III. LE PROJET DE LOI INTERNE RELATIF À L'APPLICATION DE LA CONVENTION DU 13 JANVIER 1993 : DES DISPOSITIONS CONTRAIGNANTES MAIS NÉCESSAIRES
La convention du 13 janvier 1993 illustre l'
engagement de
la France dans la lutte contre la prolifération chimique
. C'est, en
effet, à l'initiative de la France que fut réunie à Paris,
du 7 au 11 janvier 1989, la conférence internationale qui devait donner
un élan décisif aux négociations conduites au sein du
comité du désarmement en vue de l'élaboration d'un
instrument international proscrivant les armes chimiques.
C'est également à Paris qu'eut lieu la cérémonie de
signature de la convention, du 13 au 15 janvier 1993.
La ratification de la convention dès le premier trimestre de 1995 a
également confirmé le souci de la France, premier membre
permanent du Conseil de sécurité à ratifier la convention,
de jouer un rôle déterminant dans le désarmement chimique.
Bien que la France ne possède pas d'armement ou de stocks d'armes
chimiques, son adhésion à la convention du 13 janvier 1993
impliquait d'importants aménagements législatifs
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destinés à inscrire dans
notre droit l'interdiction de tous les usages envisageables des armes
chimiques, les obligations de déclaration et de destruction liées
aux armes chimiques, ainsi que les mesures de contrôle prescrites en cas
de fabrication ou de détention de produits chimiques sensibles. Sont
également prévues par le présent projet de loi les limites
au droit de propriété destinées à permettre la mise
en oeuvre, dans les installations françaises, des opérations de
vérification internationales. Le présent projet de loi tend aussi
à instaurer les sanctions civiles, administratives et pénales
susceptibles d'être infligées aux personnes physiques et morales
françaises contrevenant aux prescriptions de la convention.
A. DISPOSITIONS RELATIVES AUX ARMES CHIMIQUES (TITRE PREMIER, ARTICLES 2 À 6)
Le titre 1er du présent projet de loi tire les conséquences, sur notre droit interne, des stipulations de la convention posant le principe de l'interdiction des armes chimiques et de leurs installations de fabrication, de l'obligation de déclaration, ainsi que de l'obligation de destruction.
1. Interdictions
a) Armes chimiques
Les interdictions définies par l'article 2 du projet de
loi à l'égard des armes chimiques constituent la transposition de
l'article I-1 de la convention. Elles concernent l'emploi, la mise au point, la
fabrication et l'acquisition d'armes chimiques, leur stockage, leur
détention, leur conservation, ainsi que toutes les manipulations
visées par la convention par le terme de transfert direct ou indirect
(cession, importation, exportation, transit, commerce et courtage).
Est également interdite l'incitation d'entreprendre quelque
activité que ce soit liée aux armes chimiques et interdite par la
convention.
La seule exception à l'interdiction de détenir des armes
chimiques vaut pour les
services de l'Etat,
autorisés à
détenir des armes chimiques en vue de leur destruction.
Rappelons que, comme il a été indiqué à votre
rapporteur par le Ministère de la défense,
"la France qui a
ratifié le protocole de Genève de 1925 interdisant l'emploi des
armes chimiques, ne s'est livrée à aucune activité
relative aux armements chimiques, illégitime ou interdite juridiquement
ou moralement.
Elle n'a jamais possédé d'armement ou de stocks d'armes
chimiques. Elle ne s'est toutefois pas interdit d'évaluer la menace pour
réduire la vulnérabilité de ses forces en
développant une protection chimique adaptée et efficace. Elle a
donc mis constamment à jour son savoir-faire technique et poursuivi ses
études sur la toxicité et les risques des produits et des armes.
Elle a ainsi conservé constamment depuis la fin de la deuxième
guerre mondiale un savoir-faire qui se traduit par la qualité et
l'étendue des moyens de protection dont elle dispose.
A la date d'entrée en vigueur de la Convention, la France remplissait
toutes ses obligations relatives à l'interdiction des armes et des
installations de fabrication. La France ne détient que des armes
chimiques anciennes antérieures à 1925, collectées sur les
champs de bataille",
et stockées, en vue de leur destruction, dans
quatre sites situés dans le Nord et l'Est de la France, et
gérés par les services de la Sécurité civile,
relevant du Ministère de l'Intérieur (voir infra, 3).
b) Installations de fabrication d'armes chimiques
. L'article 3 du présent projet de loi tire les
conséquences de l'article V-8 de la convention, qui prescrit la
destruction des installations de fabrication d'armes chimiques et de
"matériel connexe" (termes dont le contenu est précisé par
le projet de loi : il s'agit des matériels de fabrication
utilisés exclusivement pour la fabrication de pièces non
chimiques d'armes chimiques, ou de matériels spécifiquement
conçus pour être utilisés en liaison directe avec l'emploi
d'armes chimiques).
. L'article 3 vise également les installations où sont
fabriqués, à d'autres fins que médicales, pharmaceutiques,
de recherche ou de protection, des produits dits du tableau 1,
c'est-à-dire des produits hautement toxiques, dont les usages civils
sont très limités (article VI-3 de la convention et points 10
à 12 de la sixième partie de
l'Annexe sur la
vérification
relatifs aux installations, autres que l'installation
dite "unique à petite échelle", où sont fabriqués
des produits du tableau 1).
. L'article 3 concerne aussi les échanges de matériels de
fabrication d'armes chimiques, ainsi que de technologies et d'informations
relatives aux armes chimiques, aux installations de fabrication d'armes
chimiques et de produits du tableau 1, et aux matériels de fabrication
d'armes chimiques.