B. DES RÉFORMES INDISPENSABLES

1. Une meilleure articulation entre RFO et les autres chaînes publiques

RFO doit sortir du ghetto et être mieux articulée avec le reste du secteur public .

Elle pourrait être intégrée, en tant que filiale, dans le holding de France Télévision que prévoit la proposition de loi n°477 du 27 juin 1996, déposée au Sénat. La mobilité des cadres dans tout l'audiovisuel public serait facilitée, la circulation des programmes et des émissions outre-mer serait accélérée.

Cette meilleure intégration à la politique audiovisuelle globale devrait également concerner l'action audiovisuelle extérieure. Des opérations conjointes entre RFO, TV5 et CFI pourraient être menées .

Enfin, une prise en compte plus grande de RFO au sein du secteur public pourrait se traduire par l'association de RFO au bouquet de programmes TPS dont il n'est pas normal que la chaîne ait été écartée .

Avec la transition vers la diffusion directe des programmes des chaînes métropolitaines, la mission de RFO devra profondément évoluer. La diffusion d'un programme local au sein des décrochages de France 3 rendra nécessaire une adaptation des tâches du personnel de la station .

La production audiovisuelle locale devrait être renforcée et les chaînes publiques métropolitaines faire davantage appel aux équipes locales de RFO afin de réaliser des reportages non seulement sur les DOM, mais également sur leur environnement régional.

2. Des économies possibles

Les budgets de certaines stations de RFO paraissent exorbitants .

Est-il raisonnable que l'on consacre - au nom de la continuité du service - presque 70 millions de francs pour financer une soixantaine d'emplois à la station RFO de Saint-Pierre-et-Miquelon (6 400 habitants), alors que cet archipel est situé à quelques kilomètres du plus grand marché audiovisuel du monde et du Canada francophone ?... Les mêmes interrogations valent pour Wallis-et-Futuna (36,4 millions de francs, pour desservir 13 700 habitants), ou Mayotte (32,3 millions de francs, pour 100 000 habitants).

À l'heure du numérique, cette situation paraît dérisoirement (ou délicieusement ?) anachronique .

Il existe certainement des gisements d'économies importants.

Ces économies pourraient permettre de dégager les ressources nécessaires pour mettre en oeuvre quatre projets de relocalisation (au siège parisien, à Tahiti, en Guadeloupe et en Guyane) qui représentent un coût total de 260 millions de francs.

a) En matière de diffusion

Actuellement, les populations desservies par RFO n'ont accès qu'à un petit nombre de chaînes télévisées, voire même à une seule.

La demande de diffusion directe des trois chaînes publiques métropolitaines est donc légitime , même si elle reste difficile, compte tenu des décalages horaires qui peuvent être importants, et onéreuse, les populations devant faire l'acquisition d'un décodeur et d'une antenne - d'autant que la diffusion s'effectue actuellement en bande C et non en bande Ku, ce qui permettrait l'usage d'antennes moins coûteuses.

Avec l'utilisation de la diffusion numérique, des économies peuvent être réalisées. Les chaînes publiques métropolitaines peuvent être diffusées à l'aide d'un répéteur sous la forme de trois bouquets numériques , le canal TV1 de la station locale de RFO étant préservé, l'un desservant la zone Caraïbe, l'autre l'océan Indien et le dernier, le Pacifique. Ce bouquet numérique pourrait associer la chaîne francophone TV5 et d'autres chaînes thématiques. Afin d'éviter un repli de RFO et de lui garantir une audience minimale, la chaîne pourrait reprendre les émissions, reformatées, de La Cinquième, et rediffuser des émissions des chaînes publiques, eu égard aux contraintes du décalage horaire, sur le canal qui lui serait dévolu.

La suppression du second canal télévisuel de RFO, lorsque le pluralisme existera, apportera une économie en année pleine de 85 millions de francs.

Par ailleurs, compte tenu du montant des frais de diffusion à Saint-Pierre-et-Miquelon (11 000 francs par habitant et par an), et de la présence d'un réseau câblé qui dessert la quasi totalité de la population en lui offrant une vingtaine de chaînes, on pourrait imaginer que ce réseau offre aux habitants de l'île l'ensemble des chaînes publiques françaises avec un décrochage local de France 3, et TF1.

b) En matière de ressources publicitaires

Il parait indispensable de remettre un peu d'ordre dans la collecte des ressources publicitaires de RFO et le recul des ressources brutes doit être en partie compensé par l'augmentation des ressources nettes.

Certains frais d'intermédiation semblent excessifs .

Ainsi, le ratio recettes nettes/recettes brutes a-t-il atteint, en 1995, seulement 47,8 %.

Plusieurs prélèvements sont, en effet, opérés sur les ressources publicitaires de RFO :


• Les « commissions délégués exécutifs » (30 % des recettes brutes) couvrent la rémunération d'Havas-DOM en tant que partenaire exclusif dans les quatre DOM et la Nouvelle-Calédonie, de Publi-Pacific à Tahiti.

Le délégué exécutif reverse la moitié de sa rémunération en cas d'intervention d'une agence extérieure, situation qui tend à se généraliser, car les conditions tarifaires (remises de groupage) y incitent.

Havas-DOM, filiale du groupe Havas, par ailleurs actionnaire d'un diffuseur concurrent. Canal +, sous-délégue la commercialisation de la publicité extra-locale à la société anonyme HM1, petite structure qui n'a aucun lien juridique avec Havas-DOM. En Nouvelle-Calédonie, Havas-DOM sous-délégue la commercialisation de la publicité locale à Havas-Pacifique, dont RFO est l'unique client, et qui gère aussi la mise à l'antenne des films publicitaires diffusés à la télévision.

La direction locale des deux structures est cependant parfois assurée par les mêmes personnes.

Les délégués exécutifs perçoivent aussi une rémunération importante sur les parrainages (2 millions de francs sur 9,5 millions de francs de recettes brutes), cette rémunération étant due même si la station RFO est en contact direct avec le « parrain », ce qui n'est pas normal .


Les « frais de mise à l'antenne » (FMA) rémunèrent l'intervention de la société ICV ( International Création Vidéo ), dont ils constituent la ressource majoritaire. La société prépare la mise à l'antenne TV de la publicité dans les quatre DOM en mettant bout à bout les spots des annonceurs. Le coût de l'intervention d'ITV, en hausse importante sur l'année précédente, représente 22 % des recettes brutes correspondantes, ce qui est manifestement excessif . Une nouvelle convention a cependant revus ce coût en légère baisse.


• Une commission destinée à R30 est assise sur les recettes publicitaires brutes de la radio (1 %) et celles de la TV, hors frais de mise à l'antenne (5 %).

Dans les faits, R30 est un démembrement de RFO, dont l'excédent des recettes sur les charges est affecté à des dépenses décidées par RFO (campagnes publicitaires par exemple) ; son rôle se limite à la comptabilisation et au contrôle des délégués exécutifs dont le rôle est celui d'un régisseur délégué et non d'une agence.


• Le dernier prélèvement est destiné à un fonds d'intervention, assis sur des recettes publicitaires brutes de la télévision, déduction faite, comme pour R30, des frais de mise à l'antenne.

Il permet de subventionner les PME locales qui veulent communiquer, par exemple, après le passage d'un cyclone. Les excédents éventuels sont reversés à RFO.

La mission d'audit qualifie ce dispositif « d'assez extraordinaire » et constate que « son degré d'efficacité ne paraît pas satisfaisant ». Seule l'intervention d'une agence de publicité apparaît réellement nécessaire.

La récession des recettes publicitaires doit s'accompagner d'une remise à plat nécessaire, au moins à terme, de ce dispositif .

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