2. Des atteintes aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale
Dans le droit fil de sa jurisprudence antérieure, le Conseil constitutionnel a considéré que certaines clauses du traité établissant une Constitution pour l'Europe affectaient les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale en transférant à l'Union européenne des compétences nouvelles ou en lui permettant d'exercer certaines de ses compétences selon des modalités nouvelles.
Curieusement, alors qu'il est tenu de contrôler la conformité à la Constitution de l'intégralité d'un traité, le Conseil n'a pas cru devoir - ou pouvoir - dresser une liste exhaustive de ces clauses , se contentant d'en citer des exemples caractéristiques.
En ce qui concerne les transferts de compétences intervenant dans des matières nouvelles , ont été jugés contraires à la Constitution :
- les clauses faisant relever de la procédure législative ordinaire des « compétences inhérentes à l'exercice de la souveraineté nationale » , celles mises en exergue par le Conseil relevant toutes de l'espace de liberté, de sécurité et de justice ;
- « eu égard à la portée que revêt une telle disposition pour l'exercice de la souveraineté », l'article III-274, qui rend possible la création, par une loi européenne adoptée à l'unanimité par le Conseil des ministres après approbation du Parlement européen, d'un Parquet européen habilité à poursuivre les auteurs d'infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union et à exercer devant les juridictions françaises l'action publique relative à ces infractions, ses attributions pouvant être étendues, selon des modalités similaires, à la « lutte contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontière ».
En ce qui concerne les nouvelles modalités d'exercice de compétences transférées à l'Union, ont été jugées contraire à la Constitution :
- les clauses d'effet immédiat prévoyant le passage de l'unanimité à la majorité qualifiée des règles de vote en Conseil des ministres, l'intervention désormais décisionnelle du Parlement européen ou encore la perte du pouvoir d'initiative de chaque Etat membre au profit de la seule Commission ou d'un groupe d'Etats membres dans des matières régaliennes ;
- les « clauses dites passerelles » permettant de modifier ultérieurement les modalités de décision sans que ces modifications soient soumises à ratification et, en conséquence, puissent faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité préalable.