II. TERRITORIALISER LA POLITIQUE D'ACCÈS AUX SOINS

A. DES DIFFICULTÉS À DÉFINIR LES BESOINS EN SANTÉ DES TERRITOIRES

Depuis la loi « HPST » de 2009, le pilotage de l'organisation territoriale du système de santé a été confié aux agences régionales de santé (ARS). Elles sont ainsi chargées de mettre en oeuvre au niveau régional et infrarégional la politique nationale de santé « en tenant compte des particularités de chaque région ».

Toutefois, malgré la généralisation des délégations départementales des ARS chargées d'assurer une meilleure prise en compte des spécificités de chaque département, la territorialisation des politiques de santé reste encore trop dépendante d'une logique descendante d'application des politiques établies au niveau régional. Si bien que le département, pourtant acteur majeur en santé publique et dans le domaine médico-social, reste trop souvent un maillon secondaire dans la régulation de l'offre de santé sur son territoire.

L'analyse des enjeux liés à l'évolution de la démographie des professions de santé incombe depuis 2003 à l'Observatoire national de la démographie des professionnels de santé (ONDPS). Il est également chargé de la définition des objectifs pluriannuels de formation de professionnels de santé (médecine, pharmacie, maïeutique et odontologie).

Le dispositif actuel de pilotage des ressources humaines, que la Cour des comptes juge inabouti, ne permet pas de répondre aux besoins des territoires, faute de prise en compte adéquate de ces besoins et des inégalités de densité médicale existantes. Surtout, l'ONDPS ne tient que trop peu compte des remontées d'information effectuées par les observatoires régionaux.

B. RENFORCER LE RÔLE DU DÉPARTEMENT, ÉCHELON DE PROXIMITÉ

Le code général des collectivités territoriales attribue, depuis l'adoption de la loi dite « 3DS » en 2022, explicitement au département une compétence pour « promouvoir [...] l'accès aux soins de proximité sur le territoire départemental ».

L'article 1er de la proposition de loi donne corps à cette compétence en attribuant au département un rôle de coordination des politiques en matière d'accès aux soins sur son territoire. Elle met en place une coordination collégiale avec les ARS et les caisses primaires d'assurance maladie.

Elle prévoit également de remplacer l'ONDPS et ses comités régionaux par un nouvel office national de l'évaluation de la démographie des professions de santé et ses déclinaisons au niveau départemental. Ce nouvel office serait chargé de :

- rassembler et diffuser les données relatives à la démographie des professions de santé et à l'accès aux soins ;

- dresser annuellement un bilan des besoins pour chaque profession et spécialité aux niveaux national et territorial ;

- proposer des objectifs nationaux pluriannuels relatifs au nombre de professionnels de santé à former.

Les offices départementaux, présidés par le président du conseil départemental, seront quant à eux chargés de l'identification des besoins en professionnels de santé sur le département et les territoires de santé concernés.

La constitution des offices départementaux permet de passer d'une logique descendante de définition des besoins par les ARS à une logique ascendante issue des territoires infrarégionaux.

Attachée à une véritable territorialisation de la politique de santé, la commission soutient la volonté de donner aux départements la capacité d'agir en matière d'accès aux soins et de définition des besoins en santé sur leur territoire. Elle estime que l'échelle régionale, aujourd'hui privilégiée dans la définition des besoins en santé, ne permet pas de mesurer finement la diversité des situations locales.

Le département constitue l'échelle cohérente d'action en matière d'accès aux soins, entre proximité du terrain et taille critique assurant la présence d'une pluralité d'acteurs et la constitution d'un projet cohérent sur un territoire. De par son expérience dans le domaine médico-social, il incarne naturellement l'échelon de référence de la concertation territoriale entre les services préfectoraux, les délégations départementales des ARS, les caisses primaires d'assurance maladie et les organismes de protection sociale, mais également la majorité des ordres et les représentants des collectivités territoriales concernées.

Par ailleurs, l'article 2 prévoit la création d'un comité de pilotage de l'accès aux soins, associant les élus locaux, afin de renforcer leur présence dans la définition de la stratégie nationale en santé en matière d'accès aux soins et de favoriser la prise en compte des adaptations nécessaires aux réalités territoriales.

L'article 18 quant à lui améliore l'information du Parlement et des citoyens sur l'action menée par le Gouvernement en faveur de l'accès aux soins.

Pour prolonger ces dispositions, la commission a adopté un amendement visant à renforcer le rôle des offices départementaux en prévoyant que l'identification des zones « sous-denses » ou « sur-denses » ne pourra être réalisée par le directeur de l'ARS qu'après avis conforme des offices départementaux concernés. Par ailleurs, il prévoit que ce zonage sera désormais revu annuellement, pour mieux l'adapter à l'évolution des besoins de santé. Enfin, il précise explicitement que les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) devront être consultés dans le cadre des travaux des observatoires. Cet amendement permet ainsi de renverser la logique de construction du zonage et d'identification des besoins en tenant mieux compte des évaluations faites dans les territoires.

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