EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 10 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de MM. Albéric de Montgolfier et Claude Nougein, rapporteurs spéciaux, sur les missions « Gestion des finances publiques », « Crédits non répartis », « Transformation et fonction publiques ».
M. Claude Raynal , président . - Nous passons maintenant à l'examen des rapports sur les missions « Gestion des finances publiques », « Crédits non répartis », « Transformation et fonction publiques » et sur le compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
M. Claude Nougein , rapporteur spécial . - Je commencerai par la mission « Crédits non répartis », qui n'appelle que deux brèves remarques de ma part. Ses deux dotations sont prévues par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). La première, la « dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles » bénéficie de la même ouverture de crédits depuis 2018, soit 124 millions d'euros. Il faut néanmoins rappeler qu'elle avait servi de réserve de budgétisation massive au début de la crise sanitaire, avec une augmentation de plus de 1,5 milliard d'euros votée dans la deuxième loi de finances rectificative (LFR) pour 2020. Cette réserve a permis d'abonder différentes missions par voie réglementaire pour des dépenses urgentes, dans l'attente d'un autre projet de loi de finances rectificative (PLFR). Notre commission s'est montrée attentive à ce que de telles dépenses soient bien liées à la crise sanitaire, et que le Parlement soit par ailleurs bien informé avant que les décrets de répartition ne soient publiés, ce qui fut le cas.
La seconde dotation, qui concerne la « provision relative aux rémunérations publiques », fait de nouveau l'objet d'une ouverture de crédits, afin de financer trois mesures : le versement de la prime de fidélisation en Seine-Saint-Denis ; le déploiement du forfait mobilité durable dans la fonction publique d'État ; ainsi que des revalorisations indemnitaires, décidées lors du rendez-vous salarial de la fonction publique d'il y a trois mois.
La ventilation des crédits entre ces trois mesures n'est pas précisée par les documents budgétaires. Pour nous, c'est un manque de transparence, alors que cette dotation atteint un montant exceptionnellement élevé : près de 200 millions d'euros en 2021, contre 26 millions d'euros en 2020 ! Il faut espérer que le Gouvernement les répartisse au cours du débat en séance. Malgré ces réserves, nous vous proposerons l'adoption des crédits de cette mission - un rejet ayant peu de signification.
J'en viens maintenant à la mission « Gestion des finances publiques », la plus importante budgétairement. Elle porte les crédits des deux grandes administrations de réseau du ministère de l'économie, des finances et de la relance, c'est-à-dire la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Elle porte également les crédits du secrétariat général du ministère et d'une pluralité de structures comme la direction du budget ou Tracfin.
Le périmètre de la mission est modifié dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, puisqu'elle perd le programme 148 « Fonction publique » rattaché à la mission « Transformation et fonction publiques ». Même retraités de cette mesure de périmètre, les crédits de la mission baissent entre les lois de finances pour 2020 et pour 2021 : de 1,11 % pour les autorisations d'engagement (AE) et de 1,28 % pour les crédits de paiement (CP). La mission continue donc de contribuer aux efforts de rationalisation de la dépense publique, certes bien rares dans ce PLF. Au total, ses crédits s'élèvent à environ 10 milliards d'euros.
La diminution des crédits provient principalement des dépenses de personnel, qui représentent 80 % des crédits de la mission. Ces dépenses diminueront de 1,42 % en 2021, du fait d'un schéma d'emplois négatif, attendu à -2 033 équivalents temps plein (ETP), dont -1 800 pour la DGFiP.
Les administrations de la mission ont été particulièrement mobilisées durant la crise sanitaire, je pense notamment à la DGFiP. La direction a dû continuer d'assurer ses missions traditionnelles essentielles, comme la gestion fiscale locale et nationale, tout en assumant de nouvelles missions. On lui a ainsi confié la gestion du fonds de solidarité, et elle a mené un travail de veille sur les entreprises, les collectivités locales et les hôpitaux.
Le secrétariat général du ministère a, quant à lui, joué un rôle de coordination très important, puisqu'il a, d'une part, coordonné les plans de continuité d'activité (PCA) des directions du ministère, et, d'autre part, coordonné le travail de la cellule de continuité économique.
Pour la DGDDI, les effets sont un peu plus particuliers et doivent être étudiés sous l'angle du Brexit. La crise sanitaire a conduit à une chute brutale du volume des échanges et des trafics, aériens comme routiers. Les effectifs ont dû être redéployés, de la même façon que les 600 ETP recrutés pour faire face au Brexit avaient dû être réaffectés après son report d'un an. Alors que le rétablissement de la frontière entre la France et le Royaume-Uni approche, les échanges moindres devraient rendre la période de transition plus facile pour la douane, qui craint beaucoup moins le risque d'embouteillages dans ces nouvelles conditions. Elle a même demandé à reporter en 2021 le recrutement des 100 derniers ETP qui devaient compléter ses effectifs face au Brexit. La direction craint en effet de les recruter pour rien, et qu'ils soient en surnuméraire.
Nous avons constaté, y compris durant nos auditions, que les crédits de la mission et de ces directions sont en réalité moins affectés par la crise sanitaire et économique que par les processus de transformation entamés par ces administrations bien avant la crise. Ces processus n'ont pas été reportés et la crise a même renforcé la nécessité de certains d'entre eux. Ils sont inscrits dans le plan de transformation ministériel publié en juin 2020 et sont suivis avec attention par le secrétariat général. Nous allons vous en présenter six.
Le premier concerne la réorganisation territoriale de la DGFiP et de la DGDDI, un sujet que nous abordons régulièrement à la commission. La DGFiP poursuit la mise en place de son nouveau « réseau de proximité », qui comprend trois axes. Le premier est la mise en place d'un réseau de 1 200 conseillers aux décideurs locaux d'ici à 2022 ; le deuxième est l'augmentation des points de contact de la DGFiP sur le territoire, par le biais d'une contractualisation avec les collectivités ; le troisième est la délocalisation de services des métropoles vers les villes moyennes. Les cinquante premières villes ont été choisies et les déménagements devraient avoir lieu entre 2021 et 2024. Pour la DGDDI, sa réorganisation tient compte des effets du Brexit, elle bascule ses emprises de l'est et du sud de la France vers les Hauts-de-France, avec l'ouverture de nouveaux bureaux et brigades.
Le second sujet concerne le transfert de la gestion du recouvrement de certaines taxes et impositions de la douane vers la DGFiP. Cette réforme doit s'accompagner de gains de productivité et d'efficacité. Deux millions d'euros sont en parallèle affectés à la création d'un portail unique de recouvrement fiscal et social pour les entreprises, un projet qui a pris du retard. Ce transfert impose aussi à la Douane de réfléchir à ce qui constitue son « coeur de métier », et nous soutenons son recentrage sur ses missions stratégiques : le contrôle des flux passagers et marchandises.
Le troisième enjeu concerne la gestion des ressources humaines, essentielle quand on se rappelle que la DGFiP et la DGDDI comptent à elles deux près de 117 000 emplois - environ 100 000 pour la DGFiP et 17 000 pour les douanes. Les transformations en cours appellent à la révision des règles de mobilité ou de rémunération. Des dispositifs d'accompagnement sont mis en place et pourraient s'avérer coûteux, mais nous manquons d'informations sur ce sujet, ce qui est regrettable. Je souligne par ailleurs que nous avons consacré un développement particulier à la gestion des ressources humaines par la DGDDI après un rapport de la Cour des comptes plutôt accablant sur ce point. La directrice a elle-même reconnu que le régime indemnitaire était assez catastrophique et l'a qualifié de « stratification indemnitaire ». Les règles de temps de travail ne sont pas non plus respectées dans toutes les branches, avec soit une durée de travail bien inférieure à la règle, soit bien supérieure, ce qui conduit certains personnels à avoir des centaines de jours à récupérer ! Heureusement, des réformes sont en cours.
Le quatrième processus de transformation concerne le recours accru aux nouvelles techniques d'analyse de données pour améliorer les résultats du contrôle fiscal. Le recours à ces techniques doit également permettre de détecter les cas de fraude les plus complexes. Comme je le rappelais avec notre ancien collègue Thierry Carcenac dans notre rapport d'information sur le contrôle fiscal, on manque encore d'indicateurs précis sur ce point.
Mon collègue Albéric de Montgolfier va évoquer les deux derniers processus de transformation en cours ainsi que la mission « Transformation et fonction publiques ».
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur spécial . - Il y a quelques années, nous avions commis, avec mon collègue Philippe Dallier, un rapport d'information sur cette mission, dans lequel nous évoquions la fraude à la TVA. Celle-ci demeure encore aujourd'hui un enjeu considérable pour les deux directions, et nous sommes encore loin d'atteindre nos objectifs. C'est d'autant plus important que le commerce électronique explose aujourd'hui, avec la crise sanitaire et le confinement, et vient concurrencer les commerces de proximité. Or, l'inspection générale des finances (IGF) avait rappelé que 98 % des vendeurs sur les plateformes internet n'étaient pas immatriculés à la TVA. De même, nous attendons toujours la traduction opérationnelle de certaines dispositions législatives votées par le Parlement, comme le principe de responsabilité solidaire des plateformes ou la concrétisation de la facturation électronique. Par ailleurs, avec la fin de l'exonération pour les envois dits de « valeur négligeable », la DGDDI nous a confirmé qu'elle s'attendait à voir exploser le fret aérien. En effet, jusqu'à maintenant, tous les envois de moins de vingt-deux euros étaient exonérés de TVA. La suppression de cette règle conduit à l'explosion du nombre de déclarations, que la DGDDI ne sera pas en mesure de contrôler. S'ajoute à cela l'impossibilité d'ouverture des commerces physiques avec le confinement et donc le report sur le commerce électronique. Ces flux sont donc sans commune mesure avec ceux d'il y a quelques années. On peut ainsi regretter l'absence de mise en priorité de la lutte contre la fraude sur la TVA. Les techniques de datamining ne seront pas suffisantes, les directions doivent aussi se doter de nouveaux moyens matériels, comme des scanners, qu'elle n'a cependant pas obtenus, malgré ses efforts, sur le plan de relance.
Le cinquième sujet que nous souhaitions aborder est celui du pilotage par les directions du ministère de leurs projets informatiques. Notre commission avait demandé un rapport à la Cour des comptes sur cette question, sur le périmètre État. Nous constatons des dépassements de délais et des coûts encore trop importants, qui traduisent un défaut de gouvernance.
Le sixième axe de transformation concerne la dématérialisation des administrations et des procédures administratives. Même si celle-ci peut offrir des gains de productivité aux administrations et une simplification pour les usagers, elle ne doit pas se faire au détriment de ces derniers, et donc il faut maintenir un accueil physique et téléphonique de qualité. Tous ne peuvent pas réaliser leurs démarches sur internet, notamment parce qu'ils n'ont pas accès au numérique. Il est assez scandaleux de voir que le numéro d'aide proposé est parfois surtaxé. On nous a dit que les numéros surtaxés prendraient fin au 1 er janvier 2021, mais encore faut-il qu'ils donnent vraiment accès à un interlocuteur, ce qui n'est pas toujours le cas.
Cette réflexion me conduit naturellement vers la mission « Transformation et fonction publiques ». Cette mission correspond en réalité à la mission « Action et transformation publiques », créée en 2018. Elle a été renommée pour le PLF 2021, avec le rattachement du programme 148 « Fonction publique ». Elle se compose donc désormais de cinq programmes à vocation interministérielle, qui concernent des sujets aussi variés que la rénovation des cités administratives de l'État, les ressources humaines ou encore les start-up d'État. On ne peut qu'être dubitatifs sur les résultats de cette mission, et ce pour plusieurs raisons.
La première, c'est la consommation des crédits. En 2021, ces derniers augmenteraient de 14 % à périmètre constant et avoisineraient les 500 millions d'euros, ce qui laisse supposer une montée en charge de la mission. Toutefois, cela fait deux ans que nous constatons chaque année de fortes sous-consommations, et cela ne devrait pas changer en 2020, puisque près de 75 % des crédits sont annulés dans le quatrième projet de loi de finances rectificative (PLFR4). Autant dire que cette mission relève plutôt de l'affichage que de la réalité. C'est pour cette raison que nous vous proposerons, avec Claude Nougein, un amendement d'appel annulant 75 % des crédits des trois programmes, qui connaissent chaque année des sous-exécutions allant de 80 % à 90 %. Il est temps que le Gouvernement nous donne des explications plus convaincantes quant à la non-consommation des crédits.
La seconde raison tient à la capacité des administrations à engager tous les crédits mis à leur disposition. Les annulations pour 2020 ne tiennent pas seulement à la crise sanitaire : elles s'expliquent aussi par les retards de contractualisation et par un décalage entre les besoins anticipés des porteurs de projets et leurs besoins réels. Après trois ans, on aurait pu penser que ces problèmes aient été résolus.
Nous nous sommes enfin intéressés au changement de périmètre de la mission ; nous avons auditionné la ministre de la transformation et de la fonction publiques Amélie de Montchalin. Son ministère exerce maintenant la tutelle sur trois directions transversales : la direction interministérielle de la transformation publique, la direction générale de l'administration et de la fonction publique et la direction interministérielle du numérique. La ministre nous a dit ne pas être la ministre de la fonction publique, mais celle de la « qualité des services publics ». Si nous saluons cet objectif, nous sommes plutôt réservés sur la capacité des programmes de la mission à concourir à cet objectif. Les chantiers du ministère en matière de dématérialisation et de réforme de la fonction publique sont par ailleurs considérables et avancent plutôt lentement. Sur la fonction publique, le Gouvernement a rapidement abandonné ses objectifs de rationalisation, même sur les ministères non régaliens. Le ministère doit également finir de traduire toutes les dispositions de la loi de transformation de la fonction publique, y compris sur le télétravail en période « ordinaire ».
Je présenterai maintenant rapidement le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Globalement, il y a peu de changements : pour être très clair, je considère que l'État n'a pas de politique immobilière. Celle-ci souffre toujours du manque d'une gouvernance solide et d'un manque de compétences. Au 31 décembre 2019, la surface totale des bâtiments de l'État était en effet de 96,8 millions de mètres carrés, pour une valeur comptable estimée à 65,7 milliards d'euros. Force est de reconnaître que la connaissance du parc s'est améliorée, sauf pour les opérateurs, qui sont très en retard sur ce point. Cela est très inquiétant.
Le CAS est supposé servir de vecteur budgétaire pour financer des opérations immobilières structurantes et des dépenses d'entretien lourd. On peut toutefois se féliciter du fait que les dépenses d'entretien soient sanctuarisées, même si leur montant, qui s'élève à 160 millions d'euros, peut sembler faible. L'entretien est essentiel pour éviter que les biens non utilisés de l'État continuent de se dégrader.
Les recettes et les dépenses du CAS connaissent une baisse tendancielle, même si l'année 2019 a constitué une exception pour les cessions, du fait de la vente de deux biens exceptionnels, dont l'îlot Saint-Germain, ayant représenté 70 % de ses recettes. En 2021, les produits de cession sont attendus à 280 millions d'euros, un point bas, et les redevances domaniales à 90 millions d'euros. Les dépenses sont, elles, estimées à 275 millions d'euros. Résultat, la politique immobilière de l'État est fragmentée : le CAS ne représente que 15 % des dépenses d'investissement de l'État en matière immobilière et environ 4 % à 7 % du total des crédits qui sont consacrés à l'immobilier.
Selon la direction de l'immobilier de l'État, il est encore trop tôt pour avoir une estimation des effets de la crise sanitaire sur les recettes et les dépenses du CAS. Les redevances domaniales devraient largement dépasser la prévision révisée : elles s'élevaient déjà à 96 millions d'euros fin octobre. En revanche, les produits de cessions seraient faibles en 2021, en raison des effets conjugués de la conjoncture, ou encore de la difficulté de trouver des acheteurs. Si la prévision révisée pour 2020 était de 220 millions d'euros, les produits encaissés fin octobre s'élevaient seulement à 126 millions d'euros.
Marginalisé, le CAS est aussi contourné dans ses règles mêmes de fonctionnement. Les produits de cessions sont en principe répartis à égalité entre les anciens ministères occupants et le compte d'affectation spéciale, mais ce n'est pas toujours le cas. D'autres bénéficient par ailleurs d'avances sur cession, comme le ministère de la défense, de l'Europe et des affaires étrangères, ou encore la présidence de la République.
Le CAS ne suffit donc plus pour porter les grands projets de l'État dans le domaine immobilier : la rénovation des cités administratives est portée par le programme 348 de la mission « Transformation et fonction publiques » et la rénovation thermique des bâtiments publics fait l'objet d'une action dans le programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance ». L'enveloppe allouée aux bâtiments publics serait de 4 milliards d'euros, dont 2,7 milliards d'euros pour les bâtiments de l'État, soit bien plus que le CAS n'est en l'état actuel capable de mobiliser.
Il faut donc s'interroger sur la réforme du CAS et de ses principes de fonctionnement. Deux objectifs doivent être plus particulièrement poursuivis : le premier est la diversification des modes de valorisation des biens non utilisés par l'État. Les cessions sont de plus en plus dépendantes de biens « exceptionnels », et cette contrainte pèse sur le solde du CAS, extrêmement sensible à la conjoncture. Les modes de valorisation du parc doivent donc être diversifiés. Le second objectif est de faire participer le parc immobilier de l'État à l'effort en faveur de la transition écologique. Les progrès réalisés sur ce point demeurent cependant bien difficiles à suivre.
Nous sommes donc très loin de l'objectif de transformation de la gestion immobilière de l'État. Néanmoins, nous vous proposerons l'adoption des crédits de l'ensemble des missions et du compte d'affectation spéciale, en raison de la conjoncture très particulière dans laquelle nous nous trouvons cette année. La DGFiP a, par exemple, montré une très grande réactivité sur le versement du fond de solidarité même si l'on peut regretter qu'un certain nombre d'objectifs aient été oubliés, parmi lesquels la lutte contre la fraude à la TVA. Cette question n'est pas simplement un problème de recettes publiques, mais aussi une question morale et d'équité de traitement, notamment entre les commerçants et le e-commerce.
Enfin, je vous précise que, sur la mission « Gestion des finances publiques », les articles 54 undecies , 54 duodecies et 54 terdecies , ainsi qu'un amendement de crédit tirant les conséquences de ces articles ont été adoptés hier après-midi à l'Assemblée nationale. Compte tenu de leur vote tardif, nous n'avons pas encore eu le temps nécessaire pour les expertiser et nous vous présenteront notre analyse le 19 novembre, lors de l'examen définitif des missions et articles rattachés.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Vous avez mentionné l'intérêt porté à la qualité des services publics par la ministre de la transformation et de la fonction publiques. Un certain nombre de citoyens regrettent parfois les conditions d'accès et la qualité des services publics en raison de leur éloignement. Comment ce sujet est-il suivi par ce ministère, et quel est votre point de vue sur le développement du « tout numérique » ?
Comment la fraude peut-elle survenir dans le cadre des dispositifs de réponse à la crise que constituent le fonds de solidarité et l'indemnisation du chômage partiel ? La DGFiP s'est-elle organisée pour les intégrer, et si oui, de quelle manière ?
Lors du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR3), nous avions adopté un dispositif visant à annuler les redevances domaniales pour les occupants du domaine public de l'État dans les secteurs touchés par la crise, parmi lesquels la restauration, le tourisme et l'hébergement. Avez-vous des statistiques démontrant que le dossier est suivi et que cette politique est mise en oeuvre ?
M. Claude Nougein , rapporteur spécial . - Dans le recours aux dispositifs de réponse à la crise, la fraude est un enjeu. Un certain nombre de sociétés dites « éphémères » déclarent beaucoup de personnels et touchent ainsi de fortes indemnités de chômage partiel. Mais elles disparaissent ensuite rapidement, ce qui les rend impossibles à contrôler ! Il en est de même pour le fonds de solidarité, où les outils du datamining ont été mobilisés pour détecter a priori les cas de « fraude manifeste », et pas forcément les plus complexes. Cela nécessite de nouvelles adaptations, qui demanderont un gros travail dans les semaines et les mois à venir, y compris pour des contrôles a posteriori . Il est évident que la fraude sera significative.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur spécial . - Nous avions déjà eu ce débat durant l'un des derniers PLFR, notamment sur le chômage partiel : nous nous demandions pourquoi quasiment seul un numéro de système d'identification du répertoire des établissements (Siret) était demandé. La philosophie retenue par l'administration a été la volonté d'aller vite, ce qui peut être soutenu, dans un contexte de crise et dans lequel une partie des agents était également en télétravail. Il en résulte un traitement des demandes de fonds de solidarité ou de chômage partiel quasi automatisé, avec des contrôles assez sommaires. Si l'administration ne s'interdit pas des vérifications a posteriori , elle a reconnu ne procéder qu'à très peu de contrôles a priori , et les dispositifs de soutien sont accordés très largement.
Le numérique satisfait indéniablement une grande partie des usagers, mais cela ne suffit pas : certaines personnes âgées ont des difficultés à accéder à ces services, d'autres encore ne disposent pas d'une bonne connexion internet. Et même avec une bonne connexion, le système de traitement par des outils numériques ne permet pas toujours de répondre à la question posée. Aussi, un certain nombre de dossiers nécessitent un contact personnel spécifique, qu'il soit physique ou téléphonique. C'est là que le bât blesse. Par ailleurs, lorsqu'on observe les statistiques, la DGFiP a diminué ses effectifs sur le terrain en fermant des trésoreries, mais pas dans les administrations centrales, en tout cas pas dans la même ampleur. Si le Gouvernement a annoncé que toutes les créations de postes à partir de 2021 se feraient sur le territoire, dans la réalité, il semble qu'il y ait toujours autant de monde dans les couloirs de Bercy. Cela explique en partie l'insatisfaction de nos concitoyens sur le terrain, qui voient le taux de prélèvement obligatoire toujours aussi élevé, tout en ayant l'impression que les services publics ont disparu. C'est peut-être dans ce cadre qu'on oublie le service à l'usager, et le « tout numérique » n'est pas à même d'y répondre complètement.
Sur les redevances domaniales, la direction de l'immobilier de l'État (DIE) nous a indiqué ne pas encore être en mesure de fournir une estimation sur les effets de l'annulation partielle des redevances domaniales dues par les occupants du domaine public de l'État, mais ils seront modérés, seuls 20 % du domaine public de l'État environ est occupé par des établissements visés par la disposition adoptée en LFR 3. La DIE nous a également expliqué qu'il y avait des remises au cas par cas, par exemple pour les concessionnaires des équipements touristiques. Le produit de ces redevances s'élève à 96 millions d'euros à la fin du mois d'octobre 2020, contre 90 millions d'euros espérés sur l'année. C'est une ressource dynamique, en hausse depuis plusieurs années.
Les difficultés ont en réalité concerné les cessions, car la conjoncture n'a pas été bonne. On ne vend pas chaque année l'îlot Saint-Germain !
M. Antoine Lefèvre . - La réorganisation des directions des finances publiques a largement mobilisé les départements. La mise en place des conseillers aux décideurs locaux a été évoquée : un premier bilan du déploiement dans les intercommunalités a-t-il été dressé ? Quelles sont les modalités de la prise en charge de ces fonctionnaires ? Je doute que les présidents d'intercommunalités aient manifesté un grand enthousiasme pour les accueillir dans leurs locaux...
M. Marc Laménie . - Je remercie les rapporteurs spéciaux pour leur analyse. On constate, année après année, une diminution des effectifs de la DGFiP et la suppression de trésoreries dans nos territoires. Combien restera-t-il de trésoreries par département au final ?
Cette restructuration est-elle vraiment bénéfique ? Les trésoreries sont les interlocuteurs des élus de proximité.
Les rapports de la Cour des comptes mentionnés par les rapporteurs spéciaux ont-ils été suivis d'effets ?
Quelles mesures sont prises pour limiter la lutte contre la fraude à la TVA ?
M. Éric Bocquet . - En juillet 2020, un rapport d'information de Claude Nougein et Thierry Carcenac relevait que « le Parlement ne dispose pas d'informations suffisantes pour pouvoir apprécier la portée des résultats du contrôle fiscal ». La situation s'est-elle améliorée ?
M. Macron, lors de sa conférence de presse du 25 avril 2019, avait confié à la Cour des comptes le soin d'évaluer le chiffre de la fraude fiscale. Dans le rapport rendu en décembre 2019, celle-ci indiquait qu'elle n'avait pas les capacités pour mener cette mission dans un délai aussi court. La mission avait ensuite été confiée à l'Insee. Où en est ce travail ?
Google a fait un chèque de 1 milliard d'euros au fisc français. Un article du magazine Capital d'octobre 2019 avançait que le montant aurait dû être de 7 milliards d'euros. La forte diminution de l'addition aurait été justifiée par la « coopération » de l'entreprise avec la justice française. Le secret fiscal n'est peut-être pas opposable aux rapporteurs spéciaux : disposez-vous d'éléments sur la transaction qui a eu lieu entre le fisc français et Google ?
M. Vincent Delahaye . - Les questions d'Éric Bocquet me semblent très pertinentes.
Les rapporteurs spéciaux ont-ils pu obtenir des éléments concrets sur des améliorations permises par Action publique 2022 ? Pourquoi prévoir 500 millions d'euros à cet effet ? Une augmentation de 14 % me semble considérable, d'autant que les crédits sont sous-consommés. La mission « Transformation et fonction publiques » me laisse dubitatif. Je serai favorable à un amendement de forte réduction de ces crédits.
M. Michel Canevet . - Je remercie les rapporteurs spéciaux pour la qualité de leur travail.
Pour ma part, j'ai plutôt le sentiment qu'on assiste à une évolution assez forte des services de l'État. S'agissant des douanes et droits indirects, le recouvrement a été recentralisé au niveau de la DGFiP. L'absence de clarification des statuts des personnels a conduit à ce qu'une des responsables de cette direction a appelé une « stratification indemnitaire épouvantable ». Reste-t-il beaucoup de chemin à parcourir ?
Sur le terrain, j'ai également l'impression d'une grande évolution : des directions départementales interministérielles ont été créées, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) vont intégrer la cohésion sociale... Fallait-il garder la même organisation alors que les trésoreries ne reçoivent pratiquement plus de visiteurs, en raison notamment de la réforme de la taxe d'habitation ? La solution retenue n'est peut-être pas la meilleure, mais des efforts sont faits.
La direction de l'immobilier de l'État est-elle assez efficiente pour parvenir à une rationalisation optimale des bâtiments de l'État ?
S'agissant de la fonction publique, il y a beaucoup à faire ! Je rappelle que nous avons voté la loi de transformation de la fonction publique l'année dernière. Assiste-t-on une évolution des cadres d'emploi, rendue nécessaire par le regroupement de services sur le terrain ?
Lorsqu'on évoque le nombre de postes dans la fonction publique d'État, y intègre-t-on les CDD ou les contrats temporaires ? Leur nombre est-il significatif ?
M. Vincent Segouin . - L'impôt sur le revenu est désormais géré par les entreprises, qui font de la déclaration et du recouvrement. Le nombre de fonctionnaires de Bercy a-t-il diminué en proportion ?
Quand s'attaquera-t-on véritablement au problème récurrent de la fraude à la TVA, évaluée à 15 milliards d'euros ? On se triture les méninges chaque année pour trouver de nouvelles taxes : ne faudrait-il pas d'abord s'attaquer à ce sujet ?
M. Patrice Joly . - Je salue le travail des rapporteurs spéciaux. S'agissant de la réorganisation des services des finances publiques sur le terrain, je confirme les points de vue des rapporteurs. On recense trois types d'usagers : les collectivités locales, les entreprises, les ménages.
S'agissant des ménages, la présence sur le terrain avec les maisons de services au public et les possibilités d'accès à l'information sur internet ne sont pas suffisantes pour certaines catégories de personnes.
S'agissant des collectivités locales, je m'interroge sur la qualité du service rendu en matière de tenue des comptes et d'accompagnement des plus petites collectivités. Idem en matière de recouvrement des recettes : les voies de droit pour s'assurer du recouvrement des créances ne sont, par exemple, pas mises en oeuvre. Une présence plus faible sur le terrain engendre des gains pour l'État, mais des pertes, dont il serait intéressant d'avoir une évaluation précise, pour les collectivités locales.
Pour les petites entreprises, l'accompagnement fiscal n'est également plus le même qu'auparavant.
Mme Christine Lavarde . - Je pense que les rapporteurs spéciaux n'auront sûrement pas grand-chose à dire à propos d'Action publique 2022, car il ne se passe plus rien !
Je siège au Conseil de l'immobilier de l'État. J'entends avec grand intérêt les critiques qui sont émises sur la gestion immobilière : en effet, au bout de quelques années, je constate que ce sont toujours les mêmes reproches qui reviennent, notamment sur les schémas pluriannuels de stratégie immobilière. Le Conseil de l'immobilier de l'État pourrait peut-être être supprimé : aucune réunion, même en visioconférence, ne s'est tenue entre mars et septembre-octobre... Un certain nombre de parlementaires y siègent : j'observe que, si l'un des deux sénateurs est toujours là, sur les cinq députés n'est présent que le président.
J'ai du mal à comprendre l'articulation entre le Conseil de l'immobilier de l'État, la direction de l'immobilier de l'État et les directions de l'immobilier de chaque ministère. Tout le monde parle de la même chose, mais les choses ne bougent pas beaucoup...
M. Thierry Cozic . - Merci aux rapporteurs pour leur travail.
Je voudrais intervenir sur la mission « Gestion des finances publiques » au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER). Nous vivons une crise importante, et nous savons l'importance du rôle des fonctionnaires. Les coupes de budget et les baisses d'effectifs semblent être aujourd'hui des politiques difficilement conciliables avec la préservation d'un service public de proximité.
Depuis quinze ans, le nombre d'agents affectés à cette mission a diminué de 20 %. À cela s'ajoute la suppression de 1 800 équivalents temps plein annoncée par le Gouvernement. Ces agents sont essentiels pour l'accompagnement de nos concitoyens dans leurs démarches fiscales : la fracture numérique est certainement un concept très vague pour ceux qui font la « start-up nation », mais elle est pourtant bien réelle dans nos territoires.
Les agents de la DGFiP sont également des conseilleurs pour les collectivités territoriales et pour les petites entreprises. Les conseils fiscaux sont vitaux pour celles-ci, car elles n'ont pas toutes des pôles fiscalité en leur sein...
La dématérialisation ne résoudra pas tout et ne viendra pas compenser la suppression des 989 trésoreries et centres des finances publiques actée pour 2022.
Le groupe SER ne votera pas les crédits de cette mission.
M. Jean-Marie Mizzon . - Je remercie les rapporteurs spéciaux pour la qualité de leur travail. L'État a fort bien communiqué sur son initiative en matière de réorganisation du réseau des finances publiques dans les territoires : il a essayé de faire croire qu'il pouvait faire plus avec moins. Il a augmenté le nombre de points de contact, mais il s'agit d'une présence d'affichage. Cette réorganisation s'est par ailleurs accompagnée d'une baisse de qualité des prestations rendues par les agents des impôts en direction des collectivités locales : ils rendent des avis décontextualisés.
M. Claude Nougein , rapporteur spécial . - La réorganisation de la DGFiP et la fermeture des trésoreries intéressent peut-être moins nos concitoyens que nos élus de proximité. Ceux qui ont parcouru l'été dernier leur département pour se faire élire ou, comme moi, réélire ont constaté que cette question était un sujet de préoccupation pour les maires des petites communes. Antoine Lefèvre, les conseillers aux décideurs locaux devraient être au nombre de 1 200 d'ici à 2022. Les trente premiers sont entrés en fonction au premier trimestre 2020, mais la crise sanitaire a retardé le processus...
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur spécial . - La crise a bon dos !
M. Claude Nougein , rapporteur spécial . - Marc Laménie l'a souligné, on parlait d'une trésorerie par intercommunalité, puis d'une par arrondissement. Albéric de Montgolfier dit toujours que cela se terminera avec une par département... La baisse est inéluctable.
Nous avons du mal, Éric Bocquet, à obtenir des informations sur le contrôle fiscal. Avec Thierry Carcenac, nous avions fait un rapport d'information au printemps dernier sur la question. En 2019, le redressement fiscal s'est élevé à 11 milliards d'euros, contre 9 milliards d'euros en 2018. Je n'ai pas d'information sur le travail de l'Insee. Le contrôle fiscal est, semble-t-il, de plus en plus efficace grâce à de nouveaux instruments, comme le datamining , qui permettent de mieux cibler les contrôles mais il faut en améliorer les indicateurs de performance, notamment sur la fraude complexe ou la rentabilité. S'agissant du montant de la fraude fiscale, tout le monde a son chiffre ! Nombreux sont ceux qui confondent évasion fiscale et fraude fiscale.
En ce qui concerne les douanes, Michel Canevet, des progrès restent à faire en matière d'effectifs et d'indemnités. Il existe, par exemple, une indemnité de garde des chapiteaux d'alambic - elle concerne, certes, que peu d'agents ! - ou une indemnité de langue étrangère. La durée de temps de travail de certains agents est de 1 563 heures, alors qu'elle devrait être de 1 607 heures. Des primes de pénibilité sont accordées à l'ensemble d'un service sans tenir compte des fonctions réelles exercées. Il faut remettre de l'ordre dans ces primes obsolètes et injustes.
Sur les recettes, le rendement de l'impôt sur le revenu devrait être assez conforme aux prévisions en 2020, grâce à la stabilité des revenus garantie par les indemnités d'activité partielle. La TVA s'est effondrée au deuxième trimestre, mais est très fortement remontée au troisième trimestre. En revanche, l'impôt sur les sociétés sera très fortement impacté : les entreprises vont connaître des pertes énormes ou, dans le meilleur des cas, des baisses de bénéfices.
Les effectifs de la DGFiP qui étaient de l'ordre de 100 000 il y a deux ou trois ans s'élèvent maintenant à 97 000 et devraient baisser à 95 000. Le prélèvement à la source et la suppression de la taxe d'habitation expliquent ce phénomène. Je rappelle que le Gouvernement avait l'intention de supprimer 50 000 emplois de fonctionnaires : cette année, la baisse devrait être de 157 - on est loin du compte ! La DGFiP devrait supprimer 4 900 postes entre 2020 et 2022 : cela « donne du mou » aux autres ministères pour augmenter leurs effectifs...
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur spécial . - Je le répète, la fraude à la TVA est une question non pas seulement de recettes publiques, mais aussi de morale et d'équité. Les commerçants physiques, qui sont soumis à des impôts locaux et nationaux, sont concurrencés par des vendeurs d'e-commerce qui ne payent aucune taxe en France. La directrice des douanes nous a indiqué que les volumes de fret étaient en très forte augmentation depuis le confinement. Ses services seront dans l'incapacité de contrôler l'ensemble des déclarations en douane après la suppression des envois à valeur négligeable à compter du 1 er juillet 2021. Les administrations sont désarmées face à l'industrialisation du e-commerce.
Les chiffres des transactions fiscales peuvent paraître importants : ils représentent plusieurs années d'impôt. J'ai eu connaissance des éléments de la transaction avec Google lorsque j'étais rapporteur général. Je ne sais pas à quel montant l'administration aurait pu prétendre, mais celle-ci a toujours perdu ses contentieux devant les tribunaux administratifs et le Conseil d'État, faute de pouvoir prouver l'existence d'un établissement stable. La jurisprudence n'est pas favorable à l'administration fiscale et recourir aux conventions judiciaires d'intérêt public permet au moins de recouvrer une partie des sommes dues.
Concernant la fonction publique, quelques décrets sont encore en attente, Amélie de Montchalin l'a reconnu. Cela me conduit à évoquer le sujet de la transformation de l'action publique, pour répondre à Vincent Delahaye ou Christine Lavarde. Pourquoi les crédits de la mission ne sont-ils jamais consommés ? Notre amendement d'appel va nous aider à obtenir des réponses. Nous constatons une politique d'affichage, qui n'est d'ailleurs pas propre à ce Gouvernement. Souvenez-vous du programme de modernisation de l'action publique (MAP) : à chaque fois, il s'agit de décisions très technocratiques, avec des comités d'experts, et cela finit dans des archives sur des étagères. Il y a quelques années, la commission avait expertisé cette question. Dans tous les pays qui ont réussi leur transformation de l'action publique - je pense notamment à la Suède, à l'Allemagne, au Canada -, ces objectifs ont été portés au plus haut niveau. En France, nous ne sommes pas capables d'assumer les choses. Donc, pour obliger le Gouvernement à se prononcer sur le bien-fondé de cet objectif de transformation, nous allons proposer un amendement de réduction des crédits.
Dernier sujet, l'immobilier de l'État. J'ai siégé, à une époque, au Conseil de l'immobilier de l'État. En ce moment, le confinement a bon dos pour ne pas répondre à un certain nombre de questions. Quoi qu'il en soit, la conclusion à en tirer est connue : l'immobilier nécessite une professionnalisation. L'État est un piètre gestionnaire, notamment par rapport aux collectivités. L'exemple à suivre nous vient d'Allemagne, où une agence s'occupe de l'entretien des bâtiments en faisant payer les administrations.
Je me souviens également d'un rapport, il y a quelques années, avec Philippe Dallier, concernant l'immobilier et la justice. Nous nous étions aperçus que l'immobilier de certains tribunaux comme celui de la cour d'appel de Versailles étaient gérés par des magistrats délégués à l'équipement, qui n'avaient aucune compétence pour s'occuper de la gestion du chauffage, par exemple. Dans beaucoup d'administrations, c'est un fonctionnaire qui, en plus de son travail, va s'occuper de gérer les fluides, les problèmes de toiture et autres. Il serait temps d'avoir un vrai gestionnaire de la cité administrative, spécialiste de l'immobilier.
Pour répondre enfin à la question de Vincent Segouin, l'IGF a estimé que le gain lié à l'impact du prélèvement à la source pourrait être de 1 466 à 1 621 ETP ; de son côté, la DGFiP n'a fait aucun chiffrage.
La mission, je le conçois, est assez décevante cette année. En temps normal, nous aurions été sur une position plus réservée. Néanmoins, avec ce contexte très particulier, nous vous proposons l'adoption des crédits. Et pour finir sur une note positive, je voudrais souligner la mobilisation de la DGFiP pour le versement du fonds de solidarité et pour les mécanismes de soutien en général.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Gestion des finances publiques ».
La commission a décidé de réserver sa position sur les articles 54 undecies , 54 duodecies et 54 terdecies .
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Crédits non répartis ».
M. Claude Raynal , président. - Nous avons à statuer sur l'amendement concernant la mission « Transformation et fonction publiques ».
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur spécial . - L'amendement n° II-186 diminue les crédits des trois programmes de la mission « Transformation et fonction publiques » : le programme 348 « Rénovation des cités administratives et sites multi-occupants », le programme 349 « Fonds pour la transformation de l'action publique » et le programme 351 « Fonds d'accompagnement interministériel ressources humaines ». Comme je l'ai évoqué précédemment, la sous-consommation des crédits de la mission est assez délirante : entre 80 % et 90 % ne sont pas consommés ! Dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR) que nous examinerons lundi prochain en séance, entre 62 % et 97 % des crédits de paiement sont annulés. Cela pose, à mon sens, un problème d'autorisation parlementaire. D'où l'intérêt de cet amendement d'appel, qui traduit le décalage persistant entre les objectifs affichés et l'exécution des crédits et qui invite à des explications du Gouvernement sur ce point.
L'amendement n° II-186 a été adopté.
La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Transformation et fonction publiques », sous réserve de l'adoption de son amendement.
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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits des missions « Gestion des finances publiques » et « Crédits non répartis ». Elle a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits « Transformation et fonction publiques » tels que modifiés par son amendement. Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter les articles 54 undecies et 54 duodecies tels que modifiés par ses amendements n° II-18 et n° II-19 . Enfin, elle a décidé par son amendement n° II-20 de proposer de supprimer l'article 54 terdecies .