C. UN DÉSENGAGEMENT FINANCIER QUI MENACE CINQ ANS D'INVESTISSEMENTS EN MATIÈRE D'INCLUSION NUMÉRIQUE

Le budget alloué à l'inclusion numérique dans la loi de finances pour 2025 avait déjà eu pour effet l'arrêt du cofinancement, par l'État, de 1 200 postes de conseillers numériques. Le nombre de postes engagés dans le dispositif est ainsi passé de 4 000 à 2 800 fin 2025. Avec 14 M€ inscrits au PLF pour 2026, la baisse du nombre de postes cofinancés par l'État va mécaniquement s'accélérer en 2026, la grande majorité des postes ayant une échéance de fin de subventionnement courant 2026 : ceux-ci avaient en effet été reconventionnés en 2023 et 2024 pour 3 ans.

Ce désengagement financier a été opéré dans des délais rapides : en seulement 24 mois, les crédits sont passés de 62 M€ à 14 M€, ce qui menace la pérennité du dispositif et des compétences acquises. Comme l'a indiqué la Banque des Territoires au rapporteur pour avis, « les collectivités et les associations qui emploient actuellement les conseillers numériques n'auront pas toutes la capacité de pérenniser ces postes à l'issue du cofinancement de l'État. [...] Nous estimons qu'environ 1 000 postes créés par le dispositif pourraient être pérennisés à l'issue du soutien de l'État, soit un quart seulement des 4 000 postes initiaux ».

Dans la mesure où la rapidité du désengagement de l'État met en péril l'ensemble des investissements réalisés depuis 5 ans en matière d'inclusion numérique, à hauteur de près de 390 M€, la commission, sur proposition du rapporteur pour avis, a adopté à l'unanimité un amendement visant à réduire de moitié l'effort financier demandé aux porteurs de projet sur l'année 2026 en matière d'inclusion numérique, et prévoyant ainsi une augmentation de crédits de 20 M€.

D. L'IMPACT SUR « FRANCE NUMÉRIQUE ENSEMBLE », UNE STRATÉGIE DÉJÀ FRAGILISÉE

« La formalisation des feuilles de route locales intervient à un moment où les cofinancements de l'État s'arrêtent. Comme injonction contradictoire, c'est plutôt fort ! »

L'association de collectivités Avicca4(*)

Le désengagement financier de l'État intervient moins d'un an après le lancement des feuilles de route territoriales en matière d'inclusion numérique, les plans d'action « France numérique ensemble » (FNE). Ainsi, comme l'a indiqué l'ANCT au rapporteur pour avis, ce retrait de l'État « risque d'enrayer une dynamique enclenchée depuis le plan de relance, et qui structurait le déploiement de toute la stratégie France numérique ensemble ».

C'est d'ailleurs déjà le cas : au sein de 12 départements, aucune collectivité ne s'est manifestée pour porter la gouvernance locale « France numérique ensemble », ce qui s'explique, pour la majorité de ces départements, par la crainte d'un désengagement financier de l'État à moyen et long terme.

Gouvernances locales FNE : un tout premier point d'étape

L'objectif formulé en 2023 pour la stratégie nationale « France numérique ensemble » pilotée par la DGE et l'ANCT était de « territorialiser la politique d'inclusion numérique et d'accompagner les acteurs locaux par la mobilisation d'un fonds d'ingénierie dédié ».

Une circulaire de juillet 2023, traduction de la stratégie nationale, demandait aux préfets de lancer une concertation avec les collectivités territoriales pour porter la déclinaison locale des feuilles de route. Suite à cette concertation, 106 gouvernances locales « France numérique ensemble » avaient été remontées à l'ANCT en 2024.

Depuis, 84 feuilles de route ont été formalisées, permettant de manière inédite de recenser les stratégies locales d'inclusion numérique. Il s'agit, dans la plupart des territoires, de politiques publiques naissantes où les acteurs ont besoin de se connaître et de se faire connaître : 46 % des actions proposées par des feuilles de route sont ainsi des actions de coordination et de sensibilisation.


* 4 Réponse au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

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