III. LE SOLDE D'EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES EN 1995
Le
déficit budgétaire pour 1995 s'est établi en
exécution à 323 milliards de francs. La loi de finances
initiale prévoyait un déficit de 275,1 milliards de francs, mais
de 322,1 milliards de francs si l'on tient compte des recettes de privatisation
distraites du budget général par la première loi de
finances rectificative. L'exercice 1995 a donc été marqué
par une maîtrise satisfaisante de l'équilibre budgétaire,
malgré une croissance économique en net fléchissement
(2,2 % contre 2,8 % en 1994) et surtout moins vive que prévu
initialement (3,1 %).
Par rapport à l'exercice 1994, l'amélioration du déficit
budgétaire a été de 26,1 milliards de francs, soit un
déficit de 4,2 % du PIB, permettant à la France de continuer
son chemin vers l'union économique et monétaire, même si le
déficit global des administrations publiques en 1995, 4,9 % du PIB
(contre 5,75 % en 1994), ne permettait plus raisonnablement
d'espérer une mise en place de l'Euro dès 1997.
De la fin de 1994 à la fin de 1995, la dette brute des administrations
publiques (au sens du traité sur l'Union européenne) est
passée de 3.572 milliards de francs à 4.021 milliards de
francs, soit de 48,5 à 52,7 % du PIB.
Le
passage du déficit budgétaire à la dette publique
(réponse du gouvernement)
***
QUESTION
La Cour des Comptes fait apparaître un déficit de
382 milliards de francs comme "besoin de financement des administrations
publiques" et un "découvert" de 322,7 milliards de francs pour le
budget de l'Etat. En revanche, la progression de la dette publique est
établie à 452,6 milliards de francs. Préciser les
retraitements comptables qui permettent le passage d'une donnée à
l'autre.
REPONSE
Du
déficit budgétaire au besoin de financement public
aux sens
français et européen
S'agissant du "
déficit
", le traité de
Maastricht se réfère au concept de "
besoin de financement des
administrations publiques
", tel que le définit le système
européen de comptabilité nationale de 1979 précisé
par Eurostat.
Celui-ci recouvre l'ensemble des administrations publiques : l'Etat, mais
aussi les collectivités territoriales et leurs satellites
(administrations publiques locales), les organismes de protection sociale
(administrations publiques de sécurité sociale et hôpitaux)
et des "
organismes divers d'administration centrale
" (ODAC),
c'est-à-dire, pour l'essentiel, des établissements publics
auxquels l'Etat a confié une compétence spécialisée
au niveau national et dont les ressources principales sont des subventions de
l'Etat ou des contributions obligatoires. En revanche, les "
administrations
publiques
", au sens du traité, ne comprennent pas les entreprises
publiques, sauf si celles-ci sont financées majoritairement par des
ressources publiques (elles entrent alors, comme le CEA ou le CNES, dans la
catégorie des ODAC).
La notion de besoin de financement de l'Etat ne recoupe pas entièrement
celle de déficit budgétaire. Elle ne prend pas en compte les
opérations financières et budgétaires, mais intègre
à l'inverse des "
opérations non budgétaires non
financières
".
Or, le budget de l'Etat comporte des opérations financières qui
modifient la composition du patrimoine financier de l'Etat, sans a priori
influencer sa valeur nette : prêts et avances des comptes
spéciaux du Trésor, dotations en capital, produits des
privatisations...
A l'inverse, le budget de l'Etat ne comprend pas, par définition, des
"
opérations non financières et non budgétaires
" qui
ont un effet sur le besoin de financement car elles modifient la valeur nette
de son patrimoine (abandon d'une créance au profit d'un pays en voie de
développement, par exemple).
Ainsi, le "
découvert
" (322,7 milliards de francs)
mentionné par la Cour dans son rapport sur l'exécution des lois
de finances, correspond au solde d'exécution des lois de finances pour
1995, hors FMI. Il figure également à l'article premier du projet
de loi de règlement pour 1995.
Le déficit de 382 milliards de francs (révisé depuis
à 379 milliards de francs) correspond au besoin de financement de
l'ensemble des administrations publiques tel que défini ci-dessus, au
sens des critères du traité de Maastricht.
Logiquement, le passage de l'un à l'autre s'effectue en deux
étapes :
passage du solde budgétaire au besoin de financement de l'Etat.
Au sens français, ce passage fait l'objet d'une ventilation
détaillée dans le rapport sur les comptes de la Nation pour 1996
(pages 192-193 des comptes et indicateurs économiques). Il aboutit
à un montant de 335,9 milliards de francs.
Au sens européen, ce passage est explicité dans la notification
à Eurostat sur les déficits excessifs. Il diffère
notamment sur les traitements du crédit-bail, des avances
aéronautiques et des recettes des coupons courus. Il aboutit à un
montant de 312,5 milliards de francs.
Ajout des autres administrations publiques :
- ODAC : + 9,3 milliards de francs
- APUL : - 17,5 milliards de francs
- SECU : - 68,7 milliards de francs au sens français,
- 58,7 milliards de francs au sens européen après prise
en compte d'une correction de 10 milliards de francs sur les
hôpitaux (erreur de base).
Il est utile de se reporter aux pages 181 et suivantes du rapport sur les
comptes de la Nation pour 1996, afin d'y obtenir les principaux chiffres
aboutissant au besoin de financement des administrations publiques.
A l'issue de ce passage, on obtient le besoin de financement de
379 milliards de francs (y compris FMI) au sens européen
(412,8 milliards de francs au sens français).
Du besoin de financement à la dette publique
La Cour
des Comptes reprend le chiffre de déficit des administrations publiques
au sens du traité de Maastricht, pour l'année 1995,
notifié en mars 1996. Ce chiffre est fondé sur la version
provisoire du compte, revue depuis.
La progression de la dette publique au sens de Maastricht correspondante
était évaluée à 449,7 milliards de francs,
chiffre proche de celui cité par la Cour (452,6 milliards de
francs).
L'écart entre le besoin de financement et la variation de la dette
s'explique par des ajustements comptables provenant des différences de
définition. Les plus importantes viennent de ce que la dette au sens de
Maastricht ne comprend pas certains passifs financiers et est brute en valeur
nominale.
La dette au sens de Maastricht est nette des décalages comptables, des
crédits commerciaux et des opérations de crédit-bail. Or,
ces opérations financières sont implicitement retracées
dans le déficit public et il faut donc les prendre en compte pour passer
de ce dernier à la variation de dette au sens de Maastricht.
La dette est brute : or, le besoin de financement est comptablement
égal à la variation des dettes nettes des créances des
administrations publiques. Pour passer de la variation de dette publique au
besoin de financement, il faut donc rajouter à ce dernier les variations
de créances.
La dette est en valeur nominale : la cohérence stricte entre le
déficit public et la variation de la dette publique nette correspondante
voudrait que la dette obligataire soit mesurée en valeur de
marché. Or, la dette au sens de Maastricht est en valeur nominale. Il
faut donc prendre en compte l'écart entre ces deux modes de valorisation.