INTRODUCTION
LA NATURE DE LA MENACE
Le
projet de budget de la Défense pour 2002 s'inscrit dans un environnement
international marqué par les événements du
11 septembre 2001.
Votre rapporteur ne peut mieux faire ici que de reprendre les principaux
éléments de l'analyse du ministère de la
Défense
1(
*
)
. Celui-ci
considère en effet que
« l'examen des facteurs susceptibles
d'influencer notre outil de défense permet de
confirmer, dans leurs
grandes lignes
, les hypothèses stratégiques qui avaient
présidé à l'élaboration du modèle 2015.
Toutefois,
certains enseignements doivent être tirés de
l'évolution récente du contexte international et des engagements
de nos forces armées depuis 1996
.
I. UN CADRE GÉOSTRATÉGIQUE PRÉOCCUPANT
A. L'ÉVOLUTION DU CONTEXTE INTERNATIONAL : NOMBREUX FACTEURS DE DÉSORDRE ET DE CONFLITS
1. Une expression paroxystique du terrorisme
-
« Les attentats aux Etats-Unis ont frappé le monde entier par
le nombre de victimes (près de 6 000 morts) et la
volonté de destruction massive qu'ils témoignent de la part de
leurs auteurs. Même si cette expression paroxystique du terrorisme ne
relève pas nécessairement d'une rupture stratégique, elle
souligne
l'importance de l'effort à engager au niveau
international pour lutter contre le terrorisme et plus
généralement contre les facteurs qui sont à son
origine
.
- « De nombreux facteurs de désordre et de conflits persistent
par ailleurs dans un environnement international incertain.
2. Les difficultés de la transition démocratique dans l'entourage immédiat de l'Europe
«
Autour de l'Europe, les effets de la transition
démocratique vont continuer à se manifester plus longtemps
encore. Les économies des régions en développement
connaissent des difficultés profondes. Leurs sociétés en
transition seront marquées par
une instabilité forte,
aggravée par d'intenses migrations internes
. Cette
instabilité continuera à s'exprimer par
des réactions
identitaires violentes, teintées de nationalisme ou de fondamentalisme
religieux. Les pays européens s'en trouveront affectés de
diverses manières : mouvements migratoires, actions terroristes,
criminalité organisée
.
«
La crédibilité des Nations-Unies
comme outil
de règlement des conflits sera régulièrement mise à
l'épreuve,
et, avec elle, l'audience des pays comme la France
qui
veulent en faire un élément-clé de la régulation
politique mondiale.
« Les risques et les menaces pour la France et pour l'Europe se
caractérisent, plus que par le passé, par l'asymétrie en
tant que mode de réponse par un certain nombre d'Etats ou d'acteurs non
étatiques qui ne sont pas en mesure de s'opposer par d'autres moyens
à la supériorité des pays appartenant à la
sphère occidentale. Ces risques comprennent en particulier
le
terrorisme, qui n'est pas un risque nouveau mais manifeste actuellement des
tendances très préoccupantes
: réseaux moins
centralisés, terroristes dormants,
liens croissants avec les
économies criminalisées et les mafias, montée d'un
terrorisme maximaliste tel que celui exprimé aux Etats-Unis d'une
façon dramatique.
Ce risque concerne aussi l'Europe sur son
territoire comme nos forces déployées à
l'extérieur.
3. Des risques asymétriques de prolifération
«
Ces risques asymétriques comprennent
également les
diverses formes de prolifération
, y compris
la prolifération des armes de destruction massive et des missiles
associés, les agressions contre les systèmes d'information, et
nécessiteront des moyens plus importants dans le domaine de la
détection, du renseignement et de la protection
.
«
Les Etats-Unis
sont engagés dans un effort
budgétaire de défense particulièrement important, et
semblent faire le choix, avec la défense antimissile, d'options
stratégiques nouvelles qui doivent être précisées
dans le cadre de leur revue générale de défense. Ils se
mettent ainsi
en position d'imposer davantage encore leurs concepts de
défense et leurs propres normes. Le défi adressé à
l'Europe
dans les domaines stratégique et technologique par la
nouvelle approche américaine pourrait affecter son autonomie future
d'appréciation et d'action et a pour enjeu sa capacité à
entrer dans des
coopérations transatlantiques
équilibrées tant sur les concepts de défense que sur
l'accès aux technologies.
B. LES ENGAGEMENTS DE NOS FORCES ARMÉES DEPUIS 1996 : DES LEÇONS À TIRER
1. Un déploiement à la limite de nos capacités.
«
Depuis 1996, nos forces ont été
impliquées dans des opérations de nature très diverses, et
souvent particulièrement contraignantes, que ce soit par leur
durée (Bosnie), leur intensité (Kosovo), ou leur
éloignement(Timor).
« Ces forces ont parfois été déployées
à la limite de leurs capacités, comme cela a été le
cas lors de la crise au Kosovo, du fait de la concomitance de la montée
en puissance de la professionnalisation et de la rotation très rapide du
personnel en opérations.
« Les
insuffisances déjà connues
ont
été confirmées.
«
D'autres ont été
révélées
, notamment lors de l'opération Force
alliée. L'interopérabilité, tant sur le plan technique que
sur celui de l'entraînement peut encore être
améliorée afin de permettre de conduire, au sein de l'OTAN ou de
l'UE, un combat complexe et prolongé.
« Plus particulièrement, dans le cadre des opérations
du Kosovo, d'autres capacités se sont révélées
insuffisantes au niveau national ou européen, comme le
renseignement
stratégique par tout temps
, la
suppression des défenses
aériennes adverses
, le
sauvetage de pilotes au combat, la
sélection de cibles
et l'
évaluation des dommages
. Le
rôle croissant de l'infanterie dans la phase de consolidation de la paix
a par ailleurs mis en évidence la nécessité
d'améliorer sa protection.
2. Persistance de faiblesses technico-opérationnelles déjà identifiées
« Cette persistance de faiblesses technico-opérationnelles déjà identifiées confirme la nécessité de maintenir une cohérence de longue durée dans la politique d'équipement. La programmation actuelle, qui s'inscrit dans cette préoccupation, permettra le développement ou l'entrée en fabrication d'un nombre élevé de programmes, aujourd'hui approuvés, pendant la loi de programmation militaire à venir (avion de combat Rafale, avion de transport A400M, missiles, hélicoptères NH90 et Tigre, Véhicule de combat d'infanterie VBCI, frégates multimissions et sous-marins d'attaque futurs, segment sol de l'imagerie radar, drones de théâtre et tactiques).
3. Des besoins confirmés et des contraintes fortes
«
Les crises récentes ont
confirmé
l'intérêt de la supériorité technologique dans les
domaines du renseignement, du contrôle et du commandement, de la
précision des armes et de l'action à distance sous toutes ses
formes
.
« Simultanément, la maîtrise de la violence et le
contrôle des espaces continueront d'imposer des actions de projection
dans lesquelles nos forces devront s'adapter à des formes souples et
rapidement réversibles d'action militaire, au contact avec la
population, de plus en plus fréquemment dans des milieux urbains,
passant, parfois au cours d'une même mission, de l'accompagnement de
l'effort humanitaire au contrôle de la sécurité des
personnes, ou aux
opérations ponctuelles de rétablissement de
la paix pouvant impliquer des phases de combat de haute intensité
.
« L'action militaire sera contrainte de recourir à
des
moyens de plus en plus discriminants et sélectifs
. La maîtrise
des effets sur l'environnement, le respect des prescriptions du droit
international et la maîtrise de la communication sont devenus des
contraintes fortes qui s'imposent à l'action militaire. Les moyens de
supériorité des forces doivent en tenir compte.
« La durée indispensable au succès des
opérations de rétablissement de la paix
se confirme,
introduisant de
fortes contraintes sur la gestion de notre appareil
militaire
. »