LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
MERCREDI 29 OCTOBRE 2025
- Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) des Alpes françaises 2030 : MM. Edgar GROSPIRON, président, et Cyril LINETTE, directeur général.
MARDI 4 NOVEMBRE 2025
- Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) : Mme Béatrice BOURGEOIS, présidente, M. Jérémy ROUBIN, secrétaire général, et Mme Marilyn HESRY, secrétaire générale adjointe.
- Agence nationale du sport (ANS) : Mmes Marie-Amélie LE FUR, présidente, et Marie-Line ARNAUD, directrice générale adjointe.
- Ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative - Direction des sports : Mme Fabienne BOURDAIS, directrice des sports, MM. Jérôme FOURNIER, chef de service, adjoint à la directrice des sports, et Michaël BOUGEAREL, adjoint au chef de la mission financière.
MERCREDI 5 NOVEMBRE 2025
- Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP) : M. Fabien CANU, directeur général, et Mme Anne WITTMANN, directrice générale adjointe en charge de l'administration générale.
Table ronde des fédérations nationales sportives
- Fédération française de Handball (FFHANDBALL) : M. Philippe BANA, président ;
- Fédération française d'Athlétisme (ATHLÉ) : M. Jean GRACIA, président ;
- Fédération française de Judo (France Judo) : MM. Stéphane NOMIS, président, et Sébastien NOLESINI, directeur général.
JEUDI 6 NOVEMBRE 2025
- Association nationale des élus en charge du sport (ANDES) : M. Vincent SAULNIER, secrétaire général.
ANNEXE I
Audition commune de Mmes Amélie
Oudéa-Castéra,
présidente du Comité national
olympique et sportif français (CNOSF),
et Marie-Amélie
Le Fur,
présidente du Comité paralympique et sportif
français (CPSF)
MERCREDI 12 NOVEMBRE 2025
___________
M. Laurent Lafon, président. - Nous en venons à l'audition de Mmes Amélie Oudéa-Castéra et Marie-Amélie Le Fur, respectivement présidentes du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et du Comité paralympique et sportif français (CPSF), qui représentent, accompagnent et soutiennent l'ensemble du mouvement sportif dans notre pays.
Mesdames les présidentes, nous sommes très heureux de vous accueillir pour échanger sur la situation du sport en France. Notre commission examinera la semaine prochaine l'avis de son rapporteur sur les crédits du sport, Jean-Jacques Lozach, alors que le débat sur le projet de loi de finances (PLF) démarrera le 25 novembre au Sénat.
La question du financement des politiques sportives est aujourd'hui au coeur des préoccupations du mouvement sportif. Malgré les promesses d'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024, la situation budgétaire impose un recul des moyens affectés au sport, compromettant les ambitions fixées ces dernières années, notamment celle de faire de la France une nation sportive.
Vous aviez toutes deux exprimé votre inquiétude cet été, alors que le PLF était encore en cours d'élaboration. La baisse des crédits du programme 219 « Sport » est finalement moindre que ce que vous redoutiez. Elle est néanmoins de l'ordre de 6,5 % et entourée de nombreuses incertitudes, s'agissant d'éventuelles régulations budgétaires qui pourraient avoir lieu, comme ce fut le cas cette année.
Le rendement des taxes affectées à l'Agence nationale du sport (ANS) est lui aussi incertain, en particulier celui de la « taxe Buffet », qui assure une solidarité entre sport professionnel et sport amateur, mais dépend à 70 % de l'évolution des droits de retransmission du football.
Ces interrogations touchent à la fois le financement du sport de haut niveau et le développement des pratiques sportives, les deux étant étroitement liés. Viennent s'y ajouter des enjeux de gouvernance. Madame Marie Amélie Le Fur, vous présidez également l'ANS, dont les missions sont en cours de réexamen, conformément aux termes de sa convention constitutive. La complexité de la distribution des subventions sur le terrain est régulièrement pointée.
Par ailleurs, nous avons engagé, au Sénat, une réforme du sport professionnel, afin d'encadrer davantage le fonctionnement des ligues et de renforcer la solidarité dans ce secteur.
Enfin, votre rôle est déterminant pour préserver autant que possible la dynamique des Jeux, mais aussi pour préparer les futurs jeux Olympiques et Paralympiques : ceux de Milan-Cortina, qui auront lieu du 6 au 22 février 2026, et bien sûr les Jeux d'hiver de 2030 qui se dérouleront dans les Alpes françaises. Leur organisation a été véritablement lancée cette année, avec la mise en place d'un comité d'organisation et d'une Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo).
Vous nous direz comment vous percevez l'avancement de ce projet, qui présente la particularité d'avoir été initié par les deux régions principalement concernées, en concertation avec l'État.
Le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 est actuellement en navette entre les deux assemblées. Nous attendons désormais son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
Mesdames les présidentes, je vous propose de procéder à un propos liminaire. Nos collègues pourront ensuite vous poser leurs questions, à commencer par le rapporteur Jean-Jacques Lozach.
Mme Amélie Oudéa-Castéra, présidente du Comité national olympique et sportif français (CNOSF). - Monsieur le président, merci pour cette introduction. Je souligne la richesse des travaux du Sénat sur tous les sujets qui touchent au sport, et particulièrement ceux de votre commission, qui a ajouté le mot « sport » à son intitulé en 2024. Votre investissement porte à la fois sur l'olympisme et le paralympisme, sur le sport amateur et le sport professionnel. Je veux aussi saluer l'importance de la proposition de loi relative au sport professionnel que vous avez portée, monsieur le président, avec Michel Savin.
Le sport traverse une étape inédite de son histoire. Entre Paris 2024 et les Jeux d'hiver de 2030, jamais nous n'avons accueilli deux éditions des Jeux à six ans d'intervalle. Ce contexte nous offre un élan unique pour atteindre notre ambition : passer d'une nation de grands sportifs à une grande nation sportive. C'est un moment d'opportunité, mais aussi un moment où certains vents contraires soufflent sur le sport français ; il faut les contenir. C'est maintenant que nous pouvons durablement faire bouger les lignes de la place du sport en France. Cette occasion ne doit pas être gâchée.
Notre premier impératif est de réussir ensemble l'héritage des Jeux de Paris 2024. C'est par nos actions quotidiennes que celui-ci prendra tout son sens. Il est déjà concret, bien plus qu'on ne le dit : 17,2 millions de licenciés, soit une progression de 20 points en vingt ans ; 71 % des Français pratiquant une activité sportive, soit une hausse de plus de 17 points en douze ans ; des milliers d'équipements de proximité construits avec l'ANS et le mouvement sportif ; des résultats sportifs exceptionnels de nos équipes de France, confirmés en 2025, qui valident largement notre modèle de haute performance.
Toutefois, il va falloir aller « plus vite, plus haut et plus fort » sur cet héritage. Le CNOSF a un rôle et une responsabilité particulière avec la reprise du Fonds de dotation Paris 2024, que j'ai le plaisir de présider. Ce fonds coordonne les parties prenantes de la gouvernance pour le bon usage du boni de liquidation des Jeux, aujourd'hui chiffré à 76 millions d'euros. Pour les années à venir, il interviendra sur trois axes : les célébrations des Jeux, la pratique sportive pour tous et l'accompagnement des athlètes.
Au titre du sport pour tous, il est impératif d'accélérer le processus sur trois sujets prioritaires.
Le premier est la place du sport dans la vie des jeunes. Le mouvement sportif regrette l'arrêt, en 2025, du Pass'Sport pour les enfants de 6 à 13 ans issus de familles modestes, en sus du démantèlement du dispositif des deux heures supplémentaires pour les collégiens. Ces deux évolutions ont malheureusement été confirmées dans le PLF pour 2026, mais de bonnes nouvelles se profilent peut-être pour le Pass'Sport, grâce aux amendements adoptés en commission des affaires culturelles puis en commission des finances à l'Assemblée nationale, visant à le rétablir pour la saison prochaine.
Le deuxième concerne les équipements structurants. L'effort doit se poursuivre, et je sais que votre assemblée est très attentive à l'accompagnement de l'investissement local. Nous avons besoin de remédier à la vétusté d'un certain nombre d'équipements sportifs, tout en travaillant à leur meilleure mutualisation pour booster les taux d'usage dans les territoires.
Le troisième est l'inclusion sociale par le sport. Il faut absolument poursuivre la démarche des 10 000 clubs engagés dans les territoires, avec des actions d'« aller-vers », de repérage des « invisibles » et d'insertion professionnelle. Pour ce faire, le sport est un levier important.
En parallèle de l'héritage, il faut préparer les Jeux de 2030. Lors du Comité interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques (Cijop) de juin dernier, j'ai présenté les cinq rôles majeurs que jouerait à cet égard le CNOSF : préparer et conduire la délégation des athlètes, en lien avec le CPSF ; mobiliser l'expertise des fédérations de sports d'hiver, faire appel à des volontaires et supporters, associer le grand public en amont et durant les Jeux via le Club France ; et contribuer à la construction du volet 2030 de l'héritage des Jeux, en favorisant les meilleures mutualisations et passerelles avec l'héritage de Paris 2024.
Le projet avance, les équipes du Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) sont maintenant bien structurées, et une révision budgétaire récente a permis d'affiner le budget du Comité d'organisation. Le CNOSF et le CPSF y ont pris une part active.
Le PLF pour 2026 comporte également deux éléments importants pour 2030 : l'article 60, qui acte la garantie de l'État au projet, dans des modalités encore en discussion entre les parties prenantes et devant l'Assemblée nationale ; et la création du programme 385, qui porte les autorisations d'engagement (AE) et les crédits de paiement (CP), avec la mise en place de la Solideo, dont les effectifs progressent sensiblement dans cette version du PLF.
En prélude à 2030, les Jeux de Milan-Cortina auront lieu dans à peine 85 jours. Nous aurons une magnifique équipe de France de plus de 160 athlètes, un record pour notre délégation olympique, avec l'ambition de figurer dans le top 5, comme à Paris 2024. Les moyens alloués à la haute performance ont été largement préservés dans le PLF pour 2026, ce dont le mouvement olympique se félicite.
Dans ce moment inédit, le CNOSF accompagne avec détermination la transformation du mouvement sportif. J'ai défendu, dans le cadre de l'élection à la présidence du comité, une ambition sous la forme d'un triptyque : bâtir un CNOSF plus fort, plus utile et plus moderne.
Plus fort, pour peser davantage dans le débat public et faire entendre la voix du sport. Je présenterai mardi prochain, au Salon des maires, un plaidoyer pour faire du sport une grande cause municipale pour le mandat à venir, après ma contribution récente à la Convention citoyenne sur les temps de l'enfant.
Plus utile, en soutenant les fédérations, particulièrement les plus petites, sur la lutte contre les violences, la laïcité, la simplification administrative, le bénévolat et la prospection de partenaires économiques.
Plus moderne, enfin, en accompagnant activement la transformation économique des fédérations, leur transition numérique et écologique, et la féminisation des instances via l'essaimage du Club des 300 dirigeantes dans les territoires pour atteindre la parité au niveau des ligues régionales en 2028. Nous mettrons également en place un conseil de prospective pour anticiper l'évolution des usages.
Pour réussir l'héritage, préparer les Jeux de 2030 et transformer notre modèle, le sport a besoin de soutien. Vous l'avez évoqué, monsieur le président, 2025 a été une année très difficile, avec un budget en baisse, atténué toutefois grâce aux amendements du Sénat, et des coupes en gestion de près de 300 millions d'euros qui ont mis le sport en difficulté.
Le budget pour 2026, actuellement en discussion, marque une inflexion positive que je veux saluer. La baisse des crédits, d'un peu moins de 5 %, est bien moindre que les 18,7 % envisagés initialement. Le maintien des taxes affectées est également un point essentiel pour les ressources du sport français.
Nous avons besoin de quelques corrections que le Sénat pourra certainement apporter, notamment grâce à l'action et à la sagacité de votre rapporteur pour avis, M. Jean-Jacques Lozach. Le budget est presque satisfaisant, mais il reste essentiel de travailler ensemble au rétablissement du Pass'Sport pour les 6-13 ans.
Nous devons créer, en lien avec le ministère des sports, les conditions d'une reconstitution de la trésorerie de l'Agence, qui a beaucoup mobilisé ses ressources pour mener à bien les plans d'équipement. Il est également nécessaire de réviser la trajectoire de baisse des cadres techniques sportifs, qui, avec une réduction de 26 postes dans le projet, pose de réelles difficultés pour nos fédérations, tant pour le haut niveau que pour le développement de la pratique.
Nous sommes également inquiets de la trajectoire de baisse des services civiques, avec la suppression prévue de l'enveloppe de 40 000 services civiques dans le budget pour 2026. Ces points s'ajoutent aux aléas liés au rendement de la « taxe Buffet », dans un contexte où les droits du football restent incertains.
Le soutien de l'État et des parlementaires en faveur du CNOSF est indispensable pour que celui-ci puisse accomplir l'ensemble de ses missions. En 2025, le Comité avait construit un budget à l'équilibre autour de 25 millions d'euros, garanti par la convention pluriannuelle d'objectifs (CPO) avec l'État et par un accord sur le programme de marketing conjoint (JMPA) avec les deux régions et le Comité international olympique (CIO).
Ces accords ont subi des baisses significatives : une contraction de 3 millions d'euros sur la CPO et une réduction de 20 % de l'accord marketing, l'ensemble représentant 75 % des recettes initiales. Il est important de préserver la soutenabilité économique de notre modèle. À cet égard, l'engagement du ministère des sports de maintenir une CPO à 9,4 millions d'euros annuels, inscrits dans le PLF pour 2026, constitue un élément capital.
En conclusion, je soulignerai l'effort du CNOSF pour prendre pleinement sa part dans les ajustements budgétaires que l'ensemble des secteurs doivent consentir. Le Comité mène en parallèle un véritable effort de transformation économique pour moderniser le modèle du mouvement sportif, en recherchant des financements privés - sponsoring, partenariats, mécénat, travaux - et en articulant ses actions avec des fonds d'investissement et des banques publiques comme la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ou la Banque publique d'investissement (Bpifrance).
Vous, élus de la Nation, qui êtes proches du terrain, savez tout ce qu'apporte le sport. C'est le moment de ne pas relâcher notre engagement. Le sport conduit cet effort de transformation, et il nous faut, jour après jour, le faire vivre dans nos territoires pour bâtir enfin cette nation sportive à la hauteur de nos ambitions.
Mme Marie-Amélie Le Fur, présidente du Comité paralympique et sportif français (CPSF). - Je m'exprime aujourd'hui en qualité de présidente du Comité paralympique et sportif français pour présenter plus spécifiquement les enjeux de financement du parasport en France.
Je souhaite d'abord remercier le Sénat, et plus particulièrement votre commission, pour leur engagement en faveur du sport. Deux exemples l'illustrent : la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France, structurante pour le parasport, qui a permis des avancées sur plusieurs chantiers, et l'amendement de 80 millions d'euros voté l'an dernier dans le PLF, grâce auquel l'ANS a pu maintenir une politique engagée en faveur du sport dans les territoires.
Je présenterai le fonctionnement budgétaire du Comité paralympique et sportif français et du parasport en France, ainsi que les évolutions considérables que nous avons connues ces dernières années.
Le CPSF exerce deux grandes missions : d'une part, la conduite de la délégation aux jeux Paralympiques d'été et d'hiver - nous sommes dans la phase finale de préparation de Milan-Cortina 2026, jeux importants dans la perspective de 2030, tout en préparant dès maintenant Los Angeles 2028 - ; d'autre part, la représentation des fédérations souhaitant développer une offre sportive.
Cette dynamique s'est fortement renforcée : de 25 fédérations membres du Comité paralympique en 2018, nous sommes passés à 50 aujourd'hui, avec trois nouvelles demandes d'affiliation. Cela illustre la maturité croissante du mouvement sportif et sa volonté d'accueillir les personnes en situation de handicap (PSH) dans les clubs et les territoires.
Le budget du Comité est globalement équilibré entre fonds publics et privés. Il repose notamment sur une CPO avec le ministère des sports, d'un montant de 1,5 million d'euros par an, complétée par des avenants couvrant les jeux Paralympiques et les compétitions multisports.
Nous bénéficions également d'autres financements publics, en particulier d'une contractualisation récente avec les agences régionales de santé (ARS), conformément à la loi du 2 mars 2022 relative au sport en établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS). Celle-ci prévoit la mise en place d'un projet sportif et d'un référent sport dans chaque établissement. Fort de son expertise, le Comité paralympique accompagne les ARS et ces référents dans la montée en compétence, afin d'adapter les projets aux besoins des PSH.
Un financement de l'ANS soutient par ailleurs notre déploiement territorial : depuis 2019, le Comité compte au moins un salarié dans chaque région, et deux en Nouvelle-Aquitaine et en Auvergne-Rhône-Alpes, pour accompagner le mouvement sportif, les acteurs de proximité et les collectivités dans la définition et la mise en oeuvre de politiques publiques du parasport.
S'agissant des ressources privées, la France, en tant que pays hôte des jeux Paralympiques, ne peut commercialiser directement ses marques, notamment les Agitos. Un programme marketing conjoint a donc été signé avec le Comité d'organisation, initialement prévu à hauteur de 15,6 millions d'euros. À la suite d'une révision budgétaire menée ces dernières semaines, ce JMPA a subi une baisse de 3 millions d'euros sur six ans, ce qui rend d'autant plus nécessaire la stabilité des financements publics, en particulier de la CPO et de la contractualisation avec l'ANS.
Le Comité porte également des programmes d'intervention dans les territoires, souvent cofinancés avec les collectivités. Or, la baisse de leurs dotations et leur recentrage sur les compétences prioritaires entraînent une diminution des budgets dédiés au sport. J'attire notamment l'attention sur le programme « Club inclusif », programme phare d'impulsion territoriale : en 2022, seulement 1,4 % des clubs déclarait pouvoir accueillir une PSH ; nous atteignons aujourd'hui 3 % à 4 %, mais nous devons accélérer le processus. Ce programme, cofinancé par les collectivités, risque toutefois d'être fragilisé si les financements locaux se contractent davantage.
Concernant la trajectoire financière entre 2024 et 2025, le budget de la haute performance s'est stabilisé. Grâce à l'amendement que vous aviez présenté, nous avons pu, en cours d'année, doter la haute performance de 6 millions d'euros complémentaires, permettant de financer le plan hiver et d'accompagner les fédérations qui préparent les athlètes pour les JOP de Milan-Cortina en 2026 et pour ceux qui se dérouleront dans les Alpes françaises en 2030.
Concernant le paralympisme, l'impulsion des Jeux de Paris 2024 a quadruplé les moyens dédiés à la haute performance, permettant à la France d'enrayer sa chute au classement mondial et d'atteindre le top 8 cette année. L'ambition collective reste de viser le top 5 pour Los Angeles 2028, ce qui nécessitera des performances accrues dans les sports majeurs, tout en préservant la pluralité de notre modèle et la diversité des fédérations et disciplines. Ce rayonnement des athlètes de haut niveau alimente également la pratique et l'engagement sportif sur les territoires.
Sur le développement de la pratique, une vraie compréhension des enjeux du parasport s'est affirmée ces dernières années. Entre 2019 et 2024, 70 millions d'euros ont été attribués à ce secteur sur des enveloppes désormais dédiées et fléchées. En 2025, ces financements ont été stables. L'enveloppe consacrée à l'accessibilité, historiquement portée à 3 millions d'euros en 2024, a baissé de 500 000 euros en 2025. Elle reste structurante, soutenant à la fois les collectivités dans la mise en accessibilité des équipements et les clubs pour s'équiper et accueillir les PSH.
En outre, une part des projets sportifs fédéraux (PSF) doit être consacrée au parasport. Or, ce financement a déjà baissé en 2025. Sans sursaut dans le budget 2026, ce sera malheureusement cette enveloppe qui sera prioritairement diminuée. Ainsi, à budget et politique d'intervention inchangés, eu égard aux efforts de trésorerie consentis pour absorber une coupe budgétaire de près de 300 millions d'euros en cours d'année 2025, nous aurons en fin d'année une trésorerie négative, ce qui supposerait une coupe de 40 millions d'euros dans nos enveloppes d'intervention, principalement à destination des PSF, donc des clubs en territoire et des organes déconcentrés de nos fédérations, c'est-à-dire au plus proche des pratiquants. Nous souhaitons donc reconstituer un niveau de trésorerie acceptable et maintenir notre politique d'intervention.
Pour conclure, nous sommes tournés vers les Jeux de 2030. Depuis le début de la phase de candidature, le comité paralympique est autour de la table, ce que justifient les singularités des parasports, notamment d'hiver.
Notre ambition pour 2030 est triple. Premièrement, nous devons réussir le volet « haute performance » et tendre vers une plus grande diversité. Ainsi, nous n'avions jamais eu d'équipe de curling ou de hockey sur luge. Notre délégation paralympique à Milan compte quinze athlètes. Pour 2030, nous souhaitons densifier l'équipe de France et avoir plus de sports représentés.
Deuxièmement, il faut porter le développement de la pratique sportive des PSH, sous l'angle du sport d'hiver, de montagne et, plus globalement, de nature, dans lequel nous rencontrons encore bien des difficultés, notamment d'ordre réglementaire ou d'accessibilité.
Troisièmement, comme pour Paris 2024, ces Jeux doivent être un catalyseur d'innovation sociale en faveur des PSH, afin de les replacer au coeur du débat de société. Le sport est un bon levier, à même de mobiliser et de sensibiliser la jeunesse dans un cadre ludique.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs au sport. - Concernant la gouvernance des fédérations, deux dates récentes sont à retenir : d'une part, l'année 2019, avec la création de l'ANS ; d'autre part, la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France. Comment appréciez-vous ces évolutions, notamment en matière de transparence des fédérations, de pérennité financière et de relations entre sport amateur et sport professionnel ? Des ajustements restent-ils nécessaires ?
Je m'interroge notamment sur le devenir de l'ANS. Quelle vision privilégiez-vous pour son périmètre d'intervention ? Doit-elle se concentrer sur le sport de haut niveau, voire sur la haute performance ? Faut-il conserver le statut de groupement d'intérêt public (GIP) ? Selon quelles déclinaison territoriale, implication du monde économique et relation avec les délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (Drajes) ?
Pour en revenir au débat budgétaire, madame la présidente du CNOSF, vous parlez de vents contraires sur le sport français. Ces vents sont également budgétaires : en un an, les crédits de paiement baissent de 6,5 %, à 554 millions d'euros, pour le seul programme 219 « Sport », exclusion faite, donc, du programme 385 « Jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver 2030 ». La tendance est claire : la diminution de 182 millions d'euros en 2025 suit des hausses de 60 millions d'euros en 2024 et de 143 millions d'euros en 2023.
Je sais votre attachement, à toutes les deux, à une trajectoire de diversification des ressources, publiques comme privées, pour les fédérations, ce qui amène au problème des contrats sportifs fédéraux. Billetterie, produits dérivés, mécénat, sponsoring, sans parler de l'argent public, avec les deux taxes affectées et les crédits budgétaires de l'État... Quelles sont vos suggestions ? Quelles barrières restent à lever ?
Vous avez évoqué trois points de vigilance, à commencer par le Pass'Sport, dont le reformatage est malvenu. Ainsi, la semaine dernière, des présidents de fédération nous ont d'ores et déjà fait part d'un ralentissement des inscriptions des 6-13 ans. La décision n'a d'ailleurs fait l'objet ni d'étude d'impact ni de concertation.
Vous avez également mentionné la trésorerie de l'ANS et la baisse de 26 conseillers techniques sportifs (CTS). J'ajouterais un autre point de vigilance, selon moi le très gros point noir de ce budget 2026 : les équipements. En effet, tous les programmes qui leur sont propres disparaissent, nous laissant noyés dans les programmes de droit commun : dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et fonds vert, lequel chutera de 500 millions d'euros l'année prochaine... Un véritable coup d'arrêt a été donné aux programmes spécifiques comme « Génération 2024 » et le plan 5 000 équipements sportifs de proximité.
Il y a bien une volonté de mutualisation des équipements sportifs, en application de la loi du 2 mars 2022, qui n'est d'ailleurs pas sans poser des difficultés. En effet, si, sur le papier il est facile d'ouvrir les gymnases des collèges et des lycées, dans la réalité, c'est plus difficile. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas s'y employer, car il est vrai que ces équipements sont loin d'être saturés, notamment à partir de 17 heures et pendant les vacances.
Selon nous, le plafond de la « taxe Buffet » a été surévalué. C'est d'ailleurs la première fois que je vois une taxe plafonnée au-delà du montant escompté... Nous devrions ainsi atteindre 40 millions d'euros, au lieu des 60 millions inscrits, ce qui est à relier à la crise des droits télévisuels du football.
Dans quelle mesure le CNOSF et le CPSF accompagnent-ils l'émergence d'emplois qualifiés dans le sport pour faire face à l'afflux de licenciés dans les clubs et créer des emplois ? Je songe en particulier au secteur de l'insertion sociale et professionnelle et à la politique de la ville.
Vous avez évoqué le rôle que vous entendez jouer pour la préparation des JOP 2030. Nous avons voté des textes, souvent d'initiative sénatoriale, relatifs à la protection des publics, et notamment à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS). Comment le CNOSF et le CPSF s'articulent-ils avec les fédérations et le ministère pour appliquer et mesurer l'efficacité de ces nouveaux dispositifs ?
Je terminerai par une synthèse. Le 11 octobre dernier, vous avez toutes les deux organisé une manifestation d'alerte et d'inquiétude, pour essayer de dynamiser le mouvement sportif et parasportif. Avez-vous l'espoir d'être entendues par le Gouvernement ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra. - Sur la gouvernance, à mon arrivée au ministère, en 2022, le sport français avançait à hue et à dia : les acteurs ne coopéraient pas, se regardaient en chiens de faïence et nous ne savions plus qui faisait quoi. Nous avons alors énormément travaillé pour clarifier les rôles et, surtout, pour consolider un esprit d'équipe qui ne nous a jamais quittés jusqu'à la livraison des Jeux et qui reste à entretenir aujourd'hui.
La difficulté réside dans la multiplicité des acteurs et les coûts de structure, question qui ne manquera pas de se poser étant donné la contraction des budgets. En revanche, la collégialité est un acquis dans le fonctionnement de l'ANS, tel qu'il est assuré par sa présidente et par ses équipes remarquables.
Le bât blesse parfois dans l'efficacité de la gouvernance territoriale, les conférences régionales du sport ayant un bilan inégal. Cela fait partie de mon plaidoyer pour les élections municipales. Nous devons faire usage des dispositions de la loi du 2 mars 2022 sur les plans sportifs locaux, afin de structurer la programmation des équipements au niveau du bloc communal, avec une implication forte des intercommunalités.
Ensuite, les fédérations assument bien davantage la plénitude de leurs missions, notamment en matière de développement ; je ne reviens pas sur les records battus et l'augmentation du nombre de licenciés.
Notre modèle de haute performance, caractérisé par la synergie entre l'action de l'ANS et les fédérations, doit être préservé dans sa forme actuelle. L'équipe qui lui est consacrée, au coeur de l'ANS, est très reconnue et respectée.
J'en viens à la dimension éthique de l'action des fédérations, qui font preuve de détermination en matière de lutte contre les discriminations et contre les VSS. J'y veille en répondant à leurs attentes. En particulier, les petites fédérations souhaitent être mieux accompagnées dans la gestion des dossiers disciplinaires. Souvent, elles manquent de ressources et le sujet est sensible, voire anxiogène pour leurs équipes. Je réfléchis à la création d'un modèle de fondation pour un sport sans violence, dans lequel nous nous appuierions sur des instructeurs financés par du mécénat ou issus du mécénat de compétences, qui nous permettraient de leur venir davantage en aide pour accélérer la gestion des dossiers disciplinaires. Parallèlement, je souhaite continuer à mobiliser les fédérations sur un meilleur déploiement des contrôles d'honorabilité.
Cette prise de conscience des fédérations vaut aussi pour leur engagement en faveur de l'inclusion sociale par le sport. Ainsi, une dizaine d'entre elles, pionnières, contribuent fortement à la démarche des clubs engagés dans ce domaine.
S'agissant des équipements, je fais écho à votre inquiétude et à votre volontarisme. Il existe clairement des marges de manoeuvre liées à un meilleur taux d'usage dans les territoires, qui se situerait aux alentours de 50 %. Ainsi, si certaines disciplines et municipalités sont saturées, la planification territoriale, l'ouverture de créneaux et une meilleure répartition au fil de la journée entre les associations sportives sont des pistes. C'est là un autre axe que nous poursuivons dans le cadre du plaidoyer, autour de la notion d'un nouveau pacte sportif avec les territoires.
En même temps, il faut une programmation encore plus ciblée pour les équipements structurants dans les territoires, dont nous connaissons la vétusté et les carences, comme pour les gymnases et les piscines. À des fins d'efficience et pour dégager des marges de manoeuvre, nous devons mieux mobiliser l'échelon intercommunal et les outils de planification comme Data ES.
Pour conclure, l'emploi sportif est une priorité pour nous. Nous travaillons ardemment à sa féminisation, ainsi qu'à la promotion, y compris dans les territoires, de la notion de groupement d'employeurs, afin de remédier à la fragilité, la précarité de cet emploi, ce qui est très important pour sa transformation économique et sociale.
Mme Marie-Amélie Le Fur. - En ce qui concerne le volet parasportif, l'évolution de la gouvernance a eu un impact positif considérable, l'ANS et les conférences territoriales ayant permis de réfléchir aux acteurs à réunir. Or, il y avait depuis des années un impensé du comité paralympique et de ses organes déconcentrés qui n'existaient pas à l'époque ; personne ne se faisait alors l'écho des besoins du parasport. Ainsi, la création de cette gouvernance en 2019, avec le comité paralympique comme membre fondateur et des représentants dans les conférences régionales du sport et dans les conférences des financeurs, a permis à cette voix spécifique d'émerger et de faire connaître les retours du terrain.
Concernant le périmètre de l'Agence, notre modèle est le bon, car il permet de ne pas dissocier la haute performance du développement de la pratique. En revanche, nous devons encore travailler sur la complémentarité des deux enjeux, particulièrement pour le parasport, dans la mesure où l'un irrigue l'autre.
Nous venons de fêter les six ans de l'Agence, qui devait révolutionner le modèle de la haute performance, non pas en partant d'une feuille blanche s'agissant du développement de la pratique, mais en s'appuyant sur l'existant pour le transformer totalement. Nous savons que cette dynamique peut prendre du temps, d'autant que, pendant l'épisode de covid, l'Agence s'est plutôt alignée sur celle du plan de relance.
Pour cette phase 2, nous entendons stabiliser ce qui a été acquis et développé sur la haute performance, car nous avons le bon modèle, avec une impulsion de l'Agence comprise et acceptée par les fédérations. En revanche, il faut aller beaucoup plus loin dans la construction d'un nouveau modèle de développement des pratiques. Nous avons besoin d'une véritable stratégie collégiale, ce que nous n'avons pas réussi à établir pendant les cinq premières années de l'Agence, malgré l'impulsion des membres des différents collègues. Telles sont donc l'ambition et la priorité des six prochains mois. C'est ainsi que nous obtiendrons une rationalisation des engagements du budget de l'État, à l'échelle du collège et de tous les acteurs du sport.
Ensuite se pose la question du déploiement territorial, qui n'est pas satisfaisant à ce stade. Dans des territoires n'ayant pas subi la fusion des régions, nous avons obtenu des résultats. Parfois, certains acteurs ont eu l'impression d'un fort dogmatisme tendant à amoindrir le pouvoir d'action du territoire. D'autres ont fait une lecture différente du décret et de sa déclinaison opérationnelle, d'où des modes opératoires très variables. Nous voulons profiter de l'impulsion liée au renouvellement des commissions et des conférences de territoire pour regrouper les bonnes personnes autour de la table. En effet, quand certains ne sont pas convaincus de l'intelligence collégiale, il n'y a pas d'intérêt à ce qu'ils siègent dans ces conférences.
Par ailleurs, peut-être ne sommes-nous pas obligés de dépendre de deux instances distinctes, telles que la loi les prévoit : la conférence régionale du sport et la conférence des financeurs. En effet, à 80 %, elles sont composées des mêmes représentants. Dans certains territoires, elles ont un bureau commun et se réunissent immédiatement l'une après l'autre.
Il faut s'assurer que ces conférences régionales du sport et des financeurs ne viennent pas empêcher. Elles doivent permettre de prioriser le fléchage de financements vers un projet de territoire, en laissant les collectivités maîtresses de leur budget et de leurs orientations. Il faut donc vraiment le voir comme un outil complémentaire, et non supplémentaire ou de substitution.
Concernant les équipements, vous savez très bien, monsieur le rapporteur, que je suis totalement alignée avec vous. J'ai la même inquiétude quant aux dispositifs de droit commun, au vu de ce qui est advenu du fonds vert. Ainsi, alors que celui-ci devait initialement financer la rénovation énergétique des bâtiments sportifs, nous avons appris quelques mois plus tard que ces derniers ne seraient plus éligibles. Cette perte de fonds fléchés accrédite l'idée selon laquelle le sport est vu par certains comme secondaire.
Concernant la « taxe Buffet », nous sommes bien au fait du sujet. Dans le budget initial 2026 de l'ANS, les recettes sont contractualisées à un montant bien inférieur au plafond.
Nous travaillons beaucoup avec l'ANS sur les emplois sportifs qualifiés mis à la disposition des fédérations, au niveau tant national que territorial, pour accompagner le développement de la pratique. Avec le ministère des sports, nous allons avancer sur la formation. En effet, si la loi impose que le parasport soit évoqué dans tous les diplômes, il l'est de manière très hétérogène. Nous souhaitons donc disposer d'un module dispensé dans le cadre de l'ensemble de ces formations, afin que les éducateurs disposent d'acquis communs dans ce domaine.
Enfin, nous avons pris le sujet des VSS à bras-le-corps, car leur taux de prévalence est plus élevé que la moyenne pour les PSH. Ainsi, notamment dans les compétitions où le comité paralympique est en responsabilité, nous entendons faire signer un contrat d'engagement à nos cadres et à nos athlètes, ce qui permet de remettre en cause une accréditation. À tout moment, dans le cadre d'une échelle de sanctions graduelle, il est possible d'aller jusqu'à l'exclusion complète de la compétition et des Jeux, en cas de manquement aux devoirs d'intégrité et de respect des autres. Au-delà des VSS, cela concerne tout fait de discrimination.
Mme Catherine Belrhiti. - Le premier bilan des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 montre un intérêt accru pour la pratique sportive chez les jeunes et dans les clubs. Comment entendez-vous transformer concrètement cet héritage en bénéfice durable pour les clubs amateurs et les territoires, notamment dans les zones rurales et périurbaines ? Selon quels indicateurs ?
Avec la baisse prévue des crédits du programme « Sport », comment le CNOSF entend-il préserver le soutien aux fédérations et aux clubs amateurs tout en maintenant ses ambitions pour le haut niveau et les événements internationaux ? Envisagez-vous des financements alternatifs, comme le partenariat public-privé ou le mécénat ?
Parmi les grands perdants de la baisse de crédits, l'on trouve le sport pour tous, avec la diminution du budget de l'ANS, le retrait du Pass'Sport pour les 6-13 ans et la fin des deux heures de sport au collège. Ce sont des remontées fortes des clubs, auxquelles il faut absolument répondre. En tant qu'ancienne athlète de haut niveau, je porterai une attention toute particulière à la limitation de cette baisse des crédits.
Comment le CPSF compte-t-il capitaliser sur les Jeux de 2024 pour accroître la médiatisation, la participation et l'inclusion des sportifs paralympiques sur le territoire ? Quelles mesures sont prévues pour que cet héritage bénéficie aux fédérations et aux clubs locaux ? Le Comité prévoit-il des programmes pour sensibiliser les écoles, les universités et les clubs amateurs à l'inclusion par le sport et à la pratique paralympique ? Comment ces initiatives seront-elles valorisées pour renforcer l'impact social du Pass'Sport ?
M. Adel Ziane. - La réussite des Jeux de Paris 2024 a été remarquable à tout point de vue, grâce aux athlètes et para-athlètes français. C'est une fierté nationale. Cependant, nous devons relever plusieurs défis pour faire vivre l'héritage de ces Jeux et préparer sereinement ceux de 2030.
Ma première question porte sur le rôle des collectivités territoriales. Si l'héritage matériel est incontestable pour mon département de la Seine-Saint-Denis, l'héritage immatériel reste à faire vivre, alors que nous avons le taux de licenciés le plus faible de France hexagonale. Toutefois, le département est au rendez-vous, parfois au-delà de ses compétences. Grâce au boni des Jeux, nous avons pérennisé plusieurs dispositifs de soutien de la pratique sportive pour tous, qui favorisent l'apprentissage de la nage, le sport-santé, l'inclusion et l'insertion des publics en difficulté. Vos deux institutions ont un rôle crucial à jouer pour accompagner les départements. Quel plan d'action concret envisagez-vous pour renforcer cette action, au regard du soutien que vous apportez déjà aux clubs ?
Ensuite, après une baisse de 182 millions d'euros en 2025, le budget du sport va subir à nouveau une coupe de 39 millions d'euros, en particulier pour l'action « Promotion du sport pour le plus grand nombre ». Vous avez toutes deux qualifié ce taux d'effort d'excessif et de disproportionné et souligné le risque posé pour les clubs, les emplois d'éducateurs et l'accès des enfants au sport. Madame Oudéa-Castera, au regard de vos expériences ministérielles passées, comment comptez-vous peser sur ces arbitrages ?
Par ailleurs, compte tenu du budget présenté, qui efface une partie des efforts accomplis lors de l'organisation des JOP, comment pérenniser l'héritage et les bonnes pratiques de Paris 2024 ? Quelle est votre feuille de route pour assurer la transition vers les Jeux de 2030 et garantir que les établissements, les clubs et les territoires seront prêts ?
Mon dernier point porte sur le traitement des athlètes et sur les enjeux de santé mentale, d'après-carrière, d'équité, mais aussi d'intégrité sportive. La polémique autour de la participation de Mouhamadou Fall aux Enhanced Games, où le recours à des produits « améliorants » est autorisé, illustre l'urgence de disposer d'un cadre clair et protecteur. Comment entendez-vous renforcer la protection des athlètes tout en prévenant de tels détournements et quelles sanctions proposez-vous pour ceux qui aggravent la défiance vis-à-vis de l'olympisme ?
M. Claude Kern. - Vous avez évoqué la mutualisation des équipements sportifs. Toutefois, il convient de ne pas oublier les grands équipements sportifs, qui manquent cruellement en France. En outre, plutôt que de construction, il faudrait parler de rénovation. Le risque est, sinon, de créer des friches. À ces fins, envisagez-vous de promouvoir cette démarche et de faciliter le recours à des partenariats public-privé ? Cela permettrait également, plus qu'une mutualisation, une utilisation en multi activité de ces équipements, à l'appui de l'un de vos objectifs, qui est aussi le nôtre : que le sport devienne une grande cause municipale, ce qui est délicat en cette période de disette budgétaire.
En ce qui concerne le sport de haut niveau, nous savons que le CNOSF et le CPSF jouent un rôle essentiel dans sa préparation et son accompagnement, en lien avec l'ANS. Ainsi, après le succès des Jeux de Paris 2024, la question se pose de la capacité à maintenir ce niveau d'exigence, alors que les crédits consacrés au développement des pratiques sportives sont en net recul. Ces moyens sont pourtant nécessaires pour satisfaire la promesse d'héritage et contribuer à l'émergence de futurs talents, pour les athlètes tant olympiques que paralympiques.
Comment entendez-vous consolider le modèle français du sport de haut niveau dans la perspective des prochaines échéances internationales ? Peut-on rester l'une des premières nations de sport de haut niveau sans mettre les moyens nécessaires à l'émergence d'une véritable nation sportive, où le sport est intégré comme un élément de la culture nationale, à tout âge et sur tout le territoire ?
Mme Mathilde Ollivier. - Mesdames les présidentes, nous vous auditionnons dans un contexte particulièrement préoccupant pour le sport français. Alors que la France s'apprête à accueillir à nouveau un grand événement sportif en 2030, nous constatons des reculs importants en matière de soutien budgétaire au sport. Les crédits sont certes maintenus pour la haute performance, mais des inquiétudes pèsent sur les équipements, le soutien aux fédérations, le Pass'Sport ou encore l'accompagnement à la pratique des personnes les plus éloignées.
Les Jeux d'hiver sont moins populaires que les Jeux d'été, seuls 8 % des Français déclarant pratiquer des sports d'hiver ou de montagne. Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, il serait donc difficilement justifiable que des moyens publics conséquents soient engagés au détriment du sport au quotidien. Ainsi, comment le CNOSF et le CPSF entendent-ils peser dans les discussions avec l'État et avec l'ANS pour garantir que la préparation des Jeux d'hiver de 2030 ne se fasse pas au détriment des clubs, des associations et des équipements locaux, socle même de notre politique sportive ? En effet, le haut niveau ne peut inciter à la pratique que si la vitalité des structures locales, dont le haut niveau dépend, est soutenue. C'est tout l'enjeu de ce budget.
Ensuite, certains d'entre vous ont peut-être vu le documentaire Futurs champions, le prix de la gloire, diffusé sur Arte et qui concerne l'entraînement des enfants à la pratique de haut niveau selon des méthodes qui, dans beaucoup de pays occidentaux, entraînent encore des séquelles avant l'âge de 10 ans : blessures à répétition, burn-out, anorexie. Dans un contexte d'enjeux financiers toujours plus importants, certains entraîneurs profitent d'un vide juridique dans ce domaine. Des réflexions sont-elles menées au sein de vos organismes pour mieux protéger ces enfants ? Quel cadre prévoir pour les enfants pratiquant le sport de haut niveau, à l'instar de ce qui existe dans le domaine du spectacle ?
M. Bernard Fialaire. - Une confusion persiste entre l'activité physique et le sport, la présence d'un délégué interministériel chargé du sport-santé complexifiant encore les choses. L'activité physique dépend du ministère de la santé, le sport de la jeunesse et des sports, et l'éducation physique et sportive de l'éducation nationale, ce à quoi s'ajoute le sport scolaire. Or, tout est indispensable à notre jeunesse, que ce soit dans la prévention en matière de santé, dans l'inclusion, dans l'apprentissage des règles ou de l'effort, ou encore dans la maîtrise de son corps et la lutte contre le mal-être. Il convient donc de démêler cette confusion.
Le sport universitaire est complètement délaissé, alors que l'on constate un grand mal-être étudiant et un problème de santé mentale. Comment le sport olympique, qui est une vitrine, peut-il être un vecteur de communication pour amener cette tranche de notre population vers une activité sportive ?
M. Pierre Ouzoulias. - « Citius, altius, fortius », « Plus vite, plus haut, plus fort » : telle est la devise des jeux Olympiques. Toutefois, il me semble qu'en France, nous sommes passés à « minus cito, minus alte, minus fortiter », c'est-à-dire « moins vite, moins haut, moins fort »... Le constat est terrible.
Le problème des équipements est fondamental et le retrait du fonds vert, par les préfectures, est une catastrophe absolue pour la mise à niveau énergétique des équipements sportifs. Cela démontre qu'il n'y a pas de politique pluri ministérielle et que le ministère des sports, comme celui de la culture, est incapable de faire défendre par d'autres ministères des politiques qui concernent tout le monde.
Un exemple : la réussite des frères Lebrun a suscité une énorme demande pour le ping-pong, laquelle reste totalement insatisfaite, parce que les équipements sont vétustes et insuffisants. Des gymnases ne sont pas utilisés faute de chauffage, parce que l'on ne peut pas jouer au tennis de table quand il fait 12 degrés. Ce n'est pas un problème de coordination interterritoriale, mais de matériel : des installations sont aujourd'hui complètement obsolètes du fait de leur non-mise à niveau énergétique.
Nous avons donc besoin d'un plan national, car les communes n'y arriveront pas toutes seules. Si nous voulons offrir plus de sport aux gens, il faut d'abord leur donner des équipements. Tous les acteurs sur le terrain sont concernés, notamment les préfectures.
Mme Béatrice Gosselin. - Le nombre de missions de service civique, qui atteint 110 000, a baissé de 40 000, ce qui posera un problème pour nos activités sportives, pour l'encadrement des jeunes et pour l'insertion des PSH.
Toutefois, le point le plus crucial est celui que soulève notre collègue Pierre Ouzoulias : malgré l'engouement pour les piscines, avec Léon Marchand, pour le tennis de table ou pour le judo, nous n'avons pas toujours, dans les territoires ruraux, les équipements nécessaires. Cela crée une rupture entre les territoires, alors que l'élan post-olympique ne peut s'entretenir sans une visibilité pluriannuelle, indispensable pour que les collectivités puissent planifier, engager et entretenir leurs équipements.
Une partie du boni de 76 millions d'euros issu de la liquidation des Jeux pourrait-elle être mobilisée pour remplacer des équipements défaillants, pour améliorer leur qualité énergétique et pour construire là où il y en a besoin ? Dans certains territoires, les enfants veulent faire du sport, mais nous n'avons pas de salle pour eux.
M. Cédric Vial. - En réponse à Mathilde Ollivier, je précise que le centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) mentionne que 9 % des Français sont allés en vacances aux sports d'hiver durant l'hiver 2022-2023. Habitant à la montagne, je n'en fais probablement pas partie, n'y allant pas en séjour, bien que pratiquant des sports de montagne. En fait, ce sont bien 19 % de la population, soit un peu plus de 12 millions de personnes, qui déclarent pratiquer les sports d'hiver, c'est-à-dire le ski ou le snowboard, au moins tous les deux ou trois ans. Cela signifie qu'après le jogging, il s'agit probablement du sport le plus pratiqué alors que l'on compte, par exemple, 1,2 million de trailers. Je ne suis donc pas complètement convaincu par l'argument sur la popularité de ces activités...
Nous sommes un certain nombre ici à avoir signé une tribune transpartisane, avec des députés et des représentants du monde sportif ou associatif, afin que le sport adapté ait son moment lors des Jeux des Alpes de 2030. Ce serait l'honneur de la France, après une expérience à Nagano qui ne s'est jamais reproduite, que d'accueillir les premiers jeux Olympiques et Paralympiques accessibles au sport adapté. Alors que les décisions se prennent en ce moment même, j'aimerais vous entendre sur ce point et j'espère que vous soutiendrez les initiatives que nous sommes nombreux ici à avoir prises pour encourager de telles compétitions.
M. Jacques Grosperrin. - Les associations sont le socle de la pratique sportive en France. À Bernard Fialaire, qui s'interrogeait sur la confusion entre les activités physiques et le sport, je réponds que le sport est avant tout une activité physique institutionnalisée, avec des compétitions.
Le modèle associatif en France est menacé, ce que traduit ce projet de loi de finances avec la baisse des subventions au travers du Pass'Sport, les suppressions de postes de CTS, le manque d'équipements et, surtout, la difficulté à recruter des bénévoles. Compte tenu de ce budget contraint, de quels leviers disposez-vous pour accompagner le réseau associatif sportif ?
J'en viens à la loi tant attendue sur l'héritage, non seulement par les sénateurs, mais également par l'ensemble des Français. La vétusté des infrastructures sportives et le maillage territorial des équipements posent parfois problème, de même que la gouvernance des fédérations et la carrière des sportifs de haut niveau. Avez-vous eu des échanges avec l'exécutif ? Quelles sont les principales pistes à l'étude ?
Mme Sonia de La Provôté. - L'une des missions de l'ANS est l'observation territoriale de la demande sportive. Or le financement des équipements et la mise à niveau du parc existant sont singulièrement mis en difficulté au regard des orientations budgétaires. La DETR, la DSIL et le fonds vert ne pourront répondre à toutes les demandes, alors que le secteur scolaire est déjà une priorité, à laquelle je ne vois pas comment le sport peut se raccrocher.
Nous constatons une diminution du nombre de CTS et de services civiques, alors que le financement des collectivités territoriales pose question et que le sponsoring est en difficulté. Par conséquent, l'expression des droits sportifs, pour dresser un parallèle avec les droits culturels, devrait être une priorité nationale, au regard des valeurs du sport et républicaines, ainsi que du rapport à la citoyenneté qu'elle sous-tend. Or, ces droits sportifs sont singulièrement mis en difficulté, dans leur répartition territoriale comme disciplinaire. Où en est l'ANS, dont l'une des missions principales est de guider le ministère dans ses orientations nationales, sans s'y substituer ?
M. Jean-Gérard Paumier. - Je me permets d'appeler, comme ancien maire et ancien président de département, votre attention sur le dysfonctionnement financier de certaines fédérations sportives. Lors des assemblées générales annuelles, de nombreux clubs locaux font en effet état de hausses régulières de la contribution au comité départemental ou à la ligue régionale. En outre, ils doivent s'en acquitter, la plupart du temps, en début de saison sportive, à l'automne, au moment où leur trésorerie n'est pas au plus haut.
Ainsi, dans un certain nombre de cas, j'ai constaté que la subvention communale versée à un club sportif servait en fait uniquement à payer sa quote-part à l'échelon départemental ou régional, qui a en main l'atout maître de la délivrance des licences. Que comptez-vous faire pour remédier à ces situations qui, même si elles sont rares, sont parfois ressenties comme une forme de racket organisé ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra. - Je souhaite relever le défi du sénateur Ouzoulias : avec combativité et sans reproduire le défaitisme que nous avons connu en amont des JOP 2024, nous pouvons réaliser, avec lucidité, que le sport français va globalement bien. L'évolution du nombre de licences et du taux de pratique, y compris pour des publics qu'il était compliqué de faire progresser - femmes, seniors, PSH -, est positive.
En revanche, certains combats se matérialisent à l'occasion du projet de loi de finances pour 2026, à commencer par la place du sport dans la vie de notre jeunesse. C'est pourquoi je réaffirme ma vive préoccupation au regard du démantèlement du Pass'Sport pour les 6-13 ans et du dispositif des deux heures de sport en plus pour les collégiens, alors que nous devons conserver une forte ambition.
La question nous a été posée des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) : les cités éducatives doivent continuer d'être encouragées et le temps extrascolaire doit être bien utilisé pour un accueil en club de nos enfants. C'est le sens de la contribution que le CNOSF, avec des chercheurs et des universitaires, a versé au Conseil économique, social et environnemental (Cese), en vue de la Convention citoyenne sur les temps de l'enfant.
Les 6-13 ans représentent environ 80 % des bénéficiaires du Pass'Sport. Or, au sein des fédérations de gymnastique ou d'athlétisme, par exemple, l'on constate que des milliers d'enfants issus de familles modestes abandonnent la pratique. Il est crucial d'enrayer cette chute, quitte à imaginer, dans le contexte budgétaire difficile que nous connaissons, un recentrage socio-économique, en travaillant mieux avec les caisses d'allocations familiales, au bénéfice des familles modestes.
La pratique étudiante est également un enjeu, au sujet duquel nous avons un travail d'animation à mener avec les universités. Vous connaissez mon engagement sur cette thématique. Ainsi, il faut que nous développions les championnats universitaires en héritage des Jeux, dont nous avons vu, en 2024, qu'ils étaient efficaces pour relancer le goût des étudiants pour la pratique sportive, alors que 40 % d'entre eux ne font pas de sport et que des problèmes très importants existent pour leur santé mentale et leur équilibre psychologique.
Je vous rejoins sur l'importance des collectivités territoriales dans le financement du sport, pour lequel les communes sont au premier rang, à hauteur de 8 milliards d'euros, auxquels j'ajoute plus de 3 milliards d'euros de la part des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Il est extrêmement important de leur donner, dans un partenariat avec le mouvement sportif, la confiance nécessaire pour continuer à porter la pratique sportive locale.
Il ne s'agit pas pour elles, cependant, de compenser un désengagement de l'État, qu'il faut combattre. Il convient donc de mieux accompagner, par exemple au moyen des plans sportifs locaux, la programmation et l'animation de ces politiques sportives. Or aujourd'hui, le CNOSF n'a plus aucune marge de manoeuvre financière, compte tenu de notre effort envers le comité d'organisation et de la contraction liée à notre CPO.
Je rappelle également que le boni de liquidation des Jeux, dont 20 % reviennent au CNOSF, ne peut en aucun cas alimenter ses dépenses de fonctionnement, puisque son produit est réservé à la promotion du sport en France. Telle est la raison de mon message sur le maintien de la subvention de l'État, condition à laquelle nous pourrons continuer à jouer notre rôle de structure faîtière vis-à-vis de nos fédérations.
Je suis particulièrement active sur le front du développement des nouvelles sources de financement. Ainsi, le sport concentre 58 % des mécènes et 40 % des volumes en France, avec parfois une progression de douze à quinze points, avec une forte importance des territoires, notamment des PME.
Cela étant, nous avons besoin de développer des contacts avec les banques publiques d'investissement et avec des fonds d'investissement, mais aussi de rechercher des améliorations de l'environnement normatif, par exemple sur les hospitalités ou le sponsoring, afin de stabiliser leur cadre juridique. J'insiste sur le partenariat que je suis en train de construire avec la Caisse des dépôts, plus particulièrement avec la Banque des territoires. Il nous permettra, à compter de 2026, d'embarquer tous les acteurs pertinents.
La modernisation des équipements sportifs s'inspire du dispositif EduRénov, consacré aux établissements scolaires. Nous souhaitons ainsi qu'une démarche « Sport Rénov' » ouvre aux collectivités l'accès, pour leurs installations sportives et leurs clubs municipaux, à des taux bonifiés et à l'ingénierie technique gratuite des prestataires de la CDC.
Parmi les points d'inquiétude, les équipements sont cruciaux. Il faut mieux utiliser l'argent, au moyen d'une programmation plus ciblée et outillée. À cet égard, j'ai souligné l'importance de l'outil Data ES afin d'obtenir des éléments qualitatifs et quantitatifs de programmation. Nous devons mieux travailler avec les préfets, qui seront les délégués territoriaux de l'Agence et qui prioriseront les enveloppes pour le sport demain. Il n'est pas acceptable que l'évolution du fonds vert conduise à supprimer des financements locaux pour le sport.
En même temps, nous devons travailler sur l'optimisation des usages. Ainsi, certains territoires sont saturés, quand d'autres disposent de capacités sous-utilisées, ce qui peut être corrigé par une analyse de l'utilisation effective des plages horaires et aussi par une meilleure mutualisation des équipements scolaires. À cet égard, vous êtes un relais important, mesdames et messieurs les sénateurs. Je rappelle que les établissements scolaires comportent pas moins de 26 000 équipements, dont seulement 20 % sont en accès libre pour les associations sportives.
Le soutien au bénévolat est une autre de nos priorités. Je ferai des annonces importantes le 5 décembre prochain, à l'occasion de la journée mondiale du bénévolat, afin de renforcer la visibilité nationale de l'offre de formation. Nous travaillons avec les acteurs de l'administration du travail, la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), mais aussi la Caisse des dépôts, responsable du passeport de compétences, pour oeuvrer à une meilleure reconnaissance des acquis de l'expérience bénévole. Nous sommes aussi très attachés à une meilleure animation des communautés de bénévoles et de volontaires des Jeux de Paris 2024, dont certaines, que je salue, sont en train de se structurer.
J'en arrive aux ressources humaines, alors que les CTS sont vitaux pour la santé du sport français. J'ai vraiment besoin de votre aide sur ce point.
Je voudrais faire écho à ce qui a été dit sur l'accueil collectif de mineurs. Les imperfections révélées dans certaines disciplines sportives doivent être corrigées. La direction des sports du ministère est, je le sais, particulièrement mobilisée sur ce sujet ; je me fais l'écho des préoccupations que vous relayez pour que nous continuions de bien accompagner nos jeunes.
Enfin, afin de préserver le double projet de nos hauts potentiels sportifs, nous devons poursuivre des actions ambitieuses dans le cadre de l'héritage, au sein de nos établissements universitaires et jusqu'à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep), avec le dispositif des hautes études pluridisciplinaires pour top athlètes (Hepta).
M. Laurent Lafon. - Les collectivités peuvent-elles présenter des dossiers pour le financement de leurs équipements afin de bénéficier du boni ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra. - Non, les dépenses d'équipement ne sont pas éligibles au boni, réservé à trois axes : les célébrations, le développement de la pratique - par exemple, les programmes « Savoir rouler » et « Savoir nager », à fort impact territorial - et l'accompagnement des athlètes. Nous avons beaucoup à faire pour ces derniers, que ce soit pour leur reconversion, pour le double projet que j'évoquais ou pour leur santé mentale, qui est l'une de nos priorités avec Marie-Amélie Le Fur.
Mme Marie-Amélie Le Fur. - Pour nous, il y a véritablement enjeu à poursuivre les activités de rayonnement des jeux Paralympiques, et même du parasport au sens large. C'est pourquoi le travail d'accompagnement des médias et du champ audiovisuel va se poursuivre. Nous avons eu une petite baisse d'effectifs au sein du Comité, mais nous avons souhaité que le pôle communication et marketing reste important en termes de ressources humaines. L'objectif est d'inciter les acteurs de l'audiovisuel à parler plus, et surtout mieux, des jeux Paralympiques, c'est-à-dire plus des sujets sportifs que de la situation du handicap.
Nous sommes sur une logique de projets et d'actions à destination des acteurs clés. Dans les territoires, ce sont évidemment les clubs. Nous sommes en train de réfléchir à leurs besoins. De ce point de vue, le programme Club inclusif, centré sur la sensibilisation des bénévoles et des encadrants, est un outil très utile. Les mesures d'impact que nous commençons à mettre en place démontrent un très haut taux de satisfaction, tant de la part des clubs, qui sont satisfaits à 95 % ou 96 %, que - cela répond aussi à la question sur l'héritage immatériel des collectivités - sur l'accompagnement. En l'espèce, 80 % des collectivités engagées dans le programme avaient déjà une volonté d'agir en faveur du parasport, mais seulement 16 % d'entre elles avaient un plan d'action structuré. Nous avons créé un guide à destination des élus au sport des départements pour les aider à conduire des politiques publiques du parasport en termes d'équipement et d'accompagnement des associations. Une politique incitative, ce n'est pas que du budgétaire ; parfois, c'est aussi du dialogue relationnel. Nous venons de déployer ce programme à La Réunion ; c'est la première fois que nous avons un dispositif spécifique à destination des territoires d'outre-mer.
Nous avons également développé un axe très fort en faveur de la jeunesse. À nos yeux, parler des jeux Paralympiques est aussi un moyen d'acculturer les jeunes de manière dynamique et ludique au handicap. Avec le CNOSF, nous sommes déjà en train de préparer l'édition 2026 de la semaine Olympique et Paralympique. Je vous invite à échanger avec le Cojop pour savoir quelles seront leurs priorités pour 2030 ; je pense que la jeunesse en fera partie.
L'Agence veut continuer d'avancer sur les équipements, notamment les équipements structurants, l'innovation et la rénovation. En tout cas, c'est le plan d'action que nous avons proposé. Après avoir mis en place plus de 10 000 équipements de proximité, nous devons réorienter l'action de l'Agence, par exemple sur la rénovation énergétique de gymnases où il fait froid. Pour les collectivités, cela représente des dépenses considérables. Nous devons aussi envisager de nouvelles typologies d'équipements, pour être mieux adaptés à la réalité des territoires. Il est parfois un peu compliqué de comprendre quel est le besoin réel d'une collectivité qui veut sortir un équipement.
Nous sommes donc en train de travailler sur un pivotement des ressources humaines de l'Agence nationale du sport vers le pôle équipement, qui, à date, gère des décaissements de subventions. Je souhaite qu'ils soient comme les conseillers haute performance, en appui d'expertise auprès des collectivités. Ils doivent pouvoir expliquer ce que sont les pratiques émergentes et faire un vrai observatoire de ce qui existe par ailleurs en France et à l'international, afin d'aider les collectivités à la construction ou la rénovation des équipements, et ce avec une vision à cinq ans ou à dix ans des besoins des territoires. Ils doivent aussi être dans une dynamique d'accompagnement des nouveaux modèles économiques, notamment du modèle économique public-privé, en matière d'équipements comme dans le fonctionnement des clubs.
Le boni doit venir en complémentarité des axes et des orientations qui seront retenus pour le Cojop dans la perspective de 2030 et par l'Agence, afin de permettre des réorientations et des priorisations dans certains secteurs et, dans notre cas, de retrouver de la capacité d'action sur les équipements.
Avec Amélie Oudéa-Castéra, nous ne voulons pas la performance à tout prix ; nous voulons la performance dans le respect de l'intégrité de nos sportifs de haut niveau. Nous avons sorti voilà trois semaines un plan d'action en faveur de la santé mentale des sportifs de haut niveau, tant sur le temps de la compétition, avec ce qu'on appelle les welfare officers, qu'en dehors, avec des suivis psychologiques.
L'idée est évidemment aussi de sécuriser l'intensité d'entraînement. Nous avons un outil médical : le suivi médical réglementaire (SMR) des sportifs de haut niveau, sur lequel nos deux commissions médicales respectives travaillent. Il ne s'agit pas seulement d'un suivi antidopage ; c'est avant tout un suivi d'intégrité des sportifs de haut niveau, avec un volet psychologique, physiologique et physique. Lorsqu'un médecin a des indicateurs qui lui semblent alarmants, il nous passe un coup de fil, et nous essayons de comprendre ce qui se passe physiquement ou mentalement. Cela permet de détecter des situations à risques.
Sur la feuille de route 2030, il ne sera pas acceptable d'avoir des vases communicants en termes de financement. Il faut conserver tout ce que nous avons fait pour le sport d'été et le développement de sa pratique, et agir de manière complémentaire.
Plus que du sport de montagne ou des sports d'hiver, je parlerais de sport outdoor. Parler du sport outdoor, c'est parler de la jeunesse, du sport nature, de l'association avec tous les territoires. L'un des enjeux des Jeux de 2030 sera l'éducation à la biodiversité et à l'environnement.
Nous agirons évidemment en faveur de la présence des athlètes déficients intellectuels aux Jeux de 2030. D'ailleurs, le CPSF est associé à la tribune qui a été mentionnée. Nous avons déjà eu des réunions sur le sujet avec le Cojop. À l'échelon international a été adoptée une motion du mouvement paralympique pour inciter le board du Comité international paralympique (IPC) à travailler sur le sujet et à nous présenter une feuille de route d'ici au 31 décembre 2025. Nous avons un peu de temps, car il ne s'agit pas d'ajouter un sport supplémentaire ; c'est simplement une classification et une discipline additionnelles.
L'Agence nationale du sport et le ministère des sports continuent le travail en commun, d'autant qu'Amélie Oudéa-Castéra avait donné une impulsion forte en ce sens en tant que ministre.
Pour être opérateur-conseil, nous devons avancer et discuter collégialement du déploiement opérationnel de la stratégie - j'y ai fait référence tout à l'heure -, notamment afin de prioriser certaines actions, dans un souci de plus grande efficacité.
M. Laurent Lafon, président. - Mesdames les présidentes, nous vous remercions de vos réponses. Il était d'autant plus important de vous entendre ce matin que nous auditionnerons cet après-midi Mme Marina Ferrari, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.