II. LA MISSION REGROUPE DES ACTIONS HÉTÉROCLITES QUI N'ONT QUE PEU À VOIR AVEC L'OBJECTIF INITIAL DE RELANCE

A. LE REGROUPEMENT DES CRÉDITS DANS DES MISSIONS DE GRANDE TAILLE FAVORISE UNE GESTION PEU TRANSPARENTE

Dès l'origine, la mission « Plan de relance » a été fondée sur trois programmes de grande taille : lors de la première année d'exécution en 2021, 6,6 milliards d'euros de crédits de paiement ont été ouverts pour le programme 362 « Écologie », 3,9 milliards d'euros pour le programme 363 « Compétitivité » et 11,4 milliards d'euros pour le programme 364 « Cohésion ». Ce mode de gestion était présenté comme une manière de permettre une réallocation souple des crédits au profit des dispositifs dont la mise en oeuvre était la plus rapide.

Cette pratique était contestable au regard de la définition même d'un programme budgétaire qui, aux termes de l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances, « regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère ».

Elle a permis de contourner largement le principe de spécialité budgétaire, les gestionnaires de programme pouvant faire varier librement les lignes de crédit entre un dispositif et un autre.

En outre, la complexité des circuits de financement, par transferts entre programmes budgétaires ou à destination d'opérateurs, rend le suivi des crédits très difficile. Dans le cas où les crédits sont attribués aux bénéficiaires finaux par des opérateurs ou des entités publiques autres que l'État, par exemple, c'est le versement des crédits aux tiers qui est retracé dans le système d'information Chorus, et non le versement effectif aux bénéficiaires.

Au total, le constat d'un suivi budgétaire « partiel » fait en 2022 par la Cour des comptes dans un rapport remis à la commission des finances du Sénat sur la mise en oeuvre des crédits du plan de relance14(*), reste largement d'actualité et la Cour constatait encore au printemps dernier qu'aucune vision globale et consolidée de l'exécution réelle des crédits de la mission n'est disponible15(*).

B. LES DISPOSITIFS FINANCÉS N'ONT PLUS DE CARACTÈRE DE RELANCE

La mission « Plan de relance », qui devait porter des mesures temporaires de relance, finance des mesures qui devraient être imputées au budget des ministères.

On a vu supra que des crédits sont encore demandés en 2025 pour financer un projet de portail public de facturation piloté par la direction générale des finances publiques (18,6 millions d'euros) ou l'acquisition d'hélicoptères par la gendarmerie nationale (10 millions d'euros). Cette dernière mesure, portée en crédits de paiement par la mission « Plan de relance », résulte d'ailleurs d'autorisations d'engagements ouvertes dès l'été 2020 non pas sur cette mission, qui n'existait pas encore, mais sur la mission « Sécurités » et reportées en 2021 sur la mission « Plan de relance ».

La mission sert également à financer des politiques telles que le soutien à la rénovation énergétique, qui ne présentent pas le caractère temporaire qui, en principe, devait justifier leur inscription dans une mission dédiée.

En tout état de cause, l'objectif de relance de l'économie a été atteint dès l'année 2021, le rythme antérieur de croissance étant atteint au troisième trimestre de cette année-là, et ne peut donc plus être invoqué comme raison pour justifier le maintien d'une mission budgétaire.


* 14 Cour des comptes, La préparation et la mise en oeuvre du plan de relance, rapport remis à la commission des finances du Sénat en application de l'alinéa 2 de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances, annexé au rapport d'information n° 571 (2021 2022) de Jean François Husson, fait au nom de la commission des finances et déposé le 9 mars 2022.

* 15 Cour des comptes, Note d'exécution budgétaire de la mission « Plan de relance » en 2023, avril 2024.

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