III. LA FIN SOUHAITABLE DES CRÉDITS EXCEPTIONNELS
Depuis le premier programme d'investissement d'avenir (PIA) jusqu'au plan France 2030, la part des crédits dits « exceptionnels » dédiés au secteur de la culture n'a cessé d'augmenter, jusqu'à atteindre plus de 3 milliards d'euros cumulés au cours des cinq dernières années. Le financement d'un certain nombre de dispositifs relevant de la mission « Culture » s'effectue par des crédits relevant du plan France 2030, notamment le programme « Mondes nouveaux » dédié à la création artistique. En outre, plusieurs programmes emblématiques de restauration du patrimoine ont été financé par des crédits du plan de relance : le financement de la Cité de la francophonie à Villers-Cotterêts est un exemple emblématique, sans que ces crédits ne relèvent véritablement de la relance.
Afin de disposer d'une meilleure visibilité sur ces financements, la commission des finances avait confié au nom de la commission des finances la réalisation d'une enquête à la Cour des comptes au titre du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances4(*). Le panorama qui ressort de ces travaux doit impérativement conduire à une réflexion sur l'usage qui a été fait de ces financements publics : lacunes dans le pilotage et l'évaluation malgré l'importance des moyens consacrés ; absence de lisibilité des dispositifs ; faiblesse du rôle de contrôle laissé au Parlement ; liens avec les filières culturelles parfois limités.
La stratification des programmes et des actions, ainsi que la multiplicité des objectifs, certains gérés directement par le ministère de la Culture ou le SGPI, d'autres confiée à des opérateurs, rendent extrêmement complexe l'établissement d'un panorama global de ces crédits, en dépit de l'importance des montants.
Dans le cas du plan de relance, l'urgence du soutien à apporter à des filières en difficulté a justifié un pilotage davantage quantitatif que qualitatif des crédits. Celui-ci a certes abouti à une consommation satisfaisante des crédits, mais avec deux conséquences : d'une part, une baisse de la sélectivité des projets financés ; d'autre part, le financement par le plan de relance de dispositifs sans lien avec la crise sanitaire.
Concernant la sélectivité des projets, le ministère de la Culture, en particulier la direction générale des patrimoines, a modulé à plusieurs reprises la liste des monuments bénéficiant de crédits « relance », afin de cibler davantage non pas les opérations les plus indispensables, mais celles dont les travaux pouvaient commencer le plus rapidement afin d'améliorer le taux de consommation des crédits.
Plus généralement, si les crédits ont été correctement consommés, la qualité des dispositifs a pu en souffrir. Ainsi, si la Cour souligne l'intérêt qu'a pu représenter le programme « Mondes nouveaux », elle indique que celui-ci « a souffert d'un défaut de visibilité et de médiation », se privant notamment de l'expertise des réseaux traditionnels de soutien à la création culturelle (fonds régionaux d'art contemporain - FRAC - notamment).
Les réponses du ministère de la Culture à la Cour des comptes
Le ministère de la Culture a indiqué à la Cour qu'un bilan du dispositif Mondes nouveaux était en cours de préparation selon les modalités préconisées (recommandation n° 1) et qu'une réflexion sur le volet Culture de France 2030 avait été lancée dès octobre 2022 et avait abouti à une feuille de route. Cette feuille de route fera l'objet d'un plan de communication pour en assurer l'intelligibilité et le meilleur suivi (recommandation n° 3). Par ailleurs, le ministère précise que, conformément aux doctrines des Investissements d'avenir, les critères d'évaluation et de sélection des projets retenus dans le cadre de France 2030, faisaient l'objet d'une publication dans les cahiers des charges (recommandation n° 4).
Concernant la place de chef de file du ministère de la Culture dans la conduite des projets des différents dispositifs d'investissements d'avenir, tant au niveau du pilotage (recommandation n° 7) que du redéploiement des crédits non utilisés par ses établissements publics (recommandation n° 5), le ministère indiquait accueillir favorablement ces propositions et étudiait les vecteurs et possibilités d'évolution avec le SGPI.
Source : ministère de la Culture
* 4 Les crédits exceptionnels à la culture et aux industries créatives : des moyens considérables, une logique de guichet, un contrôle insatisfaisant - 2017-2023.