EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS
Art. 75
(Art. 2 de la
loi n° 96-126 du 21 février 1996
portant
création d'un fonds paritaire d'intervention en faveur de
l'emploi)
Automaticité du bénéfice de l'allocation de
remplacement
pour l'emploi (ARPE) pour les salariés anciens
combattants
d'Afrique du Nord cessant leur
activité
I -
Le dispositif proposé
Cet article vise à étendre, de manière automatique
-c'est-à-dire même en l'absence de l'accord de l'employeur-, le
bénéfice de l'allocation de remplacement pour l'emploi (ARPE) aux
salariés titulaires de la carte du combattant au titre des conflits
d'Afrique du Nord, qui décident de cesser leur activité
professionnelle.
•
L'ARPE
Instituée par l'accord du 6 septembre 1995, entrée en vigueur en
octobre 1995 et applicable, en l'état, jusqu'à la fin de
l'année, l'ARPE est un dispositif de " préretraite contre
embauche " visant à activer les dépenses passives
d'indemnisation du chômage. Elle permet aux salariés totalisant au
moins 40 années de cotisations vieillesse et remplissant certaines
conditions (12 années d'affiliation à l'UNEDIC, un an
d'ancienneté dans l'entreprise) de quitter l'entreprise à partir
de 58 ans. Ce départ est soumis à l'accord de l'employeur
qui doit le compenser en procédant à une ou plusieurs embauches
compensatrices correspondant au minimum au nombre d'heures de travail que le
salarié partant effectuait. Les bénéficiaires
perçoivent alors jusqu'à 60 ans l'équivalent de 65 %
de leur salaire brut antérieur.
La loi n° 96-126 du 21 février 1996 prévoit que le
dispositif de l'ARPE soit financé par le fonds paritaire d'intervention
en faveur de l'emploi (FPIE). Ce fonds est alimenté par l'affectation
d'une partie des ressources du régime d'assurance chômage.
D'octobre 1995 à août 1998, 121.167 personnes ont
bénéficié de l'ARPE. En 1998, le coût net unitaire
de l'ARPE s'élève à 231.064 francs par
bénéficiaire. L'allocation mensuelle moyenne est de 8.897 francs.
•
La mesure proposée
L'article 75 du projet de loi propose certaines dérogations au
dispositif de l'ARPE en faveur d'une catégorie bien spécifique de
bénéficiaires potentiels.
Cet article vise exclusivement les salariés titulaires de la carte du
combattant au titre des opérations effectuées en Afrique du Nord
entre 1952 et 1962. Ces salariés doivent néanmoins respecter les
conditions d'âge, d'affiliation et d'ancienneté de droit commun
pour pouvoir en bénéficier.
En définitive, cet article n'introduit que deux modifications pour ces
salariés :
- le bénéfice de l'ARPE est ouvert de manière
automatique, même en cas de refus par l'employeur de la demande de
cessation d'activité ;
- la prise en charge financière de la mesure est assurée par
le FPIE qui reçoit en compensation une subvention imputée sur le
budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants au titre du fonds
de solidarité.
Le coût de la mesure est estimé à 20 millions de
francs pour 1999.
II - La position de votre commission
Si votre commission est favorable au principe de cette mesure qui permet aux
anciens combattants d'Afrique du Nord de bénéficier d'une
préretraite, elle tient toutefois à formuler deux réserves
sur le dispositif élaboré par le Gouvernement.
D'une part, c'est une mesure finalement très restrictive dans son champ
d'application pratique. Elle ne devrait bénéficier qu'à un
nombre très limité d'anciens combattants : entre 80 et 120 la
première année. Elle ne vise en effet que les salariés
pour lesquels la demande de cessation d'activité a été
refusée par l'employeur, soit 1,1 % des demandes selon l'UNEDIC.
D'autre part, cette mesure risque d'introduire une inégalité de
traitement entre les anciens combattants en réservant le
bénéfice de la mesure aux seuls titulaires de la carte du
combattant et en excluant donc les anciens combattants qui n'ont que le titre
de reconnaissance de la Nation.
Pour ces raisons, votre commission vous propose d'adopter un amendement
étendant cette mesure aux titulaires du titre de reconnaissance de la
Nation.
Cela permettra alors de rétablir l'égalité de
traitement entre anciens combattants et d'augmenter d'un quart le nombre de
bénéficiaires de la mesure.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi
amendé.
Art. 76
(Art. L. 321-9 du code de la
mutualité)
Relèvement du plafond donnant lieu à
majoration
de la retraite mutualiste du
combattant
En
application de l'article L. 321-9 du code de la mutualité, les membres
des sociétés mutualistes ayant la qualité d'anciens
combattants qui se sont constitué une rente mutualiste
bénéficient, en plus de la majoration légale
attachée à toute rente viagère, d'une majoration
spéciale de l'Etat égale, en règle générale,
à 25 % du montant de la rente résultant des versements
personnels de l'intéressé et qui s'élève au fur et
à mesure que l'on se rapproche de 60 ans.
Le total formé par la rente et la majoration spéciale de l'Etat
est limité à un plafond fixé en valeur absolue, dit
" plafond majorable ", qui est visé par le présent
article.
L'article 107 de la loi de finances pour 1998 avait modifié les
modalités de revalorisation de ce plafond majorable en l'indexant sur
l'indice 95 de la pension militaire d'invalidité. Ce nouveau mode
d'indexation permet alors de faire évoluer le montant du plafond
majorable en application du rapport constant.
Le présent article ne modifie pas le mode de revalorisation, mais
relève l'indice de référence, qui passe de 95 à
100.
Ce relèvement permettra une nouvelle augmentation du plafond de
6,6 %. Au 1
er
janvier 1999, le plafond
s'élèvera alors à 7.993 francs.
Le nombre de bénéficiaires de la rente mutualiste est
estimé à 320.000 pour une rente d'un montant moyen de 5.700
francs.
Le coût budgétaire de la mesure est évalué à
6,3 millions de francs.
Evolution du plafond majorable depuis 1987
Années |
Plafond majorable en vigueur en francs |
1987 |
5.000 |
1988 |
5.600 |
1989 |
5.600 |
1990 |
5.900 |
1991 |
5.900 |
1992 |
6.200 |
1993 |
6.400 |
1994 |
6.600 |
1995 |
6.750 |
1996 |
7.000 |
1997 |
7.091 |
1998 |
7.496 |
1999 (estimation) |
7.993 |
L'Union
des mutuelles de retraite des combattants et la plupart des associations
représentatives du monde combattant ont demandé qu'un rattrapage
soit réalisé pour parvenir à un plafond de 130 points
d'indice en 5 ans.
Considérant que le seuil des 130 points reste l'objectif
à atteindre à terme, mais estimant que le relèvement
proposé constitue déjà un premier pas substantiel, votre
commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet
article.
Art. 76 bis (nouveau)
(Art L. 253 bis du code
des pensions militaires d'invalidité
et des victimes de la
guerre)
Modification des conditions d'attribution de la carte du
combattant
aux anciens combattants
d'Algérie
La loi
de finances pour 1926 a créé la carte du combattant. Elle
concerne tous les conflits, y compris depuis 1993 les opérations
menées actuellement par la France en exécution d'accords
bilatéraux ou sous mandats internationaux.
Les conditions d'attribution répondent à deux logiques
alternatives :
- une logique collective : avoir été affecté pendant
90 jours dans une unité qualifiée de combattante par le
ministère de la défense ;
- une logique individuelle : il existe également une
procédure individuelle d'attribution permettant de prendre en compte les
mérites personnels.
Depuis la loi du 9 décembre 1974, ces conditions générales
s'appliquent également aux personnes ayant participé aux
opérations effectuées en Afrique du Nord jusqu'au 2 juillet 1962.
Toutefois, afin de tenir compte de la nature spécifique de l'engagement
en Algérie, compte tenu du risque diffus dû à
l'insécurité provoquée par la situation de
guérilla, la loi de finances pour 1998 a modifié le
critère traditionnel de 90 jours en unité combattante :
l'article 108 prévoit d'assimiler à la participation
personnelle à une action de feu ou de combat une durée de
présence en Algérie de 18 mois.
La circulaire du 25 janvier 1998 a précisé que pour les anciens
combattants ne remplissant pas cette condition, mais pouvant se
prévaloir d'une continuité de présence égale
à 18 mois partagée entre le Maroc ou la Tunisie et
l'Algérie, verront leurs dossiers soumis à l'examen de la
commission nationale de la carte du combattant.
Il semble cependant que l'extension des conditions d'attribution de la carte du
combattant n'ait eu qu'un faible impact : 22.300 cartes nouvelles ont
été attribuées au 1
er
septembre 1998,
alors que le secrétariat d'Etat aux anciens combattants prévoyait
un rythme deux fois supérieur.
En réalité, le critère d'une présence de
18 mois reste assez restrictif dans la mesure où la durée
moyenne de séjour en Algérie est de l'ordre de 15 mois.
Le présent article propose alors de ramener la durée de
présence en Algérie nécessaire pour l'obtention de la
carte du combattant de 18 à 15 mois.
Cette mesure devrait permettre l'attribution de 40.000 cartes de
combattants supplémentaires alors que plus de 1,1 million de cartes
du combattant ont déjà été attribuées au
titre des conflits de l'Afrique du Nord.
Le coût budgétaire est estimé à 3 millions de
francs en 1999, du fait de l'attribution supplémentaire de
1.200 retraites du combattant.
Votre commission, tout en étant favorable à cette mesure de
reconnaissance et de réparation (la carte du combattant donne en effet
droit à la retraite du combattant, à la retraite mutualiste et
à une demi-part fiscale supplémentaire à partir de
75 ans), ne juge pas souhaitable d'assouplir plus avant les conditions
d'attribution pour ne pas trop banaliser l'attribution de la carte du
combattant. Elle remarque à ce propos que 63 % des militaires
mobilisés en Afrique du Nord sont déjà détenteurs
de la carte du combattant, contre 52 % pour la guerre 1939-1945 et
55,5 % pour la guerre 1914-1918.
Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet
article.
Art. 76 ter (nouveau)
(Art. 125 de la
loi de finances pour 1992)
Assouplissement des conditions d'attribution de
l'allocation de préparation à la retraite pour les anciens
combattants justifiant d'une durée d'assurance vieillesse de
160 trimestres
I -
Le dispositif proposé
Instituée par l'article 125 de la loi de finances pour 1995,
l'allocation de préparation à la retraite (APR) est une
allocation versée par le fonds de solidarité.
Le fonds de solidarité n'est ouvert aux anciens combattants qu'aux
conditions suivantes :
- être titulaire de la carte du combattant ou du titre de
reconnaissance de la Nation au titre de l'Afrique du Nord ou de l'Indochine ;
- résider en France ou dans les départements d'outre-mer ;
- être privé d'emploi depuis plus d'un an, ou être
contraint à une activité professionnelle involontairement
réduite ;
- ne pas disposer de ressources personnelles mensuelles supérieures
à 4.614 francs ou 5.600 francs (dès lors que l'on peut
justifier d'une durée d'assurance vieillesse de 160 trimestres).
Tout allocataire du fonds de solidarité peut demander à
bénéficier de l'APR, après avoir perçu pendant six
mois l'allocation différentielle. Le montant de l'APR est égal
à 65 % des revenus bruts d'activité ayant
précédé la privation d'emploi. Il est plafonné
à 7.177 francs nets au 1
er
janvier 1998 et ne peut
jamais être inférieur au niveau de ressources garanti par
l'allocation différentielle. L'APR cesse d'être versée
dès lors que son bénéficiaire est en mesure de faire
valoir ses droits à la retraite à taux plein ou atteint
l'âge de 65 ans.
A la différence de l'allocation différentielle, l'APR constitue
un revenu complet versé à titre principal. Elle est
également constitutive de droits en matière d'assurance maladie
et d'assurance vieillesse.
Au 30 juin 1998, 11.972 personnes percevaient l'APR. Son montant
mensuel moyen était de 6.091 francs.
Le présent article, issu d'un amendement présenté par
le Gouvernement et adopté en première lecture à
l'Assemblée nationale, vise à modifier les conditions
d'attribution de l'APR pour une catégorie particulière de
bénéficiaires.
Les allocataires du fonds de solidarité pourront
bénéficier directement de l'APR, sans justifier du
bénéfice préalable de l'allocation différentielle,
à condition qu'ils justifient d'une durée d'assurance vieillesse
minimale de 160 trimestres.
Cette mesure pourrait bénéficier à 1.000 personnes en
1999 pour un coût budgétaire de 3,75 millions de francs.
II - La position de votre commission
La situation, très souvent particulièrement précaire, des
anciens combattants chômeurs en fin de droits et justifiant de
40 annuités d'affiliation au régime d'assurance vieillesse
préoccupe depuis plusieurs années votre commission.
Ainsi, elle avait été favorable à l'article 109 du
projet de loi de finances pour 1998 qui majorait à hauteur de 5.600
francs le montant de l'allocation différentielle versée par le
fonds de solidarité aux chômeurs qui justifient d'une durée
de 160 trimestres d'assurance vieillesse.
De même, M. Guy Fischer avait rapporté, au nom de votre
commission, le 29 juin dernier en séance, une proposition de loi
tendant à accorder la retraite anticipée aux anciens combattants
chômeurs en fin de droits justifiant de 40 annuités de
cotisations à l'assurance vieillesse. Lors de la discussion, le
Gouvernement avait déclaré la proposition de loi irrecevable en
invoquant l'article 40 de la Constitution.
Votre commission, en la personne de son président, avait alors
invité le Gouvernement à présenter dans le prochain projet
de loi de finances une mesure permettant à cette population de pouvoir
bénéficier directement de l'APR.
Votre commission se félicite d'avoir été entendue.
Le présent article apporte deux améliorations par rapport au
système existant :
- il permet d'abord de passer d'une logique d'aide sociale à une
logique de droit, l'APR n'étant jusqu'à présent accessible
que par l'intermédiaire de l'allocation différentielle
considérée comme un " RMI anciens combattants " ;
- il permet ensuite d'améliorer le montant des prestations
perçues. Alors que le montant perçu était pour l'instant
égal à 5.600 francs pour le chômeur ancien combattant
justifiant de 40 annuités d'assurance sociale, le montant serait
désormais compris entre 5.600 et 7.177 francs nets par mois en fonction
des anciens revenus d'activité.
Pour ces raisons, et tout en rappelant que cette mesure ne peut être
considérée comme un substitut à la retraite
anticipée, votre commission a émis un avis favorable à
l'adoption de cet article.