C. LE CANTON DE GENÈVE, RELEVANT DU RÉGIME DE LA CONVENTION DE 1966, VERSE UNE COMPENSATION BUDGÉTAIRE AU PROFIT DES DÉPARTEMENTS DE L'AIN ET DE LA HAUTE-SAVOIE
La situation du canton de Genève est spécifique. Bien qu'il soit géographiquement frontalier de la France, il ne relève pas de l'accord de 1983 mais du régime de « droit commun » de la convention de 1966. L'imposition des rémunérations perçues par les personnes résidant dans un pays et travaillant dans l'autre a donc lieu dans le pays d'exercice de l'activité, sans qu'il y ait lieu en principe de prévoir une compensation de nature fiscale comme dans le régime de l'accord de 1983.
Toutefois, un accord du 29 janvier 1973 sur la compensation financière relative aux frontaliers travaillant à Genève prévoit que le canton de Genève rétrocède chaque année aux départements de l'Ain et de la Haute-Savoie l'équivalent de 3,5 % de la masse salariale brute des travailleurs frontaliers. Cette compensation vise notamment à prendre en compte l'apport des frontaliers à l'économie genevoise, les charges publiques assumées par les départements français à raison de ces travailleurs et leurs familles résidant sur leurs territoires mais n'y exerçant pas leurs activités, ainsi que les infrastructures de transport les reliant à la région Genevoise.
Le montant de la compensation versée par le canton de Genève s'est élevé à 346 millions d'euros en 20226(*).
La rapporteure constate que si les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie apportent une contribution forte aux équipements routiers et ferroviaires permettant de rejoindre la zone frontalière genevoise et bénéficient à ce titre d'une indemnisation légitime, d'autres départements pourraient également y prétendre à ce titre pour l'ensemble des zones frontalières suisses, en particulier le Haut-Rhin, le Doubs et le Jura.
D. LE NOMBRE DE TRAVAILLEURS RÉSIDANT EN FRANCE ET TRAVAILLANT EN SUISSE CONNAÎT UNE AUGMENTATION DYNAMIQUE
Selon les informations transmises par la direction des affaires juridiques du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, 236 219 travailleurs français sont considérés comme frontaliers ou transfrontaliers en Suisse à la fin de l'année 2024. Sur l'ensemble de ces travailleurs, près de la moitié (114 152) travaillent dans le seul canton de Genève, la majorité des autres travaillant dans les huit cantons relevant de l'accord de 1983. En miroir, si le nombre de frontaliers/transfrontaliers de Suisse travaillant en France, demandé par la rapporteure, n'a pas pu être transmis par l'administration, il est très nettement plus faible.
Principaux cantons dans lesquels les travailleurs
frontaliers/transfrontaliers
résidant
en France exercent leur activité
(en nombre de travailleurs et en pourcentage)
Canton |
Nombre de travailleurs frontaliers/transfrontaliers |
Part des travailleurs |
Genève |
114 152 |
48 % |
Vaud |
45 691 |
19 % |
Bâle-Ville |
19 145 |
8 % |
Neuchâtel |
16 424 |
7 % |
Bâle-Campagne |
14 593 |
6 % |
Jura |
11 805 |
5 % |
Source : commission des finances, d'après les réponses de la direction des affaires juridiques du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères au questionnaire de la rapporteure, citant des données de l'office fédéral de la statistique suisse
Les travailleurs frontaliers/transfrontaliers proviennent majoritairement de Haute-Savoie (102 914), du Haut-Rhin (40 661) et du Doubs (34 359).
Principaux départements de
résidence
des frontaliers/transfrontaliers de France travaillant en
Suisse
(en nombre de travailleurs)
Haute-Savoie |
102 914 |
Haut-Rhin |
40 661 |
Doubs |
34 359 |
Ain |
32 209 |
Jura |
8 030 |
Territoire de Belfort |
4 781 |
Source : commission des finances, d'après les réponses de la direction des affaires juridiques du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères au questionnaire de la rapporteure, citant des données de l'office fédéral de la statistique suisse
Par ailleurs le nombre de frontaliers/transfrontaliers progresse de manière continue depuis plusieurs années : depuis 2010, il a augmenté de 86,2 %, et la hausse enregistrée est de 5,3 % sur la seule année 2024. Les Français représentent à l'heure actuelle 58 % de l'ensemble des frontaliers travaillant en Suisse, et cette part est également en augmentation constante, dans la mesure où la progression du nombre de frontaliers italiens et allemands est plus faible.
Évolution du nombre de travailleurs frontaliers/transfrontaliers exerçant leur activité en Suisse, et résidant en France, en Allemagne et en Italie
(en nombre de travailleurs et en pourcentage)
Source : commission des finances, d'après les chiffres de l'Office fédéral suisse de la statistique
* 6 Étude d'impact du présent projet de loi : 343 millions de francs suisses, soit 346 millions d'euros.