CHAPITRE II
DISPOSITIONS RENFORÇANT LES GARANTIES JUDICIAIRES
EN
MATIÈRE DE DÉTENTION PROVISOIRE
SECTION I A
Dispositions générales
Article 10 A
(art. 137 du code de procédure
pénale)
Détention provisoire
L'article 137 du code de procédure pénale
énonce la possibilité de mettre en détention provisoire
certaines personnes, tout en affirmant le caractère exceptionnel de
cette mesure. Il prévoit, en effet, que les personnes mises en examen
restent libres, sauf, à raison des nécessités de
l'instruction ou à titre de mesure de sûreté, à
être soumises au contrôle judiciaire ou, à titre
exceptionnel, placées en détention provisoire.
L'article 10 A, inséré dans le projet de loi par
l'Assemblée nationale au cours de la première lecture, tend
à réinscrire l'article 137 pour préciser que la
personne mise en examen est présumée innocente.
En première lecture, le Sénat a supprimé cette disposition
considérant que ce rappel n'apportait rien au droit existant. Dans un
souci de conciliation, votre commission vous propose de ne pas supprimer une
nouvelle fois cette disposition, dont l'intérêt paraît
pourtant singulièrement limité.
Elle vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 10 B
(art. L. 611-1 du code de
l'organisation judiciaire)
Suppression de l'obligation de présence
d'au moins
un juge d'instruction dans chaque tribunal de grande instance
L'article L. 611-1 du code de l'organisation
judiciaire
dispose qu'il y a dans chaque tribunal de grande instance un ou plusieurs juges
d'instruction.
L'Assemblée nationale a décidé, lors de la première
lecture, de supprimer cette disposition. La rapporteuse de la commission des
Lois, Mme Christine Lazerges, avait notamment fait valoir que le
regroupement des juges d'instruction faciliterait une rationalisation de la
carte judiciaire.
Le Sénat a supprimé l'article adopté par
l'Assemblée nationale et celle-ci l'a rétabli en deuxième
lecture.
Votre commission n'est pas hostile au regroupement des juges d'instruction et
à l'idée qu'il n'y ait pas dans chaque tribunal de grande
instance un juge d'instruction. Elle constate simplement que l'instrument
choisi par l'Assemblée nationale pour opérer cette réforme
est inopérant.
Il ne suffit pas en effet de supprimer l'obligation qu'il y ait un juge
d'instruction dans chaque tribunal pour que le regroupement des juges
d'instruction puisse être opéré.
Ainsi, actuellement, il n'existe pas de tribunal pour enfants dans tous les
tribunaux de grande instance. Le code de l'organisation judiciaire
prévoit donc que "
le siège et le ressort des tribunaux
pour enfants sont fixés par voie réglementaire
". De la
même manière, il conviendrait, pour les juges d'instruction, de
prévoir qu'un décret détermine la liste des tribunaux
où sont présents un ou plusieurs juges d'instruction.
Par ailleurs, il conviendrait de préciser si, lorsqu'une affaire est du
ressort d'un tribunal où il n'y a pas de juge d'instruction, la saisine
du juge d'instruction d'un autre tribunal est faite par le procureur du lieu de
l'infraction ou par le procureur du tribunal où sont présents des
juges d'instruction.
Aucune de ces questions n'a été abordée lors des
débats à l'Assemblée nationale. Votre commission persiste
à penser que le présent article ne peut avoir aucun effet
pratique s'il n'est pas accompagné de mesures de coordination permettant
sa mise en oeuvre.
Dans ces conditions, elle vous propose à nouveau la
disjonction
de cet article.
SECTION I
Dispositions relatives au juge
chargé
de la détention provisoire
Cette
section a pour objet de créer un juge de la détention provisoire
distinct du juge d'instruction. En première lecture, le Sénat
s'est opposé à ce qu'un juge soit qualifié de juge de la
détention provisoire, rappelant que l'autorité judiciaire est
gardienne de la liberté individuelle. Il a décidé de ne
pas nommer ce magistrat. L'Assemblée nationale est revenue à
l'appellation de juge de la détention provisoire, tout en proposant que
ce magistrat puisse se voir confier de nombreuses prérogatives n'ayant
aucun lien avec la détention provisoire.
Votre commission vous propose, suivant la logique de l'Assemblée
nationale, d'étendre les attributions de ce magistrat en lui confiant
les prérogatives actuellement exercées par le président du
tribunal de grande instance en matière de libertés. Elle estime
qu'un tel accroissement de ses attributions permet désormais de faire de
ce magistrat un véritable
juge des libertés
et propose,
par un
amendement
, de lui donner cette appellation dans
l'intitulé de la présente section.
Article 10
(art. 137-1 à 137-5 nouveaux du
code de
procédure pénale)
Création d'un juge de la
détention provisoire
Cet
article tend à créer un juge de la détention provisoire
chargé de contentieux de la détention provisoire.
• Le texte proposé pour
l'article 137-1 du code de
procédure
prévoit que ce juge doit avoir rang de
président, de premier vice-président ou de vice-président
et qu'il ne peut, à peine de nullité, participer au jugement des
affaires pénales dont il a connu.
Il serait saisi par une ordonnance
motivée du juge d'instruction
. Votre commission vous soumet
un
amendement
tendant à modifier la dénomination du juge de la
détention provisoire pour en faire un juge des libertés.
En première lecture, le Sénat a souhaité que le juge de la
détention provisoire statue dans tous les cas à l'issue d'un
débat contradictoire, alors que le texte initial ne prévoyait le
débat contradictoire que lorsque le juge de la détention
envisageait le placement en détention ou la prolongation de cette
détention.
L'Assemblée nationale s'est opposée à cette modification,
la rapporteuse de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges,
observant que le débat contradictoire n'avait guère
d'intérêt en cas de décision favorable à la personne
mise en examen. A la réflexion, votre commission vous propose d'accepter
que le débat contradictoire n'ait lieu que lorsque le juge envisage le
placement en détention. Actuellement, le juge d'instruction n'organise
pas de débat contradictoire lorsqu'il n'envisage pas de placer la
personne en détention.
Votre commission vous soumet un
amendement
de cohérence
rédactionnelle.
• Le texte proposé pour l'
article 137-2 du code de
procédure pénale
dispose que le juge d'instruction conserve
le droit d'ordonner un contrôle judiciaire. Le juge de la
détention provisoire pourrait lui aussi prononcer un contrôle
judiciaire s'il opposait au placement en détention provisoire.
• Le texte initial proposé pour l'
article 137-3 du
code de procédure pénale
prévoyait que le juge de la
détention provisoire n'était pas tenu de statuer par une
ordonnance lorsqu'il ne décidait ni le placement en détention ou
la prolongation de celle-ci, ni la prescription d'une mesure de contrôle
judiciaire. Au contraire, d'autres articles du projet de loi prévoyaient
que le juge de la détention devait statuer par ordonnance motivée
en cas de placement en détention ou de prolongation de la
détention.
En première lecture, le
Sénat a souhaité que le juge
statue toujours par ordonnance motivée
. Il a en effet
considéré que cette motivation serait utile à la personne,
même en l'absence de décision de placement en détention,
dans le cas d'un appel du parquet.
L'Assemblée nationale s'est opposée à cette proposition du
Sénat, les députés considérant que la
liberté ne se motive pas. Elle a cependant modifié le texte
proposé pour l'article 137-3, afin d'en clarifier les termes. Il
prévoit désormais que le juge statue par une ordonnance
spécialement motivée lorsqu'il ordonne ou prolonge une
détention provisoire ou qu'il regrette une demande de mise en
liberté. Cette ordonnance devrait comporter l'énoncé des
considérations de droit et de fait sur le caractère suffisant des
obligations du contrôle judiciaire ainsi que le motif de la
détention pour référence aux articles 143-1 et 144 du
code de procédure pénale, qui définissent les
critères permettant le placement en détention provisoire.
En revanche, le juge de la détention provisoire statuerait par une
ordonnance non motivée, dans les cas où il refuserait d'ordonner
ou de prolonger une détention provisoire. Votre commission persiste
à penser qu'il est préférable que l'ordonnance soit
motivée dans tous les cas, même s'il est normal de prévoir
une motivation plus conséquente en cas de décision de placement
en détention provisoire. Elle vous soumet donc un
amendement
pour
rétablir le principe de la motivation des ordonnances refusant
d'ordonner ou de prolonger une détention provisoire.
Elle vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 10 bis AA
(art. 52-1 nouveau du code de
procédure pénale)
Exercice des pouvoirs du président
par le juge de la détention
Cet
article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au
cours de la deuxième lecture, tend à insérer dans le code
de procédure pénale un article 52-1, afin de prévoir
la possibilité pour le président du tribunal de grande instance
de déléguer au juge de la détention provisoire, lorsqu'il
n'exerce pas lui-même cette fonction, tous ses pouvoirs en matière
de libertés. Cette délégation concernerait :
- le contrôle des perquisitions dans les cabinets d'avocat
(art. 56-1 du code de procédure pénale) ;
- le contrôle de l'interdiction faite à un avocat d'exercer
sa profession (art. 139-1 nouveau du code de procédure
pénale) ;
- le placement en détention provisoire en matière de
comparution immédiate (art. 396 du code de procédure
pénale) ;
- la prolongation des gardes à vue en matière de terrorisme
(art. 706-23 du code de procédure pénale) ;
- l'autorisation des perquisitions en matière de terrorisme
(art. 706-24 du code de procédure pénale) ;
- l'autorisation des perquisitions en matière de trafic de
stupéfiants (art. 706-28 du code de procédure
pénale) ;
- la prolongation des gardes à vue en matière de trafic de
stupéfiants (art. 706-29 du code de procédure
pénale) ;
- l'autorisation des perquisitions fiscales (art. L. 16 B
du livre des procédures fiscales) ;
- l'autorisation des perquisitions en matière de douane
(art. 64 du code des douanes) ;
- la prolongation des rétentions d'étrangers
(art. 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du
2 novembre 1945) ;
- la prolongation du maintien d'étrangers en zone d'attente
(art. 35 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du
2 novembre 1945) ;
- l'autorisation des perquisitions en matière de concurrence
(art. 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du
1
er
décembre 1986) ;
- la contestation d'une hospitalisation sans le consentement de la
personne concernée (art. L. 351 du code de la santé
publique).
Ainsi, l'Assemblée nationale a souhaité étendre les
prérogatives du juge de la détention provisoire. Paradoxalement,
elle n'a pas pour autant changé son nom, même si le présent
article fait référence au "
magistrat
désigné en application de l'article 137-1
",
dénomination qu'avait choisie le Sénat en première lecture.
Votre commission vous propose d'aller plus loin dans la logique poursuivie par
l'Assemblée nationale. Elle estime souhaitable que le juge des
libertés se voie effectivement confier les prérogatives du
président du tribunal en matière de libertés, sans que
cela ne demeure qu'une possibilité. Cette extension ne concernerait
cependant pas la question du contrôle judiciaire des avocats, votre
commission ayant décidé qu'il devait revenir au Conseil de
l'Ordre de statuer sur cette question.
Dans les petits tribunaux, le président du tribunal exercera
lui-même les fonctions de juge des libertés et la situation
actuelle ne sera pas modifiée. Dans les autres cas, le nouveau juge
chargé du contentieux de la détention provisoire sera le mieux
à même de statuer également sur d'autres contentieux
mettant en jeu les libertés, tels que certaines perquisitions ou
prolongations de garde à vue. Il paraît tout à fait
souhaitable qu'un magistrat de haut rang se spécialise dans ces
questions de libertés au sein des tribunaux.
Votre commission vous soumet
un amendement
tendant à
transférer au nouveau juge l'ensemble des pouvoirs du président
du tribunal, ce qui justifie pleinement que ce juge soit désormais
qualifié de
juge des libertés
. Cette proposition a
notamment été formulée devant votre commission par
Mme Mireille Delmas-Marty, responsable en 1988-1990 de la commission
" Justice pénale et droits de l'homme ".
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article 10 bis A
(art. 81 et 138 du code de
procédure pénale)
Organismes participant au respect des
obligations
du contrôle judiciaire
Dans sa
rédaction actuelle, l'article 138 du code de procédure
pénale prévoit, parmi les obligations qui peuvent être
imposées à une personne dans le cadre d'un contrôle
judiciaire :
- l'obligation de se présenter aux services ou autorités
désignés par le juge d'instruction ;
- l'obligation de répondre aux convocations de toute
autorité ou de toute personne qualifiée désignée
par le juge d'instruction et de se soumettre, le cas échéant, aux
mesures de contrôle portant sur ses activités professionnelles ou
sur son assiduité à un enseignement.
En première lecture, le Sénat, sur proposition de notre excellent
collègue, M. Michel Dreyfus-Schmidt, a proposé de
compléter les références aux services ou autorités
visés à l'article 138 du code de procédure
pénale par des références aux associations
habilitées.
D'ores et déjà, de nombreuses associations participent au
contrôle du respect des obligations du contrôle judiciaire et il
était normal de codifier cette pratique.
L'Assemblée nationale a accepté cette modification. Elle a
complété cet article par une modification de l'article 81 du
code de procédure pénale. Celui-ci prévoit notamment que
le juge d'instruction peut commettre le comité de probation et
d'assistance aux libérés, le service compétent de
l'éducation surveillée ou toute personne habilitée
à l'effet de vérifier la situation matérielle, familiale
et social d'une personne mise en examen et de l'informer sur les mesures
propres favoriser l'insertion sociale de cette personne.
L'Assemblée nationale a souhaité que les associations
habilitées soient mentionnées dans la liste des personnes ou
organes qui peuvent être commis pour vérifier la situation
matérielle, familiale et sociale d'une personne.
Votre commission vous soumet un
amendement
tendant à remplacer,
dans l'article 81 du code de procédure pénale, la
référence à l'éducation surveillée par une
référence à la protection judiciaire de la jeunesse et la
référence au comité de probation et d'assistance aux
libérés par une référence au service
pénitentiaire d'insertion et de probation. L'Assemblée nationale
avait inséré ces dispositions dans d'autres articles, qui
pourront ainsi être supprimés.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article 10 bis B
(art. 81 du code de procédure
pénale)
Protection judiciaire de la jeunesse
Cet
article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée
nationale au cours de la deuxième lecture, tend à remplacer dans
l'article 81 du code de procédure pénale la
référence à l'éducation surveillée par une
référence à la protection judiciaire de la jeunesse. Il
s'agit d'une actualisation tout à fait bienvenue.
Votre commission ayant décidé d'opérer cette modification
à l'article 10 bis A, elle vous propose, par
coordination, la
suppression
de cet article.
Article 10 bis
(art. 138, 142, 142-2 et 142-3 du code
de
procédure pénale
Cautionnement
En
première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un
amendement modifiant les règles du
cautionnement
que le juge
d'instruction peut imposer à une personne de fournir dans le cadre d'un
contrôle judiciaire.
Cet amendement prévoyait notamment que la personne pourrait s'acquitter
du cautionnement dans les conditions fixées par
l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, qui permet
à un contribuable contestant le bien-fondé du montant des
impositions mises à sa charge de demander à être
autorisé à différer le paiement de la partie
contestée de ces impositions. Ce sursis ne peut lui être
refusé s'il a constitué auprès du comptable les garanties
propres à assurer le recouvrement, telles que les hypothèques,
les garanties bancaires...
Le Sénat, soulignant les incertitudes qui entouraient le dispositif
proposé par l'Assemblée nationale, a supprimé cette
disposition.
L'Assemblée a, en deuxième lecture, souhaité modifier le
régime du cautionnement sans toutefois faire référence au
livre des procédures fiscales.
• Le
premier paragraphe
tend à modifier
l'article 138 du code de procédure pénale, qui
prévoit actuellement que le montant du cautionnement est fixé en
tenant compte notamment des ressources de la personne. L'Assemblée
nationale a souhaité que cet article fasse également
référence aux charges de la personne.
• Le
deuxième paragraphe
tend à supprimer dans
l'article 138 du code de procédure pénale, la mention selon
laquelle la constitution de sûretés, qui peut être
exigée d'une personne sous contrôle judiciaire est destinée
à garantir les droits des victimes. En fait, il s'agit simplement de
transférer cette précision à l'article 142 du code de
procédure pénale.
• Le
troisième paragraphe
tend
précisément à modifier l'article 142 du code de
procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, celui-ci
prévoit la destination du cautionnement lorsque celui-ci est
exigé d'une personne sous contrôle judiciaire. Le cautionnement
est notamment destiné à garantir la représentation de la
personne, le paiement de la réparation des dommages causés par
l'infraction, le paiement des amendes. Cet article serait modifié pour
prévoir que les
sûretés
, qui peuvent être
exigées de la personne placée sous contrôle judiciaire,
pourraient avoir le
même usage que le cautionnement
.
L'objectif est clairement d'inciter le juge d'instruction à utiliser
plus fréquemment la possibilité d'exiger de la personne la
constitution de sûretés, de préférence à la
fourniture d'un cautionnement, qui peut avoir des conséquences beaucoup
plus dramatiques.
• Les
paragraphes IV, V, VI et VII
de cet article
tendent à apporter des coordinations dans les articles 142, 142-2
et 142-3 du code de procédure pénale pour appliquer aux
sûretés les mêmes règles qu'au cautionnement.
Dès lors que des sûretés peuvent garantir notamment la
représentation de la personne, il convient en effet de prévoir la
levée de la première partie de ces sûretés lorsque
la personne a satisfait à toutes les obligations du contrôle
judiciaire, comme cela est prévu pour la première partie du
cautionnement. A l'inverse, il convient également de prévoir que,
si la personne ne satisfait pas à ses obligations, il est
procédé au recouvrement de la créance garantie par la
première partie des sûretés.
De la même manière, le paragraphe VII tend à
prévoir le sort de la deuxième partie des sûretés,
selon que la personne a été condamnée ou non et selon que
les sûretés excèdent ou non les sommes nécessaires
à l'indemnisation de la victime et au paiement des amendes.
Le dispositif proposé apparaît beaucoup plus satisfaisant que
celui que l'Assemblée nationale avait adopté en première
lecture. Il devrait en effet permettre d'éviter des situations
dramatiques dans lesquelles une personne est par exemple obligée de
vendre son logement pour satisfaire à l'obligation de fournir un
cautionnement imposée dans le cadre d'un contrôle judiciaire.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 10 ter
(art. 145 du code de procédure
pénale)
Procédure avant la décision en
matière
de détention provisoire
En
première lecture, le Sénat a eu un débat approfondi
à propos de la nécessité éventuelle qu'un
débat contradictoire soit systématiquement organisé devant
le juge appelé à connaître de la détention
provisoire. Le Sénat a finalement souhaité qu'un tel débat
ait lieu dans tous les cas.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale est revenue au texte
initial, qui ne prévoyait l'organisation d'un débat
contradictoire que lorsque le juge envisageait le placement en détention
provisoire. Elle a toutefois, dans le présent article, modifié
l'article 145 du code de procédure pénale pour
préciser de manière très claire le déroulement de
la procédure.
Ainsi, le juge de la détention devrait, dans tous les cas, faire
comparaître devant lui la personne mise en examen, assistée de son
avocat si celui-ci a été désigné.
Le juge, après avoir pris connaissance des éléments du
dossier et entendu, s'il l'estime utile, les observations de la personne lui
ferait connaître s'il envisage ou non de la placer en détention
provisoire :
- dans le premier cas, le juge devrait informer la personne que la
décision ne pourra intervenir qu'à l'issue d'un débat
contradictoire et qu'elle a le droit de demander un délai pour
préparer sa défense ;
- dans le second cas, le juge pourrait ordonner le placement sous
surveillance judiciaire de la personne et devrait lui faire déclarer son
adresse conformément aux dispositions de l'article 116 du code de
procédure pénale relatif à l'interrogatoire de
première comparution.
Votre commission vous soumet un
amendement
de coordination.
Elle vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 12
(art. 146 du code de procédure
pénale)
Conséquence d'une requalification en
matière
de détention provisoire
Cet
article tend à modifier l'article 146 du code de procédure
pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit
que, lorsqu'il apparaît au cours d'une information, que la qualification
criminelle ne peut pas être retenue, le juge d'instruction peut ordonner
le maintien de la personne en détention ou ordonner sa mise en
liberté. Le présent article tend simplement à prendre en
compte la création d'un juge chargé de la détention
provisoire en prévoyant que le juge d'instruction doit saisir ce juge
s'il souhaite le maintien de la personne en détention lorsque la
qualification criminelle ne peut être retenue.
Cet article n'est encore en navette que pour la dénomination du juge
responsable de la détention provisoire.
Votre commission vous soumet un
amendement
de coordination et vous
propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 13
(art. 147 du code de procédure
pénale)
Mise en liberté d'office ou sur demande du
procureur
Comme le
précédent, cet article n'est soumis au Sénat en
deuxième lecture que parce que les assemblées ne sont pas encore
parvenues à un accord sur la dénomination du nouveau juge
créé par le projet de loi.
Cet article tend à modifier l'article 147 du code de
procédure pénale relatif aux conditions dans lesquelles une
personne mise en détention provisoire peut être mise en
liberté. Il prévoit que, lorsque le procureur requiert la mise en
liberté, le juge d'instruction peut faire droit à la demande ou
transmettre, dans les cinq jours, le dossier, assorti de son avis
motivé, au juge de la détention provisoire, ce dernier devant
statuer dans un délai de trois jours ouvrables.
Votre commission vous soumet un
amendement
de coordination et vous
propose d'adopter l'article 13
ainsi modifié
.
Article 14
(art. 148 du code de procédure
pénale)
Demande de mise en liberté par la personne ou son
avocat
Comme
les précédents, cet article tend à tirer les
conséquences de la création d'un juge chargé de la
détention provisoire et n'a été modifié, au cours
de la navette, qu'en ce qui concerne le nom du nouveau juge.
Il s'agit de prévoir que les demandes de mise en liberté,
aujourd'hui adressées au juge d'instruction qui statue, continueraient
à lui être transmises, mais que celui-ci ne pourrait que faire
droit à la demande ou la transmettre, avec son avis motivé au
juge de la détention provisoire, qui statuerait dans les trois jours.
Votre commission vous soumet un
amendement
de coordination et vous
propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
SECTION 2
Dispositions limitant les conditions
ou
la
durée de la détention provisoire
Article 15
(art. 143-1 nouveau, 144 et 144-1-A nouveau du code de
procédure pénale)
Conditions de la détention
provisoire
Cet
article très important du projet de loi concerne les
seuils de peine
encourue
à partir desquels la détention provisoire est
possible, ainsi que les
motifs
susceptibles de justifier la
détention provisoire.
Actuellement, en vertu de l'article 144 du code de procédure
pénale, la détention est possible lorsque la personne encourt une
peine criminelle
ou une
peine correctionnelle égale ou
supérieure à un an d'emprisonnement en cas de délit
flagrant, à deux ans d'emprisonnement dans les autres cas
.
L'article 144 prévoit également les motifs susceptibles de
justifier le placement en détention provisoire. Il s'agit des
nécessités de l'instruction, de la nécessité de
protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à
la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de
prévenir son renouvellement, enfin de la nécessité de
mettre fin au trouble exceptionnel et persistant qu'a causé l'infraction
à l'ordre public.
L'article 15 prévoit d'inscrire dans deux articles
différents les conditions de mise en détention liées aux
seuils de peine et les motifs de détention.
• Le texte proposé pour l'
article 143-1 du code de
procédure pénale
prévoyait, dans le projet de loi
initial, non modifié par l'Assemblée nationale, un système
de seuils de peine très complexe, qui ne modifiait qu'à la marge
le droit actuel.
Ainsi, la détention aurait été possible lorsqu'une peine
de trois ans d'emprisonnement aurait été encourue, compte tenu de
l'aggravation de la peine encourue en cas de récidive. Mais la
détention aurait été possible dès lors qu'une peine
de deux ans d'emprisonnement avait été encourue pour des
infractions contre les personnes ou contre l'Etat, la Nation et la paix
publique. Enfin, la détention aurait également été
possible en cas de peine encourue de deux années d'emprisonnement pour
une atteinte contre les biens, mais seulement si la personne avait
déjà été condamnée.
Votre commission a estimé à la fois trop timorées et
trop complexes ces dispositions. Le Sénat a décidé que la
détention provisoire ne serait plus possible qu'en cas de peine encourue
égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement. Mme le
garde des sceaux s'est alors clairement opposée à cette
modification.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a
décidé, cette fois avec l'accord de Mme le garde des sceaux,
d'accepter que la détention provisoire ne soit possible que lorsqu'est
encourue une peine égale ou supérieure à trois ans
d'emprisonnement
.
L'Assemblée nationale a souhaité aller plus loin en ce qui
concerne les infractions contre les biens. Elle a prévu que la
détention provisoire ne serait plus possible lorsque la peine encourue
serait inférieure à cinq ans pour un délit prévu au
livre III du code pénal, relatif aux atteintes aux biens.
Ainsi,
les délits contre les biens, punis de trois ans d'emprisonnement, en
particulier le vol simple, ne pourraient plus justifier le placement en
détention provisoire.
En revanche, l'Assemblée nationale a décidé de
supprimer tous les seuils
pour les personnes poursuivies alors qu'elles
ont déjà été condamnées à une peine
privative de liberté sans sursis supérieure à un an. Une
telle disposition constitue un retour en arrière par rapport au droit
actuel.
Ne serait-il pas singulier de permettre la mise en détention provisoire
d'une personne qui encourrait une simple amende correctionnelle, sous
prétexte qu'elle a déjà été condamnée
auparavant ? Votre commission n'estime pas possible de retenir une telle
disposition, dont elle propose, par un
amendement
, la suppression.
En revanche, votre commission propose, par un
amendement
, que le nouveau
seuil de cinq ans instauré pour les délits contre les biens ne
soit pas applicable quand la personne a déjà été
condamnée à une peine d'emprisonnement sans sursis
supérieure à un an. Dans un tel cas, s'appliquera le
seuil
général de trois ans
. Le tableau suivant résume la
différence entre le droit actuel, la position de l'Assemblée
nationale en deuxième lecture et la proposition de votre commission.
Tableau des seuils de peine d'emprisonnement
permettant le
placement en détention provisoire
|
|
Texte
adopté par le Sénat
|
Texte adopté par l'Assemblée nationale |
|
Régime général |
2 ans minimum |
3 ans minimum |
3 ans minimum |
3 ans minimum |
Régimes spéciaux |
1 an en cas de flagrance |
|
- 5
ans en cas de délit figurant au livre III du code pénal
(atteintes aux biens)
|
- 5 ans en cas de délits figurant au livre III du code pénal, sauf si la personne a déjà été condamnée à une peine d' emprisonnement supérieure à un an |
•
Le texte proposé pour l'
article 144 du code de
procédure pénale
tend à réécrire les
dispositions actuelles de cet article relatives aux motifs de placement en
détention provisoire, sans les modifier.
Toutefois, le Gouvernement a proposé, dans le projet de loi initial, que
le
trouble à l'ordre public
ne puisse plus justifier, à
lui seul, la prolongation de la détention provisoire lorsque la peine
encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement.
L'Assemblée nationale, en première lecture, a souhaité que
le motif d'ordre public ne puisse plus justifier la prolongation de la
détention provisoire qu'en matière criminelle. Le Sénat a
alors décidé de rétablir le texte initial du Gouvernement,
mais l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, a rétabli
le texte qu'elle avait adopté en première lecture.
Votre commission, consciente que le critère du trouble à l'ordre
public est parfois utilisé de manière abusive, propose
néanmoins par un
amendement
, de revenir au texte initial du
projet de loi, considérant qu'il peut exister des cas, même en
matière correctionnelle, dans lesquels ce motif peut justifier un
placement en détention et une prolongation de celle-ci. Le recours
à un juge différent de celui qui instruit le dossier devrait
permettre d'éviter les abus.
• Le texte proposé pour l'
article 144-1 A du
code de procédure pénale
a été introduit dans
le projet de loi par l'Assemblée nationale lors de la deuxième
lecture, à l'initiative de la rapporteuse de la commission des lois, Mme
Christine Lazerges et de M. Alain Touret. Il tend à interdire, sauf en
matière criminelle, en cas de poursuites relatives aux infractions
commises envers les enfants et en cas de violation des obligations du
contrôle judiciaire, le placement en détention provisoire des
pères et mères d'enfants de moins de dix ans
, ayant chez
le parent concerné leur résidence habituelle et à
l'égard desquels ce parent exerce l'autorité parentale. Le texte
adopté par l'Assemblée nationale précise que le juge des
enfants peut s'opposer à cette mesure.
L'objectif poursuivi par cette disposition ne peut qu'être
approuvé. Trop souvent, la détention provisoire a des
conséquences dramatiques sur la structure familiale, et notamment pour
les jeunes enfants.
Pour autant, l'adoption d'un tel article suscite de nombreuses
difficultés. L'intervention du juge des enfants est prévue sans
que les conditions de cette intervention soient définies. Le texte
précise simplement qu'il peut s'opposer à la
" mesure ". Qu'adviendrait-il si le juge des enfants s'opposait
à la mesure ? La personne devrait-elle être obligatoirement
placée en détention provisoire ou bien la procédure
normale s'appliquerait-elle ? La rédaction adoptée par
l'Assemblée nationale donne le sentiment que le juge des enfants
pourrait s'opposer au placement en détention provisoire, alors qu'il
semble que l'intention des députés soit de permettre au juge des
enfants de s'opposer à l'interdiction de toute détention
provisoire pour les parents de jeunes enfants.
De manière plus générale, il ne paraît pas
possible d'opérer une distinction entre les prévenus selon leur
situation de famille, même dans un souci légitime de protection de
l'enfance.
Votre commission veut croire que la création d'un juge chargé de
la détention provisoire, le relèvement des seuils permettant le
placement en détention provisoire, les modifications apportées
aux règles du cautionnement en matière de contrôle
judiciaire permettront d'éviter dans bien des cas que des enfants soient
les premières victimes du recours à la détention
provisoire. Elle considère en outre que
la possibilité
prévue par le projet de loi d'exécution de la détention
provisoire sous le régime du placement sous surveillance
électronique pourrait constituer un moyen utile d'éviter la
rupture des liens familiaux.
Elle vous soumet donc un
amendement
de
suppression de cette disposition.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article 16
(art. 145-1 du code de procédure
pénale)
Durée de la détention provisoire en
matière correctionnelle
Cet
article concerne les durées maximales de détention provisoire en
matière correctionnelle.
• Le droit actuel
Actuellement, la durée de la détention provisoire ne peut
excéder :
-
six mois
lorsque la peine encourue est inférieure à
cinq ans d'emprisonnement et que la personne n'a pas déjà
été condamnée pour crime ou pour délit à une
peine d'emprisonnement supérieure à un an avec sursis ;
-
un an
lorsque la peine encourue est inférieure à
cinq ans d'emprisonnement et que la personne a déjà
été condamnée pour crime ou délit à une
peine supérieure à un an d'emprisonnement avec sursis ;
-
deux ans
lorsque la peine encourue est comprise entre cinq ans et
dix ans d'emprisonnement ;
- une
durée raisonnable
lorsque la peine encourue est
égale à dix d'emprisonnement.
• Le projet de loi
Le projet de loi initial prévoyait de maintenir les durées de
détention provisoire actuelles tout en limitant les cas ou la
durée de détention ne comporte aucune limite.
L'Assemblée nationale, en première lecture, a
procédé à une réécriture complète de
l'article 145-1 du code de procédure pénale. Elle a
prévu que la détention ne pourrait excéder :
-
quatre mois
lorsque la peine encourue est inférieure
à cinq ans d'emprisonnement ;
-
un an
lorsque la peine encourue est supérieure à
cinq ans d'emprisonnement ;
-
deux ans
lorsque la peine encourue est supérieure à
cinq ans et qu'une commission rogatoire internationale est
délivrée par le juge d'instruction ;
-
une durée raisonnable
lorsque la peine encourue est
égale à dix ans d'emprisonnement et que la personne est
poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association de
malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou infractions
commises en bande organisée.
En première lecture, le Sénat a accepté les durées
proposées par l'Assemblée nationale. Il s'est toutefois
opposé à la possibilité de faire dépendre la
durée de détention de la délivrance d'une commission
rogatoire internationale. Il a prévu que la durée maximale d'un
an de détention pourrait être prolongée à titre
exceptionnel par la chambre d'accusation et non plus par le juge de la
détention provisoire, pendant une durée maximale d'un an.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a modifié ses
propositions initiales. Elle a en effet prévu que la détention ne
pourrait excéder :
-
quatre mois
lorsque la peine encourue est inférieure
à cinq ans d'emprisonnement et que la personne n'a pas
déjà été condamnée à une peine
d'emprisonnement sans sursis supérieure à un an ;
-
un an
dans les autres cas ;
-
deux ans
lorsque l'un des faits constitutifs de l'infraction a
été commis à l'étranger ou lorsque la personne est
poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, associations de
malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une
infraction commise en bande organisée et qu'elle encourt une peine
égale à dix ans d'emprisonnement.
La durée de la détention provisoire ne pourrait donc en aucun cas
dépasser deux ans en matière correctionnelle.
Votre commission accepte que la durée de la détention puisse
être accrue lorsqu'un des faits constitutifs de l'infraction a
été commis à l'étranger. Ce critère lui
paraît en effet plus objectif que celui de la délivrance d'une
commission rogatoire internationale par le juge d'instruction
.
En revanche, elle persiste à penser que pour certaines infractions
graves et complexes, la durée de détention provisoire
proposée par l'Assemblée nationale pourrait, dans certaines
circonstances, être insuffisante. Elle propose donc, par un
amendement
, qu'un allongement de la durée maximale de
détention soit possible lorsque la personne encourt dix ans
d'emprisonnement et qu'elle est poursuivie pour trafic de stupéfiants,
terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion
de fonds ou pour une infraction commise en bande organisée. Elle propose
que, pour ces infractions, la prolongation de la détention
au-delà de deux ans ne puisse être autorisée qu'à
titre exceptionnel par la chambre d'accusation pour une durée de six
mois, la prolongation pouvant être renouvelée une fois.
Elle vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 17
(art. 145-2 du code de procédure
pénale)
Durée de la détention provisoire en
matière criminelle
Dans sa
rédaction actuelle, l'article 145-2 du code de procédure
pénale prévoit une durée maximale de détention
provisoire d'un an en matière criminelle. Cette durée peut
être prolongée pour une durée de six mois, sans que le
nombre de prolongations soit limité.
Le Gouvernement a proposé, dans le projet de loi initial, d'instaurer
des délais butoirs à la détention provisoire en
matière criminelle. Le texte prévoyait que la durée de
détention ne pourrait excéder :
-
deux ans
en cas de peine encourue inférieure à
vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ;
-
trois ans
en cas de peine encourue inférieure à
trente ans de réclusion ou de détention criminelles.
Aucun butoir
n'était prévu en cas de peine encourue
supérieure à trente ans d'emprisonnement ou en cas de crimes
multiples reprochés à une personne.
En première lecture, l'Assemblée nationale a modifié ce
dispositif pour prévoir que la détention ne pourrait
excéder :
-
deux ans
en cas de peine encourue inférieure à
vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ;
-
trois ans
en cas de peine encourue supérieure ou
égale à vingt ans de réclusion ou de détention
criminelles ainsi que lorsque la peine encourue est inférieure à
vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et que le juge
d'instruction a délivré une commission rogatoire
internationale ;
-
quatre ans
lorsque la peine encourue est supérieure ou
égale à vingt ans de réclusion ou de détention
criminelles et que le juge d'instruction a délivré une commission
rogatoire internationale.
Enfin, l'Assemblée nationale n'avait prévu aucun délai
butoir pour les personnes prévenues pour trafic de stupéfiants,
terrorisme, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour un crime
commis en bande organisée. De même, elle n'avait prévu
aucun délai butoir lorsque plusieurs crimes contre les personnes ou
contre l'Etat, la Nation et la paix publique sont reprochés à la
personne.
En première lecture, le Sénat a accepté les durées
proposées par l'Assemblée nationale tout en refusant de faire
dépendre la durée de détention de la délivrance
d'une commission rogatoire ou de la multiplicité des crimes. Il a en
outre prévu la possibilité que les durées maximales de
deux ou trois ans puissent, à titre exceptionnel, être
prolongées par la chambre d'accusation pendant une durée maximale
d'un an.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a modifié ses
propositions initiales. Elle a prévu que la durée de
détention provisoire ne pourrait excéder :
-
deux ans
lorsque la peine encourue est inférieure à
vingt ans de réclusion ou de détention criminelles ;
-
trois ans
lorsque la peine encourue est supérieure ou
égale à vingt ans de réclusion ou de détention
criminelles ou lorsque la peine encourue est inférieure à vingt
ans de réclusion ou de détention, mais que l'un des faits
constitutifs de l'infraction a été commis à
l'étranger ;
-
quatre ans
lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs
crimes mentionnés aux livres II et IV du code pénal, lorsque
la peine encourue est supérieure à vingt ans d'emprisonnement et
que l'un des fais constitutifs de l'infraction a été commis hors
du territoire nationale, enfin lorsque la personne est poursuivie pour trafic
de stupéfiants, terrorisme, proxénétisme, extorsion de
fonds ou pour crime commis en bande organisée.
Ainsi
, aucune détention provisoire ne pourrait excéder une
durée de quatre ans
. Votre commission propose d'accepter que la
multiplicité des crimes ou la commission hors du territoire national
d'un des faits constitutifs de l'infraction puissent justifier un allongement
de la durée de détention.
En revanche, elle persiste à penser que, pour quelques infractions
graves et complexes, le délai proposé par l'Assemblée
nationale peut présenter des inconvénients. Elle propose donc,
par
un amendement
, de prévoir que la détention pourra
prolongée, à titre exceptionnel, par la chambre d'accusation,
au-delà de quatre ans, en matière de terrorisme, de trafic de
stupéfiants, de proxénétisme, d'extorsion de fonds ou pour
un crime commis en bande organisée. La prolongation serait faite pour
une durée de six mois et pourrait être renouvelée une fois.
En deuxième lecture, la rapporteuse de la commission des Lois de
l'Assemblée nationale a estimé que ce système,
déjà proposé de manière plus large par le
Sénat en première lecture, était trop complexe.
Ce
système de prolongation exceptionnelle par la chambre d'accusation est
pourtant celui qu'a retenu l'Assemblée nationale en matière de
délai d'audiencement des affaires à l'article 21 quinquies.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article 17 bis A
(art. 145-5 nouveau du code de
procédure pénale)
Consultation de services d'insertion
avant toute prolongation
de la durée de la détention
provisoire
Cet
article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, tend à insérer dans le code de
procédure pénale un article 145-5 pour prévoir que le
juge d'instruction devra consulter le service pénitentiaire d'insertion
ou de probation, les services de la protection judiciaire de la jeunesse ou un
autre organisme habilité à faire des propositions en
matière d'insertion avant toute demande de prolongation de la
détention provisoire. Ces personnes ou organes devront proposer les
mesures socio-éducatives propres à se substituer à la
détention de la personne mise en examen, à favoriser sa
réinsertion sociale et à prévenir la récidive.
Une telle mesure, destinée à limiter autant qu'il est possible
les prolongations de détention, paraît cependant trop
contraignante. Le projet de loi contient déjà de nombreuses
dispositions destinées à limiter le placement et le maintien en
détention provisoire. Il convient de ne pas multiplier les
formalités nouvelles.
Surtout, on voit mal, compte tenu des motifs qui peuvent justifier le
placement en détention provisoire (risque de disparition des preuves,
risque de fuite de la personne, trouble exceptionnel à l'ordre
public...) comment des mesures socio-éducatives pourraient se substituer
à la détention provisoire.
Votre commission vous propose la
suppression
de cet article.
Article
17 bis
(art. 207-2 nouveau du code de procédure
pénale)
Prolongation exceptionnelle de la durée
de
détention par la chambre d'accusation
En
première lecture, le Sénat a souhaité que les
durées maximales de détention provisoire puissent être
prolongées, à titre exceptionnel, par la chambre d'accusation
lorsque les investigations du juge d'instruction indispensables à la
manifestation de la vérité doivent être
impérativement poursuivies et que la mise en liberté de la
personne causerait, pour la sécurité des personnes et des biens,
un risque d'une particulière gravité. Le texte adopté par
le Sénat prévoyait que la prolongation pourrait intervenir pour
une durée de quatre mois et que la décision pourrait être
renouvelée deux fois.
L'Assemblée nationale a supprimé ce dispositif . La rapporteuse
de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges, a
évoqué, à l'appui de cette décision, les risques
d'alourdissement de la procédure et d'encombrement des chambres
d'accusation.
Votre commission a proposé de rétablir ce dispositif, tout en
limitant sa portée, dans les articles 16 et 17 du projet de loi, de
telle sorte que le présent article n'a plus d'objet.
Votre commission vous propose en conséquence de
maintenir la
suppression
de cet article.
Article 18 bis A
(art. 144-2 nouveau du code de
procédure pénale)
Placement sous surveillance
électronique
Cet
article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée
nationale au cours de la deuxième lecture à l'initiative de la
rapporteuse de la commission des lois Mme Christine Lazerges, et de M. Jacques
Floch et Mme Frédérique Bredin, tend à insérer dans
le code de procédure pénale un article 144-2, pour
prévoir que la détention provisoire peut être
effectuée, sur décision du juge de la détention
provisoire, avec l'accord de l'intéressé, sous le régime
de placement sous surveillance électronique.
Votre commission ne peut que se réjouir de l'intérêt
aujourd'hui porté au placement sous surveillance électronique. Le
Sénat, et en particulier notre excellent collègue,
M. Guy-Pierre Cabanel, est en effet à l'origine de la loi du
19 décembre 1997, qui permet l'utilisation du placement sous
surveillance électronique comme modalité d'exécution des
courtes peines ou des fins de peine d'emprisonnement.
Cette loi a été adoptée il y a plus de deux ans et n'a
toujours pas reçu le moindre début d'application, même
à titre expérimental. Votre commission ne peut donc que
renouveler son appel au Gouvernement, afin qu'il mette rapidement en oeuvre les
dispositions de cette loi, susceptible de faciliter la réinsertion
sociale des condamnés.
En ce qui concerne l'application du placement sous surveillance
électronique en matière de détention provisoire, la
décision prise par l'Assemblée nationale mérite
d'être examinée de près.
En 1995, dans son rapport au Premier ministre sur la prévention de la
récidive
5(
*
)
, notre
collège, M. Guy Cabanel, tout en proposant l'utilisation du
placement sous surveillance électronique comme modalité
d'exécution de certaines peines, avait émis des réserves
en ce qui concerne l'usage de ce dispositif en matière de
détention provisoire. Il avait notamment formulé les remarques
suivantes :
"
La transposition d'un tel dispositif en France risquerait
néanmoins de se révéler d'une portée limitée
dans la mesure où les critères de placement en détention
provisoire demeureraient inchangés.
"
Il est en effet difficilement concevable que le recours à la
surveillance électronique soit appliqué à une personne
dont le maintien en liberté, même surveillée, est de nature
à nuire à l'ordre public, à conduire à une
disparition des preuves ou à constituer une menace pour les
témoins, les victimes ou pour la personne mise en examen
elle-même.
"
En outre, dans la mesure où une période d'assignation
à domicile s'imputerait sur la peine prononcée, les juges
risqueraient de se montrer réticents à appliquer ce dispositif.
En effet, la personne mise en examen pourrait chercher à faire durer
l'application de cette mesure, et donc l'instruction elle-même.
"
Ces différentes raisons avaient conduit notre collègue à
ne pas proposer l'utilisation du placement sous surveillance
électronique en matière de détention provisoire.
A l'Assemblée nationale, Mme le garde des sceaux, tout en acceptant la
mesure proposée, a exprimé la crainte que le placement sous
surveillance électronique devienne une alternative au contrôle
judiciaire plutôt qu'une alternative à l'emprisonnement.
Votre commission vous soumet un
amendement
destiné à mieux
montrer encore que le placement sous surveillance électronique ne peut
être qu'une modalité d'exécution de la détention
provisoire et en aucun cas un substitut au contrôle judiciaire. Elle
propose en outre que la personne puisse demander elle-même à
exécuter sa détention provisoire sous le régime de
placement sous surveillance électronique.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article 18 ter
(art. 187-1 et 194 du code de
procédure
pénale)
Référé-liberté
En
première lecture, sur proposition de notre excellent collègue,
M. Pierre Fauchon, le Sénat a décidé de
remplacer le mécanisme du référé-liberté par
un système d'appel à très bref délai devant la
chambre d'accusation.
Actuellement, l'article 187-1 du code de procédure pénale
prévoit qu'en cas d'appel d'une ordonnance de placement en
détention provisoire, la personne mise en examen ou le procureur de la
République peuvent, lorsque l'appel est interjeté au plus tard le
jour suivant la décision de placement en détention, demander au
président de la chambre d'accusation d'examiner immédiatement
l'appel. Le président de la chambre d'accusation doit statuer le
troisième jour ouvrable suivant la demande. Lorsque le président
de la chambre d'accusation infirme l'ordonnance du juge d'instruction, la
personne est remise en liberté et la chambre d'accusation dessaisie.
Dans le cas contraire, la chambre d'accusation doit statuer dans les quinze
jours suivant l'appel, conformément à l'article 194 du code
de procédure pénale.
Le Sénat, constatant que la procédure de
référé-liberté était peu utilisée et
qu'elle n'aboutissait que rarement à des remises en liberté, a
proposé de remplacer ce système par un appel à très
bref délai devant la chambre d'accusation, contraignant celle-ci
à se prononcer
dans les quatre jours de l'appel
lorsque celui-ci
intervient le jour même de la décision de placement en
détention.
L'avantage de ce système serait de permettre
l'intervention d'une collégialité avant le placement en
détention provisoire.
En effet, le Sénat a prévu que
la personne serait, dans l'attente de la décision,
incarcérée, sans que cette incarcération soit un placement
en détention provisoire.
L'Assemblée nationale s'est opposée au système
proposé par le Sénat. Les députés ont
remplacé ce dispositif par deux dispositions nouvelles. En premier lieu,
dans le cadre d'une procédure de
référé-liberté, le président de la chambre
d'accusation pourrait ordonner la comparution de la personne au cours de
l'audience de cabinet qu'il est tenu d'organiser. Une telle mesure paraît
bienvenue, mais il faut craindre qu'elle ne soit guère utilisée,
le président devant statuer au plus tard le troisième jour
suivant l'appel.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a décidé d'abaisser de
quinze jours à dix jours le délai dans lequel une chambre
d'accusation doit se prononcer sur les ordonnances de placement en
détention provisoire.
Votre commission persiste à penser qu'un appel à très bref
délai des décisions de placement en détention, et non des
décisions de prolongation, peut permettre un réel progrès
dans le contrôle de la détention provisoire.
Tout en acceptant la proposition de l'Assemblée nationale abaissant de
quinze à dix jours le délai donné à la chambre
d'accusation pour statuer, elle propose à nouveau, par
un
amendement
, qu'un appel interjeté le jour même du placement en
détention doive être examiné dans les quatre jours
ouvrables par la chambre d'accusation.
Elle vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 18 quater
(art. 219 du code de
procédure pénale)
Pouvoirs propres du président de
la chambre d'accusation
Cet
article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale au
cours de la deuxième lecture, à l'initiative du Gouvernement,
tend à modifier l'article 219 du code de procédure
pénale, relatif aux pouvoirs propres du président de la chambre
d'accusation, pour supprimer la possibilité pour le président de
la chambre d'accusation de déléguer tout ou partie de ses
pouvoirs à un premier vice-président du tribunal de grande
instance désigné par le président de ce tribunal.
Devant l'Assemblée nationale, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, a
expliqué qu'il s'agissait "
de renforcer le contrôle de
l'instruction par la chambre d'accusation et par son président
(...)
".
De fait, compte tenu du rôle de la chambre d'accusation en matière
de contrôle de l'instruction, il ne paraît pas souhaitable que les
pouvoirs du président de la chambre d'accusation puissent être
délégués à un magistrat du tribunal de grande
instance.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Articles 18 quinquies et 18 sexies
(art. 397-3 et
397-4 du code de procédure pénale)
Comparution
immédiate
Ces deux
articles, introduits dans le projet de loi par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture à l'initiative de
Mme Christine Lazerges, rapporteuse de la commission des Lois,
tendent à modifier les
délais de jugement en matière de
comparution immédiate lorsque la personne est en détention
provisoire
.
Actuellement, le procureur peut traduire sur le champ des prévenus
encourant entre un an et sept ans d'emprisonnement devant le tribunal
correctionnel dans le cadre de la procédure de comparution
immédiate. Si l'affaire ne paraît pas en état d'être
jugée ou si la personne demande un délai, le tribunal peut placer
ou maintenir en détention provisoire cette personne. Dans un tel cas, en
vertu de l'article 397-3 du code de procédure pénale, le
jugement au fond doit être rendu dans les
deux mois
qui suivent le
jour de la première comparution de la personne. Par ailleurs,
l'article 397-4 du code de procédure pénale prévoit
que la cour d'appel doit statuer dans les
quatre mois
de l'appel lorsque
la personne est condamnée et maintenue ou placée en
détention dans le cadre de la procédure de comparution
immédiate.
L'Assemblée nationale, dans l'article 18 quinquies du projet,
a abaissé de deux à un mois le délai dans lequel doit
intervenir le jugement des personnes placées en détention
provisoire dans le cadre d'une procédure de comparution
immédiate. Elle a de même abaissé de quatre à deux
mois le délai donné à la cour d'appel pour statuer.
Ces mesures paraissent tout à fait bienvenues. En effet, en
matière de comparution immédiate, les seuils de peine encourue
permettant le placement en détention provisoire seront différents
de ceux qui existent lorsqu'une information est ouverte, après
l'adoption du projet de loi. Actuellement, la procédure de comparution
immédiate, et donc le placement en détention provisoire, est
possible lorsque la personne encourt une peine de deux ans d'emprisonnement au
moins, ou d'un an d'emprisonnement en cas de flagrant délit.
S'il ne paraît pas souhaitable de modifier ces seuils en matière
de comparution immédiate, compte tenu de la nature des affaires soumises
au tribunal selon cette procédure et du caractère très
rapide de ce mode de jugement, il est souhaitable que la durée de la
détention provisoire soit aussi courte que possible. L'abaissement de la
durée maximale de détention de deux à un mois est donc une
heureuse initiative.
Toutefois, cet amendement pourrait avoir des conséquences
préjudiciables dans certaines circonstances. Rappelons que la
procédure de comparution immédiate peut être
utilisée pour les infractions passibles d'une peine inférieure ou
égale à sept ans d'emprisonnement. Or, certaines infractions
punies de cinq ans ou de sept ans d'emprisonnement, en particulier des
infractions sexuelles, peuvent nécessiter des expertises et, dans un tel
cas, le délai d'un mois pour être jugé ne pourra en aucun
cas être tenu. Votre commission vous propose donc, par un
amendement
, que le nouveau délai d'un mois pour juger une
personne en comparution immédiate ne soit applicable que lorsque la
peine encourue est inférieure à cinq ans d'emprisonnement.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article 18 septies
(art. 716 du code de
procédure pénale)
Emprisonnement individuel des
prévenus
En
première lecture, l'Assemblée nationale a inséré un
article 2 G dans le projet de loi modifiant l'article 716 du
code de procédure pénale pour prévoir que la distribution
intérieure des maisons d'arrêt et leur encombrement temporaire ne
pourront plus justifier, comme aujourd'hui, que les prévenus ne soient
pas emprisonnés individuellement. L'Assemblée nationale a
reporté l'application de cette disposition trois ans après
l'entrée en vigueur de la loi.
Le Sénat a accepté cette mesure. Toutefois, à la demande
du Gouvernement, il a décidé que cette disposition entrerait en
vigueur
cinq ans
après la publication de la loi.
L'Assemblée nationale, tout en modifiant la place de cet article dans le
projet, a rétabli le texte qu'elle avait adopté en
première lecture.
Pourtant, Mme le garde des sceaux a émis de sérieux doutes sur la
capacité du Gouvernement à fournir à chaque prévenu
une cellule individuelle dans un délai de trois ans :
"
Comme vous le savez, j'ai engagé un programme de construction
de sept nouveaux établissements, que j'ai souhaité concentrer
essentiellement sur les maisons d'arrêt. Il permettra compte tenu de la
fermeture de places vétustes, de réduire à 12.500 le
déficit du nombre de cellules. Ce programme représente 18 %
des ouvertures de places et 26 % des fermetures réalisées
depuis 1981.
" Pour parvenir à l'encellulement individuel, il faudrait donc
12.500 cellules de plus. Ce qui signifie qu'outre les 5,5 milliards
que nous avons engagés pour la construction de sept nouveaux
établissements et la rénovation de cinq autres, 10 milliards
de francs supplémentaires seraient nécessaires
".
Votre commission espère que le présent projet de loi
entraînera une diminution sensible du nombre de prévenus et
facilitera donc la réalisation de l'objectif d'emprisonnement individuel
des prévenus. Elle estime que l'emprisonnement individuel des
prévenus doit absolument être réalisé à
brève échéance. Rappelons que l'encellulement individuel a
été proposé par une commission d'enquête
parlementaire présidée par le vicomte d'Haussonville en...1873.
Il est désormais temps que cette règle soit enfin
appliquée.
Elle vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 18 octies
(art. 716-4 du code de
procédure pénale)
Imputation de la détention
provisoire sur la peine
L'article 716-4 du code de procédure pénale
prévoit notamment qu'en cas de détention provisoire, cette
détention est intégralement déduite de la durée de
la peine prononcée ou de la durée totale de la peine à
subir après confusion.
Le présent article, inséré dans le projet de loi par
l'Assemblée nationale au cours de la deuxième lecture, tend
à compléter l'article 716-4 pour prévoir qu'en cas
d'annulation d'une procédure, la détention provisoire
ordonnée dans le cadre de cette procédure s'impute sur la peine
éventuellement prononcée. Actuellement, on considère que
l'annulation de la procédure fait disparaître la détention
provisoire, même si une personne est par la suite condamnée pour
les mêmes faits, de sorte que la détention provisoire ne s'impute
pas sur la peine prononcée.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
SECTION 3
Dispositions relatives à
l'indemnisation
des détentions provisoires
Article 19
(art. 149 à 149-2 du code de procédure
pénale)
Indemnisation des détentions provisoires
Cet
article tend à améliorer les conditions d'indemnisation des
détentions provisoires injustifiées. Actuellement,
l'indemnisation est facultative, la décision rendue par la commission
compétente n'est pas motivée et n'est susceptible d'aucun recours.
• Le
premier paragraphe
de cet article tend à modifier
l'article 149 du code de procédure pénale.
En première lecture, l'Assemblée nationale a rendu
l'indemnisation obligatoire, tout en définissant certaines exceptions.
Elle a ainsi prévu que l'indemnisation serait impossible si la
décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement résultait de la
reconnaissance de l'irresponsabilité d'une personne atteinte d'un
trouble psychique, de la prescription ou de l'amnistie, ou lorsque la personne
a été placée en détention provisoire après
s'être librement et volontairement laissée accuser à tort.
Le Sénat a précisé le contenu de ces exceptions, notamment
pour prévoir que l'indemnisation n'est pas due lorsque la
décision de non-lieu de relaxe ou d'acquittement a
pour seul
fondement
l'irresponsabilité de la personne. En outre, le
Sénat a souhaité que l'indemnisation ne soit
écartée, lorsqu'une personne s'est librement et volontairement
accusée à tort, que si elle a agi en vue de faire échapper
l'auteur des faits aux poursuites.
L'Assemblée nationale a accepté ces modifications.
• Le
second paragraphe
tend à modifier
l'article 149-2 du code de procédure pénale, relatif aux
conditions dans lesquelles la commission placée auprès de la cour
de cassation, compétente en matière d'indemnisation des
détentions provisoires, rend ses décisions. Il prévoit que
les décisions de cette commission seront désormais
motivées, que les débats auront lieu en séance publique,
sauf opposition du requérant et que celui-ci sera, s'il le souhaite,
entendu personnellement ou par l'intermédiaire de son conseil.
En première lecture, le Sénat, sur proposition de notre excellent
collègue M. Michel Charasse, a supprimé ces
dispositions, pour transférer la compétence en matière
d'indemnisation des détentions provisoires au Conseil d'Etat.
L'Assemblée nationale a rétabli le texte qu'elle avait
adopté en première lecture. Votre commission considère que
si, jusqu'à présent, les indemnités versées pour
détentions provisoires abusives ont été insuffisantes,
c'est moins parce que la juridiction judiciaire n'accepte pas de
reconnaître ses erreurs, que parce que les conditions d'attribution des
indemnités sont définies de manière trop restrictive.
La modification des conditions d'indemnisation prévue par le projet de
loi devrait permettre une amélioration sensible de la situation,
d'autant plus que l'Assemblée nationale a décidé, lors de
la deuxième lecture du projet de loi, de mettre en place un double
degré de juridiction, en décentralisant les décisions en
matière d'indemnisation des détentions provisoires (voir article
suivant).
Votre commission considère donc que le système prévu par
le projet de loi est équilibré et que le transfert du contentieux
de l'indemnisation à la juridiction administrative ne constituerait pas
un progrès évident par rapport à la situation actuelle.
Elle vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 19 bis A
(art. 149-1 du code de
procédure pénale)
Décentralisation des
décisions d'indemnisation
•
Le
premier paragraphe
de cet article, inséré dans le
projet de loi par l'Assemblée nationale au cours de la deuxième
lecture, à l'initiative du Gouvernement, tend à modifier
l'article 149-1 du code de procédure pénale, qui
prévoit la compétence d'une commission placée
auprès de la Cour de cassation en matière d'indemnisation des
détentions provisoires et définit sa composition.
Le texte proposé prévoit la compétence du
premier
président de la cour d'appel
dans le ressort de laquelle a
été prononcée la décision de non-lieu, de relaxe ou
d'acquittement. Cette décentralisation des décisions en
matière d'indemnisation des détentions provisoires
injustifiées a été souhaitée par la Cour de
cassation, notamment parce que le nombre de dossiers en attente tend à
augmenter fortement. Elle permettra l'instauration d'un double degré de
juridiction dans cette matière, ce qui ne pourra qu'être favorable
aux droits des personnes demandant une indemnisation.
• Les
deuxième et troisième paragraphes
tendent à opérer des coordinations dans l'article 149-2,
relatif aux conditions dans lesquelles statue la commission d'indemnisation.
• Enfin, le
quatrième paragraphe
tend à
insérer dans le code de procédure pénale deux articles,
149-3 et 149-4, relatifs à l'appel des décisions prises en
matière d'indemnisation des détentions provisoires
injustifiées par le premier président de la cour d'appel. Le
texte proposé pour l'article 149-3 nouveau du code de
procédure pénale prévoit que l'appel pourra être
formé dans les dix jours auprès de la commission nationale
d'indemnisation des détentions provisoires placée auprès
de la Cour de cassation.
Les règles relatives à la composition de la commission ne
seraient pas modifiées. Elle statuerait dans les mêmes conditions
que le premier président de la cour d'appel, c'est-à-dire, sauf
exception, en séance publique, et rendrait des décisions
motivées.
Le texte proposé pour l'article 149-4 du code de procédure
pénale renvoie à un décret en Conseil d'Etat la
définition de la procédure devant le premier président de
la cour d'appel et la commission nationale d'indemnisation des
détentions provisoires.
• Le
paragraphe V
prévoit que la modification
des règles de compétence en matière d'indemnisation des
détentions provisoires entrera en vigueur six mois après la
publication de la loi.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification.
Article 19 bis
Commission de suivi de la
détention provisoire
En
première lecture, l'Assemblée nationale a prévu la
création d'une commission de suivi de la détention provisoire
placée auprès du ministre de la justice, qui serait
chargée "
de réunir les données juridiques,
statistiques et pénitentiaires concernant la détention
provisoire, en France et à l'étranger
". La commission
serait composée de deux représentants du Parlement, d'un
magistrat de la Cour de cassation, d'un membre du Conseil d'Etat, d'un,
professeur de droit pénal, d'un avocat et d'un représentant d'un
organisme de recherche judiciaire.
En première lecture, le Sénat a supprimé cet article, en
observant que la création d'un organe de ce type ne paraissait pas
indispensable et qu'une telle commission pourrait être
créée sans recourir à la loi. Il revient en particulier
aux assemblées, et notamment à leurs commissions des lois,
d'exercer un contrôle sur le système pénitentiaire et
notamment sur la question de la détention provisoire. En outre, la Cour
de cassation dresse , pour sa part, un bilan annuel des décisions
rendues par la commission nationale d'indemnisation des détentions
provisoires.
L'Assemblée nationale a rétabli cet article à l'initiative
de la rapporteuse de la commission des Lois, Mme Christine Lazerges.
Votre commission vous propose à nouveau la
disjonction
de cet
article.