LES CONCLUSIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
Le projet de loi qui nous est soumis alloue à la Marine des crédits qui, en francs constants, sont en baisse sensible par rapport à la loi de finances initiale de 1995, à savoir : - 1,2 % pour le titre III et - 11 % pour le titre V.
Cette baisse atteint même 12 % sur les crédits d'équipements si l'on prend pour référence l'annuité de programmation
Cette situation, aggravée par les amputations budgétaires en cours d'année, conduit la Marine à faire glisser dans le temps la réalisation de certaines étapes de ses programmes majeurs : SNLE/NG, avions Rafale, frégates La Fayette.
Elle prend ainsi le risque de remettre en cause la cohérence des moyens nécessaires à l'éfficacité des principales composantes de nos forces navales par le retrait d'unités anciennes avant l'admission au service actif des unités de remplacement.
La méthode habituelle consistant à prolonger la vie des bâtiments et des aéronefs connaît bien entendu ses limites et requiert en tout état de cause des ressources importantes pour disposer d'un entretien programmé des matériels sur lequel on puisse raisonnablement s'appuyer.
S'agissant de ces crédits pour 1996, votre rapporteur constate que leur montant est du même ordre qu'en 1995 et qu'ils accusent par conséquent toujours la même insuffisance, maintes fois signalée au cours des années passées.
Si l'on souhaite préserver le format de nos forces à moyen terme, un réexamen de cette dotation semble nécessaire, elle pourrait éventuellement être prise spécifiquement en compte dans la nouvelle loi de programmation.
Ce projet de loi que l'on pourrait qualifier "de transition" témoigne, contrairement à celui de 1995, de la forte contribution de la défense à la maîtrise des dépenses publiques. Il ne remet pas en cause les objectifs du livre blanc mais appelle à l'évidence une clarification dans le choix des rééquilibrages des dépenses, seule garante de l'indispensable "visibilité" pour les états-majors comme pour les industriels.
EXAMEN EN COMMISSION
Votre commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a examiné le présent rapport lors de sa réunion du 8 novembre 1995.
A l'issue de l'exposé de M. André Boyer, rapporteur pour avis, un débat s'est instauré entre les commissaires.
En réponse à M. Charles-Henri de Cossé-Brissac, le rapporteur pour avis a précisé que la question du second porte-avions demeurait en suspens mais qu'un seul porte-avions ne permettrait de disposer de ce système de forces que 60 % du temps.
M. Michel Rocard a rappelé que la décision de commander le porte-avions nucléaire -et l'aviation embarquée qui l'accompagne- avait été très mûrement réfléchie, compte tenu de son coût très élevé, et correspondait notamment au souci de permettre à la France de disposer d'une capacité d'intervention dans tous les conflits ne correspondant pas à une menace d'agression majeure contre notre pays. Ce choix supposait, à ses yeux, d'accorder une certaine priorité financière à la marine. Il a en conséquence déploré la réduction des crédits consacrés à la marine qui résultait du budget de la défense pour 1996, considérant qu'elle était de nature à porter atteinte à l'équilibre général souhaitable de nos forces armées.
M. Maurice Lombard a pour sa part estimé que les forces terrestres et l'aviation, qui constituaient la base de la défense du territoire, ne sauraient être sacrifiées aux capacités d'intervention souhaitables de la marine qui avaient pour ambition de donner à la France les moyens de maintenir son rang sur la scène internationale.
M. Xavier de Villepin, président, a estimé que le renforcement de nos capacités de projection de forces constituait une des priorités de l'adaptation de notre défense au nouveau contexte international, mais que la commission serait mieux à même d'apprécier le poids respectif des différentes armées après avoir entendu l'ensemble des ses rapporteurs budgétaires. Il a enfin évoqué, avec M. André Boyer, rapporteur pour avis, les conséquences opérationnelles et le coût pour la marine d'une éventuelle réduction de la durée du service militaire à six mois.
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La commission a ensuite examiné l' ensemble des crédits du ministère de la Défense pour 1996 au cours de sa réunion du mercredi 15 novembre 1995.
M. Jacques Genton s'est déclaré profondément préoccupé par les faiblesses du projet de budget de la défense pour 1996 exposées par les rapporteurs pour avis de la commission. Il a indiqué que, compte tenu du retard important qui apparaissait par rapport à la loi de programmation pour les années 1995-2000 et des très grandes incertitudes qui demeuraient dans la perspective de l'élaboration d'une nouvelle programmation, il émettrait, à titre personnel, un vote d'abstention volontaire.
M. Bertrand Delanoé a indiqué que le groupe socialiste aurait souhaité ne pas être contraint de rejeter les crédits de la défense mais que la manière dont la rigueur était imposée à nos forces armées et les conséquences qui allaient en résulter le conduisaient, à regret mais en conscience, à exprimer un vote négatif quant à l'adoption des crédits du ministère de la défense pour 1996.
M. Michel Caldaguès, après avoir estimé que les opérations extérieures étaient davantage justifiées par des considérations de politique internationale que par des considérations militaires, s'est interrogé sur la compatibilité, sur le plan financier, entre la poursuite d'une politique d'interventions extérieures aussi ambitieuse et les exigences d'un équipement suffisant pour nos forces armées. Il a estimé que des choix étaient désormais indispensables et il a indiqué que c'était dans cet esprit qu'il voterait les crédits militaires pour 1996.
M. Philippe de Gaulle, après avoir approuvé les observations de M. Michel Caldaguès relatives aux opérations extérieures, a estimé que le projet de budget proposé était un budget honnête et qu'il devait, pour cette raison, être approuvé.
M. Jean-Luc Bécart a indiqué que le groupe communiste voterait contre l'ensemble des crédits du ministère de la Défense pour 1996.
Enfin M. Xavier de Villepin, président, approuvé par M. Jean Clouet, a rappelé l'avis favorable exprimé par l'ensemble des rapporteurs pour avis appartenant aux différents groupes de la majorité sénatoriale.
La commission a alors émis un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des crédits du titre III et du titre V du budget de la défense pour 1996.