II. L'INSTITUT NATIONAL DE L'INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET FORESTIÈRE (IGN), UN OPÉRATEUR QUI DOIT SE RÉINVENTER À L'HEURE DE L'OPEN DATA
Établissement public administratif placé sous la double tutelle des ministres chargés de l'écologie et des forêts, le nouvel IGN est issu de la fusion entre l'Institut géographique national et l'Inventaire forestier national (IFN) intervenue le 1 er janvier 2012 6 ( * ) .
L'IGN a une triple vocation :
- assurer la connaissance continue de la surface du territoire national et de l'occupation de son sol , accessible depuis un site dédié (Geoportail) ;
- actualiser l'inventaire permanent des ressources forestières nationales qui était auparavant assuré par l'IFN ;
- concevoir et commercialiser des produits et services à partir des données recueillies dans le cadre de ses missions de service public.
Les orientations stratégiques assignées par l'État à l'Institut de l'information géographique et forestière (IFN) dans le cadre du contrat d'objectifs et de performance 2013-2016 - contribuer à la souveraineté et à l'indépendance nationales, en permettant à l'État et aux collectivités territoriales d'appuyer leurs décisions, leurs actions et leurs politiques publiques sur des informations géographiques et forestières dont l'exactitude est maîtrisée ; - assumer le rôle d'opérateur de référence auprès de l'ensemble des acteurs publics en matière d'information géographique et forestière ; - passer d'un positionnement centré sur la production et la diffusion de données géographiques et forestières à un rôle de fournisseur de services de référence et différenciés en fonction des usagers. Source : projet annuel de performances pour 2018 |
1. La subvention pour charges de service public de l'IGN va voir ses crédits diminuer de -2,8 % en 2018
L'action 12 « Information géographique et cartographique » du programme 159 porte la subvention pour charges de service public de l'IGN ainsi que les crédits dévolus au pilotage de la politique d'information géographique , pour un montant de 91,7 millions d'euros (AE=CP), en recul de - 2,7 % en AE et de - 2,8 % en CP par rapport à 2017.
Sur ces 91,7 millions d'euros , 91,2 millions d'euros (AE=CP) correspondent à la subvention pour charges de service public de l'IGN , qui représente 63,3 % du financement de cet opérateur .
Les crédits de l'action 12 se répartissent entre trois sous-actions :
- la sous-action 12.1 « Production de l'information géographique » : dotée de 77,5 millions d'euros (AE=CP), qui représente 85 % des crédits de l'action .
Elle retrace la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN consacrée au financement de ses activités exercées dans le cadre de sa mission de service public pour la production et la diffusion de l'information géographique et cartographique, ainsi que pour la formation.
À ces activités traditionnellement assurées par l'ancien Institut géographique national se sont ajoutées, depuis 2012, d'autres missions conduites jusqu'alors par l'ancien Inventaire forestier national , comme l'élaboration et la mise à jour , sur le territoire métropolitain, de l'inventaire permanent des ressources forestières, l'observation et la surveillance des écosystèmes forestiers, la diffusion des données d'inventaire sur les milieux forestiers , ainsi que la fourniture à l'État des éléments nécessaires à la formulation de la politique forestière nationale ;
- la sous-action 12.2 « Recherche dans le domaine géographique » : dotée de 13,7 millions d'euros , soit 15 % de l'ensemble des crédits de l'action .
Cette sous-action retrace la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN consacrée au financement d'activités de recherche et développement ;
- la sous-action 12.3 « Pilotage de la politique d'information géographique » : dotée de 528 000 euros en AE et de 598 800 euros en CP, elle cherche à favoriser le développement des usages de l'information géographique , en finançant le fonctionnement du Géocatalogue mis en oeuvre par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), en contribuant à l'organisation en commun avec l'Allemagne de la conférence Inspire 2017 et en assurant l'animation du projet national Prodige concernant la mise en oeuvre de plates-formes régionales de partage et de mutualisation de l'information géographique.
2. Dans un contexte d'ouverture des données publiques, l'IGN doit se réinventer pour maintenir le niveau de ses ressources propres
Pour 2018, les recettes propres de l'IGN devraient représenter 59,7 millions d'euros , soit une hausse de 1,1 million d'euros par rapport à 2017.
Le marché grand public , qui concerne avant tout les cartes papier , devrait voir ses recettes rester stables en 2018 par rapport à 2017 à 10,50 millions d'euros . Ce marché tend à diminuer structurellement et le portail « IGN Rando » ne permet pas de compenser en totalité cette érosion.
Sur le marché professionnel , le chiffre d'affaires devrait augmenter légèrement de 2,9 % par rapport à 2017, pour atteindre 10,5 millions d'euros . Mais ce chiffre est très inférieur à celui de 2015, année où il avait atteint 14,2 millions d'euros . Selon les gestionnaires de l'opérateur, cette baisse « s'explique en partie par la fin du cycle d'acquisition de données par les grands acteurs internationaux (navigation routière, grands portails, etc.) ainsi que par la gratuité progressive pour les acteurs publics ».
Sur le marché défense-espace , les recettes seraient stables , passant de 15,46 millions d'euros en 2017 à 15,50 millions d'euros en 2018. L'IGN a sécurisé cette ressource en 2016 grâce à la signature avec le ministère de la défense d'un nouvel accord-cadre de sept ans portant sur la contribution de l'opérateur à la préparation, au développement et à la mise en oeuvre de l'infrastructure des données géographiques pour l'exécution des missions des armées et des programmes du ministère des armées.
Enfin, l'IGN estime que les grands projets lui rapporteront 20,43 millions d'euros en 2018, dont 6,5 millions d'euros pour la mise à jour du référentiel parcellaire graphique (RPG) et 11,9 millions d'euros pour le projet Géopmaps conduit en partenariat avec le ministère des armées.
Le directeur général de l'IGN, entendu par votre rapporteur spécial, a attiré son attention sur l'important enjeu financier que représente pour son établissement la question du développement du principe des données publiques ouvertes et gratuites (« open data »).
Selon lui, l'évolution des ressources propres de l'IGN dans les années à venir sera conditionnée par le maintien de redevances de mise à disposition et de réutilisation des données produites par son opérateur, permise par dérogation par la loi n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public 7 ( * ) .
Les pertes de recettes pour l'IGN en termes de redevances, licences ou ventes de données pourraient représenter environ 10 millions d'euros par an .
Compte tenu de ces évolutions législatives, deux rapports ont été commandés pour jeter les bases du nouveau contrat d'objectifs et de performance de l'IGN pour la période 2017-2021 8 ( * ) .
À noter également, parmi les autres ressources propres de l'IGN, les activités partenariales et de gestion avec d'autres acteurs publics, qui devraient lui rapporter 6,0 millions d'euros en 2018, dont 3,5 millions d'euros pour des prestations de cartographie pour les services déconcentrés de l'État.
3. Les dépenses de personnel représenteront 72 % des dépenses de l'établissement en 2018
Le projet de loi de finances pour 2018 attribue à l'IGN 1 507 emplois sous plafond , soit une baisse de 35 équivalents temps plein travaillés (ETPT) par rapport à l'année 2017, ce qui correspond à une diminution de la masse salariale de 1,5 million d'euros. Cette baisse est identique à celle de 2016.
En revanche, la prévision d'équivalents temps pleins travaillés (ETPT) hors plafond devrait rester à son niveau de 2017 à 63 ETPT en 2018. Ces ETPT comprennent les emplois des agents sur contrat pour des projets de recherche, en particulier en réponse aux appels d'offre de l'Agence nationale de la recherche (ANR), ainsi que des agents sur contrats d'avenir pour la réalisation de la représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU).
L'opérateur rémunèrerait donc 1 570 ETPT au total contre 1 605 en 2017, soit une diminution de - 2,3 % .
Les charges de personnel devraient être en hausse de 0,1 % en 2018 par rapport à la prévision d'exécution du budget 2017, à 114,1 millions d'euros (+ 0,08 million d'euros). Cette légère hausse est essentiellement due à la compensation de la hausse de la CSG et aux mesures individuelles (glissement vieillesse technicité).
Par ailleurs, l'IGN prévoit en 2018 des dépenses d'investissements de 4,2 millions d'euros en CP, soit une diminution de 1,3 million d'euros par rapport à 2017 et des dépenses de fonctionnement qui devraient passer de 21,5 millions d'euros en 2017 à 20,6 millions d'euros en 2018, soit une baisse de 4,2 % des crédits.
Dès lors, les charges de personnel demeurent à un niveau analogue à celui de l'an passé et représentent toujours près de 72 % des charges décaissables que doit honorer l'IGN.
Alors que l'établissement devrait enregistrer un déficit de 1,7 millions d'euros en 2017, il votera un budget 2018 en déficit de 3,75 millions d'euros , ce qui traduit ses difficultés actuelles .
Son fonds de roulement devrait par conséquent continuer à se réduire , passant de 23,29 millions d'euros en 2016 à 21,02 millions d'euros en 2017 puis 18,20 millions d'euros en 2018.
* 6 Le décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011 précise les statuts et le fonctionnement de cet établissement public administratif.
* 7 En vertu de cette loi, le décret n° 2016-1036 du 28 juillet 2016 relatif au principe et aux modalités de fixation des redevances de réutilisation des informations du secteur public, autorise les organismes publics dont l'activité principale consiste en la collecte, la production, la mise à disposition ou la diffusion d'informations publiques, à établir des redevances lorsque la couverture des coûts liés à cette activité principale est assurée à moins de 75 % par des recettes fiscales, des dotations ou des subventions.
* 8 L'un a été commandé à une mission conjointe du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et l'autre à un bureau spécialisé dans l'économie du numérique sur les opportunités de nouveaux modèles économiques pour l'IGN liés à la transition numérique.