3. Le rôle renforcé des notations dans le développement des produits structurés
a) La notation comme partie intégrante de l'élaboration des titrisations
Le marché des produits structurés dépend directement des notations émises par les agences.
Elles tiennent un rôle central dans le processus même de titrisation. En effet, si la nature de la notation des produits titrisés est identique à celle des entreprises - l'agence de notation doit émettre une opinion sur la capacité des actifs titrisés à faire face au remboursement de la dette - le processus est tout autre.
Les agences interviennent en amont car la structuration consiste notamment à établir des « tranches » au sein du produit titrisé qui obtiennent des notes différentes, dont une au moins bénéficie d'un AAA . La notation est ici un objectif sur la base duquel le produit est élaboré et non plus une opinion délivrée ex post .
Le processus de titrisation - la sélection des créances dites sous-jacentes, leur regroupement, leur découpage ainsi que les montages juridiques - ne permet généralement pas à l'investisseur de procéder facilement à sa propre évaluation du risque. Cette complexité fait de la notation un label qui conditionne le placement du produit structuré.
Le succès des opérations de titrisation tient aussi au fait qu'elles permettent de transformer partiellement des actifs ne bénéficiant pas des meilleures notations en des tranches dites « seniors » bénéficiant de la meilleure notation. Ainsi, un fonds dont le portefeuille est limité à des actifs de la catégorie « investissement » peut investir dans une tranche de titrisation notée AAA adossée à des actifs notés B qui lui seraient autrement interdits.
b) La notation comme obligation réglementaire en France
En faisant de la notation une obligation réglementaire, le législateur français a lié très tôt titrisation et notation . L'article L. 214-44 du code monétaire et financier prévoit implicitement l'obligation de notation pour tout titre émis par un véhicule de titrisation français - Fonds commun de créances devenu Fonds commun de titrisation ou Société de titrisation - faisant l'objet d'un appel public à l'épargne.
Dans son appréciation de la qualité des produits structurés reçus en garantie, l'Eurosystème exige au minimum deux évaluations de crédit établies par des « OEEC » agréés. Il applique la règle, dite de la « deuxième meilleure note », selon laquelle le produit n'est pas accepté en garantie si la deuxième meilleure note n'est pas supérieure aux standards requis par les règles de l'Eurosystème. Par exemple, un produit structuré X peut être accepté en garantie sous réserve qu'il soit noté AAA. Il bénéficie de deux notations : AAA et AA+. En application de la règle de la « deuxième meilleure note », le produit ne sera pas accepté.