TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES
AU FONCTIONNEMENT DES CONSEILS
RÉGIONAUX
Les
dispositions contenues dans ce
titre III
ont pour objet
d'aménager la procédure d'adoption sans vote du budget de la
région issue de la loi du 7 mars 1998 (
article 22
) et
de prévoir une nouvelle procédure de " vote
bloqué " au profit de l'exécutif régional lors de
l'examen du budget (
article 21
).
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a, en outre, confirmé
plusieurs dispositions additionnelles (
articles 22 bis à
22 ter
) qu'elle avait adoptées en première lecture. Ces
dispositions sont destinées à rendre obligatoires, sauf
décision contraire, les réunions publiques de la commission
permanente (
article 22 bis
) ainsi que la constitution d'un bureau
dans chaque conseil régional (
article 22 ter
). En
revanche, l'Assemblée nationale a renoncé à la disposition
obligeant le président du conseil régional à
déléguer une partie de ses fonctions (
article 22 quater
).
Pour les mêmes motifs que ceux qu'elle vous avait exposés en
première lecture, votre commission des Lois vous propose de ne pas
accepter l'ensemble des dispositions contenues dans ce titre III.
Elle vous soumet, en conséquence, un
amendement de suppression
de
cette division et de son intitulé.
Article 21
(article L. 4311-1 du code
général des collectivités
territoriales)
Modalités de vote du budget de la
région
Cet
article a pour objet de modifier
l'article L. 4311-1
du code
général des collectivités territoriales afin, d'une part,
de préciser les modalités d'adoption du budget de la
région et, d'autre part -et surtout- d'autoriser le président du
conseil régional, à l'issue de l'examen du budget, à
soumettre à un vote d'ensemble le projet de budget initial en ne
retenant que les amendements qu'il juge compatibles avec celui-ci.
•
Lors de la première lecture
, l'Assemblée
nationale avait prévu que les modifications au projet initial retenues
par le président du conseil régional devrait recevoir
l'accord
du bureau
.
Elle avait, en outre, limité à
deux
délibérations budgétaires relatives au même exercice
hormis le compte administratif, la faculté de faire usage de cette
nouvelle procédure de " vote bloqué ".
•
En nouvelle lecture
, l'Assemblée nationale a
confirmé
le texte qu'elle avait retenu en première
lecture, ne lui apportant que des
modifications rédactionnelles.
Votre commission des Lois ne peut que réitérer les plus vives
réserves à l'égard d'un tel dispositif.
L'objet de la procédure d'adoption sans vote -issue de la loi du
7 mars 1998- a été de remédier à des
situations de blocage.
Le Conseil constitutionnel (décision
n° 98-397 DC du 6 mars 1998) a ainsi relevé que cette
procédure "
en prévoyant des modalités
dérogatoires d'adoption du budget régional, lorsque celui-ci n'a
pu être adopté dans les conditions de droit commun, a pour objet
d'assurer le respect du principe de continuité des services publics,
tout en évitant le dessaisissement des organes délibérants
de la région au profit du représentant de l'Etat
".
Or, il ne s'agit pas par la présente disposition d'"
assurer le
respect du principe de continuité des services publics
" et
d'empêcher le "
dessaisissement des organes
délibérants de la région au profit du représentant
de l'Etat
" mais d'éviter que les amendements adoptés
par l'assemblée délibérante ne mettent en cause le projet
initialement présenté par le président, lequel est
pourtant expressément chargé de préparer puis
d'exécuter les libres délibérations du conseil
régional (
article L. 4231-1
du code
général des collectivités territoriales), non de lui
imposer quoi que ce soit (article 72 de la Constitution).
La procédure proposée remet ainsi directement en cause la
solution retenue très récemment par le tribunal administratif
d'Orléans.
Dans sa décision du 7 juillet 1998 annulant le budget de la
région Centre, en effet, le tribunal administratif d'Orléans a
relevé "
que le président du conseil régional ne
peut utilement se prévaloir de la circonstance que les amendements
retenus par l'assemblée auraient dénaturé son projet de
budget pour établir qu'il s'est trouvé dans
l'impossibilité de mener la procédure budgétaire de droit
commun à son terme ; qu'ainsi le défaut d'adoption du budget
à la date du 30 avril 1998 a résulté, non du rejet de
celui-ci ou d'un quelconque obstacle à son adoption, mais de la seule
décision du président de clore prématurément les
débats afin de s'opposer aux options retenues par la majorité des
conseillers régionaux dans l'exercice des pouvoirs qui leur sont
conférés par les dispositions précitées des
articles L. 4131-2 et L. 4311-1 du code général
des collectivités territoriales
".
C'est pourquoi, le tribunal a considéré que les conditions
requises pour la mise en oeuvre de la procédure dérogatoire
d'adoption sans vote, prévue par la loi du 7 mars 1998
n'étaient pas réunies.
Ne pouvant appliquer la procédure de
l'article L. 4311-1-1
dans le cas où tous les chapitres
ou articles ayant été adoptés,
aucune situation de
blocage
n'est constatée, le président du conseil
régional disposera néanmoins -grâce aux nouvelles
dispositions prévues par le présent article- d'une arme de
procédure lui permettant de faire prévaloir le projet de budget
qu'il a initialement soumis à l'assemblée
délibérante.
Une telle procédure aboutirait ainsi à un
véritable
dessaisissement
de l'assemblée délibérante de son
pouvoir de modifier -si elle le souhaite- les chapitres ou les articles du
projet de budget. Elle paraît, en conséquence, difficilement
conciliable avec les principes régissant traditionnellement les
collectivités territoriales.
Pour ces motifs, votre commission des Lois, en application de l'article 44,
alinéa 2, du Règlement du Sénat, vous soumet une
exception d'irrecevabilité
à
l'article 21
tendant à faire reconnaître que les dispositions de cet
article méconnaissent les principes constitutionnels au rang desquels
figure notamment la
libre administration des collectivités locales
par des conseils élus
.
Article 22
(article L. 4311-1-1 du code
général des collectivités
territoriales)
Procédure d'adoption sans vote du budget de la
région
Cet
article a pour objet de donner une nouvelle rédaction à
l'article L. 4311-1-1
du code général des
collectivités territoriales, qui est lui-même issu de la loi du 7
mars 1998, afin, d'une part,
d'étendre le champ d'application de
la
procédure d'adoption sans vote
du budget de la
région à d'autres délibérations budgétaires
ainsi qu'aux délibérations relatives à la fixation des
taux des impôts locaux, d'autre part, de prévoir le
remplacement
du président du conseil régional en cas
d'adoption d'une motion de renvoi portant sur le budget primitif et, enfin,
de
préciser les délais
de mise en oeuvre de cette
procédure.
•
Lors de la première lecture
, l'Assemblée
nationale avait souhaité limiter l'utilisation de la procédure de
l'article L. 4311-1-1
à
deux
délibérations budgétaires relatives au même
exercice.
Ayant prévu -par l'article 22 ter-
l'existence obligatoire
du bureau
dans les conseils régionaux, l'Assemblée nationale
avait -par anticipation- supprimé au présent article la
référence à l'existence éventuelle du bureau.
Elle avait, par ailleurs, précisé au dernier alinéa de
l'article L. 4311-1-1
que ses dispositions ne seraient pas
applicables à défaut de présentation d'un projet de budget
par le président dans les conditions prévues par
l'article L. 4311-1
du code général des
collectivités territoriales.
•
En nouvelle lecture
, l'Assemblée nationale, outre des
modifications rédactionnelles ou de coordination, a apporté
à ce dispositif
trois
précisions :
- le recours à la procédure d'adoption sans vote du projet de
budget sera conditionné par le
rejet
de ce projet par
l'assemblée délibérante ( ce qui préviendra le
détournement de procédure sanctionné par le tribunal
administratif d'Orléans dans sa décision du 7 juillet 1998);
- la motion de renvoi devra être assortie d'une
déclaration
écrite
de politique générale présentée
par le candidat aux fonctions de président ;
- l'adoption de la motion devra avoir lieu au
scrutin secret
.
Votre commission des Lois considère qu'il serait
prématuré
de modifier
dans l'urgence
un dispositif
encore très récent et qui n'a encore fait l'objet que d'une
application limitée et, en outre, incorrecte.
Elle constate par ailleurs que l'extension du champ d'application de la
procédure d'adoption sans vote du budget ne répond pas aux motifs
qui selon le Conseil constitutionnel avaient pu fonder une telle
procédure à savoir "
assurer le respect du principe de
continuité des services publics
" et éviter le
"
dessaisissement des organes délibérants de la
région au profit du représentant de l'Etat
"
(décision n°98-397 DC du 6 mars 1998).
Pour ces motifs, votre commission des Lois vous soumet un
amendement de
suppression
de l'
article 22
.
Article 22 bis
(article L. 4133-4 du code
général des collectivités
territoriales)
Déroulement des séances de la commission
permanente
Ajouté par l'Assemblée nationale, cet article
tend
à modifier l'
article L. 4133-4
du code
général des collectivités territoriales, afin de
prévoir que les séances de la commission permanente du conseil
régional seront obligatoirement
publiques
, des dérogations
à cette règle étant néanmoins admises sous
certaines conditions.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a confirmé le
présent article
sans modification.
Votre commission des Lois ne peut qu'observer à nouveau que le
règlement intérieur des conseils régionaux -comme
d'ailleurs celui des conseils généraux- peut déjà
prévoir une telle publicité.
Une telle disposition conduirait à une plus
grande
rigidité
dans le fonctionnement des conseils régionaux. Elle
ne manquerait pas de susciter des difficultés d'ordre matériel.
Elle ne serait pas de nature à favoriser la
sérénité des débats qui se déroulent au sein
de la commission permanente.
Pour ces motifs, votre commission des Lois vous soumet un
amendement de
suppression
de
l'article 22 bis.
Article 22 ter
(article L.4133-8 du code
général des collectivités territoriales)
Obligation de
constituer un bureau
Ajouté par l'Assemblée nationale en
première
lecture sur la proposition de sa commission des Lois, cet article a pour objet
de modifier
l'article L. 4133-8
du code général
des collectivités territoriales, afin de rendre obligatoire la
constitution d'un bureau dans chaque conseil régional.
Le bureau serait constitué du
président
, des
vice-présidents
et, le cas échéant, des membres de
la commission permanente ayant reçu délégation. En
conséquence, le bureau serait, dans tous les cas, au moins
composé du président et des vice-présidents.
En nouvelle lecture
, l'Assemblée nationale a adopté une
nouvelle rédaction de cet article qui n'en modifie pas le fond.
La région se verrait ainsi dotée d'un régime
spécifique par rapport à celui applicable aux conseils
généraux, sans que sa situation le justifie.
Comme l'avait confirmé lors de la première lecture devant
l'Assemblée nationale le rapporteur M. René Dosière, il
s'agit par ces dispositions de mettre en place une
" direction
collégiale "
de la région, objectif qui ne peut que
susciter des
réserves.
C'est pourquoi, votre commission des Lois vous soumet un
amendement de
suppression
de
l'article 22 ter.
Article 22 quater
(article L. 4231-3 du code
général des collectivités territoriales)
Obligation
pour le président d'accorder des
délégations
Ajouté par l'Assemblée nationale sur la
proposition de
sa commission des Lois et contre l'avis du gouvernement, cet article tendait
à modifier
l'article L. 4231-3
du code
général des collectivités territoriales, afin de rendre
obligatoires les délégations d'une partie des fonctions du
président aux vice-présidents.
En vertu du présent article, la délégation d'une partie de
ses fonctions par le président du conseil régional aux
vice-présidents serait devenue
obligatoire
. Elle serait
restée facultative, en cas d'empêchement de ces derniers, pour
bénéficier à d'autres membres du conseil régional,
lesquels devraient obligatoirement faire partie de la commission permanente.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a en définitive
renoncé à cette disposition sur la proposition de sa commission
des Lois qui s'est ainsi rangée à l'analyse de votre commission
des Lois, laquelle avait notamment fait valoir qu'une telle disposition
n'était pas compatible avec le régime traditionnel des
délégations qui repose au contraire sur le
libre choix
du
président du conseil régional,
seul organe exécutif de
la région
.
Votre commission des Lois vous propose en conséquence de
maintenir
cette
suppression
de l'
article 22 quater.