- L'ESSENTIEL
- PREMIÈRE PARTIE
DES MOYENS DE NOUVEAU EN HAUSSE,
TOUTEFOIS EN-DEÇÀ DE LA PROGRAMMATION
- I. LES CRÉDITS DEMANDÉS SUR LA
MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRIRORIALE
DE L'ÉTAT » SONT DE NOUVEAU EN HAUSSE POUR LA
TROISIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE
- A. UNE PROGRESSION SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS
DES ADMINISTRATIONS TERRITORIALE ET CENTRALE DU MINISTÈRE DE
L'INTÉRIEUR DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE TRÈS
CONTRAINT
- B. UNE DEMANDE DE CRÉDITS TOUTEFOIS
INFÉRIEURE À LA TRAJECTOIRE FIXÉE PAR LA LOI D'ORIENTATION
ET DE PROGRAMMATION DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR
- C. UNE CONTRACTION DES DÉPENSES
CIBLÉE SUR LE PROGRAMME 232 « VIE
POLITIQUE » À RAISON DE L'ABSENCE DE SCRUTIN NATIONAL
PRÉVU POUR 2025
- 1. Un financement des partis et groupements
politiques maintenu à l'identique
- 2. Des crédits pour l'organisation des
élections en nette baisse, reflet d'une année 2025 a priori
sans scrutin national
- 3. Une activité subséquemment
réduite pour la Commission nationale des comptes de campagne et des
financements politiques
- 1. Un financement des partis et groupements
politiques maintenu à l'identique
- A. UNE PROGRESSION SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS
DES ADMINISTRATIONS TERRITORIALE ET CENTRALE DU MINISTÈRE DE
L'INTÉRIEUR DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE TRÈS
CONTRAINT
- II. UNE REVALORISATION SALUTAIRE DES CRÉDITS
DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE DE L'ÉTAT, ENCORE INADAPTÉS
À LA HAUTEUR DES ENJEUX
- A. UNE AUGMENTATION DE TOUS LES POSTES DE
DÉPENSES DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE DE L'ÉTAT, AVEC UN
EFFORT MARQUÉ À DESTINATION DE SON IMMOBILIER
PARTICULIÈREMENT DÉGRADÉ
- 1. Une hausse globale des crédits du
programme 354 s'inscrivant dans le cadre de la programmation
budgétaire
- 2. Un rehaussement des dépenses
immobilières de l'administration territoriale de l'État cependant
en décalage avec l'ampleur des besoins
- a) Un parc immobilier
hétérogène et peu conforme aux objectifs de transition
énergétique, ayant fait l'objet de mesures de restrictions
budgétaires constantes
- b) Une augmentation des dépenses
immobilières, principalement ciblée sur les
propriétés de l'État, mais encore largement
en-deçà des besoins identifiés
- a) Un parc immobilier
hétérogène et peu conforme aux objectifs de transition
énergétique, ayant fait l'objet de mesures de restrictions
budgétaires constantes
- 1. Une hausse globale des crédits du
programme 354 s'inscrivant dans le cadre de la programmation
budgétaire
- B. L'ANNÉE 2025 MARQUE UNE PAUSE DANS
LE RÉARMEMENT DE L'ÉTAT TERRITORIAL, DE NATURE À
FRAGILISER CERTAINES MISSIONS PRIORITAIRES DES PRÉFECTURES
- 1. Une stabilisation des effectifs en
contrariété avec les objectifs de la LOPMI
- 2. Des difficultés toujours marquées
dans la répartition territoriale des effectifs en fonction des
besoins
- 3. Des services étrangers et de
contrôle de légalité toujours en tension, loin du mirage de
la priorisation de ces missions
- 1. Une stabilisation des effectifs en
contrariété avec les objectifs de la LOPMI
- A. UNE AUGMENTATION DE TOUS LES POSTES DE
DÉPENSES DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE DE L'ÉTAT, AVEC UN
EFFORT MARQUÉ À DESTINATION DE SON IMMOBILIER
PARTICULIÈREMENT DÉGRADÉ
- III. LES DÉPENSES TOUJOURS SOUTENUES DE
L'ADMINISTRATION CENTRALE DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR À
RAISON DU FINANCEMENT D'OPÉRATIONS IMMOBILIÈRES MAJEURES
- A. LE LANCEMENT DE LA CONSTRUCTION DU SITE UNIQUE
DE LA DGSI ET LA LIVRAISON DE L'OPÉRATION
« UNIVERSEINE » EXPLIQUENT LA HAUSSE DES DÉPENSES
IMMOBILIÈRES EN 2025
- B. UNE BAISSE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT
FONDÉE SUR LE TRANSFERT DES DÉPENSES DE PROTECTION FONCTIONNELLE
DE LA POLICE NATIONALE
- C. UN NÉCESSAIRE RENFORCEMENT DU PILOTAGE
DES CRÉDITS ALLOUÉS À LA PRÉVENTION DE LA
DÉLINQUANCE ET LA RADICALISATION, AINSI QU'À LA
VIDÉO-PROTECTION
- 1. Une clarification nécessaire des actions
financées par le biais du fonds interministériel de
prévention de la délinquance à l'occasion de la
création d'une délégation interministérielle
- a) La transformation bienvenue du
secrétariat général du comité
interministériel de prévention de la délinquance et de la
radicalisation en délégation interministérielle, dont les
contours doivent encore être précisés
- b) La transparence de la répartition
territoriale des crédits doit être accrue, de même que les
actions financées
- a) La transformation bienvenue du
secrétariat général du comité
interministériel de prévention de la délinquance et de la
radicalisation en délégation interministérielle, dont les
contours doivent encore être précisés
- 2. Des dépenses de vidéoprotection
de la voie publique en augmentation, mais des paiements toujours en attente
dans les territoires
- 1. Une clarification nécessaire des actions
financées par le biais du fonds interministériel de
prévention de la délinquance à l'occasion de la
création d'une délégation interministérielle
- A. LE LANCEMENT DE LA CONSTRUCTION DU SITE UNIQUE
DE LA DGSI ET LA LIVRAISON DE L'OPÉRATION
« UNIVERSEINE » EXPLIQUENT LA HAUSSE DES DÉPENSES
IMMOBILIÈRES EN 2025
- I. LES CRÉDITS DEMANDÉS SUR LA
MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRIRORIALE
DE L'ÉTAT » SONT DE NOUVEAU EN HAUSSE POUR LA
TROISIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE
- SECONDE PARTIE
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS ET LES POINTS
DE VIGILANCE DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE
- I. UNE CONTRACTUALISATION MASSIVE DES EFFECTIFS
DES SERVICES DÉCONCENTRÉS ET CENTRAUX DU MINISTÈRE DE
L'INTÉRIEUR EN DISSONANCE AVEC LE CARACTÈRE RÉGALIEN DES
MISSIONS ASSUMÉES
- A. UNE CONTRACTUALISATION DIFFUSE QUI CONCERNE
TOUS LES PROGRAMMES DE LA MISSION ET LES OPÉRATEURS
- B. LE RECOURS À DES CONTRACTUELS NE DOIT
PAS ÊTRE LE MODÈLE PRIVILÉGIÉ DÈS LORS QU'IL
EXPOSE LE MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR À UNE PERTE DE
COMPÉTENCES
- 1. La contractualisation peut être
sollicitée de façon ponctuelle mais ne doit pas être un
obstacle à la réinternalisation des compétences, notamment
dans le domaine informatique
- a) Un recours aux contrats fondé pour des
compétences très spécifiques à court terme ou
lié à la structure de la personne publique employeur
- b) Un recours plus problématique à
une contractualisation poussée dans le domaine informatique, dans le
cadre de la montée en puissance numérique du ministère de
l'intérieur
- a) Un recours aux contrats fondé pour des
compétences très spécifiques à court terme ou
lié à la structure de la personne publique employeur
- 2. La contractualisation illustre plus
profondément un manque d'attractivité de la fonction publique,
à laquelle des réponses à la marge ont pour l'instant
été apportées par le ministère de
l'intérieur
- 1. La contractualisation peut être
sollicitée de façon ponctuelle mais ne doit pas être un
obstacle à la réinternalisation des compétences, notamment
dans le domaine informatique
- A. UNE CONTRACTUALISATION DIFFUSE QUI CONCERNE
TOUS LES PROGRAMMES DE LA MISSION ET LES OPÉRATEURS
- II. DES MISSIONS DÉMULTIPLIÉES DE
FRANCE TITRES, QUI NE S'ACCOMPAGNENT POUR L'HEURE PAS DES RESSOURCES
CORRESPONDANTES
- I. UNE CONTRACTUALISATION MASSIVE DES EFFECTIFS
DES SERVICES DÉCONCENTRÉS ET CENTRAUX DU MINISTÈRE DE
L'INTÉRIEUR EN DISSONANCE AVEC LE CARACTÈRE RÉGALIEN DES
MISSIONS ASSUMÉES
- EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LISTE DES DÉPLACEMENTS
- LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 144 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024 |
RAPPORT GÉNÉRAL FAIT au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025, |
Par M. Jean-François HUSSON, Rapporteur général, Sénateur LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES (seconde partie de la loi de
finances) ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET
TERRITORIALE DE L'ÉTAT |
Rapporteure spéciale : Mme Florence BLATRIX CONTAT |
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, MM. Vincent Capo-Canellas, Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean-Pierre Vogel. |
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8 Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025) |
L'ESSENTIEL
La mission « Administration générale et territoriale de l'État » retrace les crédits affectés à l'administration territoriale de l'État, à la vie politique, culturelle et associative et au pilotage des principales politiques du ministère de l'intérieur.
1. LES MOYENS EN HAUSSE DE LA MISSION TÉMOIGNENT DE CHOIX OPÉRÉS EN FAVEUR DES INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS
A. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS POUR 2025 TOUTEFOIS EN-DEÇÀ DE LA TRAJECTOIRE PRÉVUE PAR LA LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR
1. Une augmentation significative et diffuse des crédits de paiement, excepté ceux dédiés à la vie politique
Pour 2025, les crédits demandés sur la mission « Administration générale et territoriale de l'État » (AGTE) s'élèvent à 4,96 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) et 4,70 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), ce qui représente une hausse de 6,52 % en CP et une baisse de 15,84 % en AE par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. À périmètre constant, la hausse en CP est de 4,64 % et la baisse en AE de 17,33 %, soit du même ordre que l'exécution anticipée de l'exercice 2024. L'augmentation des CP concerne les programmes 354 « Administration territoriale de l'État » et 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », qui représentent près de 92 % des crédits de la mission en 2025. Les crédits du programme 232 « Vie politique » baissent quant à eux de 61 % en l'absence de scrutin national prévu pour 2025.
Comparaison du volume de la mission
entre le
projet de loi de finances pour 2025 et l'exercice 2024
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
En revanche, la contraction des AE de l'ordre d'un milliard d'euros révèle que les efforts budgétaires sont concentrés sur les dépenses à venir. Cela traduit ainsi l'absence de nouveau projet immobilier d'ampleur engagé.
Contribution des programmes à la hausse des crédits
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
2. Des crédits demandés toutefois en recul par rapport à la trajectoire pluriannuelle
Pour les dépenses entrant dans le champ de la programmation telle que fixée par la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) du 24 janvier 2023, les prévisions pour 2025 sont en-deçà de la programmation, du fait d'une déviation importante de la trajectoire s'agissant des dépenses hors titre 2 du programme 216. Par ailleurs, cette situation a vocation à perdurer pendant toute la durée de la programmation, alors même que le ministère de l'intérieur avait annoncé de grands projets de numérisation, et accuse un retard important en matière de développement des outils d'intelligence artificielle.
En revanche, le niveau des dépenses de l'administration territoriale de l'État est globalement conforme à la trajectoire de la LOPMI. Il en va de même pour les dépenses de personnel, alors même que les schémas d'emplois des programmes 216 et 354 sont neutres pour 2025.
Comparaison des trajectoires prévisionnelles pour 2025
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et la LOPMI
B. UN EFFORT PARTICULIER À DESTINATION DE L'IMMOBILIER DES PRÉFECTURES ET DE L'ADMINISTRATION CENTRALE DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR
1. La revalorisation des dépenses immobilières de l'administration territoriale de l'État répond à un besoin de rattrapage fort face aux objectifs de transition énergétique
Le projet de loi de finances pour 2025, sans être à la hauteur des besoins, notamment au regard des objectifs internes croissants de performance énergétique, mais aussi au niveau européen, traduit un effort à destination de l'immobilier de l'administration territoriale de l'État.
En particulier, les crédits demandés pour l'investissement de l'État propriétaire, qui représentent près de 76 % de ses dépenses immobilières, s'élèvent pour 2025 à 83,5 millions d'euros en AE et 60,5 millions d'euros en CP, soit une hausse de 33,4 % en AE et de 37,5 % en CP par rapport à 2024. Ces crédits sont destinés à rénover énergétiquement les bâtiments des préfectures et sous-préfectures. Depuis l'entrée dans la programmation, ces dépenses ont augmenté de 71 % entre 2023 et 2025.
Évolution des dépenses immobilières
de l'administration territoriale de l'État de 2020 à 2025
(en millions d'euros, en CP)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Outre ces investissements, la rapporteure spéciale déplore la part grandissante des loyers dans les dépenses immobilières de fonctionnement. En effet, les dépenses de loyers s'élèvent, pour 2025, à 96,8 millions d'euros en AE et 97,6 millions d'euros en CP, soit une augmentation de 19 % en AE et de 7 % en CP par rapport aux loyers constatés en 2023.
2. Des engagements financiers à honorer du fait de la poursuite des projets « Universeine » et de site unique de la direction générale de la sécurité intérieure
Les CP du programme 216 sont en forte augmentation du fait des engagements financiers à honorer pour deux opérations immobilières majeures. Ainsi, les dépenses d'investissement passent de 178,9 millions d'euros en 2024 à 513,4 millions d'euros en 2025. Tout d'abord, 139,4 millions d'euros en CP sont destinés à assurer le paiement du marché global de construction du site unique de la DGSI à Saint-Ouen. Ensuite, 296,4 millions d'euros en CP couvriront 93 % du projet « Universeine », qui a vocation à accueillir plusieurs services de l'administration centrale du ministère de l'intérieur à Saint-Denis sur l'ancien site du village olympique « Paris 2024 ». La rapporteure spéciale s'interroge sur la soutenabilité à moyen terme des restes à payer du programme 216, composés à 65 % de dépenses liées à l'investissement immobilier. Ainsi, au 31 décembre 2023, le solde des engagements non couverts par des paiements est estimé à 1 175,6 millions d'euros.
II. L'ANNÉE 2025 MARQUE UNE PAUSE DANS LE « RÉARMEMENT » DE L'ÉTAT TERRITORIAL, DE NATURE À FRAGILISER L'EXERCICE DE CERTAINES MISSIONS ESSENTIELLES DES PRÉFECTURES
A. UNE STABILISATION DES EFFECTIFS EN CONTRARIÉTÉ AVEC LES OBJECTIFS DE LA LOPMI
1. Le réarmement de l'État territorial n'aura pas lieu en 2025
Alors que 45 créations de poste devaient être opérées en 2025 conformément aux objectifs fixés par la LOPMI, et 350 emplois au global de 2023 à 2025, le schéma d'emploi de - 1 ETP pour 2025 ne permettra aucune création d'emploi. Par ailleurs, la baisse du plafond d'emploi de - 182 ETP acte le non-recrutement de 54 experts de haut niveau, et 21 agents dédiés au renforcement des plateformes régionales chargées des ressources humaines, qui avait été décidé en 2024 hors plafond de la LOPMI, et pourtant utiles aux préfectures pour combler des manques de compétence, notamment en matière de suivi des travaux immobiliers.
2. Plusieurs missions, pourtant jugées prioritaires, mises à mal au sein des préfectures
Alors qu'un plan de priorisation des missions des préfectures a été lancé de 2022 à 2025, celle-ci n'a pas été opérée, hors fléchage à la marge de postes. Ainsi, le plan de soutien en vacataires, mis en oeuvre de 2022 à 2024 à destination des services « étrangers », sera prorogé en 2025, sans pour autant que le niveau des renforts soit encore défini à ce stade. Par ailleurs, les gains attendus par l'administration numérique des étrangers en France (ANEF) sont encore peu visibles eu égard à son développement incomplet, qui ne couvre pas tous les titres de séjour. Cette situation rend difficile l'instruction des dossiers dans de bonnes conditions. S'agissant du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales, les effectifs dédiés sont en baisse (2 109 ETPT en 2025 contre 2 132,52 ETPT en 2024).
B. L'EFFICIENCE DE LA DÉLIVRANCE DES TITRES SÉCURISÉS CONFRONTÉE À LA TRAJECTOIRE FINANCIÈRE PEU SOUTENABLE DE FRANCE TITRES
L'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), devenue France Titres, joue un rôle d'interface entre différents acteurs dans la chaîne de délivrance de titres. Alors que la demande de titre se maintient à un niveau toujours très élevé, et que France Titres attrait de plus en plus de missions, ses ressources peinent à être suffisantes depuis 2023 au regard de la progression de ses dépenses. Sa soutenabilité budgétaire doit donc être garantie pour, d'une part, assurer le développement de France identité, alors que seulement 1,2 million d'identités numériques ont été créées pour l'instant, et, d'autre part, maintenir des délais moyens de délivrance des titres raisonnables. Ces derniers sont en baisse sensible en 2024, avec un délai moyen de l'ordre de 13 jours pour les cartes d'identité et de 20 jours pour les passeports, alors que ces délais moyens étaient respectivement de 34 et 26 jours en 2023.
III. LE PILOTAGE DE PLUSIEURS DÉPENSES DE L'ADMINISTRATION CENTRALE DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR DOIT ÊTRE RENFORCÉ
A. UNE BAISSE DES DÉPENSES DE PROTECTION FONCTIONNELLE QUI MASQUE TOUTEFOIS DES DÉPENSES CONTENTIEUSES TRÈS DYNAMIQUES ET STRUCTURELLEMENT SOUS-ÉVALUÉES
La diminution des dépenses de fonctionnement du programme 216 s'explique par une moindre demande de crédits pour les dépenses contentieuses et de protection fonctionnelle, gérées par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ). La baisse de 18,2 millions d'euros par rapport à 2024 est la conséquence mécanique d'un transfert des crédits relatifs à la protection fonctionnelle des agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale à la mission « Sécurité ». Hors transfert, la budgétisation initiale de 73,5 millions d'euros est déjà jugée insuffisante au regard notamment de la forte dynamique des dépenses liées au contentieux des étrangers.
Le redéploiement systématique de crédits à l'échelle du programme n'étant pas satisfaisant, la rapporteure spéciale estime nécessaire la remise à niveau des dépenses contentieuses du ministère de l'intérieur.
Écarts entre les crédits ouverts et
consommés
pour les dépenses contentieuses de
2019 à 2025
(en millions d'euros)
* La consommation affichée pour 2024 est celle des crédits disponibles au 4 novembre 2024
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et les réponses de la DLPAJ
B. LES CRÉDITS ALLOUÉS À LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE, À LA RADICALISATION ET À LA VIDÉO-PROTECTION EN RECHERCHE DE LISIBILITÉ
Le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR), qui a vocation à devenir une délégation interministérielle en 2025, coordonne l'utilisation des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), abondé à hauteur de 62,41 millions dans le présent projet de loi de finances. Or, il ressort que, d'une part, les critères de répartition territoriale des crédits sont assez peu transparents, et d'autre part, que la fongibilité des enveloppes des programmes financés alimente un problème de lisibilité des actions financées.
Les dépenses de vidéoprotection de la voie publique, gérées depuis le1er janvier 2024 par la direction des entreprises et des partenariats de sécurité et des armes (DEPSA), sont en hausse de 7 millions d'euros en 2025. Pour autant, il n'existe pour l'heure pas de revue des différents engagements gérés au niveau des préfectures, avec des paiements en attente constatés.
Réunie le mercredi 20 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.
Au 10 octobre 2024, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 68,4 % des réponses portant sur la mission « Administration générale et territoriale de l'État » étaient parvenues à la rapporteure spéciale.
PREMIÈRE PARTIE
DES MOYENS DE NOUVEAU EN HAUSSE,
TOUTEFOIS
EN-DEÇÀ DE LA PROGRAMMATION
La mission « Administration générale et territoriale de l'État » retrace les crédits affectés à l'action territoriale de l'État, à la vie politique, culturelle et associative et au pilotage des principales politiques du ministère de l'intérieur.
Elle comporte trois programmes :
- le programme 354 « Administration territoriale de l'État », qui porte les moyens du réseau préfectoral mais également ceux des services placés sous l'autorité des préfets de région et des directions départementales interministérielles, hors les personnels de ces directions, qui relèvent des ministères sectoriels. En 2025, il devrait être doté de 2,75 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,66 milliards d'euros en crédits de paiement, soit près de 54 % des dotations totales de la mission ;
- le programme 232 « Vie politique », qui finance les expressions de la vie politique du pays, dont les élections, les partis politiques et la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Depuis 2022, ce programme ne finance plus les cultes, les crédits étant portés par le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ». Il devrait être doté, en 2025 de 98,34 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 100,26 millions d'euros en crédits de paiement, soit 2 % des dotations totales de la mission ;
- le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », qui constitue un programme « réservoir » et finance les moyens généraux du ministère de l'intérieur ainsi que le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) et le fonds associé, le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Il devrait être doté, en 2025, de 1,86 milliards d'euros en AE et 2,19 milliards d'euros en crédits de paiement, soit 44 % des dotations totales de la mission.
I. LES CRÉDITS DEMANDÉS SUR LA MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRIRORIALE DE L'ÉTAT » SONT DE NOUVEAU EN HAUSSE POUR LA TROISIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE
A. UNE PROGRESSION SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS DES ADMINISTRATIONS TERRITORIALE ET CENTRALE DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE TRÈS CONTRAINT
1. Une augmentation des crédits de paiement qui concerne à la fois l'État territorial et les services centraux du ministère de l'intérieur
Pour 2025, les crédits demandés sur la mission « Administration générale et territoriale de l'État » (AGTE) s'élèvent à 4,96 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) et 4,70 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), ce qui représente une hausse de 6,52 % en CP et une baisse de 15,84 % en AE par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Corrigée de l'inflation, la hausse en CP est de l'ordre de 4,64 % et la baisse en AE de 17,33 %.
Évolution des crédits de la
mission
« Administration générale
et territoriale de l'État »
(en millions d'euros et en pourcentage)
Exécution 2023 |
LFI 2024 |
PLF 2025 courant |
Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (croissance en valeur) |
PLF 2025 constant |
Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (croissance en volume) |
Évolution PLF 2025 / LFI 2024 ( % en volume) |
|||
354 - Administration territoriale de l'État |
AE |
2 668,3 |
2 633,24 |
2 746,23 |
+ 4,29 % |
2 697,67 |
+ 64,43 |
+ 2,45 % |
|
CP |
2 607,6 |
2 583,17 |
2 665,65 |
+ 3,19 % |
2 618,52 |
+ 35,35 |
+ 1,37 % |
||
232 - Vie politique |
AE |
146,5 |
257,73 |
98,34 |
- 61,84 % |
96,60 |
- 161,13 |
- 62,52 % |
|
CP |
159,3 |
257,62 |
100,26 |
- 61,08 % |
98,49 |
- 159,13 |
- 61,77 % |
||
216 - Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur |
AE |
1 862,5 |
2 704,63 |
1 864,69 |
- 31,06 % |
1 831,72 |
- 872,91 |
- 32,27 % |
|
CP |
1 845,8 |
1 816,33 |
2 195,03 |
+ 20,85 % |
2 156,22 |
+ 339,89 |
+ 18,71 % |
||
Total |
AE |
4 677,4 |
5 595,6 |
4 709,25 |
- 15,84 % |
4 625,98 |
- 969,65 |
- 17,33 % |
|
CP |
4 612,8 |
4 657,12 |
4 960,94 |
+ 6,52 % |
4 873,22 |
+ 216,10 |
+ 4,64 % |
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Il ressort donc que, dans le cadre budgétaire contraint, les efforts ont été portés sur les AE et non sur les CP. En effet, à l'échelle de la mission, les AE diminuent de l'ordre d'un milliard d'euros, notamment en l'absence de nouveau projet immobilier d'ampleur engagé. Il convient toutefois de relever que l'administration territoriale de l'État est épargnée de cette baisse globale puisque ses dépenses d'investissement sont en hausse de 23,3 millions d'euros en AE, soit + 26,46 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
L'augmentation des crédits de paiement de la mission concerne les principaux programmes, à savoir les programmes 354 « Administration territoriale de l'État » et 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », qui représentent à eux deux près de 98 % des crédits de la mission AGTE pour 2025.
La hausse des crédits de ces deux programmes concerne principalement les dépenses d'investissement engagées aux cours des précédents exercices, et dans une moindre mesure, les dépenses de personnel. En effet, s'agissant des dépenses de titre 2, celles-ci sont en hausse en moyenne de 2,4 % pour l'administration territoriale de l'État et centrale du ministère de l'intérieur à raison des effets de la masse salariale.
Les dépenses d'investissement, notamment dans les domaines immobiliers et informatiques, sont en revanche bien plus dynamiques en 2025, avec une hausse des CP de 25 % pour le programme 354 « Administration territoriale de l'État » et de plus de 112 % pour le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ».
Par exemple, selon le projet annuel de performances de la mission pour 2025, les dépenses numériques sont en hausse de 3 % à l'échelle de la mission « pour assurer le maintien en condition opérationnelle des installations et le renouvellement du matériel, continuer à faire converger les systèmes d'information ou encore proposer des services numériques innovants aux usagers comme aux agents de l'État ». La direction de la transformation numérique (DTNUM) a notamment mentionné le projet de passage à Windows 11 en 2025, estimé à 10 millions d'euros pour le ministère de l'intérieur, en comprenant également le renouvellement du matériel informatique des agents induit par ce changement de version du système d'exploitation Windows, mais aussi la mise en place de la messagerie sécurisée Tchap, ou encore le développement du cloud souverain.
Contribution des programmes de la mission AGTE
à la hausse des crédits demandés en 2025
(en millions d'euros et en CP)
Programme 354 : Administration territoriale de l'État
Programme 232 : Vie politique
Programme 216 : Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
2. Une augmentation faciale des crédits qui masque en réalité un effet de rattrapage
Pour autant, la hausse faciale des crédits ne saurait signifier que le budget pour 2025 de la mission AGTE est un budget fastueux. L'augmentation des crédits traduit une volonté de rattrapage, et ce, sur au moins deux postes de dépenses.
En premier lieu, l'année 2025 se caractérise par une stabilisation des effectifs de la mission, et notamment ceux des préfectures et sous-préfectures, après 143 emplois créés en 2023 et 20241(*) au sein de l'administration territoriale de l'État. Toutefois, d'une part, ces créations de postes n'ont représenté finalement qu'une hausse de 0,5 % des emplois rémunérés par le programme 354 « Administration territoriale de l'État ». D'autre part, ce renforcement des effectifs des préfectures doit être considéré à l'aune de la réduction drastique et continue des effectifs jusqu'en 2021. En effet, une perte de 11 000 ETPT a pu être observée sur une dizaine d'années, soit 14 % de l'effectif initial2(*). Ainsi, la Cour des comptes, dans son rapport sur les effectifs de l'État territorial considère que les suppressions de postes de ces dernières années « n'ont pas été réalistes »3(*) au sein des préfectures.
Par suite, la rapporteur spéciale estime que la stabilisation des effectifs, imposée par le cadre budgétaire contraint, est donc le minimum requis pour assurer les missions essentielles des préfectures, déjà bien loin des promesses de réarmement de l'État territorial.
En second lieu, si les dépenses immobilières sont en nette hausse, il convient toutefois de relever que les objectifs de réduction de la consommation énergétique des bâtiments, fixés par le décret n° 2019-771 du 23 juillet 20194(*) relatif aux obligations d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire, dit « décret tertiaire »5(*), sont loin d'être atteints6(*). Rien que pour le périmètre de l'administration territoriale de l'État, le ministère de l'intérieur estime le besoin d'investissement à 226,9 millions d'euros d'ici 2027.
En outre, cette hausse des crédits s'inscrit, à partir de 2023, dans le cadre de la trajectoire financière votée par le Parlement dans la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI).
B. UNE DEMANDE DE CRÉDITS TOUTEFOIS INFÉRIEURE À LA TRAJECTOIRE FIXÉE PAR LA LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR
1. Une trajectoire pour 2025 portée par le programme 354 et les dépenses de personnel
Au niveau agrégé de la mission AGTE7(*), hors programme 232 « Vie politique » qui ne fait pas l'objet d'une programmation budgétaire au titre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur du 24 janvier 2023, les crédits demandés pour 2025 sont en deçà des montants prévus par la programmation, de - 5,4 % en AE et de - 9,6 % en CP.
Crédits de la mission AGTE8(*) pour 2025
dans le projet de loi de finances et dans la LOPMI
(en millions d'euros)
PLF 2025 |
LOPMI 2025 |
|||
AE |
CP |
AE |
CP |
|
354 - Administration territoriale de l'État |
2 746 |
2 665 |
||
354 - Administration territoriale de l'État, hors contribution au CAS Pensions |
2 171 |
2 090 |
2 103 |
2 050 |
216 - Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur |
1 864 |
2 195 |
||
216 - Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur, hors contribution au CAS Pensions |
1 602 |
1 933 |
1 885 |
2 399 |
Mission « Administration générale et territoriale de l'État » (hors CAS Pensions et programme 232 - Vie politique) |
3 773 |
4 023 |
3 988 |
4 449 |
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI)
Au-delà de cette tendance globale observée à l'échelle de la mission, il apparaît que les crédits demandés pour l'administration territoriale de l'État sont même supérieurs de + 2 % par rapport à la programmation budgétaire pour 2025. Ce dynamisme des crédits du programme 354 « Administration territoriale de l'État » dans le projet de loi de finances pour 2025 repose à la fois sur les dépenses de personnel et sur les dépenses de fonctionnement et d'investissement.
Comparaison des trajectoires prévisionnelles de la mission AGTE9(*) pour 2025
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI)
Les dépenses hors titre 2 de l'administration territoriale de l'État s'élèvent à 661,5 millions d'euros en AE et 580,9 millions d'euros en CP dans le projet de loi de finances pour 2025, contre 627 millions d'euros en AE et 574 millions d'euros en CP dans la LOPMI pour l'année 2025, ce qui représente un différentiel de + 5,5 % en AE et + 1,2 % en CP par rapport à la trajectoire financière des crédits hors titre 2 du programme 354 « Administration territoriale de l'État » prévue par la LOPMI.
S'agissant des dépenses de personnel, elles portent la trajectoire fixée dans la LOPMI pour 2025, avec des évolutions de dépenses globalement conformes, voire même légèrement supérieures, pour les deux programmes de la mission AGTE qui entrent dans le champ de la programmation budgétaire. Ainsi, elles sont supérieures, hors CAS Pensions, de + 2,3 % à la trajectoire financière de la LOPMI pour le programme 354 « Administration territoriale de l'État ». En effet, alors qu'elles devaient s'établir à 1 476 millions d'euros pour 2025 conformément à la trajectoire de la LOPMI, elles sont de l'ordre de 1 509,9 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2025, hors CAS Pensions. Ce constat vaut aussi pour les dépenses de personnel du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » dès lors qu'elles sont supérieures de 1,1 % aux prévisions de la LOPMI.
Comparaison des trajectoires prévisionnelles
des dépenses de personnel hors CAS Pensions pour 2025
(en millions d'euros, AE=CP)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI)
Toutefois, un amendement du Gouvernement, déposé à l'Assemblée nationale dans le cadre de la mise en oeuvre de mesures visant à atteindre 5 milliards d'euros d'économies supplémentaires, a annulé les crédits de titre 2 de la mission AGTE à hauteur de 8,7 millions d'euros, portant dès lors les crédits à 2 965,2 millions d'euros pour les dépenses de personnel. Cette minoration de l'ordre de 0,3 % des dépenses personnelles totales sont liées aux mesures transversales prises en matière de masse salariale, à savoir les indemnités journalières et l'ajout de deux jours de carence.
2. Une déviation importante de la trajectoire s'agissant des dépenses hors titre 2 de l'administration centrale du ministère de l'intérieur
Il en va différemment pour les dépenses hors titre 2 du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », dont la trajectoire n'est pas conforme à la LOPMI, en AE, comme en CP. Alors que ces dépenses devaient s'élever à 1 273 millions d'euros en AE et 1 787 millions d'euros en CP pour 2025 dans la LOPMI, les crédits demandés pour les dépenses hors titre 2 s'élèvent seulement à 984 millions d'euros en AE et 1 314 millions d'euros en CP, soit des montants moindres, respectivement de - 22,7 % en AE et - 26,5 % en CP par rapport à la trajectoire votée par le Parlement dans la LOPMI.
Comparaison des trajectoires
prévisionnelles des dépenses
hors titre 2 du
programme 216 de 2025 à 2027
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI)
Même si les crédits augmentent, la rapporteure spéciale déplore cette déviation importante par rapport à la trajectoire financière votée par le Parlement pour 2025, d'autant que cette situation a vocation à perdurer pour toute la durée de la programmation. En effet, selon les données prévisionnelles indicatives figurant dans le projet annuel de performances de la mission pour 2025, les dépenses hors titre 2 du programme 216 seraient de l'ordre de 1 424,6 millions d'euros en CP pour 2026 et 1 516,7 millions d'euros en CP pour 2027, alors que la LOPMI prévoyait 1 876 millions d'euros en CP en 2026 et 2 148 millions d'euros en CP en 2027.
C. UNE CONTRACTION DES DÉPENSES CIBLÉE SUR LE PROGRAMME 232 « VIE POLITIQUE » À RAISON DE L'ABSENCE DE SCRUTIN NATIONAL PRÉVU POUR 2025
Le programme 232 « Vie politique » regroupe les crédits destinés à l'aide publique aux partis politiques, à l'organisation et au déroulement des élections, et enfin à la Commission nationale des comptes de campagne des financements politiques (CNCCFP), en charge du contrôle du financement des campagnes électorales et activités politiques.
Eu égard à leur sensibilité accrue au calendrier électoral, qui détermine le nombre de scrutins à organiser, et de fait, le niveau d'indemnités électorales à verser ainsi que le volume d'activité de la CNCCFP, les crédits de ce programme sont donc logiquement en baisse pour 2025, de plus 157 millions d'euros, soit - 61 % en AE comme en CP, à raison de l'absence de scrutin national.
1. Un financement des partis et groupements politiques maintenu à l'identique
L'article 8 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique dispose que le montant des financements alloués aux partis et groupement politiques se décomposent en deux fractions, avec, d'une part, une fraction destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats aux élections à l'Assemblée nationale10(*), et, d'autre part, une fraction spécifiquement destinée au financement des partis et groupements aux bénéficiaires de la première fraction représentés au Parlement.
En 2025, le montant de cette aide publique, stable pour la douzième année consécutive, s'élève à 68,7 millions d'euros.
La CNCCFP indique que les financements sont attraits par les plus gros partis politiques. En effet, sur les 30 partis bénéficiaires de l'aide publique au titre de l'exercice comptable 2022, les trois bénéficiaires les plus importants ont perçu presque 40 millions d'euros, et les dix premiers près de 64 millions d'euros, soit 96 % du montant total alloué11(*). Toutefois, la CNCCFP relève qu'une « part non négligeable des partis bénéficiaires de l'aide publique directe reverse chaque année tout ou partie de l'aide ainsi perçue à d'autres partis politiques exclus du mécanisme de l'attribution de l'aide publique ». Ainsi, en 2022, la moitié des partis politiques bénéficiaires ont reversé une partie de leur aide, pour un montant de l'ordre de 8 millions d'euros, abondant ainsi le budget de 57 partis politiques non éligibles à l'aide publique directe.
Pour l'année 2024, force est de constater que la même tendance de concentration de cette aide publique peut être observée.
Répartition de l'aide publique aux partis politiques pour 202412(*)
(en pourcentage)
Source : Rapport d'activité pour 2023 de la Commission nationale des comptes de campagne des financements politiques, juin 2024
2. Des crédits pour l'organisation des élections en nette baisse, reflet d'une année 2025 a priori sans scrutin national
Le montant des crédits portés par l'action 02 « Organisation des élections » du programme 232 étant corrélé au calendrier électoral, ils sont en baisse de - 87,2 % en CP par rapport à 2024, à raison de l'absence, pour l'heure, de scrutin national pour 2025, passant ainsi de 180,2 millions d'euros en 2024 à 23,08 millions d'euros pour 2025.
Ces crédits avaient connu une hausse de plus de 160 millions d'euros par rapport à 2023 dans la loi de finances pour 2024, au regard de l'organisation des élections européennes. Selon les éléments transmis à la rapporteure spéciale dans les réponses au questionnaire budgétaire, le coût de ces élections est estimé à 162,15 millions d'euros.
Eu égard à la dissolution de l'Assemblée nationale et de la tenue des élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet dernier, les crédits ont dû être revalorisés en cours d'année. Dans un premier temps, de juin à septembre, la trésorerie a été mobilisée afin de régler les dépenses urgentes. À partir d'octobre dernier, afin de faire face aux dépenses obligatoires jusqu'en novembre, telles que les indemnités électorales versées aux metteurs sous pli, le remboursement d'une partie des comptes de campagne des candidats et le paiement des frais d'assemblée électorales engagés par les communes, le programme 232 a été abondé par les programmes 552 « Dotations pour dépenses accidentelles et imprévisibles » et 551 « Provisions relatives aux rémunérations publiques » de la mission « Crédits non répartis ».
En outre, une partie des crédits sera reporté sur l'exercice 2025, pour un montant de l'ordre de 31,71 millions d'euros en vue du remboursement des comptes de campagne et de campagne audiovisuelle. L'article 51 du projet de loi de finances prévoit d'ailleurs une dérogation au plafond de 3 % de report des crédits initiaux prévu à l'article 15 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF)13(*) pour les crédits afférents au remboursement des dépenses de campagne des candidats aux élections législatives de 2024.
Dans le cadre des mouvements de gestion réalisés au cours de l'exercice 2024, le coût des élections législatives anticipées de 2024 est estimé à 171,5 millions d'euros, soit 7 millions de plus que les élections législatives de 2022 selon les réponses au questionnaire budgétaire.
Enfin, 1,75 million d'euros a été budgété au titre de 2024 pour le renouvellement général des membres du Congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, dont le report, au plus tard au 30 novembre 2025, a été voté par le Sénat14(*).
Pour 2025, les crédits s'élèvent uniquement à 23,08 millions d'euros et ont vocation à financer les différentes élections partielles qui pourraient se tenir en cours d'année15(*), les dépenses de matériel électoral, ainsi que le développement d'applications informatiques de la sphère électorale.
3. Une activité subséquemment réduite pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques
a) Une autorité administrative indépendante exerçant une double mission de contrôle
La Commission nationale des comptes de campagne des financements politiques (CNCCFP), autorité administrative indépendante16(*) créée par la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques17(*), exerce une double mission. D'une part, elle contrôle les comptes de campagne des candidats à toutes les élections et consultations politiques, à l'exception des circonscriptions municipales de moins de 9 000 habitants. Dans le cadre de l'exercice de cette mission, elle peut approuver ou, après une procédure contradictoire, réformer ou rejeter les comptes de campagne et arrêter le montant du remboursement forfaitaire des dépenses électorales des candidats. D'autre part, elle constate le respect de leurs obligations comptables par les partis et groupements politiques. En cas de manquement aux obligations comptables, la CNCCFP peut priver un parti ou groupement politique de son aide publique directe prévue par la loi du 11 mars 1988, pour une durée maximale de trois ans, et de la réduction d'impôts prévue pour les dons et cotisations consentie à son profit, à compter de l'année suivante.
Par ailleurs, l'activité de la CNCCFP pourrait s'accroître dès 2025, dans la mesure où elle sera désormais en charge de l'instruction des demandes de remboursement par l'État des dépenses engagées par tout candidat pour sa sécurité, instauré par la loi n° 2024-247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux18(*), quels que soient le résultat électoral et la taille de la collectivité. La commission des lois du Sénat a souhaité confier cette mission de contrôle des dépenses engagées à la CNCCFP, « seul organisme aujourd'hui en mesure de traiter la masse des demandes de remboursement et d'analyser l'éligibilité au regard de critères posés par la loi et par voie réglementaire de dépenses souvent disparates et évolutives d'une élection à une autre »19(*).
Le nouveau contrôle des dépenses des candidats en situation de menace avérée
La loi n° 2024-247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux instaure un nouveau régime de protection des candidats aux élections locales et nationales : : d'une part, il élargit le bénéfice de la protection fonctionnelle aux candidats ayant déposé leur candidature, pendant toute la durée de la campagne électorale et, d'autre part, ouvre également le droit à une prise en charge par l'État, des dépenses engagées par tout candidat pour sa sécurité.
La prise en charge par l'État des dépenses du candidat pour assurer sa protection est soumise à la double condition que la prestation de sécurité ne soit pas exercée par les forces de l'ordre et qu'il existe une menace avérée envers un candidat.
La caractérisation de la menace avérée relève du représentant de l'État dans le département, à partir d'un référentiel national déterminant les différents niveaux de risque, qui doivent être fixés par décret en Conseil d'État, encore en cours d'élaboration à la date du présent rapport.
Une fois la menace caractérisée, les candidats pourront bénéficier d'une prise en charge de leurs dépenses de sécurité pendant les six mois qui précèdent l'élection et jusqu'au tour de l'élection auquel ils participent. Les dépenses éligibles comprennent la surveillance des biens et des personnes, par des moyens humains ou électroniques, le gardiennage des permanences électorales et la protection physique des candidats. Seuls les frais directement liés à la sécurité pourront être remboursés.
Afin d'obtenir le remboursement de leurs dépenses, les candidats devront soumettre à la CNCCFP un état détaillé des dépenses de sécurité engagées, accompagné de justificatifs tels que des devis ou des factures. La Commission procèdera ensuite à la vérification des demandes et pourra, le cas échéant, après une procédure contradictoire, approuver, réformer ou rejeter les remboursements sollicités.
Cette nouvelle procédure a vocation à entrer en vigueur en mars 2025, et dépendra de l'adoption du décret en Conseil d'État, qui doit définir, au-delà des différents degrés de menace, les plafonds de remboursement des dépenses, et préciser les modalités de transmission des informations entre le préfet et la CNCCFP. Si l'augmentation des crédits de la CNCCFP associée à cette nouvelle mission demeure encore incertaine, des renforts d'agents temporaires en cas de surcroît d'activité sont tout de même envisagés, de même que le développement de dispositifs informatiques nécessaires à la collecte et au traitement des données, en lien avec les préfectures. En effet, selon les informations transmises par la CNCCFP, une partie des crédits hors titre 2 pour 2025 servira à financer la création d'une nouvelle plateforme dématérialisée.
Source : Commission nationale des comptes de campagne des financements politiques, d'après les éléments écrits transmis à la rapporteure spéciale
Pour l'exercice de ses missions, la CNCCFP s'appuie sur un secrétariat général, composé de trois services (service du contrôle et des affaires juridiques, service de l'administration générale et service des systèmes d'information et de la sécurité), et d'un pôle communication et relations publiques, dont les effectifs ont été progressivement renforcés et qui peuvent varier au regard du caractère cyclique de l'activité de cette autorité administrative.
b) Une légère diminution des dépenses de personnel illustrant le fonctionnement cyclique de la Commission
L'absence d'échéance électorale prévue pour 2025 explique la diminution des crédits de la CNCCFP de - 2,4 %, passant de 8,7 millions d'euros en 2024 à 8,5 millions d'euros en 2025.
Évolution des crédits de paiement de la CNCCFP
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
La baisse de 200 000 euros des crédits se concentre sur les dépenses de personnel, dont une partie est conjoncturelle car intrinsèquement liée au calendrier électoral. Dans ce contexte, le plafond d'emplois pour 2025 est de 55 ETPT, soit - 1 ETPT par rapport à 2024.
En effet, l'activité de la commission étant à la fois permanente (contrôle de la comptabilité des partis) et cyclique (approbation des comptes de campagne), ses ressources humaines sont constituées d'un socle d'agents permanents affectés auprès du secrétariat général (47 ETPT) renforcé, en période de contrôle d'élections, par des recrutements temporaires. Ainsi, en 2024, dans le cadre du contrôle des élections européennes du 9 juin 2024, dont l'instruction a été entièrement dématérialisée, la CNCCFP a recruté trois renforts temporaires supplémentaires de catégorie A. De plus, pour contrôler les comptes de campagnes des élections législatives anticipées de 2024, pour lesquels l'instruction se déroule sous format papier, la CNCCFP a fait appel à 16 agents temporaires pour assurer les missions de contrôle, de logistique et d'anonymisation des données induites par la tenue des élections.
La CNCCFP a indiqué à la rapporteure spéciale que ces recrutements ont pu être effectués sous le plafond d'emplois de 55 ETPT prévu en loi de finances initiale pour 2024, suite au départ non prévu d'agents début 2024 ayant entraîné des vacances de postes. La CNCCFP a également précisé que « le surcoût généré par le recrutement de ces renforts temporaires est estimé à 177 000 euros en 2024 et 88 500 euros en 2025 et seront financés sous enveloppe »20(*). À ces dépenses s'ajoutent aussi la rémunération des vacations des 122 rapporteurs21(*) pour assurer le contrôle des comptes de campagne22(*), pour un montant global de 450 000 euros, répartis sur les exercices 2024 et 2025. Enfin, 150 000 euros de dépenses hors dépenses de personnel sont estimées, afin de financer l'achat de matériels informatiques pour les renforts temporaires et les frais postaux.
S'agissant des dépenses hors titre 2, celles-ci s'élèvent à 3,4 millions d'euros au global23(*) en crédits de paiement et sont stables par rapport à 2024. La CNCCFP poursuit en 2025 le développement de deux grands projets d'investissement informatiques : le projet de plateforme « Fin'Pol », outil de dématérialisation de tous les comptes de campagne et des partis politique, et la modernisation de l'infrastructure informatique, en cours de finalisation. Les autorisations d'engagement sont quant à elles en légère augmentation de 1,1 % à raison des dépenses prévues pour ces projets.
II. UNE REVALORISATION SALUTAIRE DES CRÉDITS DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE DE L'ÉTAT, ENCORE INADAPTÉS À LA HAUTEUR DES ENJEUX
A. UNE AUGMENTATION DE TOUS LES POSTES DE DÉPENSES DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE DE L'ÉTAT, AVEC UN EFFORT MARQUÉ À DESTINATION DE SON IMMOBILIER PARTICULIÈREMENT DÉGRADÉ
1. Une hausse globale des crédits du programme 354 s'inscrivant dans le cadre de la programmation budgétaire
Le présent projet de loi de finances prévoit de porter les crédits du programme 354 « Administration territoriale de l'État » à 2 665,65 millions d'euros en AE et 2 746,23 millions d'euros en CP, ce qui représente une hausse de + 4,3 % en AE et + 3,1 % en CP à euros courants, et de + 2,4 % en AE et + 1,4 % en CP à euros constants.
La hausse de tous les postes de dépenses de ce programme s'inscrit dans le cadre de la programmation pluriannuelle de la LOPMI, avec même une augmentation des crédits hors titre 2 légèrement supérieure à la programmation24(*).
Tout d'abord, les dépenses de personnels sont en hausse de 51,4 millions d'euros par rapport à 2024 dans le projet de loi de finances initiale pour 2025, ce qui représente une augmentation de + 2,5 %. Cette dernière s'explique par le poids de la masse salariale, et par l'évolution des effectifs.
Ensuite, en ce qui concerne les dépenses hors titre 2, elles évoluent de 61,9 millions d'euros en AE par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, du fait principalement du renouvellement des marchés d'électricité et de gaz, dépenses qui font l'objet d'un engagement pour deux ans, et de 31,3 millions d'euros en CP, à raison de la revalorisation des dépenses immobilières et des crédits alloués au numérique. Les dépenses numériques s'élèvent à 48 millions d'euros au titre du projet de loi de finances pour 2025, soit une hausse de 3 % par rapport à 2024, afin d'assurer le maintien en condition opérationnelle des installations et le renouvellement du matériel informatique, notamment induit par le projet de migration des systèmes d'exploitation vers Windows 11.
Seuls les crédits dits de fonctionnement courant, relatifs notamment aux dépenses liées au parc automobile, stagnent par rapport à 2024.
Évolution des crédits par action du programme 354
|
|
Exécution 2023 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2025/2024 |
Évolution en volume |
Coordination de la sécurité des personnes et des biens [01] |
AE |
183,3 |
187,8 |
198,6 |
5,7 % |
+ 10,8 |
CP |
183,3 |
187,8 |
198,6 |
5,7 % |
+ 10,8 |
|
Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres [02] |
AE |
501,4 |
461,4 |
474,2 |
2,7 % |
+ 12,8 |
CP |
501,4 |
461,4 |
474,2 |
2,7 % |
+ 12,8 |
|
Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales [03] |
AE |
140,4 |
143,3 |
146,8 |
2,4 % |
+ 3,5 |
CP |
140,4 |
143,3 |
146,8 |
2,4 % |
+ 3,5 |
|
Pilotage territorial des politiques gouvernementales [04] |
AE |
776,1 |
794,2 |
806,2 |
1,5 % |
+ 12 |
CP |
776,1 |
794,2 |
806,2 |
1,5 % |
+ 12 |
|
Fonctionnement courant de l'administration territoriale [05] |
AE |
696,9 |
692,7 |
695,4 |
0,4 % |
+ 2,7 |
CP |
669,1 |
683,7 |
684,8 |
0,2 % |
+ 1,1 |
|
Dépenses immobilières de l'administration territoriale [06] |
AE |
370,3 |
354,5 |
424,9 |
19,9 % |
+ 70,4 |
CP |
337,3 |
313,3 |
354,9 |
13,3 % |
+ 41,6 |
|
Total du programme 354 |
AE |
2 668,3 |
2 633,2 |
2 746,3 |
4,3 % |
+ 113,1 |
CP |
2 607,6 |
2 583,2 |
2 665,6 |
3,1 % |
+ 82,4 |
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Dans ce contexte, toutes les actions du programme 354 sont en hausse, et en particulier l'action 06 afférente aux dépenses immobilières de l'administration territoriale de l'État.
2. Un rehaussement des dépenses immobilières de l'administration territoriale de l'État cependant en décalage avec l'ampleur des besoins
a) Un parc immobilier hétérogène et peu conforme aux objectifs de transition énergétique, ayant fait l'objet de mesures de restrictions budgétaires constantes
Le patrimoine de l'administration territoriale de l'État (ATE) comporte 2 871 bâtiments hébergeant près de 75 000 agents pour une surface utile brute (SUB) de plus de 3 millions de m², soit 3 % de la SUB de l'ensemble des bâtiments occupés par l'État et ses opérateurs.
Le périmètre immobilier du programme 354
Le périmètre immobilier du programme 354 « Administration territoriale de l'État » vise les services des :
- 101 préfectures situées en métropole et départements régions d'outre-mer, ainsi que leurs sous-préfectures ;
- 235 directions départementales interministérielles (DDI) ;
- 65 directions régionales du champ de l'administration territoriale de l'État (DR du périmètre administration territoriale de l'État - ATE), dont 20 en départements ou région d'outre-mer ;
- 28 services de l'éducation nationale installés en cité administrative, dans des locaux communs avec les précédents services.
Source : projet annuel de performances de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » pour 2025
Les bâtiments préfectoraux représentent une surface totale de 1,8 million de m², tandis que le parc immobilier des DDI et des DR du périmètre ATE représente un peu plus de 1,3 million de m². Ces sites peuvent relever de trois statuts patrimoniaux (domanial, mis à disposition25(*) ou pris à bail par l'État).
Il convient de relever à ce titre que l'État loue aussi des espaces occupés à des bailleurs privés. En effet, plus de 320 000 m² des services de l'administration territoriale de l'État sont loués, ce qui représente près de 10 % des surfaces occupées par ces services. Or, la location représente des montants conséquents en termes de dépenses de fonctionnement. En 2023, ces dépenses se sont élevées à 91,32 millions d'euros, soit 27 % des dépenses immobilières du programme. Ainsi, les loyers externes ont représenté à eux seuls près de deux fois et demi (241 %) les dépenses d'investissement immobilier.
Répartition des dépenses immobilières du programme 354 en 2023
(en CP, en pourcentage des dépenses)
Source : rapport annuel de performances pour l'année 2023 de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »
Il est ressorti du contrôle budgétaire26(*) mené par la rapporteure spéciale au printemps dernier que le patrimoine de l'administration territoriale de l'État est en mauvais état et dans une situation préoccupante. Il a en effet fait l'objet d'un sous-investissement continu, dans le cadre d'arbitrages budgétaires perdus au profit d'autres postes de dépenses du ministère de l'intérieur, et notamment les projets d'investissements d'ampleur portés par le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », tels que le site Universeine et le site unique du renseignement Intérieur qui représentent respectivement 287 millions d'euros et 1,29 milliard d'euros.
Par ailleurs, les annulations de crédits découlant du décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits à hauteur de 10 milliards d'euros n'ont pas épargné les dépenses immobilières du programme 354 et ont conduit au report de projets concernant notamment des opérations de désamiantage, d'isolation, de réfection des toitures à la suite d'infiltrations.
Or, 16 % des bâtiments de l'administration territoriale de l'État sont considérés comme peu ou non conformes au référentiel de la direction de l'immobilier de l'État (DIE). S'agissant plus particulièrement de l'impératif de transition écologique, l'immobilier de l'administration territoriale de l'État accuse un retard important en matière de rénovation thermique, en l'absence de planification solide des besoins de rénovation énergétique, et alors même que les obligations nationales et européennes se renforcent dans ce domaine. En effet, la révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments, adoptée en avril 2024, apporte de nouvelles obligations aux États membres de l'Union européenne. Ces derniers devront « rénover les 16 % de bâtiments les moins performants d'ici à 2030 et les 26 % les moins performants d'ici à 2033. »27(*) Ainsi, en application de cette directive, « tous les bâtiments neufs devraient être à émissions nulles d'ici à 2030, et les bâtiments existants devraient être transformés en bâtiments à émissions nulles d'ici à 2050. »28(*)
b) Une augmentation des dépenses immobilières, principalement ciblée sur les propriétés de l'État, mais encore largement en-deçà des besoins identifiés
Le projet de loi de finances pour 2025, sans être à la hauteur des besoins identifiés par la rapporteure spéciale lors de son contrôle budgétaire, traduit un effort à destination de l'immobilier de l'administration territoriale de l'État.
Les dépenses immobilières de l'administration territoriale de l'État, portées par l'action 06 du programme 354, s'élèvent à 424,9 millions d'euros en AE et 354,9 millions d'euros en CP pour 2025, contre 354,5 millions d'euros en AE et 313,3 millions d'euros en CP en 2024. Ces dépenses sont dès lors en hausse de 19,9 % en AE et de 13,3 % en CP par rapport à l'année 2024.
Plus particulièrement, les crédits demandés pour l'investissement de l'État propriétaire, qui représentent près de 76 % de ses dépenses immobilières, s'élèvent pour 2025 à 83,5 millions d'euros en AE et 60,5 millions d'euros en CP, soit une hausse de 33,4 % en AE et de 37,5 % en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Depuis l'entrée dans la programmation en 2023 dans le cadre de la LOPMI, les dépenses d'investissement en CP de l'administration territoriale de l'État se sont progressivement accrues, passant de 38 millions d'euros en 2023, à 47 millions d'euros en 2024 puis 65 millions d'euros en 2025, soit une hausse de 71 % entre 2023 et 2025.
La direction du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES) indique que cet effort d'investissement servira principalement au soutien de la stratégie d'entretien et de rénovation du patrimoine immobilier de l'administration territoriale de l'État, afin de rénover énergétiquement les bâtiments, et de réduire leur consommation d'énergie d'ici 2050.
Au titre des entretiens lourds et de transition énergétique, plusieurs opérations sont envisagées pour 2025, avec la réfection de la toiture et des façades de la préfecture de Lyon pour 2,45 millions d'euros en AE comme en CP, le désamiantage de la préfecture de Bastia pour 4,2 millions d'euros en AE et 4,45 millions d'euros en CP, ou encore les travaux de sécurisation électrique et de mise aux normes de l'hôtel préfectoral d'Amiens pour 2,2 millions d'euros en CP. Plusieurs constructions neuves et acquisitions sont également prévues pour 2025, avec la poursuite de l'extension de la préfecture de Mamoudzou pour 2,9 millions d'euros en CP et la poursuite de la construction de la nouvelle sous-préfecture de Palaiseau pour près d'un million d'euros, en AE comme en CP. Hors activités du programme national d'équipement (PNE)29(*), la DMATES a mentionné que l'enveloppe d'investissement déconcentrée (EMIR), qui finance en régions les travaux du propriétaire du réseau préfectoral inférieurs à 0,1 million d'euros, a été revalorisée de 20 millions d'euros pour 2025 par rapport à son montant de 2024.
S'agissant des dépenses de fonctionnement de l'action 06, largement affectées à l'État occupant, elles sont aussi en hausse en 2025, de l'ordre de + 17 % en AE et + 9 % en CP par rapport à 2024, pour s'établir à 337,1 millions d'euros en AE et 290,1 millions d'euros en CP.
Évolution des dépenses immobilières
de l'administration territoriale de l'État de 2020 à 2025
(en millions d'euros, en CP)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Une fois de plus, les loyers représentent une grande partie des dépenses immobilières de l'État occupant, de l'ordre de 33 % de ses dépenses, et s'élèvent, pour 2025, à 96,8 millions d'euros en AE et 97,6 millions d'euros en CP. Ainsi, les dépenses de loyers augmentent de 19 % en AE et de 7 % en CP par rapport aux loyers constatés en 2023. Rien que pour la préfecture d'Indre-et-Loire, les loyers s'élèvent à plus de 40 000 euros par an30(*).
Si la rappporteure spéciale salue l'augmentation de la demande de crédits à destination des dépenses d'investissement de l'administration territoriale de l'État, elle ne peut que regretter l'absence d'adéquation à la hauteur des défis de la transition écologique, et ce alors même que les dépenses hors titre 2 du programme 354 sont supérieures de plus de 1 % en CP à la trajectoire financière prévue pour 2025 par la LOPMI31(*). Par suite, la rapporteure spéciale constate que les arbitrages hors titre 2 sont souvent opérés au détriment des dépenses d'investissement, d'autant plus en l'absence de stratégie claire et ambitieuse de transition énergétique du patrimoine immobilier de l'administration territoriale de l'État.
B. L'ANNÉE 2025 MARQUE UNE PAUSE DANS LE RÉARMEMENT DE L'ÉTAT TERRITORIAL, DE NATURE À FRAGILISER CERTAINES MISSIONS PRIORITAIRES DES PRÉFECTURES
1. Une stabilisation des effectifs en contrariété avec les objectifs de la LOPMI
Alors que les deux précédents exercices ont été marqués par des schémas d'emplois positifs, de + 48 ETP en 2023 et + 232 ETP en 2024, l'année 2025 renoue avec la stabilisation des effectifs observée en 2021 et 2022, en contrariété avec le réarmement de l'État territorial porté par la LOPMI. Dans ce contexte, 350 emplois devaient être créés sur cinq ans : + 42 ETP en 2023, + 101 ETP en 2024 , + 45 ETP en 2025, + 81 ETP en 2026 et en 2027.
Ainsi, en 2023 et 2024, sur les emplois créés, 149 ETP ont permis de renforcer les effectifs des préfectures et des sous-préfectures, avec un soutien particulier à destination des services en charge de l'immigration. En 2024, 131 créations de postes ont été opérées, en plus des emplois créés sous plafond de la LOPMI, avec 9 ETP pour le conseil supérieur de l'appui territorial et de l'évaluation, 77 ETP dédiés aux experts de haut niveau (EHN) placé auprès des préfets et 45 ETP dédiés au renforcement des plateformes régionales chargées des ressources humaines (PFRH)32(*).
Pour 2025, le schéma d'emploi est de - 1 ETP, et ne permettra donc aucune création de poste. Dans ses réponses au questionnaire budgétaire, le ministère de l'intérieur a indiqué à la rapporteure spéciale que « la poursuite de la trajectoire de création d'emplois est décalée et les emplois créés en 2023 et 2024 au profit de l'administration territoriale de l'État font l'objet d'une consolidation ».
S'agissant du plafond d'emplois, il est quant à lui en baisse de - 182 ETPT. D'après les informations transmises par la direction du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES), cette diminution résulte principalement du croisement de l'impact négatif du schéma d'emplois en 2024, qui a soclé les mesures d'économies de 21 millions d'euros en titre 2 en cours de gestion en 2024, et de la non-réalisation de recrutements, prolongés sur 2025. En effet, au titre de la gestion 2024, le schéma d'emplois initial en loi de finances s'est vu réduit de - 75 ETP en raison de l'absence de compensation en masse salariale des 122 créations de postes de EHN et PFRH. Ainsi, sur les 77 postes EHN, 23 ont été recrutés et pris sous plafond. De même, sur les 45 emplois PFRH, 24 ont été recrutés et également pris sous plafond. En l'absence de compensation en masse salariale des autres emplois non recrutés (54 EHN et 21 PFRH), une correction du plafond d'emplois a été intégrée.
La réduction de ce plafond d'emplois, qui acte le non-recrutement le plusieurs experts de haut niveau, a une incidence directe dans les préfectures, notamment en matière de poursuite des travaux immobiliers, dont les moyens ont été revalorisés. Ainsi, lors de son déplacement à la préfecture d'Indre-et-Loire, les services préfectoraux ont indiqué à la rapporteure spéciale qu'un expert de haut niveau, avec un profil d'ingénieur, était nécessaire pour suivre le projet de réhabilitation de la cité administrative du Cluzel à Tours. En l'absence de recrutement possible de cet expert, la préfecture d'Indre-et-Loire ne dispose pour l'heure pas de compétences de nature à mener à bien ce projet immobilier, qui a dès lors vocation à demeurer en suspens.
La rapporteure spéciale déplore que l'hypothèse de stabilisation de l'emploi public, sur laquelle repose la construction du projet de loi de finances pour 2025, affecte de nouveau les effectifs des préfectures et des sous-préfectures, déjà largement mises à contribution dans l'effort de la maîtrise des dépenses publiques liées à la masse salariale depuis une dizaine d'années, et alors que le ministère de l'intérieur venait de s'engager dans une trajectoire de réarmement de l'État territorial. La rapporteure spéciale sera donc attentive à ce que les 350 postes annoncés dans le cadre de la LOPMI soient in fine créés, le cas échéant jusqu'à la fin de la programmation en 2027, et ce d'autant plus que le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau s'est engagé pour obtenir malgré tout une quarantaine de créations de postes en 202533(*).
2. Des difficultés toujours marquées dans la répartition territoriale des effectifs en fonction des besoins
Dans le cadre des créations d'emplois envisagées sur toute la période de la LOPMI, la rapporteure spéciale constate encore que, pour 2025, le ministère n'a toujours pas élaboré une méthode d'évaluation des effectifs de référence par préfecture, telle que préconisée par la Cour des comptes dans son rapport sur les effectifs de l'administration territoriale de l'État34(*). En 2022, la Cour des comptes a constaté que l'allocation des emplois entre préfectures ne résulte d'aucune analyse du besoin, à l'origine de fortes disparités entre régions, en particulier pour les services étrangers. En effet, « les régions qui étaient le plus en sous-effectifs sur la gestion des étrangers, n'ont pas été celles qui ont été le plus préservées sur le plan des effectifs, au contraire ».
À partir de 2021, des réflexions ont été menées avec l'application d'un schéma d'emplois neutre pour le programme 354, basées sur les indicateurs du contrôle de gestion (niveau d'activité par service et par agent) et sur des déterminants objectifs tels que l'évolution démographique, le taux d'administration ou l'attractivité des territoires. Ainsi, la répartition des emplois créés en 2023 et 2024 a été effectuée dans cet esprit, en mettant l'accent sur des départements ayant un taux d'administration inférieur à la moyenne de leur strate démographique ou en soutenant les départements dont l'activité des services en charge des étrangers est la plus soutenue.
Toutefois, la DMATES admet elle-même que la méthode d'évaluation de la Cour des comptes fondée sur les effectifs cibles par budget opérationnel de programme (BOP) n'est pas encore pleinement mise en oeuvre : « ces modalités d'allocation des effectifs ne constituent néanmoins pas encore le modèle au sens où l'entend la Cour des comptes dans son rapport sur l'évolution des effectifs de l'administration territoriale de l'État ».
En tout état de cause, la rapporteure spéciale considère qu'il faudrait que les critères de répartition soient établis de manière transparente. En effet, si des situations locales spécifiques pourront justifier des dérogations, l'absence de règle de répartition clairement établie en amont risque de perpétuer la pratique de négociations sur les schémas d'emplois entre les préfets.
Dans cette perspective, il est également urgent de renforcer les outils de suivi de ses propres effectifs par le ministère de l'intérieur. L'Administration numérique pour les étrangers en France (ANEF), nouvel outil numérique déployé par le ministère, comprend un volet de suivi de l'activité d'accueil des étrangers par les préfectures. L'intégration d'une dimension de suivi de l'activité aux applications métiers constitue un levier de pilotage indispensable. Il conviendrait d'étendre ce type d'outils pour garantir la fiabilisation des données aux remontées concernant les différentes missions du réseau préfectoral. Cela permettrait aussi de disposer d'une vision précise de temps consacré par les agents sur les différentes missions.
3. Des services étrangers et de contrôle de légalité toujours en tension, loin du mirage de la priorisation de ces missions
a) La priorisation des missions, pourtant nécessaire dans un cadre budgétaire contraint, n'a pas été mise en oeuvre et demeure sans perspective après 2025
Le document « Missions prioritaires des préfectures 2022-2025 », de septembre 202235(*), revient sur les différentes missions des préfectures :
- assurer le pilotage stratégique et opérationnel des crises et des politiques de sécurité ;
- moderniser le contrôle de légalité ;
- adapter l'organisation des services en charge des élections ;
- renforcer la lutte contre la fraude dans le cadre de la délivrance de titres sécurisés ;
- accompagner l'ensemble des missions liées à l'entrée et au séjour des étrangers en France, en particulier en concentrant les efforts sur le séjour et en accentuant l'effort sur l'éloignement ;
- renforcer le rôle des services chargés de la coordination des politiques publiques ;
- mieux conseiller les porteurs de projets ;
- accroître le recours à l'expertise des services déconcentrés ;
- professionnaliser l'accueil dans les préfectures ;
- améliorer la coordination de la préfecture avec les autres services d'accueil du public de proximité.
Il ressort que, depuis 2022, le ministère de l'intérieur n'a pas engagé de vraie priorisation entre toutes ces missions, qui n'a eu en tout état de cause pas de traduction budgétaire concrète, si ce n'est à la marge, pour renforcer par exemple ponctuellement les services « étrangers ». La stabilisation des effectifs proposée par le présent projet de loi de finances ne fait que renforcer ce constat, d'autant plus que le ministère de l'intérieur n'a pour l'heure pas adopté de stratégie au-delà de 2025.
b) Certaines missions essentielles pâtissent de cette absence de priorisation, qui se traduit par une allocation insuffisante de personnels
Certaines missions, pourtant jugées comme prioritaires, ne bénéficient pas d'allocations de moyens suffisants et adaptés à la hauteur des enjeux auxquels les services qui les mettent en oeuvre sont confrontés.
Les contraintes d'effectifs demeurent une réelle difficulté pour les services les plus en tension, au titre desquels figurent les services « étrangers », et dans une autre mesure les services de contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales et de contrôle budgétaire.
En premier lieu, les services « étrangers »36(*) au sein des préfectures ont été particulièrement touchés par les réductions d'effectifs, alors même que la pression migratoire n'a jamais discontinué et s'est au contraire intensifiée sur la même période d'attrition des effectifs. Ces services sont en effet sous-dimensionnés, et ce alors même qu'ils se sont vus attribuer des renforts vacataires à partir de 2022. En effet, un plan triennal de renfort, de l'ordre de + 570 ETPT, a été déployé sur la période 2022-2024, en vue de soutenir l'activité des services « étrangers », de + 190 ETPT par an. Dans le contexte budgétaire particulièrement contraint, la DMATES a toutefois indiqué à la rapporteure spéciale que le plan de soutien aux préfectures par des vacataires sera prorogé en 2025, sans pour autant que le niveau des renforts soit encore défini à ce stade.
Pour autant, lors de son déplacement à Tours, les bureaux en charge du séjour, de l'éloignement et de l'asile de la préfecture d'Indre-et-Loire ont indiqué à la rapporteure spéciale ne pas avoir bénéficié de vacataires supplémentaires sur toute la période du plan triennal, mais seulement quelques vacataires avec des missions de courte durée au plus fort de la crise ukrainienne courant 2022. Ainsi, seulement une vingtaine d'agents37(*) composent l'ensemble de ces services « étrangers » à la préfecture de Tours, en comptant également les sept personnes chargées de l'accueil physique des étrangers, qui demeure en parallèle d'un point d'accueil numérique.
Par ailleurs, les gains attendus par l'Administration numérique pour les étrangers en France (ANEF)38(*) ne peuvent être mesurés dès lors que cette application n'est pas pleinement déployée39(*). En effet, tout d'abord, tous les titres de séjour n'entrent pas encore dans son champ. Certains titres de séjour, délivrés sur le fondement de l'admission exceptionnelle au séjour40(*), n'ont même pas vocation à basculer dans l'ANEF. Ensuite, alors même que le titre de séjour est soumis à la procédure ANEF, certaines pièces justificatives ne peuvent pas être transmises via cette plateforme, à l'instar de celles délivrées dans le cadre du contrat d'intégration républicaine (CIR). Les agents des préfectures doivent donc passer par des échanges de mail ou des appels téléphoniques hors ANEF pour ces pièces justificatives, amoindrissant dès lors l'intérêt de disposer d'une plateforme dédiée. Enfin, l'ancien logiciel AGDREF, utilisé en préfectures depuis les années 1990, coexiste encore fin 2024 en parallèle de l'ANEF. La DTNUM a indiqué que la deuxième phase de l'ANEF en 2025 impliquera un décommissionnement complet d'AGDREF, ainsi qu'un accompagnement des préfectures pour se saisir pleinement du nouvel outil ANEF.
À la date du présent rapport, alors que « la mise en oeuvre de l'ANEF doit permettre de réaliser des économies d'échelle et de réallouer les effectifs à d'autres tâches »41(*), force est de constater que, pour l'heure, la réduction de l'activité au sein des services « étrangers » n'est pas constatée42(*). Dans ce contexte, il convient de relever que les indicateurs de performance du programme 354 afférents à la délivrance des titres séjours ont évolué, en introduisant des sous-indicateurs qui intègrent des objectifs de délais précis. Ainsi, l'indicateur du « délai moyen de traitement des premières demandes d'admission au séjour » comprend un sous-indicateur relatif à la part des premières demandes d'admission au séjour traitées en moins de 90 jours. De même, l'indicateur relatif au délai de traitement des demandes de renouvellement de titre de séjour comprend désormais un sous-indicateur pour mesurer la part des renouvellements intervenus en moins de 60 jours. La rapporteure spéciale tient à souligner l'intérêt de ces nouveaux sous-indicateurs, qui permettront, en partie, de mesurer les gains d'efficience engendrés par l'ANEF en termes de délais de traitement des demandes de titres de séjour.
En deuxième lieu, les services en charge du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire sont eux aussi confrontés à de grandes difficultés pour assurer leurs missions constitutionnelles suite à la réduction drastique de leurs effectifs jusqu'en 2014, et qui s'est accentuée dans le cadre de la mise en oeuvre du plan préfectures nouvelles génération, notamment pour les préfectures qui ont ouvert des centres d'expertise et de ressources titres (CERT). En effet, les effectifs mobilisés pour l'ouverture des CERT ont eu pour conséquence de vider d'autres services de leurs effectifs, et notamment les bureaux de contrôle de légalité.
Lors de son déplacement à la préfecture d'Indre-et-Loire, la rapporteure spéciale a pu constater ce phénomène. En 2015, 18 agents étaient affectés aux contrôles de légalité et budgétaire. Avec la création du CERT permis de conduire à Tours, le service a perdu 3 agents. En 2019, avec la création du bureau des collectivités locales au sein de la direction de la citoyenneté et de la légalité, seulement 11 agents étaient affectés à ce service, qui est composé en 2024 de seulement 8 agents et d'un apprenti. La diminution des effectifs de plus de 40 % en l'espace d'à peine dix ans, avec des agents peu formés, alors même que 88 000 décisions43(*) sont transmises sur la plateforme dédiée @CTES44(*) chaque année, a pour effet l'abandon de certains contrôles, dont le contrôle de légalité des marchés publics qui s'est transformé en une simple mission de conseil.
Pour 2025, le projet annuel de performances de la mission AGTE mentionne que 2 109 ETPT devraient être affectés au contrôle et au conseil aux collectivités territoriales, contre 2 132,52 ETPT en 202445(*). Le nombre d'agents affectés à cette mission consacrée à l'article 72 de la Constitution est dès lors en baisse, et ne représente que 7,2 % des emplois rémunérés par le programme 354 en 2025, et ce, alors même qu'une tendance haussière sur le nombre d'actes transmis est anticipée par la direction générale des collectivités territoriales (DGCL) pour 2025. Le nombre d'actes transmis au niveau national s'est établi à 7,4 millions en 2023, et pour le seul premier semestre 2024, déjà 4 millions d'actes ont été transmis aux préfets.
Face à ces constats, la rapporteure spéciale affirme de nouveau son soutien à l'objectif de renforcement du contrôle de légalité, dont, comme le relève la Cour des comptes, « la qualité n'est plus suffisante au regard des obligations constitutionnelles de l'État »46(*), tout en constatant une hétérogénéité dans son application sur le territoire national. Elle a d'ailleurs estimé qu'un renforcement des effectifs à hauteur de 190 ETP serait nécessaire.
Si ce niveau de renforcement paraît à moyen terme difficile à atteindre au regard du nombre total des 350 créations de postes envisagées dans le cadre de la LOPMI47(*) et de la stabilisation des effectifs en 2025, la rapporteure spéciale appelle de ses voeux qu'une part plus importante des postes créés sur la période 2023-2027 soient affectée au contrôle de légalité et au conseil aux collectivités territoriales. Par ailleurs, en parallèle des renforcements d'effectifs, le développement de l'utilisation de l'intelligence artificielle dans l'exercice de ces missions de contrôle pourrait fluidifier le travail des agents et permettre leur montée en compétences.
L'utilisation
encore lointaine de l'intelligence artificielle dans le contrôle
de
légalité des actes administratifs des collectivités
territoriales
Les missions prioritaires des préfectures 2022-2025 ont pour ambition de moderniser l'exercice du contrôle des actes administratifs des collectivités territoriales, en recourant à l'intelligence artificielle dans le traitement quantitatif des actes.
Alors que ce document prévoyait une poursuite du chantier dans les prochaines années, au regard des premières expérimentations menées par la direction générale des collectivités territoriales (DGCL), il est ressorti des auditions menées par la rapporteure spéciale que des expérimentations plus poussées n'ont pas été encore lancées, dès lors qu'elles supposent une application et un mode de transmission permettant d'utiliser les moyens de l'intelligence artificielle. À terme, les potentielles utilisations sont prometteuses : « la refonte du logiciel @ctes doit permettre d'intégrer le recours à l'intelligence artificielle, prioritairement pour fiabiliser les données enregistrées lors du dépôt des actes. Il s'agirait ainsi d'assurer la qualité des métadonnées liées aux actes soumis au contrôle de légalité. Le cas échéant, l'intelligence artificielle pourrait également être utilisée pour aider au contrôle lui-même, extraire les informations utiles des actes ou préparer les fiches de synthèse sur les collectivités »48(*).
Or, la DMATES a indiqué que finalement, l'intelligence artificielle ne serait pas développée avant quatre ou cinq ans dans les préfectures. La rapporteure spéciale regrette un tel décalage de calendrier, qui reporte à horizon 2030 la mise en oeuvre de cette technologie, alors que le déplacement de la rapporteure spéciale a confirmé l'intérêt des services pour ces développements, et même au-delà du contrôle de légalité.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de la DMATES et le déplacement en Indre-et-Loire
III. LES DÉPENSES TOUJOURS SOUTENUES DE L'ADMINISTRATION CENTRALE DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR À RAISON DU FINANCEMENT D'OPÉRATIONS IMMOBILIÈRES MAJEURES
A. LE LANCEMENT DE LA CONSTRUCTION DU SITE UNIQUE DE LA DGSI ET LA LIVRAISON DE L'OPÉRATION « UNIVERSEINE » EXPLIQUENT LA HAUSSE DES DÉPENSES IMMOBILIÈRES EN 2025
Les dépenses immobilières du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » concernent les dépenses de l'administration centrale ainsi que les dépenses immobilières des secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'intérieur (SGAMI) qui ont été transférées sur le programme au 1er janvier 2020, et celles relatives à l'immobilier des cultes, transférées depuis le programme 232 « Vie politique » au 1er janvier 2022.
Pour 2025, les crédits de paiement de l'action 05 « Affaires immobilières » sont en forte augmentation du fait des engagements financiers à honorer pour deux opérations immobilières majeures. Dans ce contexte, les dépenses d'investissement augmentent de 187 %, passant de 178,9 millions d'euros en 2024 à 513,4 millions d'euros en 2025.
En premier lieu, le présent projet de loi de finances prévoit 139,4 millions d'euros en crédits de paiement en vue d'assurer le paiement du marché global de construction du site unique de la DGSI à Saint-Ouen, engagé au mois de juin 2024, pour des travaux lancés à l'été 2025. Le montant de ce marché public global, qui représente la plus grande part des dépenses du projet, a été notifié pour un montant de 837,2 millions d'euros. Ce montant, inférieur à l'estimation financière initiale49(*), permet de réduire de 71,5 millions d'euros le coût global du projet, désormais estimé à 1 221,5 millions d'euros, dont 88 % est financé par le programme 21650(*).
En second lieu, la hausse des crédits immobiliers vise à assurer le paiement de la livraison fin 2025 du projet « Universeine », acquis en vente à l'état futur d'achèvement (VEFA) en 2021, qui a vocation à accueillir plusieurs services de l'administration centrale du ministère de l'intérieur à Saint-Denis sur l'ancien site du village olympique « Paris 2024 ». Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, 296,4 millions d'euros en crédits de paiement couvriront 93 % du projet « Universeine », dont le montant total est de 317,9 millions d'euros.
En revanche, les dépenses immobilières pour 2025 sont en baisse de 82 % en AE par rapport à 2024. Si cette baisse peut s'expliquer en l'absence de nouveaux projets immobiliers d'ampleur, force est de constater que le niveau des AE pour 2025 est inférieur de près de 23 % par rapport à la programmation51(*), et ce, alors même que de nombreux travaux doivent être menés pour atteindre les objectifs de performance énergétique fixés par le décret tertiaire de 2019, à l'instar des bâtiments de l'administration territoriale de l'État. D'après les réponses au questionnaire budgétaire, les dépenses liées à l'amélioration de la performance énergétique du patrimoine de l'administration centrale sont estimées à 88,2 millions d'euros sur la période 2023-202752(*), conformément au plan pluriannuel d'investissement (PPI) du ministère de l'intérieur.
Par ailleurs, la rapporteure spéciale s'interroge sur la soutenabilité à moyen terme des restes à payer du programme 216, composés majoritairement de dépenses liées à l'investissement immobilier, mais aussi au numérique du ministère de l'intérieur, et dans une moindre mesure ceux du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Ainsi, au 31 décembre 2023, le solde des engagements non couverts par des paiements est estimé à 1 175,6 millions d'euros.
Évolution des restes et charges à payer du programme 216 depuis 2019
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Les restes et charges à payer au titre des opérations immobilières s'élèvent à 764,7 millions d'euros en 2023, et constituent plus de 65 % des restes et charges à payer du programme 216. Rien que pour le site unique de la DGSI, sur le montant total du marché public global de 837,2 millions d'euros notifié, le reste à payer est estimé au 31 décembre 2024 à de 726,8 millions d'euros. La Cour des comptes a ainsi estimé que « le montant des restes à payer présente un risque dès lors qu'il fige une part importante de la programmation », et qu'il a pour effet l'accumulation d'une dette informatique et immobilière importante53(*).
La hausse des dépenses immobilières contraste avec la stabilité les dépenses de personnel, passant de 861 millions d'euros en 2024 à 880 millions d'euros en 2025, soit une hausse + 2,2 % du fait de quelques mesures catégorielles limitées54(*). En revanche, comme pour le programme 354 « Administration territoriale de l'État », aucune création d'emploi n'est prévue pour 2025 contrairement au schéma d'emploi prévu dans le cadre de la LOPMI, de l'ordre de + 75 ETP55(*).
B. UNE BAISSE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT FONDÉE SUR LE TRANSFERT DES DÉPENSES DE PROTECTION FONCTIONNELLE DE LA POLICE NATIONALE
1. Une baisse mécanique des dépenses de protection fonctionnelle
Les dépenses de fonctionnement de l'administration centrale du ministère de l'intérieur sont en baisse de - 2,9 % en crédits de paiement, passant ainsi de 538 à 523 millions d'euros de 2024 à 2025, du fait de la sortie des dépenses de protection fonctionnelle des policiers et des gendarmes du périmètre du programme 216.
L'action 06 « Affaires juridiques et contentieuses », dont les crédits sont gérés par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ)56(*) du ministère de l'intérieur, porte les dépenses contentieuses et de protection fonctionnelle du ministère de l'intérieur, qui résultent d'une condamnation juridictionnelle, d'un règlement négocié à l'amiable, de frais d'expertise ou de frais d'honoraires d'avocat. Pour 2025, ces dépenses s'élèvent à 73,5 millions d'euros en AE comme en CP, ce qui représente une baisse de 18,2 millions d'euros par rapport à 2024.
Cette diminution des dépenses est la conséquence mécanique d'un transfert des crédits relatifs à la protection fonctionnelle des agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale, de l'ordre de 16 millions d'euros transférés au programme 176 « Police nationale » et de 2,2 millions d'euros transférés au programme 152 « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités ». S'agissant de la police nationale, ce transfert de crédits acte le transfert de compétence de la gestion de la protection fonctionnelle de l'ensemble des agents de la police nationale de la DLPAJ à la direction générale de la police nationale (DGPN) au 1er janvier 2025. En ce qui concerne la protection fonctionnelle des personnels de la gendarmerie, la direction générale de la gendarmerie nationale assurait déjà la protection fonctionnelle de ses personnels, les crédits afférents lui sont donc logiquement transférés.
Cette nouvelle organisation fait suite à un rapport de l'inspection générale de l'administration (IGA) sur la renforcement de la protection fonctionnelle des agents de la police nationale de septembre 2023 et à un rapport de la Cour des comptes57(*), qui recommandait d'imputer les dépenses de protection fonctionnelle sur les programmes budgétaires dont relèvent les agents concernés, dans une démarche de responsabilisation accrue des directions « métiers » concernées par l'attribution de la protection fonctionnelle, en conservant un fort rôle de pilotage de la DLPAJ58(*).
Il convient de relever que ce transfert sera sans incidence, en termes d'effectifs, sur la cellule de protection fonctionnelle du bureau du contentieux statutaire et de la protection juridique des fonctionnaires (BCSPJF) de la sous-direction du conseil juridique et du contentieux de la DLPAJ, qui traitait une faible proportion des demandes de protection fonctionnelle des agents de la DGPN59(*). Sur les 2 ETP qui composent la cellule, la DLPAJ indique qu'il peut être considéré que 0,41 ETP étaient consacrés aux enjeux de la protection fonctionnelle des agents de la police nationale, animation du réseau compris. Par suite, « il n'y aura pas de transfert d'effectif (...). Ce transfert de compétence permettra aux agents de la cellule de renforcer l'efficacité de ses missions, notamment en matière d'indemnisation des victimes d'accident de service, et de les exercer dans de meilleures conditions ».
Ainsi, à périmètre constant, les dépenses contentieuses et de protection fonctionnelle sont stables par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
2. Des dépenses contentieuses demeurant très dynamiques et structurellement sous-évaluées
a) Une augmentation significative des dépenses portées par les refus de concours de la force publique et le contentieux des étrangers
Outre la protection fonctionnelle60(*), plusieurs types de litiges sont pris en charge par l'action 06 « Affaires juridiques et contentieuses » :
- les refus de concours de la force publique ;
- les contentieux relatifs à la situation des personnes de nationalité étrangère ;
- les attroupements ;
- les accidents de la circulation ;
- les autres mises en cause de l'État telles que celles afférentes notamment à la police administrative, aux contentieux statutaires, électoraux et de la commande publique.
Entre 2019 et 2023, les dépenses contentieuses ont progressé de + 51 %, passant de 87,8 millions d'euros en 2019 à 132,5 millions d'euros en 2023, et ce malgré les actions de maîtrise des dépenses mises en place depuis plusieurs années et un taux de réussite devant les juridictions administratives et judiciaires de l'ordre de 80 %. À ce titre, le projet de loi de finances pour 2025 introduit un nouveau sous-indicateur de performance, spécifiquement dédié au taux de réussite pour le contentieux des étrangers, suite à une recommandation de la Cour des comptes dans son rapport précité.
Dans la mesure où la majeure partie des dépenses contentieuses est consommée au niveau des préfectures61(*), le plan préfectures nouvelle génération a entendu réorganiser la fonction juridique du ministère de l'intérieur, en créant des pôles d'appui juridique (PAJ), spécialisés par matière et au service des préfectures, pour répondre à leur besoin croissant d'expertise juridique. Si ces PAJ sont résolument un bon outil à la disposition des préfectures pour les aider à maîtriser leurs contentieux, force est de constater que l'augmentation des volumes contentieux a un effet direct sur le niveau de la dépense budgétaire, et ce quels que soient les moyens de maîtrise de ladite dépense. Sur la période 2021-2023, le nombre de requêtes traitées au titre du contentieux des étrangers a augmenté de + 25 %, avec plus de 124 000 requêtes traitées par les services en 2023, pour 113 202 affaires jugées.
Les pôles
d'appui juridique (PAJ), une expertise internalisée
à la
disposition des préfectures
Les pôles d'appui juridique (PAJ) ont été créés par circulaire ministérielle du 16 novembre 2016, dans le cadre du plan préfectures nouvelle génération, et font l'objet d'un pilotage fonctionnel assuré par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ) du ministère de l'intérieur.
Ces PAJ, hiérarchiquement rattachés à la préfecture du lieu d'implantation, ont vocation à aider les préfectures sur des points de droit précis et qui se posent de façon récurrente. Ils constituent des structures d'appui complémentaires, intervenant à la demande expresse des préfectures qui peuvent les saisir par voie dématérialisée, pour solliciter une expertise comme elles le feraient en recourant à un cabinet d'avocat. Les PAJ apportent une réponse autonome aux préfectures dans 90 % des cas. Les 10 % restants, portant sur des questions inédites et complexes, relèvent de la DLPAJ.
Il existe pour l'heure sept PAJ, dont trois compétents en matière de police administrative, situés à Dijon, Orléans et Lille, deux en matière de concours de la force publique et de responsabilité de l'État, situés à Marseille et Strasbourg, et deux compétents en matière de conseil et de contentieux statutaire, à Nantes et Limoges. Il n'existe pas de PAJ spécialisé en contentieux des étrangers, eu égard aux volumes contentieux et à la temporalité particulières de ces derniers. Le ministère de l'intérieur n'a pas encore arbitré sur la façon d'optimiser le traitement de ce contentieux particulier.
Les effectifs des PAJ sont réduits à cinq agents, dont un chef de pôle, trois rédacteurs de catégorie A et un agent de greffe de catégorie B.
Source : commission des finances, d'après les réponses de la DLPAJ
Ainsi, deux contentieux alimentent particulièrement la hausse des dépenses contentieuses : le refus de concours de la force publique et le contentieux des étrangers.
L'augmentation des dépenses en matière de refus de concours de la force publique est principalement conjoncturelle, liée aux conséquences de la crise sanitaire, et notamment aux mesures inédites prises dans ce contexte, et notamment aux prolongations de la trêve hivernale en 2020 et 2021. Ainsi, alors que les crédits dédiés étaient sous-consommés de l'ordre de 19,4 % en 2019, ils ont été surconsommés depuis 2021, de 12 % cette année-là à plus de 60 % en 2023. Si une partie du surcoût de l'indemnisation pour refus de concours de la force publique (RCFP) a été absorbée par transferts de crédits en gestion du ministère du logement, le ministère de l'intérieur a dû financer sur son budget une partie des besoins complémentaires à hauteur de 16,3 millions d'euros en 2023, sans purger pour autant l'ensemble des dossiers prêts à être engagés par les services. Pour 2024, le besoin de financement supplémentaire pour ce contentieux par rapport à la dotation de la loi de finances initiale est estimé à 19 millions d'euros.
Dans la mesure où tout le contentieux lié à la crise sanitaire a vocation à être épuré d'ici la fin de l'année 2024, le montant prévu pour 2025 pour ce poste de dépense marque un retour à la situation constatée avant la crise sanitaire et s'établit à 27 millions d'euros.
En revanche, la dynamique des dépenses en matière de contentieux des étrangers est structurelle. Les dépenses pour ce contentieux sont passées de 20,7 millions d'euros en 2019 à 33,9 millions d'euros en 2023, soit une augmentation de + 63 % du fait de la hausse tendancielle du contentieux des étrangers.
En plus de ces deux contentieux majeurs, la DLPAJ a attiré l'attention de la rapporteure spéciale sur l'évolution potentielle du contentieux des attroupements, dont l'enveloppe est de 10,7 millions d'euros dans le cadre du présent projet de loi de finances, au regard de la multiplication des évènements susceptibles d'engager la responsabilité de l'État sur le fondement de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure62(*). Par ailleurs, des contentieux indemnitaires à l'encontre de l'État introduits par des sociétés concessionnaires d'autoroutes suite aux diverses manifestations dans le cadre du mouvement des « gilets jaunes » sont en cours d'instruction, pour u montant demandé à l'encontre de l'État de 164,9 millions d'euros.
En dehors de ce contentieux exceptionnel que la budgétisation initiale ne peut vraisemblablement ni prévoir ni absorber, et alors que l'évolution des dépenses contentieuses a été anticipée dans le cadre de la LOPMI63(*), les crédits dédiés au contentieux des attroupements sont en baisse de l'ordre d'un million d'euros, illustrant ainsi de façon topique le décalage entre les enveloppes allouées dans le cadre de la budgétisation initiale et les besoins réels.
b) Une sous-budgétisation récurrente, colmatée par des abondements en gestion de plus en plus massifs de nature à nuire à la lisibilité budgétaire
Malgré une imprévisibilité des dépenses intrinsèque à la nature même du contentieux, il apparaît que les crédits alloués aux dépenses contentieuses sont sous-budgétées de façon récurrente, et pourraient être mieux anticipées.
Alors que sur la période 2021-2024 la budgétisation initiale moyenne de l'action 06 « Affaires juridiques et contentieuses » a été de 89,7 millions d'euros, la consommation moyenne prévisionnelle sur la même période s'élève, selon la DLPAJ, hors protection fonctionnelle des policiers et des gendarmes, à 96,05 millions d'euros.
Écarts entre les crédits ouverts et
consommés de l'action 6 Affaires juridiques
et
contentieuses du programme 216 de 2019 à
2025*
(en millions d'euros)
* La consommation affichée pour 2024 est celle des crédits disponibles au 4 novembre 2024.
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et les réponses de la DLPAJ
Cet écart entre la prévision et la consommation est particulièrement visible s'agissant des crédits relatifs au refus de concours de la force publique et au contentieux des étrangers, pour lesquels les crédits ont été supérieurs en 2023 de + 83 % par rapport à la budgétisation initiale, et ont toujours été supérieurs d'au moins 15 % par rapport à la loi de finances initiale depuis 2019.
Consommation des crédits relatifs au refus de concours de la force publique et
au contentieux des étrangers par rapport
aux prévisions
de la loi de finances initiale de 2019 à
2023
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires et les réponses de la DLPAJ
Afin de financer ces écarts en cours de gestion, le responsable du programme 216 procède systématiquement à des redéploiements de crédits à l'échelle du programme en faveur de l'action 06 et des reports de charge. En 2023, le responsable de programme a opéré un redéploiement significatif de crédits à destination de l'action 06, pour un montant de 47,25 millions d'euros.
Pour 2024, un abondement de crédits de l'ordre de 13,9 millions d'euros a déjà été effectué en faveur de l'action 06 du programme 216, assurant dès lors une consommation à hauteur de 105,7 millions d'euros. La DLPAJ indique toutefois que « le besoin exprimé par les services reste cependant supérieur et s'élève à 129 millions d'euros, soit 24 millions d'euros supplémentaires au regard de la ressource disponible. Le responsable du programme 216 est en attente d'un arbitrage pour permettre une prise en charge de ce besoin, sous réserve de la capacité d'engagement effective des services d'ici la fin de gestion ».
Ainsi, les redéploiements de crédits en faveur de l'action 06, de l'ordre de 90,25 millions d'euros en 2023 et 2024, sont supérieurs aux prévisions budgétaires de l'action pour une année.
Pour 2025, la DLPAJ estime d'ores et déjà que les crédits de l'action 06 ne seront pas suffisants pour couvrir les besoins de l'année, notamment au regard de la situation du marché locatif et de l'évolution tendancielle du contentieux des étrangers, et même en dehors d'une éventuelle condamnation de l'État dans le cadre des litiges indemnitaires en cours engagés par les sociétés concessionnaires d'autoroute. Les besoins estimés en gestion sont déjà de l'ordre de 8,75 millions d'euros, pour une consommation des crédits de l'action 06 prévue de l'ordre de 82,3 millions d'euros. Le projet de loi de finances pour 2025 prévoyant une mise en réserve des crédits de 5,5 %, appliquée aux dépenses contentieuses, le besoin prévisionnel serait même de 86,8 millions d'euros.
Alors que des besoins en gestion ont déjà été identifiés lors de la préparation du présent projet de loi de finances, la rapporteure spéciale ne peut que déplorer cette situation peu satisfaisante, qui nuit à la lisibilité budgétaire, et dans une certaine mesure, à la sincérité des autorisations votées. Comme la Cour des comptes dans ses observations définitives de juin dernier, la rapporteure spéciale estime nécessaire la remise à niveau des dépenses contentieuses du ministère de l'intérieur64(*), et en particulier celles relatives aux contentieux des étrangers.
Le service
d'assurance automobile du ministère de l'intérieur (SAAMI),
modèle d'une réinternalisation des compétences
réussie
Parmi les dépenses contentieuses portées par l'action 06 figurent les dépenses pour accident de la circulation, qui s'élèvent à 12,5 millions d'euros pour 2025. Afin de maîtriser ces dépenses, la DLPAJ a mis en place, par arrêté du 4 septembre 2020, un service d'assurance interne, rattaché à la sous-direction du conseil juridique et du contentieux, basé à Saint-Cyr-sur-Loire (Indre-et-Loire), qui exerce des fonctions identiques à celles d'un assureur privé pour l'ensemble de la flotte automobile opérationnelle du ministère de l'intérieur. Jusqu'en 2020, la gestion des dossiers d'accidents de la route des véhicules de la flotte opérationnelle du ministère de l'intérieur était répartie entre les SGAMI pour les dossiers courants et la DLPAJ pour les dossiers plus importants.
Son champ de compétences s'est progressivement étendu, tout d'abord en 2021 aux préfectures des départements et collectivités d'outre-mer. En 2023, il a étendu son champ d'activité aux dossiers d'accidents de la circulation des secrétariats généraux pour l'administration de la police (SGAP) et des services administratifs et techniques de la police nationale (SATPN) d'outre-mer.
À l'instar de toutes les dépenses contentieuses de l'action 06 « Affaires juridiques et contentieuses », les dépenses pour accidents de la circulation sont supérieures à la budgétisation initiale, de 7,2 millions en 2023 et de 3,5 millions estimés pour 2024 selon les données transmises par la DLPAJ. Toutefois, la Cour des comptes a relevé que « la hausse conjoncturelle des dépenses en 2023, n'est pas le signe d'une détérioration, mais dénote au contraire la poursuite d'une démarche d'apurement des dossiers et de maîtrise de ce poste de dépenses, elles sont principalement imputables à la mise en paiement de dossiers de dommages corporels lourds et anciens ». Ainsi, la gestion des dépenses est optimisée, et le SAAMI génère aussi des recettes, de plus de 12 millions d'euros chaque année, reversées aux véhicules endommagés.
Ce service fonctionne avec un nombre réduit d'agents (44 en 2024), dont une majorité de contractuels issus du secteur privé des assurances.
Saluant la réussite de cette réforme, la Cour des comptes a même recommandé d'apprécier l'opportunité d'étendre la compétence du SAAMI à l'ensemble des véhicules du ministère de l'intérieur, et le cas échéant aux véhicules d'autres administrations.
Source : commission des finances, d'après les réponses de la DLPAJ
C. UN NÉCESSAIRE RENFORCEMENT DU PILOTAGE DES CRÉDITS ALLOUÉS À LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE ET LA RADICALISATION, AINSI QU'À LA VIDÉO-PROTECTION
1. Une clarification nécessaire des actions financées par le biais du fonds interministériel de prévention de la délinquance à l'occasion de la création d'une délégation interministérielle
a) La transformation bienvenue du secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation en délégation interministérielle, dont les contours doivent encore être précisés
Le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » finance aussi le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), pour lequel le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR) coordonne l'utilisation des crédits et arrête notamment la répartition entre les différentes unités opérationnelles.
L'évolution de l'activité et des relations avec le politique du SG-CIPDR a malheureusement conduit, comme l'a montré le rapport de la mission sur le fonds Marianne, à « un mélange des genres regrettable »65(*). Au-delà des recommandations de la mission, il semble indispensable de tirer des enseignements sur le rôle du SG-CIPDR et son positionnement, même si sa structure évolue progressivement66(*).
L'année 2025 doit acter la transformation du SG-CIPDR en délégation interministérielle, que la rapporteure spéciale appelait de ses voeux l'an passé, dans la lignée de la proposition du rapport de l'inspection générale de l'administration sur l'évolution de l'organisation et des missions du SG-CIPDR. Cette transformation doit permettre de renforcer le caractère interministériel de la structure, et de donner à celui qui la dirige, devenu délégué interministériel, la capacité d'entretenir des rapports directs avec les autres ministres et cabinets. Reconnu comme directeur d'une administration centrale, le délégué interministériel serait ainsi nommé en conseil des ministres. Il conviendrait, plus largement, que les experts recrutés au sein du SG-CIPDR représentent bien les différents ministères. Les ministères sociaux, le ministère de la justice ou encore celui de l'éducation nationale doivent être pleinement impliqués dans les différentes stratégies de lutte contre la prévention de la délinquance et de la radicalisation.
Cette évolution doit notamment passer par la normalisation de la situation des agents de l'unité du contre discours républicain, qui doivent pouvoir être des agents titulaires. Il conviendrait, comme le propose le rapport de l'inspection générale de l'administration, de régulariser ces emplois en les intégrant au schéma d'emploi du programme 216. Pour ce faire, la rapporteure spéciale considère qu'un rehaussement du plafond d'emplois du programme s'impose.
À la date du présent rapport, le projet de nouveau statut du SG-CIPDR, suspendu pendant la période de la dissolution, est toujours en cours, et doit être prochainement acté lors d'une réunion interministérielle, selon les informations fournies par son secrétaire général.
b) La transparence de la répartition territoriale des crédits doit être accrue, de même que les actions financées
Les crédits demandés dans le présent projet de loi de finances pour le FIPD s'élèvent à 62,41 millions d'euros en AE comme en CP, soit un montant stable par rapport à 2024, auquel s'ajoute les 31,9 millions d'euros, en hausse par rapport à 2024, destinés à financer le déploiement de dispositifs de vidéoprotection sur la voie publique du ministère de l'intérieur, des collectivités territoriales et des acteurs privés, dont les crédits sont regroupés depuis la loi de finances pour 2024 au sein d'une nouvelle action 11 éponyme.
Les dépenses d'intervention du FIPD, qui composent la quasi-totalité de ses crédits, ont vocation à financer de multiples actions regroupées en quatre thématiques : la prévention de la délinquance (dit « programme D »), la prévention de la radicalisation (dit « programme R »), des dispositifs de sécurisation des établissements scolaires et sites sensibles (dits « programmes S et K »), et enfin, les actions de prévention des dérives sectaires. Au fil des années, les actions financées par ce fonds se sont diversifiées, notamment avec le rattachement de la MIVILUDES en 2020 ou encore le financement du déploiement d'intervenants sociaux au sein des commissariats de police et des unités de gendarmerie (ISCG) sur le programme D, si bien que l'intitulé du fonds n'a plus grand chose à voir avec la diversité des actions financées.
Dépenses d'intervention du FIPD en 2025
(en millions d'euros)
|
Actions financées |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Prévention de la délinquance (D) |
Actions en faveur des jeunes exposés à la délinquance ou la récidive, des personnes vulnérables, pour améliorer la tranquillité publiques et soutien et ingénierie aux projets |
38,4 |
39,5 |
Prévention de la radicalisation (R) |
Mise en oeuvre du plan national de prévention de la radicalisation, financement des quartiers de reconquête républicaine (QRR) |
12,7 |
13,1 |
Sécurisation |
Sécurisation des sites exposés aux risques terroristes (établissements scolaires et lieux de cultes) et subventions d'équipements des polices municipales |
10 |
8,7 |
Lutte contre les dérives sectaires |
Campagnes nationales de prévention et soutiens aux associations, pilotées par la MIVILUDES |
1 |
0,7 |
TOTAL |
62,1 |
62 |
* La lutte contre les dérives sectaires était intégrée au programme R jusqu'en 2024, mais s'autonomisera en 2025. 1 million était consacré en 2024 dans le programme R, sur les 13,7 millions alloués à ce programme.
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Il ressort des auditions et déplacements menés par la rapporteure spéciale au moins deux sujets dans l'attribution des crédits du FIPD : d'une part, des critères de répartition territoriale des crédits assez peu transparents, et d'autre part, un problème de lisibilité des actions financées alimenté par la fongibilité des enveloppes des programmes financés.
En premier lieu, l'attribution initiale des crédits dépend du SG-CIPDR67(*), qui notifie aux régions leurs dotations annuelles pour les programmes D, R et S. Le préfet de région procède alors à l'affectation des crédits à chaque département, puis il appartient au préfet de département d'attribuer les crédits à partir d'un appel à projets départemental. Il apparaît que les modalités d'attribution des crédits sont assez peu transparentes et harmonisées à tous les stades de la procédure. Les crédits sont répartis par le SG-CIPDR entre régions en fonction notamment de la taille des départements, de l'importance de la délinquance constatée dans la région et du nombre de personnes radicalisées. Selon les données transmises par le SG-CIPDR, l'Ile-de-France et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur attraient à elles seules plus de 30 % des dotations totales, avec respectivement 10,7 et 4,8 millions d'euros en 2024. Toutefois, la clé de répartition plus précise n'a pas été fournie à la rapporteure spéciale.
S'agissant ensuite de la répartition au sein des régions et par les préfets de département, la Cour des comptes a constaté des modalités de répartition divergentes selon les régions « mais relèvent souvent d'une reconduction des répartitions passées »68(*), et une répartition par les préfets de département des crédits avant même que les orientations fixées par la circulaire annuelle ne soient connues, caractérisant plus globalement une « gestion du FIPD défaillante ».
En second lieu, s'il convient de saluer la souplesse dans l'exécution des crédits permise par la fongibilité des crédits entre les trois programmes D, R et S gérés au niveau départemental, portée à 30 % en 202369(*), il est ressorti de l'audition du SG-CIPDR menée par la rapporteure spéciale un certain dévoiement dans l'utilisation des crédits. Faute de dépôt de projets par des associations, les crédits a priori fléchés pour la prévention de la radicalisation sont, de fait, utilisés dans plusieurs départements pour équiper les communes en dispositifs de vidéoprotection, et constituent ainsi des enveloppes complémentaires d'achat de caméra. A contrario, le seuil de 30 % peut aussi être trop contraignant pour certains départements, peu exposés au phénomène de radicalisation. Ainsi, lors de son déplacement, la rapporteure spéciale a pu constater que, faute de nombreux appels à projet en lien avec la radicalisation, le département allait organiser un « escape game » sur le communautarisme.
Dans ce contexte, la rapporteure spéciale estime qu'il convient d'accroître la transparence quant à la clé de répartition des crédits, qui doit être améliorée pour mieux tenir compte des besoins au niveau local.
Les intervenants
sociaux au sein des commissariats de police
et des
unités de gendarmerie (ISCG)
Dans le cadre de la stratégie nationale prévention de la délinquance 2020-2024, l'objectif fixé est que tous les départements soient dotés d'au moins deux intervenants sociaux au sein des commissariats de police et des unités de gendarmerie (ISCG).
Pour ce faire, dans le cadre de la LOPMI, il est prévu la création de 200 postes supplémentaires, pour aller jusqu'à 600 postes, ce qui représente 40 créations de postes par an sur toute la durée de la programmation.
Dans les territoires, il revient au préfet de piloter le déploiement du dispositif, en mobilisant les financements de différents partenaires : le conseil départemental, les conseils municipaux mais également des associations. Le préfet dispose pour ce faire des crédits du FIPD, qui lui permettent de donner une impulsion au dispositif : ainsi, le fonds couvre 80 % du coût la première année, 50 % la deuxième et 30 % la troisième.
Selon les informations transmises par le SG-CIPDR, la prise en charge à 30 % par le FIPD, sera maintenue en 2025. Ainsi, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, 9,5 millions en CP sont prévus au sein du programme de prévention de la délinquance afin de financer les postes d'ISCG, soit une augmentation de + 0,5 million par rapport à 2024.
Si les objectifs n'ont jamais été atteints entre 2020 et 2023 du fait notamment de la difficulté des territoires à construire des partenariats financiers pérennes, des progrès importants ont été réalisés. Ainsi, tous les départements sont aujourd'hui dotés d'au moins un ISCG depuis la fin de l'année 2023. Entre 2019 et 2023, leur nombre est passé de 281 à 468 ISCG fin 2023. En fin d'année 2024, 480 ISCG sont en poste sur tout le territoire.
Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
2. Des dépenses de vidéoprotection de la voie publique en augmentation, mais des paiements toujours en attente dans les territoires
Depuis le 1er janvier 2024, la gestion des crédits de vidéoprotection, hors établissements scolaire et lieux de cultes, portés par l'action 11 du programme 216, est confiée à la direction des entreprises et des partenariats de sécurité et des armes (DEPSA), créée par décret du 5 juillet 2023. Ainsi, la DEPSA est en charge du pilotage de tous les projets de vidéoprotection sur la voie publique portés par les communes et les dispositifs de caméra installés par les bailleurs sociaux.
Alors même que leur gestion a été transférée à la DEPSA, ces crédits relèvent toujours en 2025 du FIPD. S'agissant d'une éventuelle adaptation du cadre financier de ces subventions de vidéoprotection, aligné pour l'heure sur les modalités de gestion et d'engagement des crédits du FIPD, la DEPSA a indiqué à la rapporteure spéciale que « ce sujet fait actuellement l'objet de réflexions dont les points d'aboutissements possibles ne sont pas encore connus »70(*).
Partant du constat que les demandes de subventions de dispositifs de vidéoprotection sont depuis de nombreuses années structurellement supérieures aux volumes financés71(*), le projet de loi de finances pour 2025 procède à une augmentation de 7 millions des crédits de l'action 11, passant ainsi de 24,9 millions d'euros en 2024 à 31,9 millions d'euros en AE comme en CP en 2025. Cette hausse de plus de 28 % des crédits en 2025 permettra de financer le déport d'images vers les centres opérationnels de police et de gendarmerie nationales pour maximiser l'impact opérationnel des dispositifs déployés par les collectivités, le développement de centres de supervision urbains (CSU) mutualisés entre communes de moyenne et petite tailles ou, en application des nouvelles opportunités offertes par la loi pour une sécurité globale préservant les libertés, dans le cadre de syndicats mixtes, les dispositifs figurant dans les contrats de sécurité intégrée (CSI), le renouvellement des dispositifs devenus obsolètes ou encore le déploiement de dispositifs de vidéoprotection pour la sécurisation des transports.
Or, la revalorisation des moyens dédiés à la vidéoprotection s'inscrit dans un contexte d'augmentation des restes à payer du FIPD, dont le montant s'élève à 41,98 millions d'euros fin 2023, soit 51 % des ressources totales du FIPD pour l'année de référence. Ainsi, la Cour des comptes a constaté que « sur l'ensemble de la période 2016-2023, l'essentiel des restes à payer est constitué par le volet « S » sécurisation du FIPD, pour 313 millions d'euros, et plus particulièrement la vidéoprotection qui représente à elle seule 27,1 millions d'euros soit 87 % des restes à payer du volet S et 65 % de l'ensemble des restes à payer »72(*).
La rapporteure spéciale déplore que la création de la DEPSA ne se soit pas accompagnée, pour l'heure, d'une revue des différents engagements gérés au niveau des préfectures. En effet, lors de son déplacement en Indre-et-Loire, les services préfectoraux ont indiqué à la rapporteure spéciale qu'ils n'avaient jamais eu de retour de la DEPSA sur les demandes de vidéoprotection des communes formulées en 2024, qui prend la forme d'un tableau transmis à cette direction, et que la préfecture a dû engager des dépenses, avec des paiements qui n'ont pour l'heure pas été reçus. Sollicitée sur ce point précis, la DEPSA n'a pas fourni d'éléments de réponse à la rapporteure spéciale.
SECONDE PARTIE
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS ET LES POINTS
DE
VIGILANCE DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE
I. UNE CONTRACTUALISATION MASSIVE DES EFFECTIFS DES SERVICES DÉCONCENTRÉS ET CENTRAUX DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR EN DISSONANCE AVEC LE CARACTÈRE RÉGALIEN DES MISSIONS ASSUMÉES
A. UNE CONTRACTUALISATION DIFFUSE QUI CONCERNE TOUS LES PROGRAMMES DE LA MISSION ET LES OPÉRATEURS
1. Une contractualisation accrue des services préfectoraux concomittante à la baisse continue des effectifs
a) Une contractualisation marquée au sein des services préfectoraux, qui ne se tarit pas, particulièrement pour les CERT
En 2024, le taux de contractuels au sein de l'administration territoriale de l'État atteint 13,5 %.
La contractualisation est encore plus marquée s'agissant de certains services, et plus particulièrement les centres d'expertise et de ressources des titres (CERT), qui ont remplacé les services « titres » des préfectures et sous-préfectures, à partir d'avril 2017 pour les documents d'identité des personnes (CNI et passeports), et de novembre de la même année pour les permis de conduire et les certificats d'immatriculation des véhicules. En effet, depuis leur création, les effectifs des CERT ont toujours été constitués d'un taux de contractuels de l'ordre de 25 %, avec un pic à près de 29 % en 2023. Depuis 2022, ce sont les CERT dédiés aux CNI et passeports et certificats d'immatriculation de véhicule qui sont composés de la plus grande part de contractuels. Par exemple, pour l'année 2023, l'ensemble des CERT CNI et passeports comprenaient 42,5 % de contractuels dans leurs effectifs. La rapporteure spéciale relève à ce titre une certaine incohérence entre le fait d'interdire le télétravail pour des raisons de sécurité informatique dans ces CERT, tout en confiant une grande partie des missions à des agents contractuels.
Répartition des effectifs entre titulaires
et contractuels dans les CERT
de 2018 à 2024
(en milliers)
Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
La politique de contractualisation au sein des préfectures s'explique principalement par les suppressions de poste sur la période 2010-2020, qui ont engendré plus particulièrement le recrutement de vacataires au sein des CERT et des services étrangers. Dans son rapport de 202273(*), la Cour des comptes a pris le soin de préciser que les « vacataires » dont il est question, improprement désignés par le ministère de l'intérieur, « ne sont pas des agents recrutés pour une mission spécifique et rémunérés à la vacation, qui correspondent à la définition légale des vacataires. Il s'agit d'agents contractuels remplissant des missions permanentes mais recrutés sur des contrats infra-annuels ».
b) Une utilisation de plus en plus fréquente des vacataires non comptabilisés dans le schéma d'emplois
En 2022, la Cour des comptes constatait que les vacataires représentaient de manière pérenne 10 % des emplois en préfectures. En 2023, la durée moyenne des contrats était de l'ordre de 376 jours, illustrant ainsi la forte part des contrats infra-annuels au sein des recrutements sur contrat.
Le plan de renfort triennal susmentionné de 2022 à 2024, en vue de soutenir l'activité des services « étrangers », est symptomatique de cette politique du recours aux contrats infra-annuels pour exercer pourtant des missions permanentes.
La rapporteure spéciale déplore ce dévoiement du schéma d'emplois, qui permet de masquer la réalité des besoins en termes d'effectifs, notamment au sein des services en charge du séjour, de l'éloignement et de l'asile. En effet, particulièrement dans ces services, les préfectures signent des contrats de très courte durée, renouvelés autant que de besoin, souvent avec le même agent, jusqu'au 30 décembre où tous les contrats expirent afin de ne pas peser sur le schéma d'emplois.
La rapporteure spéciale a pu directement constater cette situation lors de son déplacement à la préfecture d'Indre-et-Loire. Les contractuels composant les services « étrangers » y sont tous recrutés pour une très courte durée, en général de l'ordre de 3 à 6 mois, mais jamais plus d'un an. Il apparaît ainsi que les contrats à durée déterminée de trois ans, qui se pratiquent pourtant dans le reste de la fonction publique, ne sont jamais utilisés dans leurs services « étrangers ».
En réaction à la recommandation de la Cour des comptes, qui entendait limiter le recours aux contrats infra-annuels au sein des préfectures74(*), le ministère de l'intérieur a mentionné qu'il s'agissait d'une modalité adaptée en cas de pic d'activités, et « s'avère également pertinent pour faire face de façon ponctuelle à la vacance temporaire de certains postes, du fait de mobilités ou d'absences d'agents titulaires »75(*).
2. Une contractualisation poussée également observée au niveau des services centraux du ministère de l'intérieur et des opérateurs de la mission
Au-delà des préfectures, les services centraux du ministère de l'intérieur ont aussi massivement recours à des contractuels. Pour 2025, dans le cadre du plafond d'emplois de 10 931 ETPT demandés pour le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », le ministère de l'intérieur estime à 28,7 % la part des contractuels dans la catégorie des personnels administratifs. Il convient de relever que pour ce programme, les autres catégories d'emploi ne recensent que des titulaires, les contractuels, qu'ils soient techniques ou administratifs, étant comptabilisés dans la catégorie des emplois administratifs.
Le programme 232 « Vie politique » n'échappe pas non plus à ce phénomène. En 2024, 70,9 % des effectifs de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques sont des contractuels. En effet sur les 55 ETPT autorisés par le plafond d'emploi, la commission compte 16 fonctionnaires et 39 agents contractuels (13 en contrat à durée indéterminée - CDI, et 26 en contrat à durée déterminée - CDD).
Enfin, la proportion de personnels contractuels est encore plus importante s'agissant des différents opérateurs de la mission AGTE.
Tout d'abord, le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), opérateur dont les crédits sont rattachés au programme 216, est composé à 64 % d'agents contractuels, et 30 % des effectifs sont recrutés sur contrat à durée indéterminée. Selon les informations transmises par le CNAPS, ces proportions sont stables depuis cinq ans.
Le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS)
Le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) est un établissement public administratif, placé sous la tutelle du ministère de l'intérieur, avec une tutelle métier de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ), et une tutelle financière de la direction de l'évaluation de la performance, de l'achat, des finances et de l'immobilier (DEPAFI). Il est chargé de contrôler les activités privées de sécurité régies par le livre VI du code de la sécurité intérieure (surveillance et gardiennage, transports de fonds, protection de l'intégrité physique des personnes, sûreté aéroportuaire, recherches privées et protection des navires). Il exerce ainsi des missions de police administrative d'autorisation des activités visées, de contrôle et de sanction disciplinaire, mais aussi de conseil et d'assistance à la profession.
Les services centraux du CNAPS s'appuient sur sept délégations territoriales sur le territoire métropolitain, dirigées par des délégués territoriaux qui sont des attachés principaux, et quatre antennes en outre-mer, qui sont seulement chargées de faire du conseil sur place, l'instruction des dossiers étant réalisée en métropole, grâce aux procédures de dématérialisation. Les décisions individuelles, d'acceptation ou de refus d'autorisation d'exercer les activités privées de sécurité, sont prises au niveau territorial par les chefs des délégations, chacun disposant à cet effet d'une délégation de signature du directeur du CNAPS.
Cet établissement public est financé par une subvention pour charges de service public, et, depuis 2023, par une subvention pour charges d'investissement qui s'élève à 17,5 millions d'euros, montant constant depuis 2017, inscrit sur le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ». Le projet de loi de finances pour 2025 opère un rebasage de la subvention pour charge de service public, de l'ordre de 0,87 million d'euros, afin de financer les mesures générales de revalorisation des rémunérations au sein de la fonction publique, portant ainsi le budget total du CNAPS à 18,37 millions d'euros.
Son plafond d'emplois est quant à lui de 217 ETPT pour 2025, soit en diminution de 4 ETPT par rapport en 2024, transférés au service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS). Cette externalisation de certaines enquêtes préalables dites de « moralité » dès le stade de l'entrée en formation, qui représentent un volume de 25 000 enquêtes, doit permettre d'accroître la célérité des contrôles menés, dans la mesure où le SNEAS a un accès direct aux fichiers de renseignements.
Si ce plafond d'emplois n'a pas permis pour l'heure d'augmenter le nombre de contrôles, de l'ordre d'un contrôle par entreprise tous les six ans en moyenne, le directeur du CNAPS estime que l'intensification des contrôles sera un des enjeux pour les années à venir, au regard du nombre croissant d'entreprises de sécurité privée en France (12 000 entreprises, dont 8 000 autoentreprises).
Source : commission des finances, d'après les éléments transmis par le CNAPS
De même, pour l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), opérateur rattaché au programme 354, la part des contractuels prédomine nettement, avec des effectifs composés à 78 % d'agents contractuels. La part des agents recrutés en CDI est toutefois croissante, et représentent 63 % des recrutements contractuels.
B. LE RECOURS À DES CONTRACTUELS NE DOIT PAS ÊTRE LE MODÈLE PRIVILÉGIÉ DÈS LORS QU'IL EXPOSE LE MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR À UNE PERTE DE COMPÉTENCES
1. La contractualisation peut être sollicitée de façon ponctuelle mais ne doit pas être un obstacle à la réinternalisation des compétences, notamment dans le domaine informatique
a) Un recours aux contrats fondé pour des compétences très spécifiques à court terme ou lié à la structure de la personne publique employeur
L'article L. 311-1 du code général de la fonction publique (CGFP) pose le principe selon lequel les emplois civils permanents de la fonction publique ont vocation à être confiés à des fonctionnaires.
A contrario, il est possible de recourir à des agents contractuels sur des emplois non permanents soit en cas « d'accroissement temporaire ou saisonnier d'activité », soit lorsque « cette charge ne peut être assurée par des fonctionnaires de l'État », conformément aux dispositions de l'article L. 332-22 du CGFP.
Toutefois, il est possible de recruter des agents contractuels pour répondre à des besoins permanents de l'administration, dans des cas limitativement énumérés par le CGFP76(*), et par exemple :
- sur l'ensemble des emplois permanents au sein des établissements publics de l'État ;
- lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ;
- lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient, notamment, pour des fonctions nécessitant des compétences techniques spécialisées ou nouvelles ou lorsque l'autorité de recrutement n'est pas en mesure de pourvoir l'emploi par un fonctionnaire de l'État présentant l'expertise ou l'expérience professionnelle adaptée aux missions à accomplir dans un certain délai.
Ainsi, le recrutement massif de contractuels à l'échelle de tous les programmes de la mission AGTE se fonde sur une utilisation maximaliste de ce cadre légal.
Par exemple, le recrutement de contractuels par le CNAPS est justifié par le statut juridique de cette entité, qui est un établissement public administratif. Au sein des 78 % d'effectifs contractuels du CNAPS, 36 % sont des fonctionnaires détachés sur contrat. Lors de son audition par la rapporteure spéciale, le directeur du CNAPS a par ailleurs affirmé que le recours à des juristes ou des informaticiens par contrat ne posait pas de difficulté pour l'établissement public, qui s'engage d'ailleurs dans une démarche de « CDIsation ».
De même, la large majorité de contractuels au sein du SAAMI a permis de recruter des agents issus du secteur de l'assurance, qui lui apportent leurs compétences professionnelles et leur expérience dans ce domaine, et alors qu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes.
Si la rapporteure spéciale estime que pour ces cas particuliers et ces compétences précises, la contractualisation peut être une richesse à court et moyen termes, il n'en va pas de même s'agissant des métiers informatiques, alors même que le ministère de l'intérieur a présenté des engagements forts en matière numérique dans le cadre de la LOPMI.
b) Un recours plus problématique à une contractualisation poussée dans le domaine informatique, dans le cadre de la montée en puissance numérique du ministère de l'intérieur
Dans le domaine informatique, le recours à des contractuels est bien moins évident, dès lors qu'il existe des corps de fonctionnaires dédiés, d'ingénieur des systèmes d'information et de communication (SIC) du ministère de l'intérieur (catégorie A) et de technicien (catégorie B). Par ailleurs, en 2025, la maîtrise de compétences informatiques poussées devient incontournable à l'heure de la transformation numérique et du développement de l'intelligence artificielle, et doit devenir une véritable compétence de l'État et ses services.
Des années de contractualisation, à défaut de développer des compétences propres, ont conduit l'État à alimenter sa propre dépendance vis-à-vis de contractuels, voire de prestataires extérieurs. Auditionnée par la commission d'enquête du Sénat sur l'influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques77(*), la secrétaire générale du Gouvernement, Claire Landais, avait affirmé que « dans le champ informatique et numérique, il est évident que le recours aux cabinets de conseil est lié à des manques internes, qui sont comblés par des compétences extérieures pointues ».
Le directeur de la transformation numérique, auditionné par la rapporteure spéciale, a indiqué que si le ministère de l'intérieur s'était lancé dans une trajectoire de réinternalisation des compétences en matière informatique et numérique, celle-ci allait toutefois être difficile à tenir au regard de l'absence de créations d'emplois en 2025. Outre des postes supplémentaires, la limitation de la contractualisation passe aussi par la valorisation de l'attractivité des postes existants.
2. La contractualisation illustre plus profondément un manque d'attractivité de la fonction publique, à laquelle des réponses à la marge ont pour l'instant été apportées par le ministère de l'intérieur
a) Un manque d'attractivité des services préfectoraux constaté et reflété par le nombre de postes non pourvus
Afin de mesurer l'attractivité de l'administration territoriale de l'État, deux indicateurs de performance, introduit par la loi de finances initiale pour 2023, renseignent le nombre et de pourcentage de postes non pourvus au niveau national (indicateur 1.1) et le nombre de préfectures dont le nombre de postes non pourvus est supérieur à 3 % (indicateur 1.2). Pour le premier indicateur, l'objectif cible pour 2024 est de 670 postes et 3 % de postes non pourvus au niveau national. Pour le second indicateur, la cible est de 55 préfectures, dans l'optique d'identifier les préfectures les plus en difficulté. Le bilan relatif à l'atteinte des objectifs fixés en termes de saturation des postes pourra être réalisé à l'issue de l'exécution 2024, à laquelle la rapporteure spéciale sera attentive.
Selon les données transmises par la DMATES, au mois de juin dernier, dix préfectures présentaient un taux de vacance le plus élevé sur les postes pérennes, de 8 % en Saône-et-Loire à près de 14 % dans les Alpes-Maritimes.
Face à cette situation, la posture de la DMATES semble assez passive, en déplaçant le centre de gravité du problème vers les agents eux-mêmes, qui seraient désireux de rester peu de temps sur les postes. Si la rapporteure spéciale ne nie pas ce phénomène, elle considère qu'il s'agit uniquement d'un volet d'un problème plus large, auquel la DMATES apporte peu de réponses concrètes en termes de vie quotidienne pour les agents. En effet, le ministère de l'intérieur a simplement indiqué que « la réduction du taux de vacance, qui explique une partie du recours aux contractuels infra-annuels, passe par une action de long terme pour améliorer l'attractivité des postes, des carrières et des territoires, ce qu'a entrepris le ministère de l'intérieur depuis plusieurs années, avec des mesures catégorielles dédiées à certains métiers de l'administration territoriale, une facilitation des mobilités ou encore des relocalisations de services centraux dans des territoires considérés comme peu attractifs ».
Plus concrètement, la rapporteure spéciale insiste pour accélérer le recours à l'intelligence artificielle dans le traitement des dossiers, afin de fluidifier certaines tâches (délivrance des titres, aide à l'analyse des mémoires et préparation de trames de mémoires en défense dans les services d'éloignement,...), et ce alors que le ministère de l'économie et des finances a déjà commencé à mettre en place des systèmes d'intelligence artificielle, notamment en matière de gestion fiscale et de lutte contre la fraude78(*).
Par ailleurs, pour les postes en CERT peu attractifs pour les fonctionnaires, la rapporteure spéciale préconise de nouveau sur l'extension du télétravail pour les agents des CERT CNI et passeports79(*), dont la nature des données traitées suffit pas à elle seule à justifier l'impossibilité de la mise en place du télétravail.
b) Une amélioration sensible de l'attractivité des métiers informatiques, qui s'accompagne d'une professionnalisation de la fonction de recrutement
Plusieurs mesures ont été mises en oeuvre s'agissant de l'attractivité des métiers informatiques, coordonnées par la direction des ressources humaines du ministère de l'intérieur et la DTNUM.
En premier lieu, le ministère de l'intérieur s'est engagé dans une démarche de contractualisation plus « fidélisante » pour les métiers informatiques, si bien que près de 80 % des contrats proposés aujourd'hui sont des CDI, avec un grand nombre encore de stock de CDD en cours.
En deuxième lieu, si les marges de manoeuvre budgétaires sont limitées pour 2025, le présent projet de loi de finances procède toutefois à une revalorisation des rémunérations des contractuels dans la filière numérique, pour un montant de 2,1 millions d'euros, et le projet de création d'emplois fonctionnels de chefs de projet SIC, pour un coût de 0,08 million d'euros. Ces revalorisations interviennent dans le contexte d'une actualisation, en janvier 2024, du référentiel de rémunération des 55 métiers de la filière numérique élaboré avec la direction générale de l'administration et des finances publiques (DGAFP) et la direction du budget.
En troisième et dernier lieu, les délais de recrutement ont diminué de 50 jours en deux ans. Cette amélioration a été permise grâce à une professionnalisation de la fonction de recrutement, nécessaire afin de capter le plus rapidement les meilleurs profils.
Si la rapporteure spéciale salue ces évolutions, il convient toutefois de mettre en cohérence les rémunérations du corps des ingénieurs SIC de catégorie A, dont la grille indiciaire est plate depuis dix ans, afin de rendre le concours au moins aussi attractif que le recrutement sur contrat pour exercer une tâche précise.
II. DES MISSIONS DÉMULTIPLIÉES DE FRANCE TITRES, QUI NE S'ACCOMPAGNENT POUR L'HEURE PAS DES RESSOURCES CORRESPONDANTES
A. UNE EXTENSION DES MISSIONS DE FRANCE TITRES DANS UN CONTEXTE DE DEMANDES DE TITRES TOUJOURS SOUTENUE
1. Une intégration du programme « France Identité numérique » aux nombreuses missions de l'ANTS, devenue France Titres
Depuis la création de l'Agence nationale des titres sécurisés en 2007, établissement public administratif dont les crédits sont rattachés au programme 354, devenu « France Titres » avec le décret n° 2024-146 du 26 février 2024, ses missions n'ont cessé de se diversifier au sein de la chaîne de délivrance des titres. Elle n'est pour autant pas l'autorité de délivrance puisque ce sont les préfets, autorités fonctionnelles des CERT, qui instruisent les demandes de titres et se prononcent sur leur délivrance.
Elle intervient toutefois tout au long de la chaîne de délivrance des titres sécurisés en exerçant un rôle d'interface entre les différents acteurs : les mairies pour le recueil des demandes, les centres d'expertise et de ressources des titres (CERT) dans les préfectures pour l'instruction, IN Groupe80(*) pour la production et enfin la Poste et ses filiales pour l'acheminement. La Cour des comptes a ainsi constaté que « le rôle de l'Agence est d'autant plus diffus qu'elle externalise largement chacune des missions qui lui incombe, en matière de systèmes d'information, de production et d'acheminement des titres, comme d'appui aux usagers »81(*).
S'agissant de cette dernière mission, depuis la crise de délivrance des titres, France Titres assure une mission d'assistance accrue aux mairies et aux préfectures, d'une part, avec le déploiement de dispositifs de recueil dans les mairies82(*), et, aux usagers, d'autre part, avec un accueil téléphonique dénommé « centre de contact citoyens » (CCC), qui gère d'ailleurs aussi l'assistance pour l'ANEF. L'activité du CCC a considérablement augmenté avec l'ANEF, qui représente aujourd'hui plus de 10 % des appels.
Enfin, le décret du 26 février 2024 procède à une intégration du programme « France Identité Numérique » au sein des missions de l'agence, alors même qu'elle portait déjà les crédits de ce programme d'identité numérique régalienne, qui concerne tous les titres dématérialisés, et dépasse ainsi le cadre de la mission AGTE. France Titres porte également un autre projet majeur, la refonte du système d'immatriculation des véhicules (SIV). Le budget de France Titres finance les 96,6 millions de crédits dédiés à ce projet sur la période 2021-2027, avec la prise en charge des ressources humaines et financières pour le marché de réalisation de la refonte SIV, l'assistance à maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre, les infrastructures, l'hébergement et l'exploitation du nouveau système d'information.
2. Des délais moyens de délivrance en baisse malgré une demande de titres toujours soutenue
France Titres suit et communique les données relatives aux indicateurs 3.1 « délais moyens d'instruction des titres » et 3.2 « délais moyens de mise à disposition des cartes nationales d'identité et passeports » des projets et rapports annuels de performances (PAP et RAP) du programme 354 « Administration territoriale de l'État », et joue ainsi un rôle dans la réalisation des objectifs de ce programme.
Alors que les délais de délivrance des titres ont été fortement dégradés en 2022 et 2023, une baisse sensible des délais est observée en 2024, particulièrement à partir du mois de juin, et ce, alors même que le niveau des demandes de titres sécurisés demeure élevé. En effet, selon les estimations de France Titres, jusqu'à 13,5 millions de titres pourraient être délivrés en 2024. Cela constitue une légère baisse par rapport à 2023, avec 15 millions de titres délivrés, mais qui caractérise un niveau de demandes toujours soutenu et plus élevé que les niveaux observés avant la crise sanitaire83(*). À ce propos, France Titres indique que « le rattrapage de la demande consécutif à la baisse sensible constatée pendant la crise sanitaire pour les titres d'identité peut être considéré comme terminé »84(*).
Pour 2024, les délais moyens se rapprochent des objectifs cibles, avec malgré tout un délai moyen toujours en recul par rapport à la cible s'agissant des délais d'instructions des passeports et des permis de conduire, respectivement de 20 et 23 jours en moyenne, contre 15 jours dans le PAP pour 2024. Le délai moyen pour les cartes nationales d'identité (CNI) est quant à lui en-deçà de deux jours du délai cible.
Délais moyens de délivrance des titres sécurisés de 2022 à 2024
(en jours)
Source : France Titres
Une décomposition des délais permet d'observer que, pour les CNI, les délais de prise de rendez-vous en mairie et d'instruction pèsent lourdement dans le délai total de délivrance, qui comprend aussi le délai d'acheminement d'un jour en général.
Délais de prise de rendez-vous, instruction et production des CNI
de janvier à août 2024
(en jours)
Source : commission des finances, d'après les données transmises par France Titres
Pour les passeports, la même tendance est observée, avec des délais aussi plus longs de production, de l'ordre de 9 jours en moyenne de janvier à août 2024.
Si France Titres constate une meilleure anticipation des demandes de titres, cette agence devra toutefois largement anticiper la vague de renouvellement des cartes nationales d'identité et permis de conduire qu'il est prévu d'attendre à horizon 2031 et 2033. En effet, d'ici 2033, 30 millions de permis de conduire devront être remplacés, en lien notamment avec le développement de l'identité numérique.
B. UNE TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE PEU SOUTENABLE AU REGARD DES ÉCHÉANCES À VENIR
1. Un solde budgétaire négatif depuis 2023, qui ne pourra pas être absorbé à terme par la trésorerie de Frances Titres
Les recettes de France Titres se composent de taxes affectées et de ressources propres. Les principales taxes perçues sont celles relatives aux passeports, au regard de leur prix élevé par rapport aux autres titres, mais aussi la taxe relative au système d'immatriculation des véhicules ou encore la redevance d'acheminement du certificat d'immatriculation. À l'exception de cette dernière redevance, toutes ces taxes sont limitées à un plafond fixé par le ministère de l'intérieur, qui correspond, selon les données de la Cour des comptes, « en moyenne à 55 % de la taxe sur les passeports et à 74 % des autres taxes »85(*). Ainsi, les recettes de France Titres ne sont pas indexées sur la production et la délivrance des titres sur lesquels les taxes sont assises. Les ressources propres de France Titres sont issues des téléservices proposés, en particulier l'usage de l'application COMEDEC par les notaires, et le financement par d'autres ministères de la délivrance d'autres titres, comme les cartes agent ministérielles.
Alors que la situation de l'agence était déficitaire en 2019, de l'ordre de - 3 millions d'euros, la période 2020-2022 a été marquée par une augmentation plus dynamique des recettes par rapport à l'évolution des dépenses, créant un excédent budgétaire de 63 millions d'euros en trois ans.
Évolution de la situation financière de France Titres entre 2019 et 2024
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les données transmises par France Titres
Toutefois, entre 2022 et 2024, la situation s'inverse et les dépenses augmentent bien plus vite que les recettes, de + 38 % pour les dépenses, contre + 15 % pour les recettes. Le poste de dépenses qui a connu la plus forte augmentation est la dépense de production de titres sécurisés, qui suit l'évolution de la demande de titres, et qui est ainsi passé de 115,3 millions d'euros en 2018 à 189,3 millions d'euros en 2023. À cet effet volume s'est ajoutée une augmentation sensible des prix, entre + 2,6 et 4 % selon les titres en 2024, renchérissant ainsi les coûts de production.
Ainsi, à partir de 2023, les excédents générés pendant la crise sanitaire, de 2020 à 2022, ont été mobilisés pour résorber le déficit constaté, et seront également absorbés par le déficit prévisionnel de 2024. Dès lors, le niveau de trésorerie attendu fin 2024, nettement inférieur au solde prudentiel préconisé par la direction du budget86(*), ne permettra plus de supporter des déficits à compter de 2025.
Au surplus, le projet de loi de finances pour 2025 maintient le plafond des taxes affectées à France Titres, alors même que la LOPMI prévoyait une augmentation de 12 millions d'euros. L'agence évalue alors ses recettes totales à 341,6 millions d'euros, alors même que le deuxième budget rectificatif récemment adopté par le conseil d'administration prévoit des dépenses à hauteur de 394,9 millions d'euros pour l'année 2024. Si les dépenses sont au même niveau pour 2025, il en découlerait un besoin de financement de l'ordre de 50 millions d'euros.
2. Si des efforts sont déployés pour maîtriser les dépenses, une trajectoire budgétaire fondée sur la baisse des demandes de titres demeure fragile
Dans ce contexte budgétaire contraint, France Titres identifie plusieurs leviers d'économies.
En premier lieu, la baisse de la demande de titres sécurisés, notamment de titres d'identité, devrait permettre de ramener la dépense liée à la production de 181 millions d'euros en 2024 à 161 millions d'euros en 2025.
En second lieu, les dépenses d'acheminement, aussi liées au niveau des demandes de titres, seraient contenues à la baisse, de l'ordre de - 20 millions d'euros, avec un envoi des certificats d'immatriculation et des permis de conduire par lettre suivie, et non plus contre signature avec vérification d'identité.
En troisième lieu, il est de nouveau prévu en 2025 de réduire des plages horaires d'accessibilité du centre de contact citoyens. Ainsi, la dépense de support usagers externalisé devrait être contenue à hauteur de 16 millions d'euros.
Enfin, le parc de dispositifs de recueil (DR) des demandes de titres d'identité déployés dans les mairies ayant notablement augmenté, il sera stabilisé en 2025. La dépense correspondante concernera en très grande partie les liaisons téléphoniques et la maintenance des DR et devrait être ramenée de 11 à 11,5 millions d'euros.
Ces mesures sont principalement basées sur une hypothèse de réduction de la demande de titre, ce qui fragilise la soutenabilité de la trajectoire budgétaire de cette agence. Par suite, la rapporteure spéciale estime que cette situation n'est pas satisfaisante, et qu'il convient de revoir les modalités et le système de financement de France Titres.
EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.
En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 20 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial, sur la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». - Les crédits demandés pour la mission « Administration générale et territoriale de l'État » (AGTE) s'élèvent à 4,9 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) et à 4,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), ce qui représente une hausse de plus de 6 % pour les CP et une baisse de 15 % pour les AE. Corrigée de l'inflation, la hausse des CP est plutôt de l'ordre de 4,5 %.
Si les crédits de la mission semblent relativement préservés, au niveau agrégé, ils sont légèrement en-deçà de la trajectoire votée dans le cadre de la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi). Au regard de l'érosion des crédits constatée depuis une dizaine d'années, il ne s'agit donc pas d'un budget fastueux pour les services centraux du ministère de l'intérieur et l'administration territoriale de l'État (ATE). La semaine passée, Bruno Retailleau a d'ailleurs admis devant nos collègues de la commission des lois que l'ATE était « à l'os ».
La hausse globale de tous les postes de dépenses des préfectures et sous-préfectures traduit un effort de rattrapage, particulièrement en ce qui concerne l'immobilier. Les dépenses immobilières de l'ATE augmentent de 41 millions d'euros en 2025, en particulier pour l'investissement de l'État propriétaire. Ces dépenses s'élèvent à 83,5 millions d'euros en AE et à 60,5 millions d'euros en CP, ce qui représente une hausse de 33,4 % en AE et de 37,5 % en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Depuis l'entrée dans la programmation issue de la Lopmi, les dépenses d'investissement de l'ATE ont augmenté de 71 % entre 2023 et 2025.
Si je tiens à saluer cette dynamique, j'ai pu constater, lors du contrôle budgétaire que j'ai mené l'été dernier, que ces moyens ne sont pas suffisants pour relever les défis de la transition écologique, auxquels le patrimoine de l'ATE est confronté. Cette revalorisation des dépenses immobilières ne s'inscrit pas dans le cadre d'une planification solide des besoins de rénovation énergétique, alors même que les obligations nationales et européennes se renforcent dans ce domaine, notamment avec la révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments, qui oblige les États membres à rénover les 16 % de bâtiments les moins performants d'ici à 2030. De plus, les dépenses de loyers, ayant augmenté de 7 % depuis 2023, sont à l'origine d'une rigidité des dépenses immobilières, qui empêche de réorienter les crédits vers de l'investissement dont l'administration territoriale aurait pourtant besoin.
Par ailleurs, en 2025, la promesse de réarmement de l'État territorial ne sera pas tenue, alors même que 45 postes devaient être créés dans le cadre de la Lopmi. Non seulement le schéma d'emploi est neutre mais le plafond d'emploi diminue de 182 équivalents temps plein (ETP). En effet, il a été décidé de ne pas pourvoir tous les postes d'experts de haut niveau créés hors plafond de la Lopmi, qui étaient censés accompagner les préfectures pour des compétences dont elles ne disposent pas. Lors de mon déplacement en Indre-et-Loire, j'ai constaté l'effet direct de cette mesure puisqu'un directeur en gestion de projet immobilier ne pourra pas être recruté pour suivre la réhabilitation d'une cité administrative prévue pour 2025. Le projet demeure donc en suspens.
Cet exemple est typique du quotidien des services déconcentrés : de nombreuses missions doivent être menées à bien sans les moyens humains nécessaires. Alors que nous entrons dans la dernière année du plan « missions prioritaires des préfectures », qui reprenait de fait la quasi-totalité de leurs missions, il apparaît qu'aucune priorité n'a été assumée et qu'aucune perspective ne se dessine pour la suite. L'absence d'allocation de moyens à la hauteur des besoins a eu des effets délétères sur au moins trois missions, pourtant jugées prioritaires.
En premier lieu, les services en charge du séjour, de l'éloignement et de l'asile sont aux abois et tournent grâce à des vacataires infra-annuels dans la plupart des territoires. Si un plan triennal de renfort en vacataires à destination de ces services a été mis en oeuvre de 2022 à 2024, nous ignorons quel sera le niveau de renfort pour 2025.
Toutefois, la priorité devrait plutôt être à la consolidation de ces services et à la fidélisation des compétences, ce que ne permet pas la contractualisation massive des effectifs, privilégiée par le Gouvernement. Par ailleurs, les gains attendus par l'administration numérique pour les étrangers en France (Anef), censée dématérialiser toute la procédure, peuvent difficilement être mesurés alors que cette application n'est pas pleinement déployée. Tous les titres de séjour ne sont pas encore disponibles sur l'application et de nombreuses pièces ne peuvent pas être téléversées au moment de la demande, ce qui nécessite un traitement par mail. L'Anef ne traite seule qu'environ 20 % des dossiers, ce qui laisse une grande marge de progression.
En deuxième lieu, les services en charge du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire sont en souffrance. Leurs effectifs sont encore en baisse et ils ne sont plus en mesure d'effectuer des contrôles efficients. En conséquence, ils doivent souvent abandonner certains pans entiers de leur activité, comme celui de la commande publique. La situation ne semble pas s'être améliorée depuis le rapport de la Cour des comptes de 2022, dans lequel on lisait : « un contrôle dont la qualité n'est pas suffisante, au regard de ses obligations constitutionnelles ».
En troisième lieu, la délivrance des titres se remet à peine de la crise des délais observée en 2022, alors même que le niveau des demandes demeure toujours bien plus élevé qu'avant la crise sanitaire. Selon les estimations de France Titres, jusqu'à 13,5 millions de titres pourraient être délivrés en 2024. Le délai moyen de délivrance s'améliore et se rapproche de l'objectif de 15 jours. Il est de l'ordre de 13 jours pour les cartes d'identité et de 20 jours pour les passeports. En revanche, le projet d'identité numérique, désormais pleinement porté par France Titres, se développe lentement et, à date, seules 1,2 million d'identités numériques ont été créées.
Enfin, je tiens à insister sur la transformation numérique, axe prioritaire de la Lopmi, qui pourrait faciliter de nombreuses tâches répétitives pour les agents en préfecture. Ces derniers sont demandeurs d'évolutions numériques, notamment pour le contrôle de légalité ou la délivrance de titres. L'utilisation de l'intelligence artificielle a été repoussée à l'horizon 2030, alors que les préfectures auraient tout à gagner à se servir de cette technologie.
Ainsi, au regard de l'ensemble des enjeux, qu'ils soient écologiques, humains ou numériques, la présence de l'État territorial ne doit pas faiblir. Les moyens alloués aux préfectures et aux sous-préfectures pour 2025 répondent a minima à cet impératif et sont plutôt insuffisants.
Concernant le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », la réalisation de deux projets immobiliers majeurs se poursuit en 2025. D'une part, 139,4 millions d'euros en CP sont destinés à assurer le paiement du marché global de construction du site unique de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Saint-Ouen. D'autre part, 296,4 millions d'euros en CP sont consacrés au projet « Universeine », qui a vocation à accueillir plusieurs services de l'administration centrale du ministère de l'intérieur à Saint-Denis, sur l'ancien site du village olympique « Paris 2024 ».
Par ailleurs, je souhaite insister sur le renforcement nécessaire du pilotage de deux volets de dépenses du ministère de l'intérieur.
Tout d'abord, les dépenses liées à la protection fonctionnelle et au contentieux sont essentielles pour assurer la fonction juridique du ministère, qui consiste à assurer la défense de l'État pour les litiges relevant de sa compétence, notamment en matière de contentieux des étrangers et de police administrative. Ces dépenses sont systématiquement sous-évaluées alors qu'elles sont très dynamiques. Il convient de procéder à la remise à niveau de ces crédits, afin d'assurer au mieux la défense de l'État devant les juridictions administratives et judiciaires.
Ensuite, j'évoquerai les actions financées par le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), à destination de la prévention de la délinquance et de la radicalisation, de la sécurisation et de la lutte contre les dérives sectaires, dont l'utilisation est coordonnée par le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR). La répartition territoriale des crédits est assez peu transparente et la fongibilité des enveloppes des programmes financés peut mener à un certain dévoiement de l'utilisation des crédits. Ainsi, faute de dépôt de projets par des associations, les crédits a priori fléchés pour la prévention de la radicalisation sont utilisés, dans plusieurs départements, pour équiper les communes en dispositifs de vidéoprotection ou organiser des escape games sur le communautarisme. On pourrait attendre une meilleure allocation de ces fonds.
En Indre et Loire, de nombreuses communes sont d'ailleurs en attente de CP pour financer des équipements de vidéoprotection et, ce, depuis 2022. La direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (Depsa), en charge du pilotage de tous les projets de vidéoprotection sur la voie publique depuis 2023, a fait savoir aux responsables de programmes régionaux qu'il n'y aurait pas, a priori, de dotation pour 2024. Cette situation est inacceptable et il faut procéder à une revue des différents engagements gérés au niveau des préfectures.
En conclusion, en dépit du contexte budgétaire contraint, les crédits de la mission sont en hausse. Ainsi, malgré les réserves importantes que j'ai exprimées, notamment en ce qui concerne les effectifs, je propose d'adopter ces crédits.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Derrière un rapport qui porte sur des sujets techniques, se trouvent de nombreuses problématiques de vie pratique. J'aurai quelques questions, plus que des observations.
En ce qui concerne la délivrance de titres d'identité, quel est le coût supporté par les collectivités territoriales ? Avant, l'État prenait la totalité en charge. Par ailleurs, vous avez dit que le nombre de pièces d'identité délivrées reste élevé ; quelles sont les explications ? Plusieurs rallonges budgétaires ont été allouées ; y aura-t-il un point d'équilibre financier ?
Vos propos sur le FIPD m'ont rappelé le fonds Marianne. Comment expliquer le peu de lisibilité que vous mentionnez ? Procéder à une revue des engagements à l'échelle des départements semble en effet indispensable. J'ai le sentiment que nous avons plutôt laissé filer les choses. Il s'agit pourtant de sujets sensibles, qui entrent pleinement dans les pouvoirs régaliens de l'État. Des éléments complémentaires seront les bienvenus.
M. Michel Canévet. - J'apprécie que l'augmentation des crédits dédiés à l'investissement dans les bâtiments de l'ATE ait été mise en exergue. En effet, les efforts à fournir sont nombreux, notamment pour assurer la transition écologique. Ces efforts nécessiteront-il encore des hausses de crédits à l'avenir ?
En ce qui concerne France Titres, monsieur le rapporteur général, je ne dirais pas qu'auparavant, tout était assuré par l'État. Les usagers étaient accueillis en mairie, pour remplir le dossier adressé à l'administration de l'État et pour récupérer leur titre d'identité. Nous avons supprimé de nombreuses étapes, grâce au numérique, et nous avons concentré dans quelques mairies la délivrance des titres pour l'ensemble des administrés.
Comment se fait-il que la trajectoire budgétaire de France Titres se dégrade ? Des besoins financiers importants sont-ils encore à prévoir ? Sa situation financière est-elle préoccupante ? Pour y répondre, ne faudrait-il pas augmenter la taxe sur les passeports ?
M. Marc Laménie. - A-t-on une idée de la répartition des effectifs entre l'administration centrale et l'administration territoriale ? Les préfectures et sous-préfectures ne sont pratiquement plus ouvertes au public, ce qui est regrettable, et leurs effectifs sont en baisse depuis plusieurs années. Pouvez-vous préciser le nombre de sous-préfectures en 2024, a-t-il vocation à être stable au regard des fermetures et des fusions opérées ces dernières années ?
Comment expliquer la part importante des loyers dans les dépenses immobilières ? J'étais persuadé que l'État restait propriétaire de ce patrimoine considérable. Quant aux dépenses d'investissement, elles progressent fortement ; tous les projets sont-ils indispensables ? Pourraient-ils être différés ou échelonnés ?
Enfin, s'agissant des maisons France Services, pouvez-vous détailler dans quelle mesure répondent-elles aujourd'hui aux attentes des citoyens, si elles entrent dans le champ de la mission ?
Mme Isabelle Briquet. - Le réarmement territorial annoncé n'aura pas lieu, puisque nous sommes loin de suivre la trajectoire de créations de postes. Pour mémoire, plus de 11 000 postes ont été supprimés ces dix dernières années et nous constatons les manques engendrés dans les services des préfectures. Le contrôle de légalité est exsangue alors qu'il s'agit d'une mission importante, au service des collectivités. Pour les services d'accueil des étrangers, de nombreux vacataires sont appelés en renfort alors qu'une telle mission nécessiterait des personnels titulaires. Quelle est la proportion de ces vacataires dans ces services ? Rien que pour ce point nous nous abstiendrons, malgré la hausse affichée des crédits.
La revalorisation des crédits pour la rénovation des bâtiments est insuffisante, quand il faut gravir une marche énorme pour atteindre la conformité en la matière. Le programme prévoyait des ventes de bâtiments afin de dégager des fonds pour la réhabilitation ; avez-vous des éléments à partager à ce sujet ?
Il me semblait que les crédits alloués à la vidéoprotection ne devaient plus être couverts par le FIPD ; qu'en est-il ?
M. Olivier Paccaud. - En ce qui concerne le FIPD, vous évoquez une répartition territoriale des crédits peu transparente, ce que je confirme. Dans le département de l'Oise, où une politique de diffusion de la vidéoprotection est menée, grâce à des subventions non négligeables du département et au soutien du conseil régional, les demandes soumises au FIPD n'aboutissent presque jamais. Les rares qui reçoivent une réponse favorable sont liées à des projets mis en oeuvre dans les communes les plus grandes. Ce dispositif ne concerne-t-il que les agglomérations et les grandes communes ?
S'agissant de la délivrance des titres, Michel Canévet a insisté sur le fait que les communes participaient jadis à cette tâche, mais elles ne jouaient en fait que le rôle de boîte aux lettres. Elles assument désormais la prise d'empreintes et d'autres opérations qui nécessitent du personnel, et, qu'on le veuille ou non, un désengagement de l'État est à l'oeuvre, alors que la délivrance des titres d'identité est une compétence régalienne par excellence.
En outre, vous avez évoqué des délais moyens de délivrance des titres qui me semblent bien supérieurs dans la réalité - en tout cas dans mon département -, en dépit de la multiplication bienvenue des lieux de délivrance.
Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. - Pour ce qui est du coût des titres sécurisés pour les communes munies de dispositifs de recueil, lesdites communes bénéficient de la dotation pour les titres sécurisés qui avait été réévaluée. Certaines d'entre elles m'ont indiqué que ce montant suffisait pour couvrir l'intégralité des coûts, tandis qu'il ne suffit pas pour d'autres.
La hausse des titres sécurisés devient quant à elle structurelle, nos auditions n'ayant pas permis d'en identifier toutes les causes.
Monsieur Canévet, l'effort à fournir en matière d'immobilier de l'État est considérable. Nous l'avions estimé dans notre rapport à 227 millions d'euros d'ici à 2027, alors que l'effort supplémentaire fourni cette année ne s'élève qu'à 60 millions d'euros. Nous n'en sommes donc qu'à la première étape d'un programme d'investissements très importants.
Mme Briquet évoquait la vente de bâtiments afin de dégager des ressources, il ne m'a pas été communiqué d'informations en ce sens. La tendance semble être plutôt à l'acquisition et aux constructions neuves, avec notamment la poursuite de la construction de la nouvelle sous-préfecture de Palaiseau.
Une bonne partie de l'immobilier de l'État territorial est détenu par les départements, voire par les communes : la ville de Strasbourg est ainsi propriétaire de la préfecture. Les possibilités de cessions ne sont donc pas si grandes et il faut privilégier la rationalisation, ce qui m'amène à la problématique des loyers. Il faudrait engager des travaux conséquents afin de réduire significativement le montant des locations, mais les moyens nécessaires ne sont actuellement pas disponibles. Une foncière pourrait être un outil permettant de mieux gérer l'immobilier de l'État, mais les ministères - et notamment celui de l'intérieur - ne semblent guère enthousiastes, même si des expérimentations de structures préfiguratives d'une foncière interministérielle seront lancées dans les régions Grand-Est et Normandie à partir de janvier 2025.
Monsieur Laménie, 233 sous-préfectures sont ouvertes en 2024, soit un chiffre stable depuis deux ans. Aucune création ou suppression de préfecture n'a été annoncée pour 2025. La plupart sont ouvertes au public, et disposent soit d'un point d'accueil numérique pour accompagner les usagers, soit d'un dispositif France Services. Certaines sous-préfectures sont ainsi labellisées, mais avec la participation financière d'autres acteurs.
Madame Briquet, les vacataires représentent de manière pérenne 10 % des emplois en préfectures. Je ne dispose pas du chiffre exact pour les services en charge du séjour, de l'éloignement et de l'asile, mais à titre de comparaison, le pourcentage de vacataires atteint environ 30 % pour l'instruction des titres sécurisés..
Concernant la vidéoprotection, les lieux de culte continuent de relever du FIPD, tandis que la voie publique relève de la direction des entreprises et des partenariats de sécurité et des armes (DEPSA), étant précisé que les préfectures interviennent dans le processus : les collectivités locales engagent donc des dépenses de vidéoprotection sans savoir à quelle date elles seront remboursées.
Monsieur Paccaud, vous avez tout à fait raison au sujet de la répartition des dépenses du FIPD dans les territoires, la moitié d'entre elles allant à l'Île-de-France et à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Cette répartition peut s'expliquer au regard des enjeux de radicalisation et prévention de la délinquance dans ces territoires, mais la lisibilité des crédits allouée devrait être améliorée.
Les délais de délivrance, par ailleurs, peuvent en effet varier d'un département à l'autre, mais se sont tendanciellement réduits. Je pense que nous pourrions davantage optimiser les processus et je regrette que la direction du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES) ne souhaite pas aller plus vite dans le déploiement de l'intelligence artificielle, car elle permettrait des gains d'efficience pour les contrôles répétitifs réalisés par les centres d'expertise et de ressources des titres (CERT). De nombreux progrès restent à accomplir sur le plan numérique et le ministère de l'intérieur n'est pas particulièrement en avance sur le sujet.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
*
* *
Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)
- Mme Anne-Gaëlle BAUDOIN, directrice générale ;
- Mme Pascale SAUVAGE, directrice générale adjointe ;
- M. Bruno JACQUET, secrétaire général.
Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS)
- M. David CLAVIÈRE, directeur.
Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation
- M. Étienne APAIRE, secrétaire général ;
- Mme Juliette AUBRUN, chef du département des actions transverses et des ressources.
Sous-direction de l'administration territoriale de l'État (SDATE)
- Mme Fabienne BALUSSOU, directrice du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur ;
- M. Fabien CHOLLET, adjoint au sous-directeur ;
- M. Aurélien ADAM, chef du bureau des moyens de l'administration territoriale de l'État (BMATE).
Conseil juridique et du contentieux (direction des libertés publiques et des affaires juridiques)
- M. Charles-Edouard MINET, sous-directeur ;
- M. Frédéric BOUDIER, adjoint au sous-directeur ;
- M. Arnaud DELOIT, chef de la mission du pilotage et de l'appui juridique aux territoires (MPAJT).
Direction de la transformation du numérique (DTNUM) - Ministère de l'intérieur
- M. Mathieu WEILL, directeur de la transformation du numérique ;
- M. Rémi de GOUVION SAINT CYR, sous-directeur de la Gouvernance et des Grands projets.
LISTE DES DÉPLACEMENTS
Déplacement à la préfecture d'Indre-et-Loire
- M. Xavier LUQUET, secrétaire générale et sous-préfet de l'arrondissement de Tours ;
- Mme Anaïs AÏT MANSOUR, directrice de cabinet du préfet ;
- Mme Paquita BANNIER GAUTHIER, directrice du secrétariat général commun départemental ;
- M. Alain CRESPIN, adjoint au chef de service du CERT Permis de conduire ;
- Mme Claire LÉVY, cheffe du service naturalisation, directrice par intérim de la citoyenneté et de la légalité ;
- M. Olivier PÉZIERE, adjoint à la cheffe du service naturalisation ;
- M. Christophe BOUIX, chef du bureau de l'immigration ;
- Mme Oumaima MANSOURI, adjointe au chef du bureau de l'immigration, cheffe de section séjour ;
- Mme Amélévi AGBEZOUHLON, adjointe, cheffe de section éloignement et asile ;
- Mme Christelle HAMON, cheffe du bureau des collectivités locales ;
- M. Corentin GUYARD, adjoint à la cheffe du bureau des collectivités locales ;
- Mme Nathalie GANGNEUX, adjointe et cheffe du bureau de la réglementation générale, des élections et des associations par intérim.
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2025.html
* 1 42 emplois en 2023 et 101 emplois en 2024.
* 2 Les effectifs sont ainsi passés de 83 027 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2012 à 70 608 ETPT en 2020.
* 3 Les effectifs de l'État territorial, Cour des comptes, mai 2022.
* 4 Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019.
* 5 L'article 175 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) impose en effet de parvenir à une réduction de la consommation d'énergie finale pour l'ensemble des bâtiments soumis à l'obligation d'au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010 ». Le « décret tertiaire », entré en vigueur à compter du 1er octobre 2019, prévoit que tous les bâtiments à usage tertiaire de plus de 1 000 m² construits avant le 24 novembre 2018 sont concernés par cette obligation.
* 6 Rapport d'information n° 769 (2023-2024), déposé le 24 septembre 2024, sur l'immobilier de l'administration territoriale de l'État, par Mme Florence BLATRIX CONTAT.
* 7 Hors CAS Pensions.
* 8 Hors programme 232 « Vie politique ».
* 9 Hors programme 232 « Vie politique ».
* 10 L'article 34 de la loi n° 2003-327 du 11 avril 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques a introduit un seuil de 1 % des suffrages exprimés, dans au moins cinquante circonscriptions.
* 11 Rapport d'activité 2023 de la CNCCFP.
* 12 Répartition constatée avant les résultats des élections législatives anticipées de juillet 2024.
* 13 L'article 15 de la loi organique aux lois de finances (LOLF) prévoit que les crédits de paiement disponibles à la fin de l'année peuvent être reportés, dans la limite de 3 % des crédits initiaux inscrits sur le même programme, et que ce plafond peut être majoré par une disposition de loi de finances.
* 14 Texte n° 11 (2024-2025) adopté par le Sénat le 23 octobre 2024.
* 15 Le coût des sept élections législatives partielles de 2023 a été estimé par le ministère de l'intérieur à 3,58 millions d'euros.
* 16 Le Conseil constitutionnel, dans une décision n° 91-1141 AN du 31 juillet 1991, et le Conseil d'État, dans son rapport public de 2001, ont qualifié la CNCCFP d'autorité administrative indépendante, statut ultérieurement consacré par l'ordonnance n° 2003-1165 du 8 décembre 2003 portant simplifications administratives en matière électorale, et désormais codifié à l'article L. 52-14 du code électoral. La CNCCFP est composée de neuf membres : trois membres du Conseil d'État, trois membres de la Cour de cassation et trois membres de la Cour des comptes.
* 17 Article 1er de la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990.
* 18 Article 12 de la loi n° 2024-247 du 21 mars 2024.
* 19 Rapport n° 7 (2023-2024) au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, par Mme Catherine DI FOLCO.
* 20 D'après les éléments transmis dans la contribution écrite de la CNCCFP.
* 21 25 rapporteurs pour les élections européennes et 97 rapporteurs pour les élections législatives anticipées.
* 22 Les rapporteurs de la CNCCFP assurent « l'instruction initiale des comptes, la conduite de la procédure contradictoire et la formulation des propositions qui en découlent » (article 9 du règlement intérieur).
* 23 Le projet annuel de performances ne distingue pas les dépenses d'investissement des dépenses de fonctionnement. Selon les documents budgétaires, ces 3,4 millions d'euros seraient uniquement affectés à des dépenses de fonctionnement.
* 24 Voir supra.
* 25 De nombreux bâtiments sont mis à disposition par les collectivités territoriales et n'ont pas changé de statut depuis les lois de décentralisation.
* 26 Rapport d'information n° 769 (2023-2024), déposé le 24 septembre 2024, sur l'immobilier de l'administration territoriale de l'État, par Mme Florence Blatrix Contat.
* 27 Adoption d'une directive sur la performance énergétique des bâtiments pour réduire les factures énergétiques et réduire les émissions, Représentation en France de la commission européenne, 12 avril 2024.
* 28 Directive (UE) 2024/1275 du Parlement européen et du Conseil du 24 avril 2024 sur la performance énergétique des bâtiments (refonte).
* 29 Le PNE a vocation à financer les opérations d'investissement dont le montant est supérieur à 0,1 million d'euros sur le périmètre des préfectures et des résidences préfectorales, vecteur national centralisé portant les ressources immobilières de l'État propriétaire.
* 30 Selon les informations transmises par la préfecture lors du déplacement de la rapporteure spéciale. À cela s'ajoutent d'autres loyers divers, de 40 000 euros également pour les directions départementales des territoires (DDT) et les locaux du sous-préfet à la relance.
* 31 Voir infra.
* 32 Les 122 créations d'emplois supplémentaires non prévues dans la LOPMI (77 postes d'experts de haut niveau et les 45 postes dédiés au renforcement des PFRH) ont été arbitrés au niveau interministériel par le comité interministériel de la transformation publique (CITP) du 9 mai 2023.
* 33 Audition devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, le 22 octobre 2024.
* 34 Les effectifs de l'administration territoriale de l'État, Cour des comptes, mai 2022.
* 35 Missions prioritaires des préfectures pour la période 2022-2025, 27 septembre 2022.
* 36 Sont entendus comme services « étrangers », les services en charge de la délivrance des titres de séjour, y compris les effectifs dédiés à l'accueil résiduel en préfecture, de l'éloignement, du droit d'asile.
* 37 Un cinquième des effectifs est composé de contractuels, tous embauchés sur des contrats d'un an maximum, et en moyenne de quelques mois.
* 38 L'ANEF est un portail internet dédié aux démarches dématérialisées pour les étrangers en France. Ce portail doit constituer un point d'entrée unique pour l'ensemble des opérations effectuées auprès de la direction générale des étrangers en France et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). L'objectif affiché est de réduire le nombre de passages des usagers étrangers en préfecture, ainsi que l'ensemble des tâches liées à la manipulation et à la saisie des dossiers.
* 39 La trajectoire prévisionnelle vise le déploiement complet de cette application en 2025. Pour l'heure, seuls les titres de séjour portant la mention étudiant, talents, famille de français, regroupement familial, visiteur, travailleur saisonnier, jeunes confiés à l'aide sociale à l'enfance et renouvellement de cartes de résident.
* 40 Articles L. 435-1 à L. 435-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA).
* 41 D'après les réponses de la DMATES au questionnaire de la rapporteure spéciale.
* 42 La préfecture d'Indre-et-Loire estime à 20 % la réduction d'activité liée au déploiement de l'ANEF.
* 43 Chiffres en Indre-et-Loire.
* 44 La plateforme @ctes désigne le système d'information destiné à mettre en oeuvre le contrôle de légalité dématérialisé.
* 45 Projet annuel de performances de la mission AGTE pour 2024.
* 46 Contrôle de légalité et contrôle des actes budgétaires en préfecture, Cour des comptes, novembre 2022.
* 47 Pour l'heure, le ministère de l'intérieur a indiqué que la priorité serait donnée aux services « étrangers », au CERT, et à la lutte contre la radicalisation et la fraude.
* 48 D'après les éléments de réponses écrites transmis par la DMATES.
* 49 La réunion interministérielle du 25 avril 2022 avait validé un budget prévisionnel de 1 293 millions d'euros.
* 50 Le programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance » et le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » ont assuré le financement des 12 % restants depuis 2019.
* 51 Voir supra.
* 52 Cette enveloppe couvre l'installation de luminaires LED, de robinets thermostatiques sur les radiateurs, l'amélioration de la performance du chauffage, des travaux d'isolation (combles, murs et fenêtres) et l'installation de panneaux photovoltaïques.
* 53 Note d'exécution budgétaire 2023 de la mission AGTE, Cour des comptes, avril 2024.
* 54 Par exemple, le coût de la mise en oeuvre en 2025 du référentiel interministériel de rémunération des contractuels numériques est de 2,1 millions d'euros, accompagnée de la revalorisation triennale des contrats et de la politique de « CDIsation ».
* 55 Il devait permettre la création de 50 emplois dans le numérique, 10 emplois d'inspecteurs du permis de conduire et 10 emplois hors numérique en vue de réinternaliser les compétences au sein du ministère
* 56 Plus particulièrement, la mission du pilotage et de l'appui juridique aux territoires (MPAJT), créée par arrêté du 8 janvier 2016 au sein de la sous-direction du conseil juridique et du contentieux, assure le rôle de responsable du budget opérationnel du programme (RPROG) pour la gestion des crédits contentieux du ministère de l'intérieur.
* 57 Les dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle du ministère de l'intérieur et des outre-mer, Cour des comptes, juin 2024.
* 58 Dans la mesure où il subsiste des organisations assez hétérogènes entre la police nationale et la gendarmerie nationale, susceptibles d'engendrer un octroi différencié de la protection fonctionnelle, la Cour des comptes proposait donc de maintenir un rôle de pilotage pour la DLPAJ.
* 59 La quasi-totalité des demandes relèvent des secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'intérieur (SGAMI). En 2023, sur les 26 969 demandes de protection fonctionnelle, la cellule placée au sein de la DLPAJ a eu à traiter 123 demandes, pour des agents relevant de l'administration centrale ou des dossiers sensibles.
* 60 Uniquement pour les agents qui relèvent de la DLPAJ à compter du 1er janvier 2025.
* 61 Entre 2020 et 2023, la part de la consommation du niveau déconcentré sur le total des dépenses contentieuses a en moyenne été de 83 %.
* 62 Le premier alinéa de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure prévoit que « l'État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens ».
* 63 Le ministère de l'intérieur a indiqué à la rapporteure spéciale que + 6,2 millions d'euros devaient être alloués pour les dépenses contentieuses sur la durée de la programmation, avec + 1,3 million d'euros en 2026 et + 4,9 millions d'euros pour 2027.
* 64 Les dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle du ministère de l'intérieur et des outre-mer, Cour des comptes, juin 2024 (recommandation n° 1).
* 65 Le fonds Marianne : la dérive d'un coup politique - Rapport d'information n° 829 (2022-2023), tome I, déposé le 4 juillet 2023, Jean-François Husson.
* 66 En août 2023, la nomination comme nouveau secrétaire général d'un ancien magistrat, a initié sa réforme, complétée en septembre 2024 par le recrutement d'une administratrice de l'État à la tête d'un département des actions transversales et des ressources en préfiguration de la nouvelle organisation et la transformation en une délégation interministérielle, permet de consolider les fonctions de contrôle administratif et financier au sein du SG-CIPDR.
* 67 La direction de l'évaluation de la performance, de l'achat, des finances et de l'immobilier (DEPAFI), en tant que responsable de programme, délègue au BOP FIPD une large majorité des crédits ouverts en loi de finances initiale. En 2024, 44 millions ont été délégués par le SG-CIPDR.
* 68 Le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation - Exercices 2018-2022, Cour des comptes, novembre 2023.
* 69 Seulement 20 % des crédits étaient fongibles jusqu'en 2022.
* 70 Contribution écrite de la DEPSA.
* 71 La DEPSA a par exemple indiqué que l'exercice 2023 s'est clos avec des dizaines de projets non financés, parfaitement pertinents et souhaitables, qui auraient nécessité environ 8 millions d'euros supplémentaires et ce, en dépit de la fongibilité alors possible jusqu'à hauteur de 30 % depuis les autres programmes du FIPD et dont bénéficiaient très largement les projets de vidéoprotection.
* 72 Note d'exécution budgétaire 2023 de la mission AGTE, Cour des comptes, avril 2024.
* 73 Les effectifs de l'État territorial, Cour des comptes, mai 2022.
* 74 Recommandation n° 3 du rapport sur les effectifs de l'administration territoriale de l'État.
* 75 Réponses au questionnaire budgétaire.
* 76 Tous ces cas sont prévus par les articles L. 332-1 et suivants du code général de la fonction publique.
* 77 Rapport d'information n° 578 (2021-2022) au nom de la commission d'enquête sur l'influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques sur « Un phénomène tentaculaire : l'influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques », par M. Arnaud Bazin et Mme Eliane Assassi.
* 78 L'intelligence artificielle dans les politiques publiques : l'exemple du ministère de l'économie et des finances, Cour des comptes, octobre 2024.
* 79 Rapport d'information n° 413 (2023-2024) au nom de la commission des finances pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur la délivrance des titres d'identité et de circulation, fait par Mme Florence Blatrix Contat.
* 80 IN Groupe est l'entreprise qui succède à l'Imprimerie nationale.
* 81 L'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), Cour des comptes, avril 2024.
* 82 Le parc de dispositifs de recueil (DR) dans les mairies a considérablement augmenté, de près de 40 % depuis fin 2021. Au 1er septembre 2019, 6 294 DR ont été installés, dont 5 845 dans les mairies et les annexes, dotant ainsi 3 961 communes d'un ou plusieurs DR.
* 83 9 millions de titres ont été délivrés en 2019.
* 84 D'après les éléments écrits transmis à la rapporteure spéciale.
* 85 L'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), Cour des comptes, avril 2024.
* 86 Deux mois de dépenses hors interventions.