B. LE REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE DOIT REPOSER PRIORITAIREMENT SUR UNE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES
Votre rapporteur général ne peut que souscrire
à la volonté affichée par le Gouvernement de respecter
toutes les conditions du passage de la France à la monnaie unique
dès la fin de l'année 1997. Il adhère également au
raisonnement du rapporteur général du budget de la commission des
finances de l'Assemblée nationale selon lequel il convient d'endiguer
l'effet " boule de neige " de la dette publique
1(
*
)
.
Néanmoins, le choix d'une politique de soutien de la demande
intérieure financée par une hausse de la fiscalité des
entreprises ne lui paraît pas approprié et le conduit à
réitérer les recommandations qu'il émettait dans le
rapport général du Sénat relatif au budget pour 1996.
Se fondant sur les conclusions d'une étude analysant les politiques
budgétaires menées de 1960 à 1992 dans une vingtaine de
pays de l'OCDE
2(
*
)
, votre
rapporteur général rappelait ainsi que
" les
augmentations de dépenses qui interviennent lors des phases expansives
de la politique budgétaire tendent à être permanentes et
font le lit des hausses d'impôt que nécessitent les phases de
rééquilibrage des finances publiques. "
Il apparaît en effet que
les politiques de redressement des comptes
publics sont dans la plupart des cas couronnées de succès
lorsqu'elles sont fondées sur la maîtrise des
dépenses
3(
*
)
alors que
les politiques axées sur l'augmentation des prélèvements
sont en cause dans la plupart des échecs.
De surcroît, dans les périodes de politique de soutien par les
finances publiques, les dépenses publiques qui s'accroissent le plus
sont les dépenses salariales et de transferts, tandis que dans les
périodes d'ajustement des finances publiques, l'investissement supporte
l'essentiel des inflexions.
En France, le haut niveau des dépenses publiques combiné avec
l'importance des prélèvements obligatoires invite à
rechercher les moyens d'optimiser la dépense publique sans alourdir
encore les prélèvements
. Il convient en particulier d'agir en
priorité sur les prestations sociales, les traitements et l'emploi
public, même si l'on mesure bien le caractère socialement
difficile de tels ajustements.
Cette recommandation est également celle qu'expriment MM. Nasse et
Bonnet dans leur rapport sur l'état des finances publiques. Après
avoir constaté la grande rigidité des dépenses publiques,
constituées à 90 % par des charges inéluctables
à législation constante, ils écrivent notamment :
" Pourtant, agir sur la dépense est le seul moyen de
réduire les déficits, comme la France s'y est engagée,
sans accroître des prélèvements obligatoires
déjà très lourds. Ce résultat ne pourra donc
être obtenu que par des actions de fond. Il faudra tout à la fois
rendre les services de l'Etat plus productifs et leur activité plus
efficace. Dans le premier cas, c'est l'organisation des services, centraux et
déconcentrés, et leur fonctionnement qui est en cause. Dans le
second, c'est l'instabilité, la complexité et
l'efficacité, souvent inconnue et parfois contestable, des
législations qui gouvernent les diverses interventions de
l'Etat. "
Votre rapporteur général renvoie à cet égard
à son rapport sur la proposition de résolution visant à ce
que soit mis un terme à la situation de déficit public excessif
en France du 19 juin 1996
4(
*
)
. Une
étude figurant en annexe de ce rapport recensait en effet les
expériences récentes de réduction de la dépense
publique dans les pays industrialisés et les analyses du FMI. Ce dernier
parvenait notamment aux conclusions suivantes :
Dans les pays industrialisés, le FMI démontre qu'une politique de
restriction budgétaire n'entraîne pas forcément de
récession. Il constate même qu'une politique rigoureuse,
menée par des dirigeants déterminés, peut conduire
à une baisse des taux d'intérêt, à des anticipations
favorables des entreprises et à une augmentation de l'investissement et
de la croissance.
Les politiques d'ajustement ayant permis une diminution du ratio dette
publique/PIB ont toutes comporté des mesures de réduction des
dépenses et, plus particulièrement, des dépenses sociales
et de transfert et des dépenses de personnel.
Un ajustement budgétaire réussi passe non seulement par la
réduction des dépenses à court terme
5(
*
)
mais aussi par une réforme
structurelle des dépenses. Le FMI cite au nombre des réformes
structurelles des dépenses la redéfinition du champ
d'intervention du secteur public, la réforme de la gestion
administrative de l'Etat et la réforme des dépenses de transfert
et des programmes sociaux.
Les expériences de la Nouvelle Zélande, du Canada, de l'Irlande
et de la Suède, pays qui ont choisi de préserver un modèle
de solidarité nationale développé, font notamment
apparaître l'importance des réformes structurelles dans la
réussite de leurs politiques de restriction budgétaire. En effet,
pour atteindre des objectifs ambitieux, leurs politiques se sont traduites par
des coupes importantes dans les dépenses et par une sensible
réduction de la taille de l'Etat. En outre, au Canada et en Nouvelle
Zélande, une rénovation des procédures
d'élaboration des budgets a été mise en uvre ainsi qu'une
réforme de la gestion de l'Etat fondée sur la substitution de la
notion de résultat à celle de moyen.