EXAMEN EN COMMISSION
I. MERCREDI 7 NOVEMBRE 2001 : EXAMEN DES PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DE L'ÉQUILIBRE
Au cours
d'une réunion tenue dans la matinée du
mercredi 7 novembre 2001 sous la présidence de M. Alain
Lambert, président, la commission a procédé à
l'examen des principaux éléments de l'équilibre du projet
de loi de finances pour 2002, sur le rapport de M. Philippe Marini,
rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général, procédant à
l'aide d'une vidéo-projection, a rappelé que le cycle
budgétaire actuel était marqué par des conditions
particulières. Il s'agit d'abord du dernier budget de la
législature, ce qui nécessite de récapituler l'ensemble de
la gestion budgétaire depuis 1997 en procédant à des
appréciations rétrospectives. Il s'agit ensuite du premier budget
en euros, qui implique de s'habituer aux ordres de grandeur exprimés
dans la monnaie unique européenne. Enfin, il a rappelé que le
projet de loi de finances pour 2002, s'il avait été
élaboré selon le calendrier habituel donnant lieu à des
arbitrages au cours de l'été dernier, était marqué
par une conjoncture économique différente depuis le 11 septembre.
Les dramatiques événements intervenus aux Etats-Unis auraient
dû conduire le Gouvernement à modifier le cadrage
macro-économique sous-tendant le projet de loi de finances. Il a
ajouté que le taux de croissance associé au présent projet
de loi de finances pouvait être qualifié de volontariste avant le
11 septembre mais d'« illusoire » depuis lors.
Abordant le cadrage macro économique, le rapporteur
général a rappelé que la croissance observée au
cours de cette année ne répondait pas aux attentes du
Gouvernement puisqu'au moins un point d'écart était
constaté par rapport aux prévisions de la loi de finances
initiale. Pour 2002, l'hypothèse de croissance retenue par le
Gouvernement se situe dans une fourchette de 2,25 % à 2,75 %,
alors que les conjoncturistes prévoient une croissance de 1,8 %
l'année prochaine, et le Fonds monétaire international (FMI),
dans une récente publication, l'estime à 1,6 %. Il a
rappelé que, de 1998 à 2000, la croissance avait
été élevée, même si elle avait rapidement
atteint un palier situé à 3 %, le décrochage intervenant
entre la fin 2000 et le début 2001. L'Institut national de la
statistique et des études économiques (INSEE) prévoit
ainsi un taux de croissance de 1,1 % cette année, de telle sorte
que les objectifs fixés par la loi de finances initiale ne seront pas
atteints. Il a attribué cette évolution au ralentissement brutal
de l'économie américaine perceptible dès avant le
11 septembre, estimant que, depuis cette date, l'évolution
observée était davantage de degré que de nature, et a
considéré que l'impact du retournement américain sur la
croissance française pouvait être estimé à
0,5 point du produit intérieur brut (PIB) à l'horizon 2002,
cette évolution n'ayant pas été prise en compte par le
présent projet de loi de finances.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a noté que
l'équilibre du projet de budget de l'année prochaine ne pouvait
être atteint que grâce à un accroissement du déficit
budgétaire. En termes de besoins de financement, il a indiqué que
l'impact du plan triennal de réduction des impôts s'élevait
à 3,7 milliards d'euros en 2002, tandis que la hausse des
prélèvements sur recettes, notamment au profit du financement de
l'Union européenne, entraînait un besoin supplémentaire de
4,4 milliards d'euros, et la progression des dépenses du budget
général, de 5,2 milliards d'euros. En termes de moyens de
financement, il a constaté que les recettes fiscales progresseraient de
6 milliards d'euros en 2002 et les recettes non fiscales,
c'est-à-dire des recettes exceptionnelles, de 5,7 milliards
d'euros, un accroissement du déficit de 2 milliards d'euros
étant également nécessaire.
Il a estimé que les prévisions de recettes relatives aux recettes
fiscales étaient particulièrement optimistes, concernant
notamment le produit de la taxe intérieure sur les produits
pétroliers (TIPP) et celui de la taxe sur la valeur ajoutée
(TVA), + 5 % en 2002, soit une hypothèse qui paraît peu
réaliste. Il a enfin insisté sur la très forte progression
des recettes non fiscales, en particulier les prélèvements
opérés par l'Etat actionnaire sur les entreprises publiques, qui
constituent un moyen indispensable au Gouvernement pour boucler son projet de
budget. A ce propos, il a vivement regretté les difficultés qu'il
avait rencontrées pour obtenir des informations plus précises sur
ces prélèvements tant auprès du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie que de Gaz de France (GDF).
Enfin, il a souligné le dynamisme des recettes engendrées par
l'impôt sur les sociétés, dont le rendement a
augmenté de 57 % depuis 1997, et de l'impôt sur le revenu,
dont le rendement a augmenté de 19,4 % durant la même
période. Au total, les prélèvements obligatoires, au cours
de la législature, ont été accrus de 92 milliards
d'euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite
présenté l'évolution des dépenses du budget
général. Il a noté qu'en 1998 et 1999, la norme
prévisionnelle de progression des dépenses n'avait pas
été respectée et que, selon la Cour des comptes, elle ne
l'avait été en 2000 qu'au prix de manipulations comptables. Il a
rappelé que, depuis 1997, les dépenses liées à la
fonction publique avaient crû de 15 milliards d'euros, soit le
premier poste de dépenses de l'Etat. La part des dépenses de
fonction publique au sein du budget général n'a cessé
d'augmenter, passant de 40,7 % en 1997 à 43,3 % dans le
présent projet loi de finances, cette évolution traduisant un
resserrement des marges de manoeuvre au sein du budget.
Il a ensuite insisté sur l'inflexion à la hausse de l'emploi
public, marqué par la création de plus de 27 200 emplois
budgétaires supplémentaires au cours des deux dernières
années, le Gouvernement rompant ainsi ses engagements initiaux de
« geler » l'emploi public. Il a également
rappelé que le projet de loi de finances pour 2001 prévoyait
aussi au titre de la résorption de l'emploi précaire dans la
fonction publique ainsi que des régularisations d'emplois et de
surnombres, des mesures de « remise en ordre » des
personnels, portant sur un total de 13 293 emplois. Par ailleurs, il
prévoit également le remplacement des
54 700 départs à la retraite de fonctionnaires
prévus pour l'année prochaine, le remplacement poste pour poste
étant lourd de conséquences tant en termes budgétaires
qu'au niveau de la nécessaire réflexion sur la
réorganisation du service public. Il a ainsi vivement regretté
que la progression des dépenses soit quasi entièrement
« captée » par la fonction publique et la charge de
la dette.
M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est ensuite
interrogé sur la pertinence de certains choix effectués par le
Gouvernement. Il a par exemple montré que la réduction du temps
de travail, bien que financée en loi de financement de la
sécurité sociale grâce à des affectations de
recettes fiscales, avait été systématiquement
privilégiée par rapport aux dépenses civiles et militaires
en capital. Il a indiqué que les emplois-jeunes avaient
coûté depuis 1998 plus de 13,20 milliards d'euros, alors que
l'avenir de ces jeunes reste très incertain. Dans le domaine militaire,
les dépenses d'investissement ont constamment été
sacrifiées au fonctionnement courant des armées de telle sorte
qu'il est aujourd'hui évident que la loi de programmation militaire ne
pourra être respectée. Il a indiqué à cet
égard que le simple respect de la loi de programmation militaire
révisée à la baisse aurait permis à la France de se
doter d'un second porte-avions nucléaire, accompagné de trois
frégates anti-aériennes.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite relaté
un déplacement effectué en Espagne et au Portugal, le premier de
ces pays ayant un gouvernement de centre-droit et le second un gouvernement
socialiste. Or, ces deux Etats de la péninsule ibérique ont
engagé une véritable politique de réduction de la
dépense publique grâce à la fixation d'objectifs ambitieux
en termes de progression des dépenses, au remplacement d'un
départ à la retraite de fonctionnaires sur quatre et à la
conduite de réformes structurelles courageuses. Il a estimé que
ces pays constituaient pour la France un exemple à méditer.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite vivement
déploré le retour au laxisme budgétaire que traduisent les
choix gouvernementaux en matière de déficit. Il a, à cet
égard, rappelé que 2001 sera la première année
depuis 1997 à présenter un déficit exécuté
supérieur aux prévisions initiales, et que, en 2002, pour la
première fois depuis 1995, le déficit prévu en loi de
finances initiale augmentera. Il en a conclu que le scénario fixé
par le programme pluriannuel de finances publiques, qui prévoit un
retour à l'équilibre budgétaire en 2004, ne pourra plus
être respecté et s'est interrogé sur les
conséquences de cette évolution sur la crédibilité
de la France en Europe, et, plus généralement, sur celle de la
zone euro et de la monnaie unique. Il a expliqué que l'année 2002
donnera lieu à un recours important à l'emprunt, pour un total
supérieur à 90 milliards d'euros ainsi
répartis : 60 milliards d'euros au titre du remboursement des
emprunts précédents, 25,6 milliards d'euros pour le
financement des investissements, et 4,8 milliards d'euros au titre du
paiement des dépenses courantes. Il a déploré le
« désavantage compétitif » de notre pays par
rapport à la moyenne de la zone euro, les déficits structurels
français étant largement supérieurs à la moyenne
européenne. Un décrochage très net est en effet apparu en
1997, la situation de la France n'ayant alors cessé de se
détériorer par rapport à la moyenne de l'Union
européenne comme à celle de la zone euro.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a considéré
que la situation de la France en matière de dette publique était
moins favorable que par le passé. En effet, si la situation
française, en termes relatifs, était globalement meilleure que
celle des autres pays européens, cet avantage s'est sensiblement
réduit, l'écart ne cessant de s'amenuiser avec le reste de
l'Europe. Il a ainsi rappelé que la dette négociable de l'Etat
passerait de 515 milliards d'euros en 1997 à 686 milliards
d'euros en 2002. Il a formé le souhait que la France ne renoue pas avec
le cercle vicieux de déficits budgétaires venant accroître
le stock de dette publique comme cela avait été le cas au cours
des années 1991 à 1993. Il a en effet rappelé que les
perspectives d'évolution de la dette sont toujours lointaines, notamment
depuis que le gain escompté de la cession des licences Universal Mobile
Telecommunication System (UMTS) était passé de
19,82 milliards d'euros à 1,23 milliard d'euros. Il a par
ailleurs rappelé que l'Etat était également
confronté à des engagements « hors-bilan »,
dont la plus grosse part est constituée des pensions publiques, dont le
montant s'établit, selon la secrétaire d'Etat au budget, entre
595 et 685 milliards d'euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite observé
qu'une part croissante des concours de l'Etat aux collectivités
territoriales était consacrée à la compensation des
exonérations et des suppressions d'impôts décidées
par le gouvernement, et a ainsi estimé que l'autonomie financière
des collectivités avait été réduite depuis le
début de la législature. Il a conclu sur le fait que le
Gouvernement, depuis 1997, n'avait pas mis à profit la période de
croissance dont il avait bénéficié pour engager les
indispensables réformes de structure dont notre pays a besoin.
M. Alain Lambert, président, a souligné la qualité de la
présentation du rapporteur général et lui a demandé
si sa conclusion n'était pas que le Gouvernement décidait de
baisses d'impôt à crédit.
M. Michel Charasse est revenu sur la comparaison entre la situation actuelle du
budget de l'Etat et les années 1991-1993. Il a tout d'abord
souligné que le déficit de l'année 1991 s'élevait
seulement à 130,8 milliards de francs contre plus de
200 milliards de francs pour l'année 2001 et que les
prévisions n'avaient été légèrement
dépassées qu'en raison du ralentissement des recettes fiscales
à partir du second trimestre de 1991. En 1992, le déficit avait
atteint 193,6 milliards de francs du fait d'une moins-value fiscale de
l'ordre de 40 milliards de francs. Il a rappelé qu'une commission
du bilan réunie par le Premier ministre de l'époque, M. Edouard
Balladur, avait conclu que la dégradation du solde budgétaire
entre 1991 et 1993 ne résultait pas d'un dérapage des
dépenses, mais d'une chute brutale des recettes. Il a ajouté que
lors de la préparation de la loi de finances pour 1993, tous les grands
instituts de prévision avaient sous-estimé l'ampleur de la
dégradation de la situation économique qui se constatait pourtant
dans le niveau des rentrées fiscales. Il en a conclu que l'objectif
essentiel d'un gouvernement devait être de lutter contre la hausse des
dépenses, puisque le pilotage du montant des recettes était
impossible.
M. Bernard Angels, tout en soulignant les qualités pédagogiques
de la présentation du rapporteur général, a
souligné qu'il aurait été également très
simple de tirer des chiffres de la période 1997-2001 des conclusions
entièrement différentes sur la pertinence de la politique
budgétaire menée par le Gouvernement. Il a fait observer que,
globalement, les résultats enregistrés par la France en
matière de dépenses, de déficit ou de dette ne variaient
pas depuis une dizaine d'années. S'agissant du taux de croissance du
produit intérieur brut (PIB) pour 2002, il a déclaré qu'il
croyait en l'action politique et en ses effets sur l'économie, et il a
estimé que l'importante croissance qu'avait connue la France depuis
quatre ans était au moins pour partie liée à l'action du
Gouvernement. Il a évoqué le plan de relance décidé
aux Etats-Unis, qui n'était pas différent dans ses objectifs de
celui décidé en France. S'agissant de la perception de recettes
exceptionnelles en 2002, il a évoqué la
« soulte » de France Télécom versée au
budget de l'Etat en 1997. Il a également estimé que
l'exposé du rapporteur général devrait comporter des
considérations sur l'évolution du pouvoir d'achat des
ménages et de l'investissement industriel depuis 1997. Enfin, il a
demandé s'il pouvait avoir communication des chiffres des
dernières rentrées fiscales qui faisaient l'objet de situations
hebdomadaires transmises par le ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie au rapporteur général et au
président de la commission.
M. Joël Bourdin s'est interrogé sur la prévision de
croissance associée au projet de loi de finances pour 2002 et sur les
conséquences budgétaires d'une révision à la baisse
de ce taux de croissance.
M. Aymeri de Montesquiou a souligné l'impact de la gestion
budgétaire de la France sur l'euro, en rappelant qu'il existait
désormais un droit de regard de nos partenaires européens sur la
conduite de nos finances publiques.
M. Gérard Miquel a estimé qu'il était paradoxal de faire
référence aux observations de l'organisation pour la
coopération et le développement économique (OCDE) et du
fonds monétaire international (FMI), alors même que les Etats-Unis
choisissaient de relancer leur économie par des dépenses
publiques supplémentaires en contradiction avec les
préconisations de ces organismes. Il a également souligné
que l'exposé du rapporteur général manquait
d'éléments de comparaison des performances de l'économie
française avec celles des autres pays européens. Il a
regretté qu'en 1999, alors que les comptes publics se redressaient, le
débat ait porté sur une répartition des fruits de la
croissance plutôt que sur la réduction du déficit
budgétaire. Enfin, il a rappelé que la France avait
déjà traversé deux périodes difficiles en 1997 et
1999 et que le Gouvernement s'était employé depuis 1997 à
augmenter de 20 % les dotations au budget de l'éducation nationale,
de 25 % les crédits à la justice et de 18 % les
crédits pour la sécurité.
M. Yves Fréville a demandé quelle était la politique du
Gouvernement pour faire face à une éventuelle dégradation
de la conjoncture économique, compte tenu des incertitudes pesant sur le
taux de croissance. Il s'est interrogé sur les prévisions de
recettes pour l'année 2002, et notamment les prévisions de taxe
sur la valeur ajoutée (TVA,) et sur les dépenses publiques, qui
pourraient augmenter de manière beaucoup plus importante que la norme de
progression retenue jusqu'à présent. Il a demandé au
rapporteur général s'il lui était possible de
présenter le déficit du budget de l'Etat en solde structurel et
en solde conjoncturel et il l'a interrogé sur la combinaison entre la
politique budgétaire du Gouvernement et la politique monétaire de
la Banque Centrale Européenne (BCE).
M. Eric Doligé, constatant l'effet de ciseaux entre la diminution des
recettes de l'Etat et l'augmentation des dépenses, s'est demandé
si l'Etat ne comptait pas transférer davantage de dépenses aux
collectivités locales. Il a déclaré que les
prévisions montraient que 80 % des départements seraient
contraints d'accroître leur fiscalité de 5 à 15 % dans
les années à venir afin de compenser les charges nouvelles pesant
sur eux. Il a souhaité qu'il soit bien noté que la situation du
budget de l'Etat serait encore plus dégradée si les
collectivités locales ne contribuaient pas à de nombreux
financements publics.
M. Jacques Oudin a expliqué que face aux aléas conjoncturels, la
France ne disposait pas de marge de manoeuvre. Il a regretté que
l'emprunt serve à hauteur de 4,81 milliards d'euros à des
dépenses de fonctionnement. Il a évoqué la chute des
investissements publics qui handicape l'avenir économique de la France
et la nécessaire restructuration des services publics, seul
véritable préalable à la maîtrise des
dépenses.
M. Yann Gaillard a souhaité que le rapporteur général
puisse définir un « bloc » de dépenses
politiques, en évoquant la réduction du temps de travail à
35 heures ou les emplois jeunes, afin de démontrer que l'action
gouvernementale avait une entière responsabilité dans la
dérive de nos finances publiques.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a répondu au
président que les baisses d'impôt décidées par le
Gouvernement l'étaient bien à crédit, car le budget pour
2002 ne pouvait être présenté qu'avec une hausse
significative du déficit budgétaire. S'agissant de la chute des
recettes et de l'absence de marge de manoeuvre évoquée par M.
Jacques Oudin, il a expliqué que celle-ci résultait de la
rigidité des dépenses et qu'il conviendrait donc de changer de
méthodologie en matière de dépenses. Il a
évoqué des expériences étrangères, notamment
aux Pays-Bas et en Nouvelle-Zélande, qui consistaient à voter des
dépenses conditionnelles qui ne se réalisaient que si la
croissance le permettait. Il a estimé que le Gouvernement ne pouvait
plus être un spectateur passif des évolutions économiques,
alors que toutes les entreprises trouvaient les facultés de s'adapter
à la conjoncture.
En réponse à M. Michel Charasse, et s'agissant de la comparaison
de la période actuelle avec celle de 1993, il a souligné trois
facteurs objectifs de différence : des incertitudes encore plus
fortes sur la croissance économique, mais aussi sur la politique
internationale, une rigidité accrue de la dépense publique
puisque la part des dépenses de fonction publique n'a cessé
d'augmenter depuis dix ans, enfin, une dette encore plus importante qu'à
l'époque considérée.
Au sujet des performances de l'économie française depuis 1997
évoquées par MM. Bernard Angels et Gérard Miquel, il a
estimé qu'une augmentation plus faible des prélèvements
obligatoires sur la période aurait sans doute permis à l'emploi
de progresser davantage, mais que de toute manière, aucun gouvernement
ne pouvait se targuer d'avoir trouvé la clé de la croissance
économique. Il a ajouté qu'il fallait en réalité
juger la performance de l'économie française par rapport au cycle
conjoncturel qu'elle avait connu, et il a cité les critiques de la
Commission européenne, qui a estimé que la politique
française sur la période récente avait été
procyclique alors qu'elle aurait dû être contracyclique. Il a
rappelé l'importance des dépenses sociales depuis 1997 et
l'absence complète de provisions pour réduire l'endettement
public dans la perspective d'un ralentissement de la croissance
économique. Il a également souligné que les Etats-Unis
pouvaient se permettre de lancer un plan d'investissement massif car ils
avaient profité de leur période de croissance pour dégager
un excédent budgétaire.
En réponse à M. Joël Bourdin, s'agissant de l'impact d'un
ralentissement de la croissance sur le budget de l'Etat, le rapporteur
général a expliqué que, selon les méthodes de
calcul de l'Observatoire français des conjonctures économiques
(OFCE), 0,5 point de croissance en moins entraînerait environ 7
milliards d'euros de moins-values fiscales, auxquelles il faudrait ajouter des
moins-values sur les prélèvements sociaux et les
prélèvements des collectivités locales.
S'agissant du regard de nos partenaires européens, évoqué
par M. Aymeri de Montesquiou, M. Philippe Marini, rapporteur
général, a expliqué que la France et l'Allemagne, compte
tenu de leur situation financière actuelle, s'éloignaient de
l'objectif de retour à l'équilibre des finances publiques en
2004. Il a ajouté que ce laxisme budgétaire conduisait à
des observations de la Commission européenne et à des remarques
de certains de nos partenaires comme l'Espagne, qui enregistrait des
performances bien meilleures que les nôtres.
En ce qui concerne les priorités budgétaires du Gouvernement
évoquées par M. Gérard Miquel, il a expliqué que la
vraie priorité avait été la hausse des dépenses de
fonction publique, celles-ci ayant représenté 70 % de la
progression des dépenses de l'Etat depuis 1997. Il a ajouté qu'au
sein des dépenses de fonction publique, les dépenses pour le
personnel de l'éducation nationale avaient le plus progressé,
sans aucune mesure d'efficacité, si bien qu'il a parlé de
« fuite en avant » du système éducatif
français. Il a ajouté que les priorités gouvernementales
ne figuraient pas uniquement dans le projet de loi de finances, puisque la
réduction du temps de travail à 35 heures coûtait
75 milliards de francs et que ce coût figurait essentiellement en
dehors du budget de l'Etat.
En réponse à M. Yves Fréville et s'agissant de la
présentation du déficit de l'État en solde structurel et
conjoncturel, il a expliqué que celle-ci figurerait dans son rapport
écrit. Il a affirmé que le Gouvernement n'avait pas assez
utilisé les recettes de la croissance pour réduire le
déficit structurel et que depuis 1997, les deux tiers de la
réduction du déficit étaient liés à
l'amélioration de la conjoncture.
S'agissant de l'évolution récente des recettes fiscales, en
réponse à M. Bernard Angels, il a précisé que
la situation hebdomadaire du budget de l'État n'était transmise
qu'au rapporteur général et au président de la commission
des finances et faisait dès lors l'objet d'une diffusion très
limitative. Il a toutefois ajouté que selon les dernières
informations dont il disposait, les recettes de TVA nettes étaient en
repli de 1,2 % par rapport à l'année précédente.
Enfin, il a approuvé les propos de M. Yann Gaillard sur l'existence d'un
« bloc » de dépenses politiques.