III. LE RENFORCEMENT DU FINANCEMENT DES POLITIQUES EN SOUTIEN À LA JEUNESSE ET AUX ASSOCIATIONS DOIT S'INSCRIRE DANS UNE TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE DURABLE, ET NON PAS DANS UN MOUVEMENT DE « STOP AND GO »

Le tableau ci-après retrace l'évolution des crédits proposée en 2022 pour le programme 163 « Jeunesse et vie associative ».

Évolution des crédits
du programme 163 « Jeunesse et vie associative »

(en millions d'euros)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution

2021-2022

AE = CP

AE = CP

AE = CP

Action 01 « Développement de la vie associative »

55,1

59,0

+ 7,1 %

Action 02 « Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire »

77,1

104,2

+ 35,1 %

Action 04 « Développement du service civique »

498,8

498,8

=

Action 06 « Service national universel »

62,3

110,0

+ 76,6 %

Total

693,2

772,1

+ 11,4 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Trois remarques peuvent en guider la lecture :

- la progression des crédits de l'action 02 « Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire » résulte majoritairement de l'introduction dans PLF pour 2022 du dispositif « 1 jeune, 1 mentor ». Ce dispositif est doté de 27 millions d'euros, et il cible l'accompagnement de 200 000 jeunes fin 2022 .

- la stabilisation des crédits dédiés au service civique sur le programme s'accompagne de l'ouverture de 201 millions d'euros sur le programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance » . Ce montant est toutefois en baisse de 162 millions d'euros par rapport à 2021.

- l'action 06 « Service national universel » poursuit sa montée en charge, au sens où les crédits qui lui sont consacrés ont augmenté de 76,6 % .

A. UNE STABILISATION DES MOYENS DÉDIÉS À LA VIE ASSOCIATIVE HORS PLAN DE RELANCE, QUI DOIT ÊTRE L'OCCASION D'ENGAGER UNE RÉFLEXION POUR UNE MEILLEURE VISIBILITÉ À MOYEN ET LONG TERMES DU FINANCEMENT DES ASSOCIATIONS

Au plus fort de la crise sanitaire comme dans la cascade de conséquences qui en résultent, les associations ont tenu une place indéfectible pour participer à la cohésion de notre société . Ce rôle n'existe que grâce aux 13 millions de bénévoles, dont plus de 5 millions agissant quotidiennement, et au 1,8 million de salariés (10% des salariés du secteur privé) qui forment le tissu associatif.

Pour autant, la crise sanitaire a aussi accentué les faiblesses du monde associatif , mis à mal ces dernières années sous l'effet cumulé de la suppression des contrats aidés et de la disparition de l'appui financier issu de la dotation d'action parlementaire, l'enveloppe dédiée au titre du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) n'en représentant qu'une moitié.

Face à cette situation, le soutien de l'Etat était demeuré en 2020 trop timide : en dehors d'un assouplissement des délais pour remplir les demandes ou réaliser les actions prévues, aucun soutien spécifique n'a été financé par le programme 163.

Les crédits demandés pour 2021 ont visé à rattraper ce retard en renforçant les moyens en faveur de la vie associative , essentiellement au titre du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP). Le fond a été abondé de 4,5 millions d'euros, correspondant à 600 postes supplémentaires ainsi soutenus, auxquels se sont ajoutés 7,2 millions d'euros dans le cadre de la mission « Plan de relance », pour 1 000 emplois supplémentaires. Au total, le FONJEP a ainsi été doté de 46,2 millions d'euros en 2021 .

En outre, en 2021 a été introduit un mécanisme de fléchage des avoirs inactifs récupérés par l'Etat vers le fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) , qui exerce depuis 2018 une mission supplémentaire de formation des bénévoles. Ce mécanisme est une demande ancienne du mouvement associatif, et a été soutenu par le rapporteur spécial. Il prévoit qu'une quote-part, fixée chaque année en loi de finances, des sommes acquises à l'État provenant des comptes bancaires inactifs et des contrats d'assurance-vie en déshérence est affectée au FDVA chaque année . Il était prévu dans la loi de finances pour 2021 que ce sont ainsi 20 % de ces sommes qui bénéficieront au FDVA .

Projets soutenus par le fonds pour le développement de la vie associative en 2022 au titre de sa mission de soutien aux associations

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données transmises par la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (DJEPVA)

Le soutien au FONJEP au titre de la mission « Plan de relance » a été reconduit en 2022 . Les crédits qui lui sont consacrés ont été multipliés par deux depuis 2021, passant de 7,2 millions à 14,4 millions d'euros. L'objectif est le financement de 2 000 « postes FONJEP ».

Si ce soutien au FONJEP est nécessaire pour lutter contre les effets de la crise, il ne doit pas masquer le fait qu'hors du plan de relance, les sommes allouées au fonds restent stables entre 2021 et 2022 à 37,5 millions d'euros . Dès lors, la question de l'avenir des emplois FONJEP nouvellement créés, une fois que le plan de relance sera achevé, doit être soulevée .

La véritable réforme structurelle de 2021 fut l'introduction du mécanisme de fléchage des avoirs inactifs vers le Fonds pour le développement de la vie associative . Au 30 septembre 2021, les montants affectés au FDVA s'élevaient ainsi à 19,1 millions d'euros, ce qui constitue un apport supplémentaire de 76,4 % par rapport à la subvention directe de l'État (25 millions d'euros) inscrite en loi de finances initiale . Cette somme est supérieure de 9,1 % aux prévisions de l'administration de l'année précédente, qui tablait sur une capacité d'action supplémentaire de 17,5 millions d'euros pour le FDVA. Le rapporteur spécial souligne ainsi l'efficacité de ce dispositif pour le soutien à la vie associative dans les territoires .

La quote-part est à nouveau fixée en 2022 à 20 % des avoirs inactifs récupérés par l'État, et l'administration a conservé la même prévision de recettes qu'en 2021, c'est-à-dire 17,5 millions d'euros .

Le choix de ne pas modifier la cible de prévision interroge, alors qu'il est déjà constaté à la fin du mois de septembre un dépassement de la cible pendant l'exercice courant. Ce choix peut s'expliquer pour deux raisons principales :

- d'une part, le montant précis des sommes qui reviendront à l'État, et donc de la quote-part à reverser au FDVA, ne peut être évalué avec précision ;

- d'autre part, une incertitude existe quant au calendrier de versement , puisque les pratiques divergent selon les établissements de crédit, certains opérant un versement direct des sommes échues à l'État, alors que d'autres versent les sommes à la Caisse des dépôts et consignations, qui effectue ensuite le reversement au Trésor.

Si le chiffre d'exécution de 2021 et celui de 2022 diffèrent trop fortement de la cible de 17,5 millions d'euros, il sera cependant nécessaire de revoir celle-ci .

L'une des principales sources d'inquiétudes des associations est le maintien du lien avec leurs bénéficiaires et leurs adhérents . En cela, le nouveau dispositif « 1 jeune, 1 mentor », intégré dans le programme 163 pour un montant de 27 millions d'euros est intéressant. D'après les documents budgétaires, ce programme impliquerait de manière étroite le monde associatif : « Ce plan national de soutien au mentorat [...] va permettre aux associations d'accompagner 100 000 jeunes fin 2021 et 200 000 fin 2022 ». Toutefois, les modalités concrètes de son articulation avec les politiques à destination du monde associatif peuvent encore être précisées . En outre, il faudra être attentif à la pérennité du dispositif .

Plus largement, les difficultés persistantes des associations appellent à une nouvelle réflexion sur leur financement . En effet, 40 % des associations n'avaient pas repris leurs activités en avril 2021 . Or, à la question de savoir ce qu'elles considèrent comme leur « besoin prioritaire », la réponse la plus souvent donnée par les associations est « la confirmation des subventions annoncées » 19 ( * ) . Cela montre le besoin vital pour les associations d'avoir une visibilité sur leurs financements à moyen et long terme .

À ce titre, il faut relever que les associations ont eu des difficultés à mobiliser les aides d'urgence pour faire face à la crise, car celles-ci, hors fonds destinés aux associations, prennent en compte des critères comme la « perte du chiffre d'affaire » qui sont davantage adaptés aux entreprises qu'aux associations . Une réflexion est donc également à mener sur l'adaptation des dispositifs d'aides existants aux spécificités du monde associatif .


* 19 Données tirées de l'enquête réalisée du 30 mars au 30 avril 2021, « #Covid-19 : où en sont les associations un an après ? », menée par le Mouvement associatif, le Réseau national maisons associations, Recherches et Solidarités et le ministère.

Page mise à jour le

Partager cette page