DEUXIÈME
PARTIE
LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS
DE LA MISSION
« SANTÉ »
Les crédits de la mission « Santé » ont une évolution différenciée selon les programmes : les programmes 204 « Prévention, politique sanitaire et offre de soins » et 379 « Compensations à la Sécurité sociale » perdent ainsi respectivement 18,1 % et 92,5 % de leurs crédits. Inversement, le programme 183 « Protection maladie » augmente de 9,2 %, porté par la hausse des dépenses d'aide médicale d'État.
Évolution des crédits des programmes de la mission « Santé » entre 2023 et 2025
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
I. DES BAISSES DE CRÉDITS SUR LE PROGRAMME « PRÉVENTION, SÉCURITÉ SANITAIRE ET OFFRE DE SOINS », CONTRIBUANT À L'EFFORT BUDGÉTAIRE EN DÉPENSE DE L'ÉTAT
Les dotations inscrites en loi de finances initiale n'ont donné qu'une vision très partielle des actions financées par le programme 204 au cours de ces trois dernières années, puisque celui-ci a bénéficié en cours d'exercice de crédits de fonds de concours très importants pour la gestion de la crise sanitaire.
En 2024 encore, les fonds de concours rattachés au programme 204 ont bénéficié d'une dotation de 154 millions d'euros, dont 150 millions d'euros pour le fonds de concours « Participation de l'Union européenne à la constitution d'un stock de produits médicaux et non médicaux en cas d'événement nucléaire, radiologique, biologique et chimique », la DGS ayant remporté un appel d'offre européen.
En 2025 toutefois, cette caractéristique devrait s'atténuer : il n'est en effet prévu que 0,5 million d'euros pour le fonds de concours « Financements européens pour la modernisation de l'offre de soins », au titre de fonds européens. Cette évolution est à saluer, le contrôle du Parlement sur les dépenses du programme 204 « prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » s'en trouvant facilité.
Le programme 204 est doté de 229,5 millions d'euros en AE et de 221,7 millions d'euros en CP pour 2025, soit une baisse respective de 14,1 % et de 18,1 %. Plus de la moitié des crédits se concentrent sur quatre actions :
- la subvention à l'Agence de santé des îles Wallis-et-Futuna (53,6 millions d'euros) ;
- les actions juridiques contentieuses (40,6 millions d'euros), incluant la subvention de l'État à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux et des infections iatrogènes (Oniam) ;
- une subvention à l'Institut national du cancer (34,5 millions d'euros) ;
- une subvention à l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Ansés) (25 millions d'euros).
Selon les prévisions pluriannuelles, le programme 204 connaîtrait une forte baisse de ses crédits en 2026 (-6,2 % en AE) et en 2027 (- 3,9 % en AE).
La diminution des crédits du programme 204 est portée essentiellement par l'action 11 « Pilotage de santé publique », qui couvre notamment les actions juridiques et contentieuses, et par l'action 16 « Veille et sécurité sanitaire », qui correspond aux crédits dédiés à la qualité et à la sécurité des soins.
L'action 16, qui comprend les crédits alloués au fonds de concours « Participation de l'Union européenne à la constitution d'un stock de produits médicaux et non médicaux en cas d'événement nucléaire, radiologique, biologique ou chimique » par l'Union européenne, connait un recul de son enveloppe.
Évolution des crédits du
programme 204 « Prévention, sécurité
sanitaire
et offre de soins » de la mission
« Santé » entre 2024 et 2025
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
A. UNE DIMINUTION DU FINANCEMENT DES ACTIONS DE SANTÉ PUBLIQUE ET DE SÉCURITÉ SANITAIRE
Beaucoup d'actions financées par ce programme sont extrêmement dispersées, pour des montants généralement faibles, si bien qu'elles paraissent loin de disposer d'une « masse critique » suffisante pour prétendre produire un réel impact sur la réalisation des objectifs de santé publique poursuivis. Le projet annuel de performances énumère à ce titre de nombreuses contributions budgétaires à des plans nationaux ou feuilles de route5(*) dans des domaines qui ont été très largement délégués à des opérateurs aujourd'hui surtout financés par l'Assurance maladie.
1. L'Institut national du Cancer en difficulté pour financer ses projets
Les subventions aux opérateurs représentent à elles seules un peu plus du quart (26,8 %) des crédits du programme 204. Cette part est en hausse par rapport à 2024 (22 %).
Le projet de loi de finances prévoit en particulier une stabilité de la subvention destinée à l'Institut national du cancer (INCa), à hauteur de 34,52 millions d'euros, ainsi que du plafond d'emplois (131 ETPT). Cette subvention est principalement destinée à financer le fonctionnement de l'opérateur - ses dépenses d'intervention étant financées par une autre dotation provenant de la mission « Recherche » pour un montant de 80,9 millions d'euros en 2024.
La lecture du « jaune » budgétaire relatif aux opérateurs de l'État6(*) laisse voir que l'INCa enregistrerait un résultat net négatif en 2024, et en déficit de 9,5 millions d'euros, qui conduit à une diminution de 9,1 millions d'euros de son fonds de roulement. De plus, les charges de personnel et de fonctionnement de l'opérateur s'élèvent à 42,1 millions d'euros, un niveau supérieur à sa subvention du programme 204. Enfin, l'opérateur a engagé d'importantes dépenses d'intervention en 2024 (108,1 millions d'euros), qui seront décaissées lors d'exercices ultérieurs. Son fonds de roulement devrait être de 12,7 millions d'euros à fin décembre 2024.
La subvention de l'INCa en provenance de la mission « Santé » a significativement diminué depuis 2023, à hauteur de de 5 millions d'euros qui devaient normalement être reportés à 2025. La direction générale de la Santé a en particulier signalé que ce financement était considéré comme indispensable pour le lancement de l'expérimentation du cancer du poumon. Il n'est pas certain à ce stade que cette expérimentation puisse avoir lieu. Par ailleurs, près de 260 000 euros ont été annulés en raison du décret7(*) d'annulation du 21 février 2024.
Évolution de la subvention pour service public de l'INCa de 2021 à 2025
(en millions d'euros)
Note : à ce stade, le montant de la subvention du Ministère de la Recherche et de l'Enseignement supérieur pour 2025 n'a pas été décidé au vu des documents budgétaires.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
La situation financière de l'INCa constitue donc un point de vigilance pour le rapporteur spécial : s'il est normal et même souhaitable de ne pas subventionner excessivement un opérateur qui bénéficie d'un fonds de roulement confortable, il convient également de lui permettre de mener à bien ses missions. Si à l'avenir un niveau d'excédents trop important était constaté, le rapporteur soutiendrait une diminution de sa subvention ; dans l'hypothèse inverse, il recommanderait a minima de la maintenir à un niveau inchangé.
La subvention à l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS) imputée sur la mission « Santé » est stabilisée à 25 millions d'euros en 2025, soit au même niveau qu'en 2024.
2. Des dotations de fonds de concours très réduites en 2025
Sur les trois fonds de concours rattachés au programme 204 « Participation de l'Union européenne à la constitution d'un stock de produits médicaux et non médicaux en cas d'événement nucléaire, radiologique, biologique ou chimique », « Financements européens pour des actions innovantes dans le domaine de la santé » et « financements européens pour la modernisation de l'offre de soin », seul ce dernier devrait bénéficier d'ouvertures de crédits en 2025, à hauteur de 0,5 million d'euros. Ces fonds bénéficient essentiellement de financements européens.
* 5 Nutrition et santé, santé environnement, santé mentale et psychiatrie, maladie d'Alzheimer...
* 6 Annexe au projet de loi de finances pour 2025, « Opérateurs de l'État ».
* 7 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.