CONCLUSION
Le
présent rapport ne se veut pas un réquisitoire.
Il reconnaît, avec objectivité, les progrès accomplis en
matière d'aide à la création d'entreprises innovantes et
de gestion prévisionnelle des emplois scientifiques.
Cependant, par delà les clivages politiques, qui tendent, naturellement,
à s'accentuer à la veille d'élections, votre rapporteur a
voulu manifester sa déception.
Il regrette, en effet, profondément que notre pays n'ait pas su profiter
de la période assez longue de croissance et de stabilité qu'il
vient de traverser, pour allier, comme d'autres ont su le faire, une forte
augmentation de crédits à de profondes réformes de
structures. La première aurait pu servir d'incitation aux secondes.
L'efficacité des dépenses s'en serait trouvée
renforcée, ce qui les aurait mieux fait contribuer au progrès des
connaissances, à l'activité économique et aux autres
demandes de la société.
L'organisation de la recherche française a besoin de davantage de
cohérence et de souplesse : cela implique, d'un côté,
une simplification des structures, une meilleure coordination des actions et un
renforcement de l'évaluation et, de l'autre, davantage d'autonomie des
différents intervenants et une plus grande utilisation des contrats dans
le monde de la recherche (pour la détermination des objectifs, l'emploi
scientifique...).
La prochaine majorité devra régler le problème, essentiel,
de l'insuffisance de mobilité, à tous les niveaux, dans la
recherche française. Elle devra renforcer l'autonomie, les moyens et
l'excellence des universités, en les incitant à coopérer
davantage entre elles et avec les entreprises.
Déplorant l'insuffisance des réformes et de la progression du
montant et de l'efficacité des dépenses de la recherche, votre
commission vous propose de rejeter ce budget.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 6 novembre 2002 sous la
présidence de
M. Michel Sergent, secrétaire, la commission a examiné les
crédits de la recherche
Le rapporteur spécial a tout d'abord souligné que contrairement
aux propos du ministre de la recherche, l'évolution des dotations
budgétaires depuis cinq ans ne marquait pas de rupture par rapport
à la tendance constatée de 1993 à 1997 : la part de
la dépense intérieure de recherche dans le produit
intérieur brut a continué de décliner, l'effort des
entreprises ne compensant pas le désengagement des administrations.
Cette évolution résulte pour lui de deux facteurs : le
freinage relatif de la progression des dépenses publiques par suite du
retour de la croissance, le fléchissement accentué des
dépenses de recherche militaire.
Le rapporteur spécial a reconnu, toutefois, la forte progression des
autorisations de programme dont bénéficient depuis 2001 les
équipements de recherche des universités et des grands organismes
scientifiques.
Ainsi, selon le rapporteur spécial, la position relative de la France en
termes de part de dépenses de recherche dans le produit intérieur
brut, loin de marquer un rattrapage, a plutôt tendance à se
détériorer : la France est désormais non seulement
derrière le Japon et les États-Unis mais également
derrière l'Allemagne et la Suède.
Le rapporteur spécial a également indiqué que si avec
39,1 % en 1998, la France se trouvait dans la moyenne européenne
pour ce qui est de la part des financements publics de la recherche, ce
pourcentage restait sensiblement plus élevé que chez nos
principaux partenaires et concurrents. Cela signifie à la fois que nos
entreprises interviennent moins dans le financement de l'effort national de
recherche et qu'elles reçoivent moins de subventions à ce titre
que dans les pays anglo-saxons.
Ensuite,
M. René Trégouët
a évoqué les
performances de la recherche française, dont il a estimé qu'elles
étaient à peu près honorables, à considérer
les trois indicateurs pertinents que sont les publications, les brevets et les
créations d'entreprises.
S'agissant des structures, il a rappelé que la France se
caractérise par la faiblesse relative des moyens de la recherche
universitaire, la coexistence du CNRS et d'organismes spécialisés
et le statut de chercheur fonctionnaire, trois singularités qui ne sont
pas favorables à la valorisation des résultats de la recherche
française.
Le rapporteur spécial a conclu son exposé en évoquant un
certain nombre de facteurs qui devraient nous conduire à repenser le
système de recherche français : la nouvelle loi organique
qui obligera à présenter le budget de la recherche sous forme de
missions et de programmes ; le choc démographique consécutif
aux départs en retraite des générations nées
après la seconde Guerre mondiale qui va se faire sentir à partir
de 2004. A cet égard, il s'est demandé s'il ne convenait pas
d'envisager un recours accru aux contrats dans l'organisation de la recherche
et éventuellement de modifier les missions et les moyens du Centre
national de la recherche scientifique (CNRS).
Après cet exposé,
M. Philippe Marini, rapporteur
général,
est intervenu pour souligner qu'il était
important d'adapter le régime de l'emploi scientifique en termes de
carrière et de mobilité et que l'évolution
nécessaire des statuts passait par celle en cours des mentalités.
M. Maurice Blin
a, de son côté, évoqué
notamment la question des « chercheurs à vie » qui
n'existent pas aux États-Unis, tandis que
M. François
Marc
a tenu à signaler que la pratique des contrats avait tendance
à se développer de plus en plus notamment dans les
universités de l'ouest de la France.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé de
réserver son vote sur les crédits du budget de la recherche
jusqu'à l'audition du ministre de la recherche.