DRSD ne se limitent pas à des opérations immobilières. Celles-ci, de par leur contenu technologique et de nouvelles architectures de travail collaboratif, vont contribuer, pour la DRSD, à transformer dès la fin du premier semestre 2025 les méthodes de travail, à améliorer l'attractivité du recrutement et contribuer à la création d'un centre de formation, allant de pair avec la livraison d'un nouveau système d'information de renseignement et de contre ingérence de défense (SIRCID) ;
- S'agissant de la DGSE, notre attention a été attirée par l'accroissement de la conflictualité sur l'ensemble du spectre des missions du service tant sur les théâtres d'opération que sur la montée en gamme des menaces cyber et informationnelles, avec la nécessité de renforcer la sécurité opérationnelle de l'ensemble des postes et des agents. Je voudrais saisir cette occasion pour saluer ici l'ensemble de ces personnels qui travaillent à notre sécurité et dont certains sont détenus au Burkina Faso. Je leur exprime nos pensées ainsi qu'à leur famille. Leur libération est une priorité absolue.
Mes chers collègues, je proposerai comme mon collègue Pascal Allizard l'adoption sans modification de ces crédits du programme 144.
M. Ludovic Haye. - Je vous remercie d'avoir insisté sur la question de l'accès au financement des entreprises de la défense. Nous avons des retours d'industriels qui reçoivent des réponses négatives de leurs banques qui ne se cachent pas de refuser des prêts en raison de leur activité dans le secteur dans la défense. Comme le propose Pascal Allizard, je pense qu'il faut remettre sur la table les propositions qui ont été faites et d'en trouver d'autres peut-être au regard de l'évolution du contexte géopolitique.
M. Cédric Perrin, président. - Dans le cadre de la mission d'information que nous réaliserons sur la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE), à l'initiative du groupe socialiste notamment, nous reviendrons sur ces questions de financement, de conformité et de taxonomies.
M. Pascal Allizard, rapporteur pour avis. - Je précise qu'à Bercy, la direction générale des entreprises semble avoir saisi les enjeux, ce qui n'est pas le cas de la direction générale du Trésor, qui peut parfois donner le sentiment que ces sujets ne nous concernent pas. Du côté de la direction générale de l'armement, autant le directeur de l'agence de l'innovation de défense est conscient des problèmes rencontrés, autant le représentant du DGA s'est contenté de livrer les éléments de langage de la direction générale du Trésor. Il y a donc encore un vrai déni sur ce sujet dans certaines administrations. J'ajoute que ce qui se passe à Bruxelles est inquiétant.
M. Cédric Perrin, président. - J'ajoute que cette problématique touche désormais les assureurs. Certaines entreprises rencontrent des difficultés pour assurer des bâtiments. La proposition de flécher une partie de l'encours du livret A vers les entreprises de la défense ne visait pas à répondre à la totalité des besoins de financement de ces entreprises mais surtout à sensibiliser sur la nécessité d'accompagner les industriels de la BITD.
La commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 144.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Mardi 5 novembre 2024 :
- Général de division Jérôme BORDELLÈS, Capitaine de frégate Claude BARTHÉLÉMY de la division « cohérence capacitaire » et Colonel Valérie MORCEL, État-major des armées ;
Mercredi 6 novembre 2024 :
- M. le directeur de l'administration de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) ;
Mardi 12 novembre 2024 :
- MM. Philippe MISSOFFE, délégué général et Jean-Marie DUMON, délégué général adjoint du Groupement des industries de construction et activités navales (GICAN) ;
- Général Jean-Marc DUQUESNE, Délégué général et Mme Léa BENASSEM-DURIEUX, directrice des affaires publiques du Groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres (GICAT) ;
- MM. Guillaume MUESSER, Directeur des affaires de défense, Jérôme JEAN, directeur des Affaires publiques et Mme Emma GENTIL, chargée de mission affaires publiques du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS) ;
- Ingénieur général de l'armement Patrick AUFORT, directeur, Ingénieur en chef de l'armement David FORICHER et Mme Maud PICHARD, responsable des relations institutionnelles de l'Agence de l'innovation de défense ;
- MM. Bruno SAINJON, président-directeur général et Jacques LAFAY, conseiller du président de l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA) ;
Jeudi 14 novembre 2024
- Général de corps d'armée Philippe SUSNJARA, directeur du renseignement et de la sécurité de la défense (audition dans le cadre d'une visite du fort de Vanves et des travaux de construction immobilière du siège de la DRSD) ;
Mardi 19 novembre 2024 :
- Général corps d'armée Bruno BARATZ, Colonel Rémi PELLABEUF et Mme Jade GELLENONCOURT, État-major de l'armée de terre ;
- Mme Alice RUFO, directrice générale des relations internationales et de la stratégie du ministère des armées ;
- MM. Frédéric PETIT, conseiller armement et innovation et adjoint du sous-chef d'état-major Plans/ programmes et Mehdi DHAKOUANI, ingénieur des études et techniques de l'armement de l'État-major de la marine ;
- Général de brigade aérienne Vincent CHUSSEAU, sous-chef d'état-major « plans-programmes » et Mme Natacha BONNEMAINS, ingénieure en chef de l'armement de l'État-major de l'armée de l'air et de l'espace
* 1 Audition du 13 novembre 2024.
* 2 Centre de réponse à incident cyber des entreprises de défense
* 3 Le périmètre est celui du « patch » innovation de la LPM qui inclut les études amont hors dissuasion, les études prospectives et stratégiques, les études technico-opérationnelles hors dissuasion et les subventions des opérateurs (ONERA, Institut de recherches franco-allemand de Saint Louis et écoles sous tutelle de la DGA).
* 4 Projet de loi de finances pour 2024, Défense : Environnement et prospective de la politique de défense, avis n° 130 (2023-2024), tome V, déposé le 23 novembre 2023.
* 5 Renseignement et prospective : garder un temps d'avance, conserver une industrie de défense solide et innovante, rapport d'information n° 637 (2022-2023) fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armée par MM. Pascal ALLIZARD et Yannick VAUGRENARD, 24 mai 2023.
* 6 Instruction n° 506403/ARM/CCF relative à l'organisation et aux attributions du commandement du combat futur.
* 7 Il s'agit, depuis le 1er août 2023, du général de corps d'armée Bruno Baratz.
* 8 L'industrie de défense dans l'oeil du cyclone, rapport d'information n° 605 (2019-2020) de MM. Pascal ALLIZARD et Michel BOUTANT, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 8 juillet 2020.
* 9 Proposition de loi relative au financement des entreprises de la base industrielle et technologique de défense française, texte n° 191 (2023-2024) de M. Pascal ALLIZARD et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 11 décembre 2023 et proposition de loi visant à flécher l'épargne non centralisée des livrets réglementés vers les entreprises du secteur de la défense nationale, n° 2094 de M. Christophe PLASSARD et plusieurs de ses collègues, déposée à l'Assemblée nationale le mardi 23 janvier 2024.
* 10 Audition du 15 octobre 2024.