B. DES RÉSULTATS QUI S'APPRÉCIENT DANS LA DURÉE
1. Le gouvernement portugais souhaite adopter des mesures « réalistes » de baisse des dépenses
a) Des premiers résultats positifs en 2001
Les mesures visant à assurer un contrôle plus strict de la dépense publique par le ministère portugais des finances ont déjà produit leurs premiers résultats positifs dans la mesure où, selon les informations obtenues par votre rapporteur général, le niveau de la dépense exécutée à ce jour en 2001 serait inférieur au niveau défini en prévision budgétaire.
b) Un effort à poursuivre en 2002 et lors des années ultérieures
Pour
2002, le gouvernement s'est assigné pour tâche de limiter la
progression des dépenses courantes à 4 % et celle des
salaires à 3,7 %, soit une stabilisation, voire une
légère diminution en termes nominaux, si la prévision
initiale du gouvernement en matière d'inflation n'était pas
respectée. Par contre, les autres dépenses du budget
général, hors les rémunérations, devront, elles,
toutes baisser. A ce titre, le ministre des finances a été
chargé de s'assurer du respect de cette norme et a mis en place un
contrôle strict de l'activité des autres ministères afin de
s'assurer du réalisme de leurs prévisions budgétaires
figurant dans le projet de budget pour 2002.
Parallèlement, même si le contenu exact du rapport de la
commission ECORDEP qui a été remis au gouvernement n'a pas encore
été intégralement rendu public, ce dernier a
souhaité compléter ce plan dans une optique de réduction
résolue, à moyen terme, du poids de la dépense publique.
Malgré cette absence de publication officielle de l'ensemble des
conclusions du rapport ECORDEP, ladite commission aurait également
préconisé, selon les informations recueillies par votre
rapporteur général, de stopper la progression des dépenses
courantes de petit équipement (« le train de vie »),
de modifier les règles de calcul des pensions de retraite des
fonctionnaires qui bénéficient en effet, à ce jour, d'un
régime souvent avantageux, ou de mettre en place dans chaque
ministère un contrôleur financier chargé de vérifier
que les consignes du ministère des finances sont bien
appliquées.
c) Un volontarisme de pur affichage ?
S'il
semble exister au Portugal un assez large consensus quant à la
nécessité d'une telle réforme, nombre d'interlocuteurs
rencontrés restent sceptiques quant à l'efficacité
réelle des dispositifs préconisés, mais aussi et surtout
quant à la capacité du gouvernement portugais à tenir les
objectifs ambitieux qu'il s'est assignés et qui à ce jour ne sont
assortis d'aucune contrainte juridique.
Il s'agit d'un engagement sans force normative. Ainsi la limitation à
3,7 % de la progression pour 2002 des dépenses de
rémunérations entraînera très vraisemblablement une
perte nette de pouvoir d'achat pour les fonctionnaires compte tenu du niveau de
l'inflation et du GVT
56(
*
)
.
Elle suscite d'ores et déjà des réactions de vive
hostilité de la part des syndicats de la fonction publique. Et cela
d'autant plus que le Portugal s'est longtemps caractérisé,
notamment pendant les années 1970-1980 par un poids de la
dépense de fonction publique rapportée au PIB parmi les plus
élevés d'Europe
57(
*
)
, non pas tant en raison d'un nombre
plus élevé de fonctionnaires, qu'en raison des nombreuses
concessions alors faites aux syndicats en matière de politique
salariale.
2. Les efforts très significatifs accomplis par le gouvernement espagnol depuis 1996
a) Une réduction impressionnante des déficits publics
En 1995,
le solde financier des administrations publiques espagnoles s'élevait
à - 6,6 points de PIB, soit un niveau supérieur de
1,6 point à celui de la zone euro (- 5 % de PIB) et de
2,7 points à la moyenne des pays de l'OCDE (- 3,9 % du
PIB).
En 2000, ces mêmes administrations étaient proches de
l'équilibre avec un besoin de financement de seulement 0,3 point de
PIB, soit un niveau comparable à celui de la zone euro.
Solde financier des administrations publiques en France, en Espagne et dans la zone euro
(en points de PIB)
Années |
France |
Espagne |
Zone euro |
1995 |
- 5,6 |
- 6,6 |
- 5,0 |
1996 |
- 4,1 |
- 4,9 |
- 4,3 |
1997 |
- 3,0 |
- 3,2 |
- 2,6 |
1998 |
- 2,7 |
- 2,6 |
- 2,2 |
1999 |
- 1,6 |
- 1,3 |
- 1,3 |
2000 |
- 1,3 |
- 0,3 |
- 0,3 |
Source : OCDE
On constate ainsi que l'Espagne a non seulement rattrapé son retard
par rapport à la France, mais présente désormais, à
la différence de notre pays, un solde public proche de
l'équilibre.
Evolution comparée des déficits publics en France et en Espagne (1995-2000)
(en points de PIB)
En outre, selon les informations communiquées à votre rapporteur général, ce mouvement devrait se poursuivre en 2001 et 2002 puisque les administrations publiques ne devraient plus être déficitaires : le déficit budgétaire de l'Etat (- 0,5 point de PIB) est compensé par l'excédent des organismes de sécurité sociale (entre 0,5 et 0,6 point de PIB), les collectivités locales étant, elles, en situation de quasi-équilibre.
b) Une diminution obtenue pour l'essentiel grâce à une réduction du poids de la dépense
Sur la
période 1996-2000, la réduction du niveau des déficits
publics correspond en effort pour les 4/5
ème
à une
diminution du poids des dépenses et pour le reliquat, soit 20 %,
à un accroissement du montant des recettes, et cela alors que l'Espagne
connaissait un taux de chômage historiquement élevé :
il représentait 22,7 % de la population active en 1995 et
22,2 % en 1996. Le gouvernement espagnol a donc réussi à
mettre en oeuvre, à compter de 1996, un programme de réduction
drastique de la dépense publique, dans un contexte de fort chômage.
Ainsi a notamment été strictement contrôlée la
progression des dépenses de rémunération. Les
négociations salariales dans la fonction publique d'Etat et dans celle
des régions relèvent en effet d'un bureau unique qui
établit les paramètres généraux d'évolution
car la même grille s'applique à l'ensemble des fonctionnaires,
sous réserve d'aménagements locaux ou ponctuels
décidés au plan local. Les dépenses ont ainsi pu
être contrôlées, grâce à des périodes de
gel des salaires, et cela malgré de fortes tensions avec les syndicats.
Dans ce contexte, le gouvernement espagnol est ainsi en mesure d'afficher pour
2002 une norme de progression des rémunérations de 2 %,
correspondant comme en 2001 au niveau anticipé de l'inflation.
Parallèlement, compte tenu du poids important des dépenses de
transfert courant
58(
*
)
, en
raison de l'importance des sommes versées par le budget de l'Etat au
régime de sécurité sociale mais aussi aux budgets
régionaux et municipaux, la priorité du gouvernement a
été de limiter de tels transferts.
En outre, le retour rapide à l'équilibre des comptes publics a
permis une réduction significative du poids de la dette publique dans le
PIB qui est passé entre 1996 et 2002 de 67 % à 59 % et,
partant, une diminution du poids des charges d'intérêt y
afférant. On estime ainsi que la diminution du poids des dépenses
publiques a permis une économie au titre des charges
d'intérêt de 1,2 milliard de pesetas entre 1996 et 2002.
Part des dépenses publiques totales en France, en Espagne et dans la zone euro
(en points de PIB)
Années |
France |
Espagne |
Zone euro |
1995 |
53,5 |
44,0 |
49,0 |
1996 |
53,8 |
42,8 |
49,2 |
1997 |
52,8 |
41,3 |
47,8 |
1998 |
52,3 |
40,6 |
47,0 |
1999 |
52,1 |
39,4 |
46,6 |
2000 |
51,4 |
38,7 |
44,7 |
Source : OCDE
On remarque ainsi que l'écart entre la France et l'Espagne s'est
significativement accru : en 1995, il était de 9,5 points en
défaveur de notre pays ; il est, en 2000, de 12,7 points, soit
une progression de 3,2 points en cinq années.
Evolution comparée des dépenses publiques en France et en Espagne (1995-2000)
(en points de PIB)
c) La volonté actuelle de ne pas « gâcher » les efforts accomplis depuis 1996
Confrontée, à l'instar de l'ensemble des autres
pays
de l'Union européenne, à une diminution notable du taux de
croissance, même si celui-ci demeure sensiblement plus
élevé que dans le reste de l'Union européenne, de l'ordre
d'un point (la prévision gouvernementale est de 2,9 % de croissance
du PIB pour 2002), la volonté du gouvernement espagnol est de maintenir
pour 2001, et surtout pour 2002, un budget neutre et équilibré.
Il s'agit d'un choix délibéré, excluant donc
a
priori
tout plan de relance de la dépense publique, laissant jouer
les stabilisateurs économiques et cela, afin de ne pas
« gâcher » les efforts entrepris depuis 1996, portant
principalement sur le niveau de la dépense, et destinés à
permettre un retour à l'équilibre global des finances publiques.