B. RISQUES NATURELS ET TECHNOLOGIQUES : DES MOYENS BUDGÉTAIRES STABILISÉS, CERTAINS DISPOSITIFS PEUVENT ÊTRE REVUS

1. Une stabilité des crédits alloués à la prévention des risques technologiques

Pour 2025, l'action 01 « Prévention des risques technologiques et des pollutions » voit ses crédits diminuer de 7,4 % par rapport à l'année précédente. Cette baisse s'explique par l'ajout de 10 millions d'euros à l'Assemblée nationale lors des débats du PLF pour 2024 afin de mettre en place des mesures visant à réduire les risques liés aux substances per- ou polyfluoroalkyles (PFAS). Sur cette somme 5 millions d'euros ont été pérennisés.

Plus généralement, la finalité de cette action consiste à assurer la prévention des risques technologiques et des pollutions, à maîtriser les effets des processus industriels, des produits et des déchets sur l'environnement et la santé, et à mettre en oeuvre la feuille de route « économie circulaire ».

Cette politique de prévention s'opère par le biais des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Créés par la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, à la suite de la catastrophe AZF, ils prévoient des mesures visant à réduire les risques associés à la présence de sites industriels à hauts risques (classés Seveso seuil haut) pour les riverains.

Ces plans permettent d'agir sur l'urbanisation autour des installations présentant les plus grands risques (installations Seveso seuil haut) et de corriger des situations d'exposition au risque des populations, au besoin, par des mesures foncières d'expropriation ou de délaissement ou par des travaux sur les biens d'habitation. Des mesures supplémentaires de réduction du risque à la source sur les sites industriels, allant au-delà des exigences réglementaires, peuvent également être prescrites lorsque leur mise en oeuvre est moins coûteuse que les mesures foncières qu'elles permettent d'éviter.

Enfin, des mesures alternatives aux mesures foncières peuvent être prescrites par arrêté préfectoral après l'approbation du PPRT. Ces mesures concernent uniquement les biens autres que les logements, dès lors qu'elles apportent une amélioration substantielle de la protection des populations et que leur coût est inférieur aux mesures foncières qu'elles permettent d'éviter. Ces mesures peuvent notamment porter sur les activités économiques.

Au 1er août 2024, pour la première fois les 387 PPRT prescrits ont été approuvés. Le dernier PPRT l'a été au second semestre de l'année 2023. Ainsi, vingt-trois ans après la catastrophe de l'usine AZF, l'élaboration de ces plans est achevée. Désormais, l'enjeu est celui de leur mise en oeuvre effective.

Bilan des PPRT

Un bilan de l'avancement de la mise en oeuvre des 387 PPRT approuvés entre 2007 et 2023 peut être effectué :

- sur les 99 logements et 78 activités faisant l'objet d'une expropriation (pour un montant de financement de l'État estimé à 132 millions d'euros), 82 logements (83 %) et 39 activités (50 %) ont été expropriés. 151 logements (soit 56 % des 269 concernés) et 64 activités (soit 35 % des 181 activités) ont été délaissés ;

- 8 mesures alternatives ont été prescrites et 4 sont à l'étude, pour un montant de financement de l'État estimé à ce stade à 6,2 millions d'euros ;

- 24 mesures supplémentaires ont été réalisées ou sont à l'étude, pour un montant de financement de l'État estimé à 138 millions d'euros ;

- 188 PPRT prescrivent des travaux de protection face aux risques technologiques à près de 15 610 logements. Au 1er août 2024, environ 7 204 logements (46 %) ont fait l'objet d'un diagnostic de travaux ; les travaux ont été réalisés pour 4 713 d'entre eux (30 % des logements soumis à travaux, représentant 64,5 % des logements diagnostiqués).

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Ainsi, entre 2009 et 2023, 273 millions d'euros d'AE ont été engagés par l'État et 180 millions d'euros de CP ont été consommés pour la mise en oeuvre des mesures prescrites par les PPRT (mesures foncières, supplémentaires et alternatives) et l'accompagnement des riverains dans la réalisation de travaux sur l'habitat de protection face aux risques technologiques.

2. La prévention des risques naturels et hydrauliques : la mise en oeuvre des plans de prévention des risques naturels se poursuit

Les AE et les CP inscrits pour 2025 sur l'action 10 « Prévention des risques naturels et hydrauliques », à savoir 37,5 millions d'euros, sont stables depuis 2023.

La prévention des risques naturels et hydrauliques, visant à assurer la protection des personnes et des biens face aux catastrophes naturelles telles les inondations, les mouvements de terrains, les séismes, ou les submersions marines, est mise en oeuvre par les plans de prévention des risques naturels (PPRN), les programmes d'actions de prévention contre les inondations (PAPI), outils de contractualisation entre l'État et les collectivités permettant de promouvoir une gestion des risques d'inondation, ou encore le plan séisme Antilles. Cette politique de prévention revêt un caractère crucial dans un contexte de dérèglement climatique.

Le PPRN, annexé au plan local d'urbanisme ou à la carte communale, a pour objet de maîtriser l'urbanisation dans les zones à risques et de réduire la vulnérabilité des populations et des biens, à travers des mesures d'interdiction ou d'adaptation des constructions nouvelles ou existantes. Il peut concerner un aléa particulier, comme par exemple, le risque inondation, ou plusieurs selon les caractéristiques du territoire.

Concrètement, un plan de prévention des risques délimite les zones concernées par le risque sur le territoire, sur la base d'un aléa de référence, par exemple pour les crues des rivières, la crue centennale, ou si elle est plus élevée, la plus haute crue connue, et définit une réglementation pour chaque zone.

L'objectif visé lors de la mise en place des PPRN conduisait à ce que 12 500 communes soient couvertes par un PPRN approuvé, couvrant les territoires à forts enjeux. Cet objectif a été dépassé depuis 202214(*). À la date du 31 août 2024, 12 556 communes sont couvertes par un PPRN opposable, et 1 906 communes relèvent d'un PPRN prescrit15(*).

Évolution du nombre de communes couvertes
par un PPRN ou assimilés jusqu'au 3 juin 2024

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

D'après les informations communiquées au rapporteur spécial, 67 % des communes couvertes par un PPRN approuvé le sont pour l'aléa inondation et 13 % pour l'aléa retrait-gonflement des argiles.

L'amendement du rapporteur spécial décrit supra permettra d'augmenter les moyens alloués à la prévention des risques naturels, tant pour les particuliers que pour les collectivités. L'évolution du coût de la sinistralité à l'horizon 205016(*) nécessite d'accentuer la politique de prévention, même dans un contexte budgétaire contraint.

3. Certains dispositifs présentent un intérêt limité dans la politique de prévention des risques et peuvent être supprimés

Le programme 181 finance également des politiques dont l'intérêt apparaît plus limité. Ainsi, 6 millions d'euros sont consacrés à la subvention des associations dans le domaine de la santé, de l'environnement et de l'économie circulaire. Certaines des associations financées sont « Women in Europe for a Common Future », « France Nature Environnement », « Humanité et biodiversité ». Ces structures bénéficient d'autres financements.

En outre, l'une des justifications du financement de ces associations est de permettre leur participation aux instances de dialogue mises en place dans le cadre des filières « REP » (responsabilité élargie du protecteur). Or, les filières REP font l'objet de nombreuses critiques, en raison de leur gouvernance et de leur faible efficacité17(*). Un rapport de l'Inspection générale des finances (IGF), de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) et du Conseil général de l'économie (CGE) paru en juin 2024 souligne ainsi que « le pilotage des filières REP par les pouvoirs publics présente des défaillances qui ne peuvent être rectifiées à cadre institutionnel constant »18(*).

Avant d'investir davantage d'argent public dans des mesures de soutien à ce dispositif, il est impératif de mettre en place les réformes nécessaires. Le rapporteur spécial propose donc un amendement de suppression de cette ligne budgétaire.


* 14 À la fin août 2022, 15 077 communes étaient couvertes par un PPRN opposable, et 2 173 communes relevaient d'un PPRN prescrit.

* 15 La diminution du nombre de communes sur le territoire desquelles un PPRN est prescrit depuis le milieu des années 2000 résulte de l'approbation d'un nombre croissant de PPRN.

* 16 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) du 15 mai 2024 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

* 17 Cette problématique est identifiée depuis longtemps. Voir par exemple « Les dysfonctionnements de « la responsabilité élargie du producteur » et des éco-organismes », Jean-Baptiste Bahers, revue Mouvement n° 86.

* 18 « Performance et gouvernance des filières à responsabilité élargie du producteur », IGF, IGEDD, CGE, juin 2024

Partager cette page