ANALYSE DES CRÉDITS DE LA MISSION
I. UNE PROGRAMMATION POUR 2019 INÉDITE À DEUX ÉGARDS : STABILISÉ APRÈS PLUSIEURS MODIFICATIONS DE MAQUETTE ENTRE 2017 ET 2018, LE COMPTE EST PRÉSENTÉ EN DÉFICIT POUR LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS LA LOI DE FINANCES POUR 2014
A. OUTIL HISTORIQUE DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L'ÉTAT, LE COMPTE EST STABILISÉ EN 2019
1. Un outil essentiel de l'affirmation de l'État propriétaire, mais une politique immobilière encore largement éclatée du point de vue budgétaire
Le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » constitue l' instrument historique de la politique immobilière de l'État .
Créé en 2006, le compte d'affectation spéciale vise à financer la modernisation du parc immobilier par les produits des cessions d'actifs et des redevances domaniales . Les produits de cession sont répartis à parité dans deux enveloppes, une enveloppe propre à l'ancien ministère occupant et une enveloppe mutualisée 1 ( * ) , tandis que les redevances domaniales sont intégralement affectées à l'enveloppe mutualisée.
Depuis 2017, il concentre l'ensemble des vecteurs budgétaires de l'État propriétaire. Il supporte à la fois les dépenses d'opérations immobilières structurantes et les dépenses d'entretien lourd du propriétaire.
Il se compose de deux programmes :
- le programme 721 « Contribution des cessions immobilières au désendettement de l'État » , qui porte les contributions au désendettement de l'État pouvant être appliquées sur les produits de cession et les reverse au budget général. La loi de finances pour 2017 2 ( * ) a supprimé son caractère obligatoire ;
- le programme 723 « Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État » , qui finance des dépenses d'entretien à la charge du propriétaire ainsi que des opérations immobilières structurantes réalisées sur le parc immobilier de l'État 3 ( * ) au profit des administrations centrales, des services déconcentrés et des opérateurs de l'État.
Pour autant, la politique immobilière demeure fortement éclatée, puisque 44 programmes budgétaires y concourent .
Comme l'illustrent les secteurs ci-après, le compte d'affectation spéciale ne représente que 7,5 % des crédits de l'État consacrés à l'immobilier en 2018 .
De même, les moyens humains consacrés à l'immobilier se caractérisent par leur éclatement : en 2018, 1 188 ETPT y sont consacrés dans les services centraux et déconcentrés du Domaine, et près de 9 800 ETPT dans l'ensemble des autres programmes budgétaires.
De l'éclatement de la politique immobilière de l'État
Source : commission des finances du Sénat, à partir du questionnaire budgétaire
La répartition est précisée dans le document de politique transversale « Politique immobilière de l'État », associé au projet de loi de finances.
2. Un outil au service de la rationalisation du parc immobilier de l'État
La valeur nette du parc immobilier de l'État au 31 décembre 2017 telle que comptabilisée au compte général de l'État s'élève à 63,8 milliards d'euros , en progression de 4,5 % par rapport à l'exercice précédent. Cette progression résulte essentiellement de la livraison de nouveaux partenariats public-privé (PPP).
Fin 2017, le parc immobilier de l'État représente près de 73,9 millions de mètres carrés de surface utile brute (SUB), en baisse de 5,1 % depuis 2012 4 ( * ) .
Le graphique ci-après illustre l'effort de rationalisation conduit depuis 2012. Il s'accompagne toutefois d'une progression notable des locaux occupés par l'État sans qu'il les possède.
Évolution des surfaces possédées
ou utilisées par l'État
entre 2012 et 2017
Source : commission des finances du Sénat, à partir des données transmises par la direction de l'immobilier de l'État
Parmi le parc dont l'État est propriétaire, près de 20 % des surfaces sont constitués d'immeubles de bureaux. Le reste comprend à la fois des biens regroupés sous le terme générique d'immobilier spécifique - les immeubles répondant à une utilisation particulière, comme les bâtiments scolaires ou techniques - et un parc résidentiel de logements.
Les logements représentent 14,5 % de l'ensemble des surfaces possédées par l'État. Près de 85 % d'entre eux relèvent du ministère des Armées (36 %) et du ministère de l'Intérieur (49 %), ce qui s'explique par les nécessités de service public auxquelles sont soumis leurs agents.
Dans le cadre de la rationalisation de la politique immobilière de l'État, une vague importante de cessions a conduit à réduire de plus de 6 % la surface des biens immobiliers dont l'État est propriétaire entre 2012 et 2017 . Parallèlement, les surfaces utilisées par l'État sans qu'il en soit le propriétaire ont fortement augmenté (23,3 %), ce qui s'explique essentiellement par le recours aux PPP.
Cette évolution illustre bien l'ambiguïté de la première phase de la politique de l'immobilier de l'État et les recommandations anciennes de la commission des finances du Sénat pour un changement d'approche. Comme tout actif, le patrimoine immobilier de l'État doit être envisagé dans une perspective de long terme, dont la logique de cession ne peut constituer l'unique stratégie.
* 1 Deux exceptions à ce principe existent toutefois, s'agissant des biens du ministère des Armées et des biens à l'étranger du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, pour lesquels la mutualisation de la moitié du produit de cession ne s'applique pas.
* 2 Article 42 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 3 Ou sur le parc immobilier qui figure à l'actif de son bilan.
* 4 Selon les données transmises par la direction de l'immobilier de l'État.