CHAPITRE II
DISPOSITIONS RENFORÇANT LES GARANTIES JUDICIAIRES
EN MATIÈRE DE DÉTENTION PROVISOIRE

SECTION I A
Dispositions générales

Article 10 A
(art. 137 du code de procédure pénale)
Détention provisoire

L'article 137 du code de procédure pénale énonce la possibilité de mettre en détention provisoire certaines personnes, tout en affirmant le caractère exceptionnel de cette mesure. Il prévoit, en effet, que les personnes mises en examen restent libres, sauf, à raison des nécessités de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté, à être soumises au contrôle judiciaire ou, à titre exceptionnel, placées en détention provisoire.

L'article 10 A, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la première lecture, tend à réinscrire l'article 137 pour préciser que la personne mise en examen est présumée innocente.

En première lecture, le Sénat a supprimé cette disposition considérant que ce rappel n'apportait rien au droit existant. Dans un souci de conciliation, votre commission vous propose de ne pas supprimer une nouvelle fois cette disposition, dont l'intérêt paraît pourtant singulièrement limité.

Elle vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 10 B
(art. L. 611-1 du code de l'organisation judiciaire)
Suppression de l'obligation de présence d'au moins
un juge d'instruction dans chaque tribunal de grande instance

L'article L. 611-1 du code de l'organisation judiciaire dispose qu'il y a dans chaque tribunal de grande instance un ou plusieurs juges d'instruction.

L'Assemblée nationale a décidé, lors de la première lecture, de supprimer cette disposition. La rapporteuse de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges, avait notamment fait valoir que le regroupement des juges d'instruction faciliterait une rationalisation de la carte judiciaire.

Le Sénat a supprimé l'article adopté par l'Assemblée nationale et celle-ci l'a rétabli en deuxième lecture.

Votre commission n'est pas hostile au regroupement des juges d'instruction et à l'idée qu'il n'y ait pas dans chaque tribunal de grande instance un juge d'instruction. Elle constate simplement que l'instrument choisi par l'Assemblée nationale pour opérer cette réforme est inopérant.

Il ne suffit pas en effet de supprimer l'obligation qu'il y ait un juge d'instruction dans chaque tribunal pour que le regroupement des juges d'instruction puisse être opéré.

Ainsi, actuellement, il n'existe pas de tribunal pour enfants dans tous les tribunaux de grande instance. Le code de l'organisation judiciaire prévoit donc que " le siège et le ressort des tribunaux pour enfants sont fixés par voie réglementaire ". De la même manière, il conviendrait, pour les juges d'instruction, de prévoir qu'un décret détermine la liste des tribunaux où sont présents un ou plusieurs juges d'instruction.

Par ailleurs, il conviendrait de préciser si, lorsqu'une affaire est du ressort d'un tribunal où il n'y a pas de juge d'instruction, la saisine du juge d'instruction d'un autre tribunal est faite par le procureur du lieu de l'infraction ou par le procureur du tribunal où sont présents des juges d'instruction.

Aucune de ces questions n'a été abordée lors des débats à l'Assemblée nationale. Votre commission persiste à penser que le présent article ne peut avoir aucun effet pratique s'il n'est pas accompagné de mesures de coordination permettant sa mise en oeuvre.

Dans ces conditions, elle vous propose à nouveau la disjonction de cet article.

SECTION I
Dispositions relatives au juge chargé de la détention provisoire

Cette section a pour objet de créer un juge de la détention provisoire distinct du juge d'instruction. En première lecture, le Sénat s'est opposé à ce qu'un juge soit qualifié de juge de la détention provisoire, rappelant que l'autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle. Il a décidé de ne pas nommer ce magistrat. L'Assemblée nationale est revenue à l'appellation de juge de la détention provisoire, tout en proposant que ce magistrat puisse se voir confier de nombreuses prérogatives n'ayant aucun lien avec la détention provisoire.

Votre commission vous propose, suivant la logique de l'Assemblée nationale, d'étendre les attributions de ce magistrat en lui confiant les prérogatives actuellement exercées par le président du tribunal de grande instance en matière de libertés. Elle estime qu'un tel accroissement de ses attributions permet désormais de faire de ce magistrat un véritable juge des libertés et propose, par un amendement , de lui donner cette appellation dans l'intitulé de la présente section.

Article 10
(art. 137-1 à 137-5 nouveaux du code de procédure pénale)
Création d'un juge de la détention provisoire

Cet article tend à créer un juge de la détention provisoire chargé de contentieux de la détention provisoire.

•  Le texte proposé pour l'article 137-1 du code de procédure prévoit que ce juge doit avoir rang de président, de premier vice-président ou de vice-président et qu'il ne peut, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales dont il a connu. Il serait saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction . Votre commission vous soumet un amendement tendant à modifier la dénomination du juge de la détention provisoire pour en faire un juge des libertés.

En première lecture, le Sénat a souhaité que le juge de la détention provisoire statue dans tous les cas à l'issue d'un débat contradictoire, alors que le texte initial ne prévoyait le débat contradictoire que lorsque le juge de la détention envisageait le placement en détention ou la prolongation de cette détention.

L'Assemblée nationale s'est opposée à cette modification, la rapporteuse de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges, observant que le débat contradictoire n'avait guère d'intérêt en cas de décision favorable à la personne mise en examen. A la réflexion, votre commission vous propose d'accepter que le débat contradictoire n'ait lieu que lorsque le juge envisage le placement en détention. Actuellement, le juge d'instruction n'organise pas de débat contradictoire lorsqu'il n'envisage pas de placer la personne en détention.

Votre commission vous soumet un amendement de cohérence rédactionnelle.

•  Le texte proposé pour l' article 137-2 du code de procédure pénale dispose que le juge d'instruction conserve le droit d'ordonner un contrôle judiciaire. Le juge de la détention provisoire pourrait lui aussi prononcer un contrôle judiciaire s'il opposait au placement en détention provisoire.

•  Le texte initial proposé pour l' article 137-3 du code de procédure pénale prévoyait que le juge de la détention provisoire n'était pas tenu de statuer par une ordonnance lorsqu'il ne décidait ni le placement en détention ou la prolongation de celle-ci, ni la prescription d'une mesure de contrôle judiciaire. Au contraire, d'autres articles du projet de loi prévoyaient que le juge de la détention devait statuer par ordonnance motivée en cas de placement en détention ou de prolongation de la détention.

En première lecture, le Sénat a souhaité que le juge statue toujours par ordonnance motivée . Il a en effet considéré que cette motivation serait utile à la personne, même en l'absence de décision de placement en détention, dans le cas d'un appel du parquet.

L'Assemblée nationale s'est opposée à cette proposition du Sénat, les députés considérant que la liberté ne se motive pas. Elle a cependant modifié le texte proposé pour l'article 137-3, afin d'en clarifier les termes. Il prévoit désormais que le juge statue par une ordonnance spécialement motivée lorsqu'il ordonne ou prolonge une détention provisoire ou qu'il regrette une demande de mise en liberté. Cette ordonnance devrait comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait sur le caractère suffisant des obligations du contrôle judiciaire ainsi que le motif de la détention pour référence aux articles 143-1 et 144 du code de procédure pénale, qui définissent les critères permettant le placement en détention provisoire.

En revanche, le juge de la détention provisoire statuerait par une ordonnance non motivée, dans les cas où il refuserait d'ordonner ou de prolonger une détention provisoire. Votre commission persiste à penser qu'il est préférable que l'ordonnance soit motivée dans tous les cas, même s'il est normal de prévoir une motivation plus conséquente en cas de décision de placement en détention provisoire. Elle vous soumet donc un amendement pour rétablir le principe de la motivation des ordonnances refusant d'ordonner ou de prolonger une détention provisoire.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 10 bis AA
(art. 52-1 nouveau du code de procédure pénale)
Exercice des pouvoirs du président par le juge de la détention

Cet article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture, tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 52-1, afin de prévoir la possibilité pour le président du tribunal de grande instance de déléguer au juge de la détention provisoire, lorsqu'il n'exerce pas lui-même cette fonction, tous ses pouvoirs en matière de libertés. Cette délégation concernerait :

- le contrôle des perquisitions dans les cabinets d'avocat (art. 56-1 du code de procédure pénale) ;

- le contrôle de l'interdiction faite à un avocat d'exercer sa profession (art. 139-1 nouveau du code de procédure pénale) ;

- le placement en détention provisoire en matière de comparution immédiate (art. 396 du code de procédure pénale) ;

- la prolongation des gardes à vue en matière de terrorisme (art. 706-23 du code de procédure pénale) ;

- l'autorisation des perquisitions en matière de terrorisme (art. 706-24 du code de procédure pénale) ;

- l'autorisation des perquisitions en matière de trafic de stupéfiants (art. 706-28 du code de procédure pénale) ;

- la prolongation des gardes à vue en matière de trafic de stupéfiants (art. 706-29 du code de procédure pénale) ;

- l'autorisation des perquisitions fiscales (art. L. 16 B du livre des procédures fiscales) ;

- l'autorisation des perquisitions en matière de douane (art. 64 du code des douanes) ;

- la prolongation des rétentions d'étrangers (art. 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945) ;

- la prolongation du maintien d'étrangers en zone d'attente (art. 35 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945) ;

- l'autorisation des perquisitions en matière de concurrence (art. 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1 er décembre 1986) ;

- la contestation d'une hospitalisation sans le consentement de la personne concernée (art. L. 351 du code de la santé publique).

Ainsi, l'Assemblée nationale a souhaité étendre les prérogatives du juge de la détention provisoire. Paradoxalement, elle n'a pas pour autant changé son nom, même si le présent article fait référence au " magistrat désigné en application de l'article 137-1 ", dénomination qu'avait choisie le Sénat en première lecture.

Votre commission vous propose d'aller plus loin dans la logique poursuivie par l'Assemblée nationale. Elle estime souhaitable que le juge des libertés se voie effectivement confier les prérogatives du président du tribunal en matière de libertés, sans que cela ne demeure qu'une possibilité. Cette extension ne concernerait cependant pas la question du contrôle judiciaire des avocats, votre commission ayant décidé qu'il devait revenir au Conseil de l'Ordre de statuer sur cette question.

Dans les petits tribunaux, le président du tribunal exercera lui-même les fonctions de juge des libertés et la situation actuelle ne sera pas modifiée. Dans les autres cas, le nouveau juge chargé du contentieux de la détention provisoire sera le mieux à même de statuer également sur d'autres contentieux mettant en jeu les libertés, tels que certaines perquisitions ou prolongations de garde à vue. Il paraît tout à fait souhaitable qu'un magistrat de haut rang se spécialise dans ces questions de libertés au sein des tribunaux.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à transférer au nouveau juge l'ensemble des pouvoirs du président du tribunal, ce qui justifie pleinement que ce juge soit désormais qualifié de juge des libertés . Cette proposition a notamment été formulée devant votre commission par Mme Mireille Delmas-Marty, responsable en 1988-1990 de la commission " Justice pénale et droits de l'homme ".

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 10 bis A
(art. 81 et 138 du code de procédure pénale)
Organismes participant au respect des obligations
du contrôle judiciaire

Dans sa rédaction actuelle, l'article 138 du code de procédure pénale prévoit, parmi les obligations qui peuvent être imposées à une personne dans le cadre d'un contrôle judiciaire :

- l'obligation de se présenter aux services ou autorités désignés par le juge d'instruction ;

- l'obligation de répondre aux convocations de toute autorité ou de toute personne qualifiée désignée par le juge d'instruction et de se soumettre, le cas échéant, aux mesures de contrôle portant sur ses activités professionnelles ou sur son assiduité à un enseignement.

En première lecture, le Sénat, sur proposition de notre excellent collègue, M. Michel Dreyfus-Schmidt, a proposé de compléter les références aux services ou autorités visés à l'article 138 du code de procédure pénale par des références aux associations habilitées.

D'ores et déjà, de nombreuses associations participent au contrôle du respect des obligations du contrôle judiciaire et il était normal de codifier cette pratique.

L'Assemblée nationale a accepté cette modification. Elle a complété cet article par une modification de l'article 81 du code de procédure pénale. Celui-ci prévoit notamment que le juge d'instruction peut commettre le comité de probation et d'assistance aux libérés, le service compétent de l'éducation surveillée ou toute personne habilitée à l'effet de vérifier la situation matérielle, familiale et social d'une personne mise en examen et de l'informer sur les mesures propres favoriser l'insertion sociale de cette personne.

L'Assemblée nationale a souhaité que les associations habilitées soient mentionnées dans la liste des personnes ou organes qui peuvent être commis pour vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d'une personne.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à remplacer, dans l'article 81 du code de procédure pénale, la référence à l'éducation surveillée par une référence à la protection judiciaire de la jeunesse et la référence au comité de probation et d'assistance aux libérés par une référence au service pénitentiaire d'insertion et de probation. L'Assemblée nationale avait inséré ces dispositions dans d'autres articles, qui pourront ainsi être supprimés.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 10 bis B
(art. 81 du code de procédure pénale)
Protection judiciaire de la jeunesse

Cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture, tend à remplacer dans l'article 81 du code de procédure pénale la référence à l'éducation surveillée par une référence à la protection judiciaire de la jeunesse. Il s'agit d'une actualisation tout à fait bienvenue.

Votre commission ayant décidé d'opérer cette modification à l'article 10 bis A, elle vous propose, par coordination, la suppression de cet article.

Article 10 bis
(art. 138, 142, 142-2 et 142-3 du code de procédure pénale
Cautionnement

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement modifiant les règles du cautionnement que le juge d'instruction peut imposer à une personne de fournir dans le cadre d'un contrôle judiciaire.

Cet amendement prévoyait notamment que la personne pourrait s'acquitter du cautionnement dans les conditions fixées par l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, qui permet à un contribuable contestant le bien-fondé du montant des impositions mises à sa charge de demander à être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions. Ce sursis ne peut lui être refusé s'il a constitué auprès du comptable les garanties propres à assurer le recouvrement, telles que les hypothèques, les garanties bancaires...

Le Sénat, soulignant les incertitudes qui entouraient le dispositif proposé par l'Assemblée nationale, a supprimé cette disposition.

L'Assemblée a, en deuxième lecture, souhaité modifier le régime du cautionnement sans toutefois faire référence au livre des procédures fiscales.

•  Le premier paragraphe tend à modifier l'article 138 du code de procédure pénale, qui prévoit actuellement que le montant du cautionnement est fixé en tenant compte notamment des ressources de la personne. L'Assemblée nationale a souhaité que cet article fasse également référence aux charges de la personne.

•  Le deuxième paragraphe tend à supprimer dans l'article 138 du code de procédure pénale, la mention selon laquelle la constitution de sûretés, qui peut être exigée d'une personne sous contrôle judiciaire est destinée à garantir les droits des victimes. En fait, il s'agit simplement de transférer cette précision à l'article 142 du code de procédure pénale.

•  Le troisième paragraphe tend précisément à modifier l'article 142 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, celui-ci prévoit la destination du cautionnement lorsque celui-ci est exigé d'une personne sous contrôle judiciaire. Le cautionnement est notamment destiné à garantir la représentation de la personne, le paiement de la réparation des dommages causés par l'infraction, le paiement des amendes. Cet article serait modifié pour prévoir que les sûretés , qui peuvent être exigées de la personne placée sous contrôle judiciaire, pourraient avoir le même usage que le cautionnement .

L'objectif est clairement d'inciter le juge d'instruction à utiliser plus fréquemment la possibilité d'exiger de la personne la constitution de sûretés, de préférence à la fourniture d'un cautionnement, qui peut avoir des conséquences beaucoup plus dramatiques.

•  Les paragraphes IV, V, VI et VII de cet article tendent à apporter des coordinations dans les articles 142, 142-2 et 142-3 du code de procédure pénale pour appliquer aux sûretés les mêmes règles qu'au cautionnement. Dès lors que des sûretés peuvent garantir notamment la représentation de la personne, il convient en effet de prévoir la levée de la première partie de ces sûretés lorsque la personne a satisfait à toutes les obligations du contrôle judiciaire, comme cela est prévu pour la première partie du cautionnement. A l'inverse, il convient également de prévoir que, si la personne ne satisfait pas à ses obligations, il est procédé au recouvrement de la créance garantie par la première partie des sûretés.

De la même manière, le paragraphe VII tend à prévoir le sort de la deuxième partie des sûretés, selon que la personne a été condamnée ou non et selon que les sûretés excèdent ou non les sommes nécessaires à l'indemnisation de la victime et au paiement des amendes.

Le dispositif proposé apparaît beaucoup plus satisfaisant que celui que l'Assemblée nationale avait adopté en première lecture. Il devrait en effet permettre d'éviter des situations dramatiques dans lesquelles une personne est par exemple obligée de vendre son logement pour satisfaire à l'obligation de fournir un cautionnement imposée dans le cadre d'un contrôle judiciaire.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 10 ter
(art. 145 du code de procédure pénale)
Procédure avant la décision en matière
de détention provisoire

En première lecture, le Sénat a eu un débat approfondi à propos de la nécessité éventuelle qu'un débat contradictoire soit systématiquement organisé devant le juge appelé à connaître de la détention provisoire. Le Sénat a finalement souhaité qu'un tel débat ait lieu dans tous les cas.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale est revenue au texte initial, qui ne prévoyait l'organisation d'un débat contradictoire que lorsque le juge envisageait le placement en détention provisoire. Elle a toutefois, dans le présent article, modifié l'article 145 du code de procédure pénale pour préciser de manière très claire le déroulement de la procédure.

Ainsi, le juge de la détention devrait, dans tous les cas, faire comparaître devant lui la personne mise en examen, assistée de son avocat si celui-ci a été désigné.

Le juge, après avoir pris connaissance des éléments du dossier et entendu, s'il l'estime utile, les observations de la personne lui ferait connaître s'il envisage ou non de la placer en détention provisoire :

- dans le premier cas, le juge devrait informer la personne que la décision ne pourra intervenir qu'à l'issue d'un débat contradictoire et qu'elle a le droit de demander un délai pour préparer sa défense ;

- dans le second cas, le juge pourrait ordonner le placement sous surveillance judiciaire de la personne et devrait lui faire déclarer son adresse conformément aux dispositions de l'article 116 du code de procédure pénale relatif à l'interrogatoire de première comparution.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 12
(art. 146 du code de procédure pénale)
Conséquence d'une requalification en matière
de détention provisoire

Cet article tend à modifier l'article 146 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que, lorsqu'il apparaît au cours d'une information, que la qualification criminelle ne peut pas être retenue, le juge d'instruction peut ordonner le maintien de la personne en détention ou ordonner sa mise en liberté. Le présent article tend simplement à prendre en compte la création d'un juge chargé de la détention provisoire en prévoyant que le juge d'instruction doit saisir ce juge s'il souhaite le maintien de la personne en détention lorsque la qualification criminelle ne peut être retenue.

Cet article n'est encore en navette que pour la dénomination du juge responsable de la détention provisoire.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 13
(art. 147 du code de procédure pénale)
Mise en liberté d'office ou sur demande du procureur

Comme le précédent, cet article n'est soumis au Sénat en deuxième lecture que parce que les assemblées ne sont pas encore parvenues à un accord sur la dénomination du nouveau juge créé par le projet de loi.

Cet article tend à modifier l'article 147 du code de procédure pénale relatif aux conditions dans lesquelles une personne mise en détention provisoire peut être mise en liberté. Il prévoit que, lorsque le procureur requiert la mise en liberté, le juge d'instruction peut faire droit à la demande ou transmettre, dans les cinq jours, le dossier, assorti de son avis motivé, au juge de la détention provisoire, ce dernier devant statuer dans un délai de trois jours ouvrables.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et vous propose d'adopter l'article 13 ainsi modifié .

Article 14
(art. 148 du code de procédure pénale)
Demande de mise en liberté par la personne ou son avocat

Comme les précédents, cet article tend à tirer les conséquences de la création d'un juge chargé de la détention provisoire et n'a été modifié, au cours de la navette, qu'en ce qui concerne le nom du nouveau juge.

Il s'agit de prévoir que les demandes de mise en liberté, aujourd'hui adressées au juge d'instruction qui statue, continueraient à lui être transmises, mais que celui-ci ne pourrait que faire droit à la demande ou la transmettre, avec son avis motivé au juge de la détention provisoire, qui statuerait dans les trois jours.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions limitant les conditions ou
la durée de la détention provisoire


Article 15
(art. 143-1 nouveau, 144 et 144-1-A nouveau du code de procédure pénale)
Conditions de la détention provisoire

Cet article très important du projet de loi concerne les seuils de peine encourue à partir desquels la détention provisoire est possible, ainsi que les motifs susceptibles de justifier la détention provisoire.

Actuellement, en vertu de l'article 144 du code de procédure pénale, la détention est possible lorsque la personne encourt une peine criminelle ou une peine correctionnelle égale ou supérieure à un an d'emprisonnement en cas de délit flagrant, à deux ans d'emprisonnement dans les autres cas .

L'article 144 prévoit également les motifs susceptibles de justifier le placement en détention provisoire. Il s'agit des nécessités de l'instruction, de la nécessité de protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement, enfin de la nécessité de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant qu'a causé l'infraction à l'ordre public.

L'article 15 prévoit d'inscrire dans deux articles différents les conditions de mise en détention liées aux seuils de peine et les motifs de détention.

•  Le texte proposé pour l' article 143-1 du code de procédure pénale prévoyait, dans le projet de loi initial, non modifié par l'Assemblée nationale, un système de seuils de peine très complexe, qui ne modifiait qu'à la marge le droit actuel.

Ainsi, la détention aurait été possible lorsqu'une peine de trois ans d'emprisonnement aurait été encourue, compte tenu de l'aggravation de la peine encourue en cas de récidive. Mais la détention aurait été possible dès lors qu'une peine de deux ans d'emprisonnement avait été encourue pour des infractions contre les personnes ou contre l'Etat, la Nation et la paix publique. Enfin, la détention aurait également été possible en cas de peine encourue de deux années d'emprisonnement pour une atteinte contre les biens, mais seulement si la personne avait déjà été condamnée.

Votre commission a estimé à la fois trop timorées et trop complexes ces dispositions. Le Sénat a décidé que la détention provisoire ne serait plus possible qu'en cas de peine encourue égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement. Mme le garde des sceaux s'est alors clairement opposée à cette modification.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a décidé, cette fois avec l'accord de Mme le garde des sceaux, d'accepter que la détention provisoire ne soit possible que lorsqu'est encourue une peine égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement
.

L'Assemblée nationale a souhaité aller plus loin en ce qui concerne les infractions contre les biens. Elle a prévu que la détention provisoire ne serait plus possible lorsque la peine encourue serait inférieure à cinq ans pour un délit prévu au livre III du code pénal, relatif aux atteintes aux biens. Ainsi, les délits contre les biens, punis de trois ans d'emprisonnement, en particulier le vol simple, ne pourraient plus justifier le placement en détention provisoire.

En revanche, l'Assemblée nationale a décidé de supprimer tous les seuils pour les personnes poursuivies alors qu'elles ont déjà été condamnées à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à un an. Une telle disposition constitue un retour en arrière par rapport au droit actuel.

Ne serait-il pas singulier de permettre la mise en détention provisoire d'une personne qui encourrait une simple amende correctionnelle, sous prétexte qu'elle a déjà été condamnée auparavant ? Votre commission n'estime pas possible de retenir une telle disposition, dont elle propose, par un amendement , la suppression.

En revanche, votre commission propose, par un amendement , que le nouveau seuil de cinq ans instauré pour les délits contre les biens ne soit pas applicable quand la personne a déjà été condamnée à une peine d'emprisonnement sans sursis supérieure à un an. Dans un tel cas, s'appliquera le seuil général de trois ans . Le tableau suivant résume la différence entre le droit actuel, la position de l'Assemblée nationale en deuxième lecture et la proposition de votre commission.

Tableau des seuils de peine d'emprisonnement
permettant le placement en détention provisoire

 


Droit actuel

Texte adopté par le Sénat
en première lecture

Texte adopté par l'Assemblée nationale


Proposition de
la commission

Régime général

2 ans minimum

3 ans minimum

3 ans minimum

3 ans minimum

Régimes spéciaux

1 an en cas de flagrance

 

- 5 ans en cas de délit figurant au livre III du code pénal (atteintes aux biens)

- n'importe quelle peine, y compris une peine d'amende lorsque la personne a déjà été condamnée à une peine d' emprisonnement supérieure à un an

- 5 ans en cas de délits figurant au livre III du code pénal, sauf si la personne a déjà été condamnée à une peine d' emprisonnement supérieure à un an

•  Le texte proposé pour l' article 144 du code de procédure pénale tend à réécrire les dispositions actuelles de cet article relatives aux motifs de placement en détention provisoire, sans les modifier.

Toutefois, le Gouvernement a proposé, dans le projet de loi initial, que le trouble à l'ordre public ne puisse plus justifier, à lui seul, la prolongation de la détention provisoire lorsque la peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement. L'Assemblée nationale, en première lecture, a souhaité que le motif d'ordre public ne puisse plus justifier la prolongation de la détention provisoire qu'en matière criminelle. Le Sénat a alors décidé de rétablir le texte initial du Gouvernement, mais l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, a rétabli le texte qu'elle avait adopté en première lecture.

Votre commission, consciente que le critère du trouble à l'ordre public est parfois utilisé de manière abusive, propose néanmoins par un amendement , de revenir au texte initial du projet de loi, considérant qu'il peut exister des cas, même en matière correctionnelle, dans lesquels ce motif peut justifier un placement en détention et une prolongation de celle-ci. Le recours à un juge différent de celui qui instruit le dossier devrait permettre d'éviter les abus.

•  Le texte proposé pour l' article 144-1 A du code de procédure pénale a été introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale lors de la deuxième lecture, à l'initiative de la rapporteuse de la commission des lois, Mme Christine Lazerges et de M. Alain Touret. Il tend à interdire, sauf en matière criminelle, en cas de poursuites relatives aux infractions commises envers les enfants et en cas de violation des obligations du contrôle judiciaire, le placement en détention provisoire des pères et mères d'enfants de moins de dix ans , ayant chez le parent concerné leur résidence habituelle et à l'égard desquels ce parent exerce l'autorité parentale. Le texte adopté par l'Assemblée nationale précise que le juge des enfants peut s'opposer à cette mesure.

L'objectif poursuivi par cette disposition ne peut qu'être approuvé. Trop souvent, la détention provisoire a des conséquences dramatiques sur la structure familiale, et notamment pour les jeunes enfants.

Pour autant, l'adoption d'un tel article suscite de nombreuses difficultés. L'intervention du juge des enfants est prévue sans que les conditions de cette intervention soient définies. Le texte précise simplement qu'il peut s'opposer à la " mesure ". Qu'adviendrait-il si le juge des enfants s'opposait à la mesure ? La personne devrait-elle être obligatoirement placée en détention provisoire ou bien la procédure normale s'appliquerait-elle ? La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale donne le sentiment que le juge des enfants pourrait s'opposer au placement en détention provisoire, alors qu'il semble que l'intention des députés soit de permettre au juge des enfants de s'opposer à l'interdiction de toute détention provisoire pour les parents de jeunes enfants.

De manière plus générale, il ne paraît pas possible d'opérer une distinction entre les prévenus selon leur situation de famille, même dans un souci légitime de protection de l'enfance.

Votre commission veut croire que la création d'un juge chargé de la détention provisoire, le relèvement des seuils permettant le placement en détention provisoire, les modifications apportées aux règles du cautionnement en matière de contrôle judiciaire permettront d'éviter dans bien des cas que des enfants soient les premières victimes du recours à la détention provisoire. Elle considère en outre que la possibilité prévue par le projet de loi d'exécution de la détention provisoire sous le régime du placement sous surveillance électronique pourrait constituer un moyen utile d'éviter la rupture des liens familiaux. Elle vous soumet donc un amendement de suppression de cette disposition.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 16
(art. 145-1 du code de procédure pénale)
Durée de la détention provisoire en matière correctionnelle

Cet article concerne les durées maximales de détention provisoire en matière correctionnelle.

•  Le droit actuel

Actuellement, la durée de la détention provisoire ne peut excéder :

- six mois lorsque la peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement et que la personne n'a pas déjà été condamnée pour crime ou pour délit à une peine d'emprisonnement supérieure à un an avec sursis ;

- un an lorsque la peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement et que la personne a déjà été condamnée pour crime ou délit à une peine supérieure à un an d'emprisonnement avec sursis ;

- deux ans lorsque la peine encourue est comprise entre cinq ans et dix ans d'emprisonnement ;

- une durée raisonnable lorsque la peine encourue est égale à dix d'emprisonnement.

•  Le projet de loi

Le projet de loi initial prévoyait de maintenir les durées de détention provisoire actuelles tout en limitant les cas ou la durée de détention ne comporte aucune limite.

L'Assemblée nationale, en première lecture, a procédé à une réécriture complète de l'article 145-1 du code de procédure pénale. Elle a prévu que la détention ne pourrait excéder :

- quatre mois lorsque la peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement ;

- un an lorsque la peine encourue est supérieure à cinq ans d'emprisonnement ;

- deux ans lorsque la peine encourue est supérieure à cinq ans et qu'une commission rogatoire internationale est délivrée par le juge d'instruction ;

- une durée raisonnable lorsque la peine encourue est égale à dix ans d'emprisonnement et que la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou infractions commises en bande organisée.

En première lecture, le Sénat a accepté les durées proposées par l'Assemblée nationale. Il s'est toutefois opposé à la possibilité de faire dépendre la durée de détention de la délivrance d'une commission rogatoire internationale. Il a prévu que la durée maximale d'un an de détention pourrait être prolongée à titre exceptionnel par la chambre d'accusation et non plus par le juge de la détention provisoire, pendant une durée maximale d'un an.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a modifié ses propositions initiales. Elle a en effet prévu que la détention ne pourrait excéder :

- quatre mois lorsque la peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement et que la personne n'a pas déjà été condamnée à une peine d'emprisonnement sans sursis supérieure à un an ;

- un an dans les autres cas ;

- deux ans lorsque l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis à l'étranger ou lorsque la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, associations de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une infraction commise en bande organisée et qu'elle encourt une peine égale à dix ans d'emprisonnement.

La durée de la détention provisoire ne pourrait donc en aucun cas dépasser deux ans en matière correctionnelle.

Votre commission accepte que la durée de la détention puisse être accrue lorsqu'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis à l'étranger. Ce critère lui paraît en effet plus objectif que celui de la délivrance d'une commission rogatoire internationale par le juge d'instruction .

En revanche, elle persiste à penser que pour certaines infractions graves et complexes, la durée de détention provisoire proposée par l'Assemblée nationale pourrait, dans certaines circonstances, être insuffisante. Elle propose donc, par un amendement , qu'un allongement de la durée maximale de détention soit possible lorsque la personne encourt dix ans d'emprisonnement et qu'elle est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une infraction commise en bande organisée. Elle propose que, pour ces infractions, la prolongation de la détention au-delà de deux ans ne puisse être autorisée qu'à titre exceptionnel par la chambre d'accusation pour une durée de six mois, la prolongation pouvant être renouvelée une fois.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 17
(art. 145-2 du code de procédure pénale)
Durée de la détention provisoire en matière criminelle

Dans sa rédaction actuelle, l'article 145-2 du code de procédure pénale prévoit une durée maximale de détention provisoire d'un an en matière criminelle. Cette durée peut être prolongée pour une durée de six mois, sans que le nombre de prolongations soit limité.

Le Gouvernement a proposé, dans le projet de loi initial, d'instaurer des délais butoirs à la détention provisoire en matière criminelle. Le texte prévoyait que la durée de détention ne pourrait excéder :

- deux ans en cas de peine encourue inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ;

- trois ans en cas de peine encourue inférieure à trente ans de réclusion ou de détention criminelles.

Aucun butoir n'était prévu en cas de peine encourue supérieure à trente ans d'emprisonnement ou en cas de crimes multiples reprochés à une personne.

En première lecture, l'Assemblée nationale a modifié ce dispositif pour prévoir que la détention ne pourrait excéder :

- deux ans en cas de peine encourue inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ;

- trois ans en cas de peine encourue supérieure ou égale à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ainsi que lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et que le juge d'instruction a délivré une commission rogatoire internationale ;

- quatre ans lorsque la peine encourue est supérieure ou égale à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et que le juge d'instruction a délivré une commission rogatoire internationale.

Enfin, l'Assemblée nationale n'avait prévu aucun délai butoir pour les personnes prévenues pour trafic de stupéfiants, terrorisme, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour un crime commis en bande organisée. De même, elle n'avait prévu aucun délai butoir lorsque plusieurs crimes contre les personnes ou contre l'Etat, la Nation et la paix publique sont reprochés à la personne.

En première lecture, le Sénat a accepté les durées proposées par l'Assemblée nationale tout en refusant de faire dépendre la durée de détention de la délivrance d'une commission rogatoire ou de la multiplicité des crimes. Il a en outre prévu la possibilité que les durées maximales de deux ou trois ans puissent, à titre exceptionnel, être prolongées par la chambre d'accusation pendant une durée maximale d'un an.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a modifié ses propositions initiales. Elle a prévu que la durée de détention provisoire ne pourrait excéder :

- deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ;

- trois ans lorsque la peine encourue est supérieure ou égale à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ou lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention, mais que l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis à l'étranger ;

- quatre ans lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs crimes mentionnés aux livres II et IV du code pénal, lorsque la peine encourue est supérieure à vingt ans d'emprisonnement et que l'un des fais constitutifs de l'infraction a été commis hors du territoire nationale, enfin lorsque la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour crime commis en bande organisée.

Ainsi , aucune détention provisoire ne pourrait excéder une durée de quatre ans . Votre commission propose d'accepter que la multiplicité des crimes ou la commission hors du territoire national d'un des faits constitutifs de l'infraction puissent justifier un allongement de la durée de détention.

En revanche, elle persiste à penser que, pour quelques infractions graves et complexes, le délai proposé par l'Assemblée nationale peut présenter des inconvénients. Elle propose donc, par un amendement , de prévoir que la détention pourra prolongée, à titre exceptionnel, par la chambre d'accusation, au-delà de quatre ans, en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants, de proxénétisme, d'extorsion de fonds ou pour un crime commis en bande organisée. La prolongation serait faite pour une durée de six mois et pourrait être renouvelée une fois.

En deuxième lecture, la rapporteuse de la commission des Lois de l'Assemblée nationale a estimé que ce système, déjà proposé de manière plus large par le Sénat en première lecture, était trop complexe. Ce système de prolongation exceptionnelle par la chambre d'accusation est pourtant celui qu'a retenu l'Assemblée nationale en matière de délai d'audiencement des affaires à l'article 21 quinquies.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 17 bis A
(art. 145-5 nouveau du code de procédure pénale)
Consultation de services d'insertion avant toute prolongation
de la durée de la détention provisoire

Cet article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 145-5 pour prévoir que le juge d'instruction devra consulter le service pénitentiaire d'insertion ou de probation, les services de la protection judiciaire de la jeunesse ou un autre organisme habilité à faire des propositions en matière d'insertion avant toute demande de prolongation de la détention provisoire. Ces personnes ou organes devront proposer les mesures socio-éducatives propres à se substituer à la détention de la personne mise en examen, à favoriser sa réinsertion sociale et à prévenir la récidive.

Une telle mesure, destinée à limiter autant qu'il est possible les prolongations de détention, paraît cependant trop contraignante. Le projet de loi contient déjà de nombreuses dispositions destinées à limiter le placement et le maintien en détention provisoire. Il convient de ne pas multiplier les formalités nouvelles.

Surtout, on voit mal, compte tenu des motifs qui peuvent justifier le placement en détention provisoire (risque de disparition des preuves, risque de fuite de la personne, trouble exceptionnel à l'ordre public...) comment des mesures socio-éducatives pourraient se substituer à la détention provisoire.

Votre commission vous propose la suppression de cet article.

Article 17 bis
(art. 207-2 nouveau du code de procédure pénale)
Prolongation exceptionnelle de la durée
de détention par la chambre d'accusation

En première lecture, le Sénat a souhaité que les durées maximales de détention provisoire puissent être prolongées, à titre exceptionnel, par la chambre d'accusation lorsque les investigations du juge d'instruction indispensables à la manifestation de la vérité doivent être impérativement poursuivies et que la mise en liberté de la personne causerait, pour la sécurité des personnes et des biens, un risque d'une particulière gravité. Le texte adopté par le Sénat prévoyait que la prolongation pourrait intervenir pour une durée de quatre mois et que la décision pourrait être renouvelée deux fois.

L'Assemblée nationale a supprimé ce dispositif . La rapporteuse de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges, a évoqué, à l'appui de cette décision, les risques d'alourdissement de la procédure et d'encombrement des chambres d'accusation.

Votre commission a proposé de rétablir ce dispositif, tout en limitant sa portée, dans les articles 16 et 17 du projet de loi, de telle sorte que le présent article n'a plus d'objet.

Votre commission vous propose en conséquence de maintenir la suppression de cet article.

Article 18 bis A
(art. 144-2 nouveau du code de procédure pénale)
Placement sous surveillance électronique

Cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture à l'initiative de la rapporteuse de la commission des lois Mme Christine Lazerges, et de M. Jacques Floch et Mme Frédérique Bredin, tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 144-2, pour prévoir que la détention provisoire peut être effectuée, sur décision du juge de la détention provisoire, avec l'accord de l'intéressé, sous le régime de placement sous surveillance électronique.

Votre commission ne peut que se réjouir de l'intérêt aujourd'hui porté au placement sous surveillance électronique. Le Sénat, et en particulier notre excellent collègue, M. Guy-Pierre Cabanel, est en effet à l'origine de la loi du 19 décembre 1997, qui permet l'utilisation du placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des courtes peines ou des fins de peine d'emprisonnement.

Cette loi a été adoptée il y a plus de deux ans et n'a toujours pas reçu le moindre début d'application, même à titre expérimental. Votre commission ne peut donc que renouveler son appel au Gouvernement, afin qu'il mette rapidement en oeuvre les dispositions de cette loi, susceptible de faciliter la réinsertion sociale des condamnés.


En ce qui concerne l'application du placement sous surveillance électronique en matière de détention provisoire, la décision prise par l'Assemblée nationale mérite d'être examinée de près.

En 1995, dans son rapport au Premier ministre sur la prévention de la récidive 5( * ) , notre collège, M. Guy Cabanel, tout en proposant l'utilisation du placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution de certaines peines, avait émis des réserves en ce qui concerne l'usage de ce dispositif en matière de détention provisoire. Il avait notamment formulé les remarques suivantes :

" La transposition d'un tel dispositif en France risquerait néanmoins de se révéler d'une portée limitée dans la mesure où les critères de placement en détention provisoire demeureraient inchangés.

" Il est en effet difficilement concevable que le recours à la surveillance électronique soit appliqué à une personne dont le maintien en liberté, même surveillée, est de nature à nuire à l'ordre public, à conduire à une disparition des preuves ou à constituer une menace pour les témoins, les victimes ou pour la personne mise en examen elle-même.

" En outre, dans la mesure où une période d'assignation à domicile s'imputerait sur la peine prononcée, les juges risqueraient de se montrer réticents à appliquer ce dispositif. En effet, la personne mise en examen pourrait chercher à faire durer l'application de cette mesure, et donc l'instruction elle-même. "

Ces différentes raisons avaient conduit notre collègue à ne pas proposer l'utilisation du placement sous surveillance électronique en matière de détention provisoire.

A l'Assemblée nationale, Mme le garde des sceaux, tout en acceptant la mesure proposée, a exprimé la crainte que le placement sous surveillance électronique devienne une alternative au contrôle judiciaire plutôt qu'une alternative à l'emprisonnement.

Votre commission vous soumet un amendement destiné à mieux montrer encore que le placement sous surveillance électronique ne peut être qu'une modalité d'exécution de la détention provisoire et en aucun cas un substitut au contrôle judiciaire. Elle propose en outre que la personne puisse demander elle-même à exécuter sa détention provisoire sous le régime de placement sous surveillance électronique.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 18 ter
(art. 187-1 et 194 du code de procédure pénale)
Référé-liberté

En première lecture, sur proposition de notre excellent collègue, M. Pierre Fauchon, le Sénat a décidé de remplacer le mécanisme du référé-liberté par un système d'appel à très bref délai devant la chambre d'accusation.

Actuellement, l'article 187-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas d'appel d'une ordonnance de placement en détention provisoire, la personne mise en examen ou le procureur de la République peuvent, lorsque l'appel est interjeté au plus tard le jour suivant la décision de placement en détention, demander au président de la chambre d'accusation d'examiner immédiatement l'appel. Le président de la chambre d'accusation doit statuer le troisième jour ouvrable suivant la demande. Lorsque le président de la chambre d'accusation infirme l'ordonnance du juge d'instruction, la personne est remise en liberté et la chambre d'accusation dessaisie. Dans le cas contraire, la chambre d'accusation doit statuer dans les quinze jours suivant l'appel, conformément à l'article 194 du code de procédure pénale.

Le Sénat, constatant que la procédure de référé-liberté était peu utilisée et qu'elle n'aboutissait que rarement à des remises en liberté, a proposé de remplacer ce système par un appel à très bref délai devant la chambre d'accusation, contraignant celle-ci à se prononcer dans les quatre jours de l'appel lorsque celui-ci intervient le jour même de la décision de placement en détention. L'avantage de ce système serait de permettre l'intervention d'une collégialité avant le placement en détention provisoire. En effet, le Sénat a prévu que la personne serait, dans l'attente de la décision, incarcérée, sans que cette incarcération soit un placement en détention provisoire.

L'Assemblée nationale s'est opposée au système proposé par le Sénat. Les députés ont remplacé ce dispositif par deux dispositions nouvelles. En premier lieu, dans le cadre d'une procédure de référé-liberté, le président de la chambre d'accusation pourrait ordonner la comparution de la personne au cours de l'audience de cabinet qu'il est tenu d'organiser. Une telle mesure paraît bienvenue, mais il faut craindre qu'elle ne soit guère utilisée, le président devant statuer au plus tard le troisième jour suivant l'appel.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a décidé d'abaisser de quinze jours à dix jours le délai dans lequel une chambre d'accusation doit se prononcer sur les ordonnances de placement en détention provisoire.

Votre commission persiste à penser qu'un appel à très bref délai des décisions de placement en détention, et non des décisions de prolongation, peut permettre un réel progrès dans le contrôle de la détention provisoire.

Tout en acceptant la proposition de l'Assemblée nationale abaissant de quinze à dix jours le délai donné à la chambre d'accusation pour statuer, elle propose à nouveau, par un amendement , qu'un appel interjeté le jour même du placement en détention doive être examiné dans les quatre jours ouvrables par la chambre d'accusation.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 18 quater
(art. 219 du code de procédure pénale)
Pouvoirs propres du président de la chambre d'accusation

Cet article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture, à l'initiative du Gouvernement, tend à modifier l'article 219 du code de procédure pénale, relatif aux pouvoirs propres du président de la chambre d'accusation, pour supprimer la possibilité pour le président de la chambre d'accusation de déléguer tout ou partie de ses pouvoirs à un premier vice-président du tribunal de grande instance désigné par le président de ce tribunal.

Devant l'Assemblée nationale, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, a expliqué qu'il s'agissait " de renforcer le contrôle de l'instruction par la chambre d'accusation et par son président (...) ".

De fait, compte tenu du rôle de la chambre d'accusation en matière de contrôle de l'instruction, il ne paraît pas souhaitable que les pouvoirs du président de la chambre d'accusation puissent être délégués à un magistrat du tribunal de grande instance.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Articles 18 quinquies et 18 sexies
(art. 397-3 et 397-4 du code de procédure pénale)
Comparution immédiate

Ces deux articles, introduits dans le projet de loi par l'Assemblée nationale en deuxième lecture à l'initiative de Mme Christine Lazerges, rapporteuse de la commission des Lois, tendent à modifier les délais de jugement en matière de comparution immédiate lorsque la personne est en détention provisoire .

Actuellement, le procureur peut traduire sur le champ des prévenus encourant entre un an et sept ans d'emprisonnement devant le tribunal correctionnel dans le cadre de la procédure de comparution immédiate. Si l'affaire ne paraît pas en état d'être jugée ou si la personne demande un délai, le tribunal peut placer ou maintenir en détention provisoire cette personne. Dans un tel cas, en vertu de l'article 397-3 du code de procédure pénale, le jugement au fond doit être rendu dans les deux mois qui suivent le jour de la première comparution de la personne. Par ailleurs, l'article 397-4 du code de procédure pénale prévoit que la cour d'appel doit statuer dans les quatre mois de l'appel lorsque la personne est condamnée et maintenue ou placée en détention dans le cadre de la procédure de comparution immédiate.

L'Assemblée nationale, dans l'article 18 quinquies du projet, a abaissé de deux à un mois le délai dans lequel doit intervenir le jugement des personnes placées en détention provisoire dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate. Elle a de même abaissé de quatre à deux mois le délai donné à la cour d'appel pour statuer.

Ces mesures paraissent tout à fait bienvenues. En effet, en matière de comparution immédiate, les seuils de peine encourue permettant le placement en détention provisoire seront différents de ceux qui existent lorsqu'une information est ouverte, après l'adoption du projet de loi. Actuellement, la procédure de comparution immédiate, et donc le placement en détention provisoire, est possible lorsque la personne encourt une peine de deux ans d'emprisonnement au moins, ou d'un an d'emprisonnement en cas de flagrant délit.

S'il ne paraît pas souhaitable de modifier ces seuils en matière de comparution immédiate, compte tenu de la nature des affaires soumises au tribunal selon cette procédure et du caractère très rapide de ce mode de jugement, il est souhaitable que la durée de la détention provisoire soit aussi courte que possible. L'abaissement de la durée maximale de détention de deux à un mois est donc une heureuse initiative.

Toutefois, cet amendement pourrait avoir des conséquences préjudiciables dans certaines circonstances. Rappelons que la procédure de comparution immédiate peut être utilisée pour les infractions passibles d'une peine inférieure ou égale à sept ans d'emprisonnement. Or, certaines infractions punies de cinq ans ou de sept ans d'emprisonnement, en particulier des infractions sexuelles, peuvent nécessiter des expertises et, dans un tel cas, le délai d'un mois pour être jugé ne pourra en aucun cas être tenu. Votre commission vous propose donc, par un amendement , que le nouveau délai d'un mois pour juger une personne en comparution immédiate ne soit applicable que lorsque la peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 18 septies
(art. 716 du code de procédure pénale)
Emprisonnement individuel des prévenus

En première lecture, l'Assemblée nationale a inséré un article 2 G dans le projet de loi modifiant l'article 716 du code de procédure pénale pour prévoir que la distribution intérieure des maisons d'arrêt et leur encombrement temporaire ne pourront plus justifier, comme aujourd'hui, que les prévenus ne soient pas emprisonnés individuellement. L'Assemblée nationale a reporté l'application de cette disposition trois ans après l'entrée en vigueur de la loi.

Le Sénat a accepté cette mesure. Toutefois, à la demande du Gouvernement, il a décidé que cette disposition entrerait en vigueur cinq ans après la publication de la loi. L'Assemblée nationale, tout en modifiant la place de cet article dans le projet, a rétabli le texte qu'elle avait adopté en première lecture.

Pourtant, Mme le garde des sceaux a émis de sérieux doutes sur la capacité du Gouvernement à fournir à chaque prévenu une cellule individuelle dans un délai de trois ans : " Comme vous le savez, j'ai engagé un programme de construction de sept nouveaux établissements, que j'ai souhaité concentrer essentiellement sur les maisons d'arrêt. Il permettra compte tenu de la fermeture de places vétustes, de réduire à 12.500 le déficit du nombre de cellules. Ce programme représente 18 % des ouvertures de places et 26 % des fermetures réalisées depuis 1981.

" Pour parvenir à l'encellulement individuel, il faudrait donc 12.500 cellules de plus. Ce qui signifie qu'outre les 5,5 milliards que nous avons engagés pour la construction de sept nouveaux établissements et la rénovation de cinq autres, 10 milliards de francs supplémentaires seraient nécessaires
".

Votre commission espère que le présent projet de loi entraînera une diminution sensible du nombre de prévenus et facilitera donc la réalisation de l'objectif d'emprisonnement individuel des prévenus. Elle estime que l'emprisonnement individuel des prévenus doit absolument être réalisé à brève échéance. Rappelons que l'encellulement individuel a été proposé par une commission d'enquête parlementaire présidée par le vicomte d'Haussonville en...1873. Il est désormais temps que cette règle soit enfin appliquée.

Elle vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 18 octies
(art. 716-4 du code de procédure pénale)
Imputation de la détention provisoire sur la peine

L'article 716-4 du code de procédure pénale prévoit notamment qu'en cas de détention provisoire, cette détention est intégralement déduite de la durée de la peine prononcée ou de la durée totale de la peine à subir après confusion.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture, tend à compléter l'article 716-4 pour prévoir qu'en cas d'annulation d'une procédure, la détention provisoire ordonnée dans le cadre de cette procédure s'impute sur la peine éventuellement prononcée. Actuellement, on considère que l'annulation de la procédure fait disparaître la détention provisoire, même si une personne est par la suite condamnée pour les mêmes faits, de sorte que la détention provisoire ne s'impute pas sur la peine prononcée.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

SECTION 3
Dispositions relatives à l'indemnisation
des détentions provisoires


Article 19
(art. 149 à 149-2 du code de procédure pénale)
Indemnisation des détentions provisoires

Cet article tend à améliorer les conditions d'indemnisation des détentions provisoires injustifiées. Actuellement, l'indemnisation est facultative, la décision rendue par la commission compétente n'est pas motivée et n'est susceptible d'aucun recours.

• Le premier paragraphe de cet article tend à modifier l'article 149 du code de procédure pénale.

En première lecture, l'Assemblée nationale a rendu l'indemnisation obligatoire, tout en définissant certaines exceptions. Elle a ainsi prévu que l'indemnisation serait impossible si la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement résultait de la reconnaissance de l'irresponsabilité d'une personne atteinte d'un trouble psychique, de la prescription ou de l'amnistie, ou lorsque la personne a été placée en détention provisoire après s'être librement et volontairement laissée accuser à tort.

Le Sénat a précisé le contenu de ces exceptions, notamment pour prévoir que l'indemnisation n'est pas due lorsque la décision de non-lieu de relaxe ou d'acquittement a pour seul fondement l'irresponsabilité de la personne. En outre, le Sénat a souhaité que l'indemnisation ne soit écartée, lorsqu'une personne s'est librement et volontairement accusée à tort, que si elle a agi en vue de faire échapper l'auteur des faits aux poursuites.

L'Assemblée nationale a accepté ces modifications.

•  Le second paragraphe tend à modifier l'article 149-2 du code de procédure pénale, relatif aux conditions dans lesquelles la commission placée auprès de la cour de cassation, compétente en matière d'indemnisation des détentions provisoires, rend ses décisions. Il prévoit que les décisions de cette commission seront désormais motivées, que les débats auront lieu en séance publique, sauf opposition du requérant et que celui-ci sera, s'il le souhaite, entendu personnellement ou par l'intermédiaire de son conseil.

En première lecture, le Sénat, sur proposition de notre excellent collègue M. Michel Charasse, a supprimé ces dispositions, pour transférer la compétence en matière d'indemnisation des détentions provisoires au Conseil d'Etat.

L'Assemblée nationale a rétabli le texte qu'elle avait adopté en première lecture. Votre commission considère que si, jusqu'à présent, les indemnités versées pour détentions provisoires abusives ont été insuffisantes, c'est moins parce que la juridiction judiciaire n'accepte pas de reconnaître ses erreurs, que parce que les conditions d'attribution des indemnités sont définies de manière trop restrictive.

La modification des conditions d'indemnisation prévue par le projet de loi devrait permettre une amélioration sensible de la situation, d'autant plus que l'Assemblée nationale a décidé, lors de la deuxième lecture du projet de loi, de mettre en place un double degré de juridiction, en décentralisant les décisions en matière d'indemnisation des détentions provisoires (voir article suivant).

Votre commission considère donc que le système prévu par le projet de loi est équilibré et que le transfert du contentieux de l'indemnisation à la juridiction administrative ne constituerait pas un progrès évident par rapport à la situation actuelle.

Elle vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 19 bis A
(art. 149-1 du code de procédure pénale)
Décentralisation des décisions d'indemnisation

• Le premier paragraphe de cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture, à l'initiative du Gouvernement, tend à modifier l'article 149-1 du code de procédure pénale, qui prévoit la compétence d'une commission placée auprès de la Cour de cassation en matière d'indemnisation des détentions provisoires et définit sa composition.

Le texte proposé prévoit la compétence du premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle a été prononcée la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement. Cette décentralisation des décisions en matière d'indemnisation des détentions provisoires injustifiées a été souhaitée par la Cour de cassation, notamment parce que le nombre de dossiers en attente tend à augmenter fortement. Elle permettra l'instauration d'un double degré de juridiction dans cette matière, ce qui ne pourra qu'être favorable aux droits des personnes demandant une indemnisation.

•  Les deuxième et troisième paragraphes tendent à opérer des coordinations dans l'article 149-2, relatif aux conditions dans lesquelles statue la commission d'indemnisation.

•  Enfin, le quatrième paragraphe tend à insérer dans le code de procédure pénale deux articles, 149-3 et 149-4, relatifs à l'appel des décisions prises en matière d'indemnisation des détentions provisoires injustifiées par le premier président de la cour d'appel. Le texte proposé pour l'article 149-3 nouveau du code de procédure pénale prévoit que l'appel pourra être formé dans les dix jours auprès de la commission nationale d'indemnisation des détentions provisoires placée auprès de la Cour de cassation.

Les règles relatives à la composition de la commission ne seraient pas modifiées. Elle statuerait dans les mêmes conditions que le premier président de la cour d'appel, c'est-à-dire, sauf exception, en séance publique, et rendrait des décisions motivées.

Le texte proposé pour l'article 149-4 du code de procédure pénale renvoie à un décret en Conseil d'Etat la définition de la procédure devant le premier président de la cour d'appel et la commission nationale d'indemnisation des détentions provisoires.

•  Le paragraphe V prévoit que la modification des règles de compétence en matière d'indemnisation des détentions provisoires entrera en vigueur six mois après la publication de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 19 bis
Commission de suivi de la détention provisoire

En première lecture, l'Assemblée nationale a prévu la création d'une commission de suivi de la détention provisoire placée auprès du ministre de la justice, qui serait chargée " de réunir les données juridiques, statistiques et pénitentiaires concernant la détention provisoire, en France et à l'étranger ". La commission serait composée de deux représentants du Parlement, d'un magistrat de la Cour de cassation, d'un membre du Conseil d'Etat, d'un, professeur de droit pénal, d'un avocat et d'un représentant d'un organisme de recherche judiciaire.

En première lecture, le Sénat a supprimé cet article, en observant que la création d'un organe de ce type ne paraissait pas indispensable et qu'une telle commission pourrait être créée sans recourir à la loi. Il revient en particulier aux assemblées, et notamment à leurs commissions des lois, d'exercer un contrôle sur le système pénitentiaire et notamment sur la question de la détention provisoire. En outre, la Cour de cassation dresse , pour sa part, un bilan annuel des décisions rendues par la commission nationale d'indemnisation des détentions provisoires.

L'Assemblée nationale a rétabli cet article à l'initiative de la rapporteuse de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges.

Votre commission vous propose à nouveau la disjonction de cet article.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page