B. UN CHIFFRAGE BUDGÉTAIRE INCERTAIN

Les seuls éléments disponibles sur le chiffrage global de la réforme sont ceux déjà présentés dans le I du présent rapport, qui évaluent l'économie nette globale cumulée à - 4 milliards d'euros sur la période 2008-2015.

Cette économie nette se décompose de la manière suivante :

- des gains au titre de la masse salariale (- 6,4 milliards d'euros) et des produits de cessions immobilières (- 0,5 milliard d'euros) ;

- des coûts résultant de l'accompagnement social des restructurations (+ 1,2 milliard d'euros), des interventions sur les infrastructures (+ 1,5 milliard d'euros) et de l'accompagnement économique des restructurations (+ 0,2 milliard d'euros).

Comme cela a été observé dans le I du présent rapport, ces chiffrages sont incertains et réévalués régulièrement, même s'il faut se féliciter d'une évaluation prudente par l'actuel Gouvernement qui réservera, le cas échéant, une bonne surprise.

En réponse au questionnaire envoyé par vos rapporteurs spéciaux dans le cadre de leur mission de contrôle budgétaire, le ministère de la défense a indiqué avoir mis en place un instrument dédié de mesure des économies nettes réalisées (dans le cadre du projet Aramis de renforcement de la fonction financière du ministère de la défense), lancé en 2011.

Toujours selon le ministère, les premiers résultats sont conformes aux prévisions initiales. Il y a tout lieu d'espérer que, dans un proche avenir, il soit possible de disposer d'un outil de mesure plus solide des économies et des coûts engendrés par la réforme, en intégrant également certains postes aujourd'hui non pris en compte (notamment, les surcoûts au titre de la prise en charge du chômage ) 36 ( * ) .

Il manque également dans cette estimation les économies de fonctionnement, détaillées par poste de dépenses . Le gain résultant de la seule mutualisation des achats est pourtant estimé à 143 millions d'euros sur la période 2008-2015.

Sous ces réserves, une économie annuelle nette de 1,2 milliard d'euros, prévue à terme en 2016, représentera près de 4 % du budget annuel de la défense , apportant ainsi les marges de progression nécessaire au renouvellement des équipements et à l'amélioration de la condition militaire.

C. DES CONSÉQUENCES SUR LES FLUX D'ENTRÉE ET DE SORTIE ET LA REVALORISATION DE LA CONDITION MILITAIRE

Conjuguée à la réforme des retraites, la déflation des effectifs a eu un effet difficilement mesurable sur les flux de sortie .

Le ministère de la défense constate que l'âge moyen de départ à la retraite des officiers n'a que faiblement augmenté entre 2004 et 2011 (de 51,1 à 51,5 ans), même si la durée de services a augmenté (de 30,4 à 31,2 années).

En revanche, pour les sous-officiers, l'âge moyen de départ a progressé de 43,7 ans à 45 ans au cours de la même période 2004-2011. La durée moyenne de services a légèrement augmenté (de 24,6 à 25,1 années).

Enfin, la diminution de l'âge de départ pour les militaires du rang (de 36,9 ans à 33,8 ans), parallèlement à une réduction de la durée de services (de 18,2 à 13,6 années) est interprétée comme la conséquence de l'introduction de la possibilité, en 2003, de bénéficier d'une pension d'invalidité, quelle que soit la durée des services effectués.

Dès le début de la mise en oeuvre des diminutions d'effectifs, il a été constaté une forte hausse du nombre annuel de pensions liquidées (de 10 700 en 2007 à 12 800 en 2008, les flux d'entrées en pensions étant stables depuis 2008 autour de 12 500 par an, nonobstant un pic de 13 500 en 2010, lié au calendrier d'entrée en vigueur de la réforme des retraites).

Le ministère de la défense a par ailleurs mis en place un plan d'accompagnement des restructurations (PAR) qui lui est propre (et s'ajoutant au dispositif de restructuration existant pour l'ensemble des agents publics), s'appuyant sur un réseau territorial de huit médiateurs mobilité. Le reclassement du personnel civil relève quant à lui de l'agence de reconversion de la défense, et concerne principalement les ouvriers d'Etat employés sur des métiers très spécifiques (comme celui de cartographe, par exemple).

Globalement, les reconversions ont concerné 11 090 personnes en 2011, dont 2 075 dans la fonction publique et 9 015 dans le secteur privé, alors que l'agence de reconversion du ministère traite 17 000 dossiers par an. Les reconversions donnent lieu à des démarches communes avec les conseils régionaux et les chambres de commerce et d'industrie dans les principaux bassins d'emplois. En volumes annuels, environ 1 800 militaires sont reclassés dans le cadre de partenariats avec les grandes entreprises et les fédérations professionnelles, notamment dans les secteurs de la logistique et du transport.

En ce qui concerne les reclassements , il y a lieu de déplorer leur très faible nombre dans d'autres ministères que celui de la défense (seulement 123 ont ainsi été opérés dans les ministères civils en 2011), tout comme dans la fonction publique territoriale (160 reclassements en 2011).

S'agissant des entrées , le ministère de la défense fait part de ses inquiétudes sur les difficultés rencontrées dans les recrutements, qui ont diminué de 23 209 en 2008 à 20 201 en prévision pour 2012, la baisse globale de 16,2 % au cours de la période étant accentuée par une baisse plus marquée pour les seuls militaires, alors qu' a contrario les flux de recrutement de personnels civils ont augmenté.

La journée défense et citoyenneté reste une occasion privilégiée de faire connaître les métiers de la défense puisque, selon les statistiques communiquées à vos rapporteurs spéciaux par le ministère de la défense, 22 % à 23 % des appelés demandent des informations sur les métiers militaires à l'issue de cette journée.

Evolution des flux d'entrée au ministère de la défense (2008-2012)

(en ETP)

2008

2009

2010

2011

2012 (prévision)

Evolution 2009-2012

Militaires

21 487

21 926

20 646

17 758

17 807

- 18,79 %

Civils

1 722

2 174

2 644

2 418

2 394

+ 10,12 %

Total

23 209

24 100

23 290

20 176

20 201

- 16,18 %

Source : ministère de la défense

Ces difficultés de recrutement se reflètent dans les non-recrutements et les non-renouvellements de contrats, estimés à 60 % en fin d'année 2011 .

Elles sont accentuées pour certains métiers techniques, comme par exemple celui d'informaticien, sans que cette pénurie de main-d'oeuvre soit propre au ministère de la défense.

Elles posent la question de la revalorisation de la condition militaire , justifiant par ailleurs l'enquête demandée par votre commission des finances à la Cour des comptes, en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur les primes et indemnités du ministère de la défense.

Le « retour catégoriel » aux agents (c'est-à-dire la part des économies de personnel donnant lieu à des primes catégorielles) a été globalement de l'ordre de 50 % jusqu'en 2010, alors que des plans de revalorisation des salaires ont été conduits entre 2008 et 2010 37 ( * ) . En revanche, ce ratio n'est plus atteint depuis 2011 et devrait être inférieur à 30 % en 2012.


* 36 Jusqu'à la fin de l'année 2012, l'indemnisation des anciens militaires au titre du chômage relève encore du ministère de la défense, alors que le traitement administratif incombe à Pôle emploi. Les marges de manoeuvre financières ainsi retrouvées par le ministère de la défense mériteraient d'être mieux mesurées et prises en compte dans l'évolution de ses dépenses .

* 37 Il convient par ailleurs d'observer que ces revalorisations n'étaient pas prévues dans la loi de programmation militaire, ce qui a accru les tensions de gestion des dépenses de personnel du titre 2, détaillées par ailleurs dans le I du présent rapport et déjà soulignées par vos rapporteurs spéciaux lors de l'examen du projet de loi de règlement pour 2011.

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