III. ALLÉGER LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
A. ENGAGER UNE DIMINUTION RÉELLE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
La
France connaît l'un des taux de prélèvements obligatoires
les plus élevés de l'Union européenne (46,1 % du PIB
en 1997). Des actions volontaristes doivent donc être entreprises :
L'impôt sur le revenu
Il est certain que la combinaison des relèvements d'impôt sur le
revenu et du taux de la CSG pour 1998 a conduit à aggraver les
prélèvements directs sur les revenus des ménages de plus
de 11 milliards de francs en 1998.
La réduction programmée de l'impôt sur le revenu reste
donc une priorité.
Or, hors effet de l'évolution spontanée, les mesures du
présent projet de loi de finances, revues très
légèrement à la baisse suite au vote de l'Assemblée
nationale, aboutiront tout de même à un alourdissement d'un
milliard de francs de cet impôt.
De surcroît, la baisse du plafond par demi-part de l'avantage fiscal
procuré par le quotient familial
(3,9 milliards de francs) sera une
nouvelle mesure d'aggravation de la fiscalité pesant sur les familles,
après la mise sous condition de ressources des allocations familiales en
1998 (mesure sur laquelle, d'ailleurs, le gouvernement a été
contraint de revenir).
L'impôt sur les sociétés
Comme cela a été vu, la loi portant mesures urgentes à
caractère fiscal et financier (MUFF) a considérablement accru les
charges fiscales directes des entreprises. Elle a porté le taux de
l'impôt sur les sociétés à 41,66 %,
plaçant la France au troisième rang européen
derrière l'Italie et l'Allemagne.
Cet alourdissement a rompu avec la réforme engagée depuis 1985 et
qui avait conduit à diminuer l'impôt pesant sur les
bénéfices des sociétés de 50 % à
33,1/3 % en 1993.
Il crée un désavantage compétitif pour les entreprises
françaises alors que, dans le même temps, la fiscalité des
bénéfices distribués et non distribués est
allégée en Allemagne et le taux marginal d'imposition est
diminué en Grande-Bretagne.
De même, la taxation au taux de droit commun des plus-values à
long terme va à contre-courant des législations fiscales de nos
principaux partenaires économiques.
Il ne serait donc pas admissible que les nouveaux prélèvements
portent encore sur le potentiel économique de notre pays, potentiel qui
est, quoi qu'on en dise, un élément clef des prévisions de
croissance.
Or, force est de constater que certaines dispositions du présent projet
de loi de finances poursuivent l'aggravation de la fiscalité pesant sur
les entreprises, notamment la réduction du taux de l'avoir fiscal ou le
nouveau régime de cessions de parts de sociétés à
prépondérance immobilière. Cette aggravation, qui ne
pouvait qu'être modeste compte tenu des hausses antérieures, a
toutefois été amplifiée par le passage à
l'Assemblée nationale (et notamment le rétablissement de la
taxation des dividendes de la fille à la mère supprimée en
1993).
Alléger l'imposition du patrimoine et favoriser l'épargne
L'imposition du patrimoine nuit à la compétitivité de
notre pays.
L'ensemble des mesures fiscales présentées dans le projet de loi
de finances et le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 1998 (élargissement de l'assiette des
prélèvements sociaux, augmentation de la CSG, imposition de
l'assurance-vie, plafonnement envisagé de l'avoir fiscal)
correspondaient à 23 milliards de francs supplémentaires
pesant sur les épargnants.
Cette politique de surtaxation de l'épargne méconnaît ses
caractéristiques, et notamment le risque de freiner l'investissement et
d'assister à des délocalisations de capitaux.
Enfin, le patrimoine lui-même, et notamment le patrimoine "productif",
subit une fiscalité déstabilisante : à titre d'exemple, la
fiscalité des transmissions d'entreprises est quatre fois plus
élevée en France qu'en Allemagne ou en Italie.
De surcroît, l'insécurité juridique devient une
caractéristique forte de la politique fiscale en matière de
patrimoine et d'épargne, soit exactement le contraire du souhaitable,
s'agissant de l'argent mis de côté par les ménages
français pour assurer leur avenir.
Le présent projet de loi de finances est un modèle en ce domaine,
puisqu'il revient sur toute une série de dispositions fiscales
jugées "acquises", notamment en matière d'impôt de
solidarité sur la fortune et de droits de mutation à titre
gratuit. La suppression de la disposition relative au régime fiscal de
l'assurance-vie et son remplacement montre toutefois que cette
instabilité fiscale a des limites qu'il convient de ne pas
dépasser.
Diminuer le coût du travail en allégeant les charges sur les
bas salaires
Le poids des prélèvements obligatoires sur l'économie
française ne se limite pas à la seule pression fiscale.
Ainsi, les prélèvements sociaux ont augmenté de
manière significative depuis 20 ans (21,6 % du PIB en 1997
contre 18,1 % en 1980) et pèsent particulièrement sur la
masse salariale.
Selon une enquête Eurostat
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*
)
sur les coûts du travail dans
l'industrie, le coût du travail est nettement plus élevé en
France qu'aux Etats-Unis et dans les autres pays européens : pour une
base 100 en France, le coût est de 61,5 en Grande-Bretagne, 76,3 aux
Etats-Unis et 76,8 en Italie. Grâce à la diminution de leur
pression fiscale et sociale, des pays dont le coût du travail
était plus élevé que celui de la France en 1980, comme les
Pays-Bas, sont désormais plus compétitifs.
De plus, les charges patronales sont particulièrement
élevées et non dégressives en France. L'effet
dégressif des cotisations patronales n'est pertinent que pour les
salaires très élevés, proches de 100.000 francs par mois.
La situation des salariés les moins qualifiés s'est
aggravée, puisque dans la loi de finances pour 1998, le gouvernement a
choisi de restreindre le dispositif d'allégement de charges pour les bas
salaires en limitant le mécanisme de la ristourne dégressive aux
salaires inférieurs à 1,3 smic et en plafonnant son montant
à 1.213 francs.
Il est parfois objecté que les diverses mesures d'allégement
prises ces dernières années n'ont pas eu d'effet sur l'emploi.
Mais il faut se placer sur moyenne période et d'un point de vue global :
les arbrisseaux d'allégements ponctuels ne doivent pas cacher la
forêt d'une tendance à l'alourdissement des
prélèvements sur le travail depuis un quart de siècle.
Il est donc urgent de revenir à une politique volontariste
d'allégement du coût du travail ainsi que le préconise la
proposition de loi du Président Christian Poncelet, votée par le
Sénat le 29 juin dernier
.