TITRE III : SIMPLIFIER LA MISE EN PLACE DES DISPOSITIFS DE PARTAGE DE LA VALEUR

Article 9
Versement d'avances sur l'intéressement et la participation des salariés

Cet article propose d'ouvrir la possibilité aux accords d'intéressement et de participation de prévoir le versement d'avances en cours d'exercice.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le versement d'avances sur les sommes dues n'est possible que dans le cadre des dispositifs d'intéressement

· Les modalités de versement des sommes dues au titre de l'intéressement ou de la participation sont respectivement fixées par la loi et le règlement. Le code du travail85(*) prévoit en effet que le versement intervient au plus tard le dernier jour du cinquième mois qui suit la clôture de l'exercice, et à défaut les sommes concernées produisent un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées (TMO)86(*).

La destination de ces versements dépend alors de la situation du salarié et de sa décision :

si le salarié ne dispose que d'un accord d'intéressement : il perçoit immédiatement la somme due ;

- si le salarié dispose également d'un plan d'épargne salariale : il ne perçoit immédiatement la somme due qu'à la condition d'en faire la demande dans les quinze jours après avoir été informé du calcul des sommes dues87(*) ; à défaut elles sont affectées à un plan d'épargne salariale et bloquées durant la durée légale88(*).

Les modalités d'information des bénéficiaires sur le régime mis en place

L'accord d'intéressement comme l'accord de participation doivent prévoir les modalités d'information de chaque bénéficiaire, ainsi que la date à laquelle le bénéficiaire est présumé avoir été informé.

Pour l'accord d'intéressement89(*), l'information porte sur :

- les sommes qui sont attribuées au titre de l'intéressement ;

- le montant dont le bénéficiaire peut demander le versement ;

- le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

- l'affectation des sommes au plan d'épargne d'entreprise (PEE) ou au plan d'épargne interentreprises (PEI), lorsqu'ils existent, en cas d'absence de demande de sa part.

Pour l'accord de participation90(*), l'information porte sur :

- les sommes qui sont attribuées au titre de la participation ;

- le montant dont le bénéficiaire peut en tout ou partie demander le versement ;

- le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

- l'affectation d'une quote-part des sommes au plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) ou au plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (Pereco) en cas d'absence de réponse de sa part.

· Le versement d'avances sur les sommes dues au titre de l'intéressement ou de la participation n'est pas envisagé par le code du travail. Cependant une circulaire91(*) encadre cette possibilité dans le seul cas de l'intéressement ; compte tenu du caractère aléatoire de ce dernier, elle précise notamment que :

- lorsque les avances versées au cours de l'année dépassent l'enveloppe totale de l'intéressement, le trop perçu est intégralement reversé par les salariés92(*) ;

- lorsque l'accord d'intéressement comporte une clause de versement d'avances, il doit également comporter une clause de reversement des trop-perçus dans le but d'assurer une bonne information des salariés ;

- les clauses prévoyant l'acquisition définitive d'avances par les salariés en cas de trop-perçu sont considérées comme illégales.

Concernant la participation, le versement d'avances est exclu par la jurisprudence : la Cour de cassation a jugé que « l'ensemble des dispositions légales et réglementaires étant d'ordre public absolu, il ne peut y être dérogé qu'avec l'autorisation expresse de la loi »93(*).

B. La sécurisation du versement d'avance sur intéressement et participation lors de la mise en place de l'accord afférent

Le présent article transpose l'article 12 de l'ANI, dans le but d'inscrire dans la loi la possibilité pour les accords d'intéressement ou de participation de prévoir le versement d'avances, en cours d'exercice, sur les sommes dues au titre du dispositif correspondant.

Son 1er alinéa crée un nouveau chapitre après le chapitre V du titre IV du livre III de la troisième partie du code du travail intitulé « Avances sur intéressement et participation ». Il est composé d'un article unique L. 3348-1 qui reprend la solution juridique ménagée par la circulaire précitée pour l'intéressement en l'étendant aux accords de participation.

Son 2e alinéa prévoit que, le cas échéant, les avances seront versées après que le bénéficiaire ait donné son accord, et selon une périodicité qui ne peut être inférieure au trimestre. Cette périodicité plancher vise à diminuer le risque d'une substitution de ces avances avec les éléments de rémunération.

Son 3e alinéa dispose que, lorsque le cumul des avances au titre de l'intéressement ou de la participation dépasse les droits définitifs attribués au terme de l'exercice, le trop-perçu est intégralement reversé à l'employeur par le biais d'une retenue sur salaire, dans les conditions prévues à l'article L. 3251-3 du même code.

Son 4e alinéa précise que lorsque le trop-perçu a été versé sur un plan d'épargne salariale, il est alors considéré comme versement volontaire du bénéficiaire, et n'ouvre pas droit au traitement fiscal et social attaché à l'intéressement et à la participation94(*).

Son 5e alinéa article renvoie à un décret la détermination des conditions d'information des bénéficiaires.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels proposés par le rapporteur au stade de la commission, ainsi qu'un amendement du même auteur énumérant les exonérations remises en cause lorsqu'une avance versée sur un plan d'épargne salariale conduit à l'existence d'un trop-perçu.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article transcrit fidèlement la demande de sécurisation juridique des avances sur intéressement ou participation exprimée dans l'ANI.

Cette possibilité permet en effet de laisser plus de souplesse aux employeurs, afin d'anticiper le versement des sommes dues au titre de la participation ou de l'intéressement. Cela se justifie notamment dans les cas où les résultats de l'entreprise, constatés au cours de l'exercice ou attendus, ne laissent pas de doute quant à l'existence prochaine de sommes dues au titre des dispositifs de partage de la valeur.

Sur le plan juridique, la jurisprudence de la Cour de cassation ayant considéré que les dispositions qui se rapportent à la participation étaient d'ordre public, la mise en place d'avances sur ce dispositif nécessitait de recourir à un vecteur législatif. Si la mesure équivalente pour l'intéressement était valablement encadrée par de seules dispositions règlementaires, le rapporteur considère que, dans un souci de cohérence et d'intelligibilité de la norme pour les acteurs, une inscription dans le domaine de la loi se justifie.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 9 bis
Nouveau calcul de la participation en cas de rectification
des résultats de l'entreprise

Cet article propose d'inscrire dans la loi des dispositions figurant dans la partie réglementaire du code du travail et qui prévoient que lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fait l'objet d'un nouveau calcul tenant compte des rectifications apportées.

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article a été introduit à l'Assemblée nationale lors de la discussion du texte en séance publique, par l'adoption d'un amendement de Mme Eva Sas et d'un sous-amendement du rapporteur.

? L'article D. 3324-40 du code du travail, qui figure dans sa partie réglementaire, est ainsi rédigé :

« Lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fait l'objet d'un nouveau calcul, compte tenu des rectifications apportées.

« Le montant de la réserve spéciale de participation est modifié en conséquence au cours de l'exercice pendant lequel les rectifications opérées par l'administration ou par le juge de l'impôt sont devenues définitives ou ont été formellement acceptées par l'entreprise. Ce montant est majoré d'un intérêt dont le taux est égal au taux mentionné à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et qui court à partir du premier jour du sixième mois de l'exercice qui suit celui au titre duquel les rectifications ont été opérées. »

? Le présent article propose d'insérer un article L. 3326-1-1 au sein du code du travail pour y reproduire les dispositions figurant à l'article D. 3324-40 du même code, en ajoutant la précision selon laquelle le nouveau calcul du montant de la participation doit s'effectuer « que la rectification donne lieu ou non à l'application de majorations, à des poursuites pénales ou à une convention judiciaire d'intérêt public ».

? Le présent article ne transpose aucune des stipulations de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023.

II - La position de la commission

D'une part, les dispositions du présent article relèvent manifestement du domaine réglementaire puisqu'elles reproduisent dans la loi le contenu d'un décret.

Si la précision ajoutée à ces dispositions par le présent article s'avérait nécessaire, il appartiendrait au Gouvernement de l'apporter par décret, en modifiant l'article D. 3324-40 du code du travail.

D'autre part, le présent article ne transpose aucune des stipulations de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023. Il contrevient donc à l'objectif de circonscrire le projet de loi à la seule transposition fidèle et complète des stipulations de l'accord qui relèvent de la loi.

Pour ces raisons, la commission a adopté l'amendement COM-29 du rapporteur tendant à supprimer le présent article.

La commission a supprimé cet article.

Article 10
Salaires plancher et plafond dans la répartition
de l'intéressement en fonction du salaire

Cet article propose d'instaurer la possibilité de fixer un salaire plancher et un salaire plafond en cas de répartition de l'intéressement en fonction du salaire.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit en vigueur

· La répartition entre les bénéficiaires des sommes perçues au titre de l'intéressement et de la participation est effectuée selon des critères qui sont limitativement énumérés par la loi.

Le code du travail prévoit ainsi, à l'article L. 3314-5 pour l'intéressement et à l'article L. 3324-5 pour la participation, que cette répartition peut s'opérer de manière :

- uniforme ;

- ou proportionnelle à la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'exercice ;

- ou proportionnelle aux salaires.

La répartition peut également s'effectuer en retenant conjointement ces différents critères.

· Lorsque l'accord d'intéressement ou de participation retient plusieurs des critères ci-dessus, le calcul de la répartition des sommes doit être fait en distinguant plusieurs sous-masses afin de respecter le principe de proportionnalité.

La Cour de cassation a en effet exclu que la réduction de la prime individuelle d'intéressement soit plus que proportionnelle à la durée des absences constatées au cours de l'exercice95(*).

Or, à défaut de cette clé de répartition par sous-masses, le risque est en d'aboutir à une formule qui discriminerait de façon disproportionnée l'absentéisme. La pondération des salaires perçus par un coefficient de présence revient de fait à pénaliser deux fois les bénéficiaires concernés : l'absence venant à la fois diminuer les salaires perçus, et minorer leur pondération.

Exemple de répartition en sous-masses des sommes
dues au titre de l'intéressement ou de la participation

Uniforme

Proportionnelle à la présence

Proportionnelle aux salaires

0 %

50 %

50 %

· Afin de prévoir une répartition des primes plus favorables aux bas salaires, les accords de participation ou d'intéressement peuvent fixer :

- un salaire plancher : qui sert de base de calcul minimale à la part individuelle de tout bénéficiaire lorsque la répartition se fait en fonction du salaire ;

- un salaire plafond : qui permet en cas de répartition en fonction du salaire de caper le salaire du bénéficiaire dans le calcul de la part individuelle. Le plafond est ainsi égal à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale pour les accords de participation.

La conjonction de ces deux seuils peut permettre de concentrer la distribution des primes et d'obtenir un écart plus réduit entre les bénéficiaires.

Cette fixation de salaire plancher et plafond se fonde sur différentes sources :

- pour l'accord de participation : le code du travail prévoit explicitement la possibilité d'un salaire plancher et fixe un salaire plafond d'autorité96(*) à l'article L. 3324-5 ;

- pour l'accord d'intéressement : le code du travail ne prévoit pas de disposition adéquate, mais cette possibilité a été encadrée par deux circulaires ministérielles successives97(*), et réexposée dans le guide interministériel de l'épargne salariale de juillet 2014.

B. L'évolution proposée

Le présent article transpose l'article 13 de l'ANI, et vise à sécuriser au niveau législatif la possibilité de fixer un salaire plancher et plafond en cas de choix d'une répartition de l'intéressement en fonction du salaire.

Il complète l'article L. 3314-5 du code du travail, en précisant que « l'accord peut fixer un salaire plancher, un salaire plafond, ou les deux, servant de base de calcul de la part individuelle ».

Cette disposition porte au niveau législatif la formulation retenue dans les circulaires précitées, dans lesquelles est indiqué que « La définition du salaire peut également intégrer un plancher et/ou un plafond [destiné à atténuer la hiérarchie des rémunérations.] ».

En revanche, la détermination du salaire plancher comme du salaire plafond est libre, contrairement à la disposition miroir concernant la participation. L'article L. 3324-5 du même code plafonne en effet les salaires pris en compte pour le calcul de la répartition à trois fois le plafond de la sécurité sociale.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Le présent article répond au souci de sécurisation exprimée par les signataires de l'ANI au sujet de la fixation de salaires plancher et plafond dans le calcul de la répartition de l'intéressement.

Le rapporteur souligne que cette possibilité est déjà encadrée par deux circulaires et un guide ministériel, sans que les auditions des partenaires sociaux n'aient fait état de difficultés particulières dans l'application de ces mesures. Cependant, compte tenu de l'inscription d'une mesure analogue pour la participation dans la partie législative du code du travail, le présent article trouve sa justification dans un souci de cohérence et d'intelligibilité de la norme pour les acteurs. Ce d'autant plus alors que la diffusion des dispositifs d'intéressement cherche à être amplifiée, a fortiori auprès des petites et moyennes entreprises (PME).

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 10 bis
Mention des critères de responsabilité sociale et environnementale
dans le calcul de l'intéressement

Cet article propose de préciser que les critères de performance retenus dans le calcul de l'intéressement collectif des salariés peuvent contenir des critères de responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise (RSE).

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

A. L'intéressement bénéficie d'exonérations dans les conditions fixées par la loi

· L'article L. 3312-1 du code du travail caractérise le régime juridique de l'intéressement par trois principes cumulatifs :

- le caractère collectif : l'ensemble des salariés doivent pouvoir en bénéficier, sous réserve éventuelle de l'ancienneté nécessaire ;

- le caractère aléatoire : il doit traduire l'évolution des résultats de l'entreprise. Cela implique notamment qu'un aléa, même faible, doit exister le concernant98(*) ;

- le caractère facultatif : c'est ce qui le différencie de la participation.

· L'article L. 3314-2 du code du travail dispose plus précisément des conditions permettant de respecter le principe d'aléa de l'intéressement collectif. La formule de calcul de l'intéressement peut ainsi être liée :

aux résultats ou aux performance de l'entreprise, observés au cours d'une année ou d'un nombre de mois au moins égal à trois ;

aux résultats d'une ou des filiales99(*) de l'entreprise situées en France, à condition qu'au moins deux tiers des salariés de ces filiales soient couverts par un accord d'intéressement ;

- le cas échéant, la formule de calcul d'une entreprise peut être complétée d'un objectif pluriannuel lié aux résultats ou aux performances.

· Le respect des conditions exposées permet à l'intéressement de bénéficier d'un régime fiscal et social incitatif, qui présente des avantages similaires à ceux de la participation.

Tableau synthétique du régime fiscal et social de l'intéressement

 

Pour les salariés

Pour les entreprises

Impôt sur le revenu (IR)

- Si affectées à un plan d'épargne entreprise (PEE) : exonération dans la limite de trois quarts du plafond de la sécurité sociale (Pass)100(*)

- Sinon : soumises à l'IR au titre de l'année en cours

Déductibles de l'assiette de l'IR le cas échéant101(*).

Impôt sur les sociétés (IS)

X

Forfait social

- Jusqu'à 249 salariés : exonération102(*) ;

- À partir de 250 salariés : forfait social de 20%, ou 16% sur les produits d'épargne fléchés vers les petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaires (ETI)103(*).

Cotisations de la sécurité sociale

Les sommes sont exclues des assiettes de la sécurité sociale104(*).

Contribution sociales généralisée (CSG) et contribution pour le remboursement de la dette sociale

Les sommes sont soumises à la CSG105(*) et CRDS106(*).

B. Le rappel de la possibilité pour les les accords d'intéressement de prévoir des critères de performance en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE)

· L'article 15 de l'ANI énonce l'attachement des partenaires sociaux à l'intégration de critères de RSE dans les accords d'intéressement afin de « mobiliser collectivement l'ensemble des acteurs de l'entreprise ». Pour cela, ils appellent à la mise en place d'un « cadre juridique clair et sécurisé », qui viserait notamment à préciser la notion de critère aléatoire.

· L'Assemblée nationale a adopté en séance deux amendements identiques déposés par le rapporteur et M. Thomas Cazenave, qui ont inséré le présent article dans le texte en navette.

Le présent article complète ainsi l'article L. 3314-2 du code du travail, en précisant que la formule de calcul de l'intéressement mentionnée à au 1° du même article peut prendre en compte des critères de performance relevant de la RSE.

Cette disposition est à croiser avec le premier alinéa du même article, qui impose que l'intéressement collectif des salariés « présente un caractère aléatoire ».

II - La position de la commission

Le désir de sécurisation, et plus largement de mise en lumière, des critères RSE dans les accords d'intéressement a effectivement été exprimé dans l'ANI. Cependant, la formulation même du titre de l'article 15 de l'ANI, « Faciliter le choix de critères RSE dans les accords d'intéressement », souligne que certains accords d'intéressement prennent déjà en compte des critères RSE.

En effet, cette pratique est d'ores et déjà permise, puisqu'elle rentre dans le champ couvert par les « performances de l'entreprise » au 1° de l'article L. 3314-2 du code du travail, ce dont convient l'auteur même de l'amendement portant article cet article additionnel107(*).

Ces critères doivent cependant répondre à la condition générale de « caractère aléatoire » : ce qui est, par exemple, le cas de la performance énergétique, de la réduction des déchets, de la diminution de la consommation d'eau ou d'électricité, ou encore de l'amélioration du bien-être des salariés.

Or cet ajout ne participe pas à sécuriser l'insertion de critères RSE dans les accords d'intéressement, puisque le caractère aléatoire de ces derniers n'est pas précisé. Le rapporteur considère que cette sécurisation pourrait plus efficacement être effectuée au niveau règlementaire, en détaillant les critères valables, ainsi que les modalités de contrôle permettant d'apprécier leur caractère aléatoire.

Par conséquent, le rapporteur propose de supprimer cet article qui ne comporte pas, en l'état, de portée normative ayant le caractère de nouveauté (amendement COM-30).

La commission a supprimé cet article.

Article 11
Simplifier la procédure de révision du contenu des plans interentreprises

Cet article propose de simplifier la procédure de révision du contenu des plans d'épargne interentreprises (PEI) en accélérant l'entrée en vigueur de la version modifiée du plan.

La commission a adopté l'article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques est venue simplifier la procédure de modification du plan interentreprises

Institué par un accord collectif dans les conditions prévues au livre II de la deuxième partie du code du travail, le plan d'épargne interentreprises (PEI) doit être approuvé par l'ensemble des entreprises adhérentes au plan, et fait l'objet d'un règlement qui détermine son contenu et ses modalités108(*).

Article L. 3333-3 du code du travail : le contenu du règlement du PEI

« 1° Les entreprises signataires ou le champ d'application professionnel et géographique ;

2° La nature des sommes qui peuvent être versées ;

3° Les différentes possibilités d'affectation des sommes recueillies, en particulier le nombre, l'orientation de gestion et le profil de risque des fonds utilisés ;

4° Les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs ;

5° La liste de différents taux et plafonds d'abondement parmi lesquels les entreprises souhaitant effectuer des versements complémentaires à ceux de leurs salariés pourront opter ;

6° Les conditions dans lesquelles sont désignés les membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement prévus par le règlement du plan et les modalités de fonctionnement des conseils. »

· La révision du PEI était initialement particulièrement lourde, puisque réalisée dans les mêmes conditions que le plan initial. L'article L. 3333-7 du code du travail, dans sa version en vigueur jusqu'au 7 août 2015, précisait ainsi :

la procédure de droit pour les avenant relatif aux modalités d'alimentation, de gestion et d'abondement du PEI (2°, 3° et 5° ci-dessus) : ratification expresse par une majorité des entreprises parties du plan ;

- la procédure simplifiée pour les seules modifications du règlement du PEI visant à l'adapter aux dispositions législatives ou réglementaires postérieures à son institution : après information des entreprises parties prenantes, la modification s'appliquait sous réserve que la majorité de ces entreprises ne s'y opposent pas dans un délai d'un mois passé la date d'information.

· La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a cherché à simplifier cette procédure de révision du PEI en alignant les avenants relatifs à l'alimentation, à la gestion et à l'abondement du PEI sur la procédure simplifiée (absence d'opposition d'une majorité des entreprises parties prenantes dans un délai d'un mois).

· Cependant, la simplification de la procédure n'a pas accéléré l'entrée en vigueur des règlements adossés aux PEI qui sont modifiés. Le cas échéant, les nouvelles modalités commencent à s'appliquer aux entreprises parties prenantes à compter du premier exercice suivant la date d'envoi de l'information. Ce délai incompressible constitue un frein à l'adaptabilité des PEI.

B. Le dispositif proposé

Le présent article transpose l'article 19 de l'ANI, en modifiant l'article L. 3333-7 du code du travail.

Le du présent article supprime la mention de l'entrée en vigueur de la modification à compter du « premier exercice suivant la date de l'information de l'entreprise ». Par conséquent la modification du règlement du PEI intervient à l'échéance du seul délai de un mois.

Le ajoute un alinéa qui précise en outre que, de manière dérogatoire, lorsque la modification du règlement du PEI porte sur de nouvelles possibilités d'affectation des sommes recueillies, l'entrée en vigueur est immédiate dès l'information des entreprises parties prenantes.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Le présent article répond à la volonté exprimée par les signataires de l'ANI de simplifier la modification du règlement d'un PEI, mais également que cette modification soit plus rapidement effective.

L'assouplissement de la procédure de modification du règlement d'un PEI est en effet un critère important de leur attractivité pour les entreprises adhérentes. C'est également le cas pour les modifications qui permettent de nouvelles possibilités d'affectation des sommes versées, qui seront désormais effectives dès information des entreprises adhérentes, notamment.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 12
Aménagement de la condition d'ancienneté applicable aux salariés temporaires pour l'attribution de l'intéressement et de la participation

Cet article propose que pour l'attribution de l'intéressement et de la participation, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire puisse prévoir une durée d'ancienneté requise pour les salariés temporaires différente de celle des autres salariés, dans la limite de quatre-vingt-dix jours.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

? Aux termes de l'article L. 3342-1 du code du travail, tous les salariés d'une entreprise compris dans le champ des accords d'intéressement et de participation ou des plans d'épargne salariale bénéficient de leurs dispositions.

Toutefois, peut être exigée une condition d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe d'entreprises, qui ne peut excéder trois mois. Pour la détermination de l'ancienneté éventuellement requise, sont pris en compte tous les contrats de travail exécutés au cours de la période de calcul et des douze mois qui la précèdent.

Cet article L. 3342-1 prévoit une disposition dérogatoire pour les salariés temporaires : ils sont réputés compter trois mois d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe qui l'emploie s'ils ont été mis à la disposition d'entreprises utilisatrices pendant une durée totale d'au moins 60 jours au cours du dernier exercice. Cette durée est entendue comme une période de 60 jours calendaires.

? Les entreprises de travail temporaire emploient deux types de salariés :

- les salariés temporaires qui sont mis à la disposition d'entreprises utilisatrices ;

- les salariés permanents qui exécutent leur contrat de travail au sein de l'entreprise de travail temporaire.

Ces deux catégories de salariés bénéficient des dispositifs de partage de la valeur mis en place par l'entreprise de travail temporaire, avec laquelle ils sont liés par un contrat de travail.

Cette spécificité a des conséquences sur la distribution de l'intéressement et de la participation au sein des entreprises de travail temporaire.

Selon Prism'emploi109(*), chaque année, près de 2,9 millions de salariés intérimaires sont mis à disposition d'entreprises utilisatrices pour des missions d'une durée variable comprise entre quelques heures et 18 mois. La durée moyenne des missions est de 2 semaines et la durée cumulée d'emploi annuelle est d'environ 3 mois.

La règle d'ancienneté applicable aux salarié temporaires a pour conséquence de rendre éligibles au bénéfice de l'intéressement et de la participation un grand nombre de salariés des entreprises de travail temporaire.

Il en résulte une forte dilution des sommes versées aux salariés, ce qui fragilise la capacité de ces entreprises à fidéliser ceux ayant une ancienneté plus importante. Ainsi, Prism'emploi a établi que près de 30 % des intérimaires en contrat de travail temporaire sont concernés par une participation inférieure à 50 euros et 10 % par un montant inférieur à 30 euros au titre d'une année.

Les niveaux moyens des sommes perçues au titre de la participation par les salariés de la branche du travail temporaire (111 euros) sont ainsi nettement inférieur à la moyenne générale (1 409 euros en 2020110(*))

Montants moyen de participation perçus par les salariés
des entreprises de travail temporaire selon leur type de contrat

Salariés en contrat de travail temporaire

105 €

Salariés en CDI intérimaire

134 €

Salariés permanents

242 €

Moyenne

111 €

Source : Enquête Prism'emploi

En outre, si 90 % des salariés permanents de ces entreprises bénéficient de la participation, ils ne représentent que 3,1 % de l'ensemble des salariés bénéficiaires, 96,9 % d'entre eux étant des salariés intérimaires111(*).

? Reprenant ces constats, les signataires de l'accord national interprofessionnel ont souhaité que les règles qui régissent actuellement la distribution de l'intéressement et de la participation dans le secteur du travail temporaire puissent être aménagées.

Ainsi, l'article 20 de l'accord stipule que « les modalités actuelles de calcul de la participation et de l'intéressement sont peu adaptées au secteur du travail temporaire. Elles conduisent d'une part, à un très fort effet de dilution des sommes, et d'autre part, désincitent les entreprises du secteur de s'engager dans la négociation d'accords d'intéressement. Les signataires souhaitent que soit donnée la possibilité aux partenaires sociaux de la branche du travail temporaire d'aménager les modalités d'attribution de l'intéressement et de la participation, afin de tenir compte de la nature de la relation qui lie le salarié à son entreprise. »

? Le présent article entend traduire les stipulations de l'ANI en permettant à la branche du travail temporaire d'aménager la condition d'ancienneté aujourd'hui prévue pour les salariés temporaire.

À cette fin, le présent article complète l'article L. 3342-1 du code du travail afin de prévoir que, par dérogation à la règle d'ancienneté de soixante jours, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire pourra prévoir une durée d'ancienneté différente pour les salariés temporaires, dans la limite de 90 jours.

Cette disposition permettra ainsi, par accord de branche, d'allonger au-delà de 60 jours la durée d'ancienneté requise pour que les salariés intérimaires soient éligibles à la participation et à l'intéressement. Elle permettra en outre de fixer des conditions d'ancienneté différentes entre salariés temporaires et salariés permanents au sein des entreprises du travail temporaire, en considérant que leur situation au regard de leur employeur est suffisamment différente pour justifier une différence de traitement.

La limite fixée à 90 jours par le présent article permet ainsi au législateur d'exercer pleinement sa compétence et de donner un cadre suffisamment précis à la négociation de branche qu'il propose. C'est ce qu'a souligné le Conseil d'État112(*) dans son avis rendu sur le projet de loi : « Le Conseil d'État considère qu'en fixant un plafond à la durée maximale d'ancienneté que les partenaires sociaux sont susceptibles de retenir pour les salariés temporaires, le législateur définit avec suffisamment de précision les mesures d'application qu'il confie à la négociation collective et apporte la garantie que la différence de traitement qui en résultera avec les salariés permanents ne sera pas disproportionnée. »

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

La mesure proposée permettra à la branche du travail temporaire de rehausser, pour les salariés temporaires, la durée d'ancienneté requise pour bénéficier de l'intéressement et de la participation. Une telle disposition limitera la dilution des sommes versées dans les entreprises de ce secteur et concentrera l'octroi de la participation et de l'intéressement sur les salariés qui contribuent le plus aux performances de l'entreprise. Le présent article laisse à la négociation collective de branche le soin de fixer une durée adaptée aux besoins du secteur en posant une durée maximale qui ne créera pas de différence de traitement disproportionnée entre salariés temporaires et salariés permanents au sein d'une même entreprise.

Le présent article assure une transposition répondant à l'objectif poursuivi par les signataires de l'accord national interprofessionnel qui ont souhaité aménager les modalités de distribution de l'intéressement et de la participation pour limiter les effets de dilution des sommes versées dans le secteur du travail temporaire.

En conséquence, le rapporteur a proposé à la commission d'adopter le présent article.

La commission a adopté cet article sans modification.


* 85 Art. L. 3314-9 du code du travail pour l'intéressement, D. 3324-21-2 et D. 3324-25 pour la participation, du code du travail.

* 86 Calculé selon une formule définie à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et publié chaque semestre, il est par exemple de 2,51 % au 10 mars 2023.

* 87 Art. R. 3313-12 du code du travail.

* 88 Hors situation de déblocage exceptionnel, il s'agit d'une durée de cinq ou huit ans dans le cas d'un plan d'épargne d'entreprise (PEE) (suivant si l'entreprise est soumise ou non à un régime d'autorité en raison d'absence de mise en place d'un régime de participation dans le délai légal), ou jusqu'au départ à la retraite dans le cas d'un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) ou plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (Pereco).

* 89 Art. R. 3313-12 du code du travail.

* 90 Art. R. 3324-21-1 du code du travail.

* 91 Circulaire du 14 septembre 2005 relative à l'épargne salariale.

* 92 Dans le cas où les versements ont été effectués sur un plan d'épargne entreprise (PEE), le trop-perçu ne peut être sortis du plan, mais constituent alors des versements volontaires, qui ne donnent pas droit à un traitement fiscal et social incitatif.

* 93 C. cass. Soc., 23 mai 2007, n° 04-20157 et suivants.

* 94 Ces exonérations sont prévues aux articles L. 3312-4, L. 3315-1 à L. 3315-3 et L. 3325-1 à L.3325-4 du code du travail.

* 95 C. cass.,soc., 16 décembre 2003, n° 02-30862.

* 96 Il correspond à trois fois le plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale (PASS), ce qui équivaut à 131 976€ en 2023.

* 97 Circulaire du 22 novembre 2001 relative à l'épargne salariale et circulaire du 14 décembre 2005 relative à l'épargne salariale.

* 98 C.cass., soc., 2 juillet 2003, 00-22.101.

* 99 Entendues au sens de l'article L.233-16 du code de commerce.

* 100 Art. L. 3315-2 du code du travail.

* 101 Art. L. 3315-1 du code du travail.

* 102 Art. L. 137-15 du code de la sécurité sociale.

* 103 Art. L. 137-16 du code de la sécurité sociale.

* 104 Art. L. 3312-4 du code du travail.

* 105 Art. L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 106 Art. 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

* 107 L'exposé sommaire de l'amendement du rapporteur affirme ainsi que « Rien n'empêche aujourd'hui une formule d'intéressement de prendre en compte ces critères mais cet amendement permet de mettre en exergue cette faculté. »

* 108 Art. L. 3333-1 à L. 3333-8 du code du travail.

* 109 Les éléments mentionnés ont été transmis au rapporteur par Prism'emploi.

* 110 Dares, 2022.

* 111 Étude d'impact, page 121.

* 112 Conseil d'État, avis n° 407.057 du 17 mai 2023.

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