V. UN FINANCEMENT DU LOGEMENT SOCIAL STABLE MAIS INSUFFISANT PAR RAPPORT AUX OBJECTIFS
La Ligne budgétaire unique (LBU), portée par l'action 1 du programme 123, finance :
- le développement du logement locatif social (PLS32(*) et LLS33(*)) et du logement locatif très social (LLTS34(*)) et la réhabilitation de ces logements (SALLS35(*)) ;
- l'accession sociale - via le dispositif « logement évolutif social » (LES), mais également le PTZ36(*) et le PSLA37(*) - ainsi que l'amélioration de l'habitat des propriétaires via l'aide à l'amélioration de l'habitat (AAH) ;
- la résorption de l'habitat insalubre (RHI) et spontané (RHS) ainsi que l'aménagement et la viabilisation des terrains en vue d'assurer la constitution de réserves foncières grâce au fonds régional d'aménagement foncier et urbain (FRAFU)38(*).
A. UN MARCHÉ DU LOGEMENT PARTICULIÈREMENT TENDU EN OUTRE-MER
1. Des besoins importants structurellement en logements sociaux
Hormis la Guyane, les DROM sont des îles et archipels dans lesquels le foncier est rare et qui se prêtent parfois difficilement à la construction de logements. La situation géographique de ces territoires les expose également à des risques naturels importants générant ainsi une limitation, de fait, des terrains constructibles, renchérissant le coût de la construction et rendant nécessaire un effort permanent de construction, de réhabilitation et d'adaptation des logements.
De surcroit, les évolutions démographiques liées soit au vieillissement de la population (Martinique, Guadeloupe), soit à la forte croissance de la population (Guyane, Mayotte) et à un niveau de vie inférieur à l'hexagone créent un besoin de logements sociaux considérable. Ainsi, en dix ans, la population en outre-mer a augmenté de 5,4 %, alors que la hausse n'a été que de 3,4 % dans l'hexagone. En particulier, la hausse démographique a été de 42,7 % à Mayotte et de 23,3 % en Guyane (voir infra).
Il en résulte que 80 % de la population des DROM serait éligible au logement locatif social (LLS), contre 66 % dans l'hexagone, et que 70 % de la population serait même éligible au logement locatif très social (LLTS), contre 29 % dans l'hexagone.
2. Un parc social insuffisant
Les demandes annuelles en logement sociaux sont évaluées par le ministère des outre-mer entre 19 680 et 21 481 logements au total, dont plus de 6 500 pour la Province sud de Nouvelle-Calédonie, entre 3 300 et 3 900 logements en Guyane ou encore près de 1 200 à Mayotte.
Besoins annuels en logements sociaux dans les territoires ultramarins en 2024
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Or les logements sociaux disponibles restent insuffisants par rapport à la demande, malgré la construction année après année de nouveaux logements financés par l'action 1. Ainsi, le parc social et le logement intermédiaire correspondent à 20 % du volume total des résidences principales des territoires des départements et régions d'outre-mer (DROM). S'il est plus difficile de disposer de données actualisées pour les COM, au total, le parc social représente 17,8 % des résidences principales des territoires ultramarins.
À Mayotte en particulier, le parc social ne représente que 5 % des résidences principales disponibles, alors que les besoins annuels en logement sont évalués à au moins 1 000 logements. En Polynésie française également, le parc social est particulièrement peu important, puisqu'il ne représente que 5 % des résidences disponibles.
Part des logements sociaux en 2024 dans les départements et régions d'outre-mer
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
3. Un nombre très élevé de logements insalubres
Les DROM présentent une proportion de logements indignes et insalubres nettement supérieure à l'hexagone. La direction générale des outre-mer a estimé qu'en 2022, les DROM comptaient près de 150 000 logements indignes et insalubres. Ainsi, 16,8 % des logements des DROM sont en réalité des logements indignes et insalubres, contre moins de 2 % dans l'hexagone. En particulier, Mayotte et la Guyane sont caractérisés par de grandes poches de logements indignes et informels, constituant de véritables bidonvilles. Près de 40 % des logements en Guyane et de 60 % à Mayotte sont indignes et insalubres.
Nombre de logements indignes et insalubres dans les DROM en juillet 2022
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Cette situation s'explique en partie par la construction d'un habitat informel important, notamment dans un contexte de pénurie de logements. La nature même de ces logements informels (auto-constructions sans déclaration et titres de propriété) rend leur recensement très complexe et peu fiable avec une multitude de situations hétérogènes allant de l'habitat dégradé à indigne voire insalubre.
En ce sens, le Plan logement en outre-mer de troisième génération (PLOM 3) prévoit un plan de redynamisation de la lutte contre l'habitat indigne dans les DROM, ce que les rapporteurs saluent.
* 32 Prêt locatif social.
* 33 Logement locatif social.
* 34 Logement locatif très social.
* 35 Subvention à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale.
* 36 Prêt à taux zéro.
* 37 Prêt social de location accession.
* 38 Le Fonds régional d'aménagement foncier et urbain (FRAFU) coordonne les interventions financières de l'Union européenne, de l'État, des collectivités territoriales, en vue d'assurer la constitution de réserves foncières et la réalisation d'équipements.


