II. ACCEPTER LE REPORT DES ÉLECTIONS PROVINCIALES ET DU CONGRÈS DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE, À LA SEULE FIN DE PERMETTRE LA CONCLUSION D'UN ACCORD GLOBAL TRIPARTITE RELATIF À L'AVENIR INSTITUTIONNEL
Suivant l'avis du rapporteur, la commission des lois a accepté le report de sept mois au plus tard des prochaines élections provinciales et du congrès de la Nouvelle-Calédonie proposé par le Gouvernement.
A. UN REPORT LIMITÉ ET JUSTIFIÉ PAR DES MOTIFS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL, QUI RESPECTE LES EXIGENCES CONSTITUTIONNELLES
Selon une jurisprudence constitutionnelle constante, le report d'une élection doit respecter deux conditions :
- d'une part, le législateur doit définir avec suffisamment de précision le calendrier électoral et ainsi éviter tout risque d'incompétence négative. En l'espèce, le projet de loi précise clairement que les prochaines élections provinciales et du congrès de la Nouvelle-Calédonie auront lieu au plus tard le 15 décembre 2024 ;
- d'autre part, le report d'une élection doit être exceptionnel et transitoire mais également proportionné à l'objectif d'intérêt général poursuivi.
Le projet de loi organique du Gouvernement est motivé par « la volonté d'assurer la respiration démocratique nécessaire tout en laissant le temps au dialogue de se nouer, se densifier et éventuellement se conclure [, ce qui constitue] la principale des raisons pour lesquelles il est proposé de reporter les élections »1(*).
C'est un des motifs d'intérêt général suffisant aux yeux du législateur organique pour fonder, dans l'intérêt de la conclusion d'un accord tripartite global consensuel sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, une telle prolongation des mandats en cours des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.
Ainsi, eu égard au fait qu'il est limité à sept mois et qu'il poursuit des motifs d'intérêt général, ce report des élections provinciales et du congrès de la Nouvelle-Calédonie n'a paru à la commission contraire à aucune exigence constitutionnelle ou conventionnelle.
B. UN REPORT NÉCESSAIRE POUR SE PRÉMUNIR DES RISQUES QUE LA TENUE D'UN TEL SCRUTIN SERAIT SUSCEPTIBLE D'EMPORTER, AU DÉTRIMENT D'UNE SOLUTION CONSENSUELLE GLOBALE TRIPARTITE
La commission des lois a considéré que le report proposé se justifiait, eu égard aux risques que la tenue d'élections provinciales et au congrès sur la base des dispositions en vigueur serait susceptible d'emporter.
En effet, le rapporteur a pris connaissance des avis du Conseil d'État du 7 décembre 2023 et du 27 janvier 2024 qui font apparaître que l'organisation du scrutin peut difficilement être envisagée sur le fondement des dispositions actuelles régissant la composition de la liste électorale, et cela en raison de l'ampleur qui ne cesse de croître des dérogations apportées au principe constitutionnel de l'égalité de suffrage. Il s'agit d'une difficulté objective qu'il appartient par priorité aux parties calédoniennes de résoudre par leurs discussions. Cette difficulté empêche le Gouvernement, qu'il le veuille ou non, d'organiser les élections sur un fondement juridique mettant celle-ci à l'abri de toute contestation.
C'est pourquoi, la commission des lois, sans préjuger du contenu des dispositions qui devront être adoptées, a considéré qu'un texte d'un niveau approprié devrait impérativement intervenir pour régir les inscriptions sur la liste électorale en vue des élections aux assemblées provinciales. Elle a réitéré son souhait que ce texte s'inscrive dans le cadre d'un accord global.
* 1 Rapport n°14 du 11 janvier 2024 de la commission de la législation et de la réglementation générales du congrès de la Nouvelle-Calédonie relatif à l'examen du projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de provinces de Nouvelle-Calédonie, p. 3.