B. DES NIVEAUX DE DOTATIONS ET DE CONSOMMATION DE CELLES-CI QUI DOIVENT ÊTRE REVUS À LA HAUSSE POUR RÉPONDRE PLEINEMENT AUX ENJEUX ET À L'URGENCE CLIMATIQUE

1. Des dotations classiques consommées quasi intégralement...

Les dotations d'investissement classiques, DETR, DSIL et DSIL exceptionnelle, présentent des taux de consommation compris entre 93,3 % et 99,9 % des crédits en AE et entre 67 % et 158 % (en raison de report N-1) en CP. Le delta pour atteindre 100 % résulte essentiellement de la réserve de précaution, de sorte que la consommation des crédits disponibles avoisine les 100 % pour les AE.

Les niveaux d'engagement des AE et de consommation de CP mettent en exergue deux phénomènes :

la bonne gestion par les collectivités des crédits alloués pour des opérations matures ;

le besoin important de financement des investissements par les collectivités et subséquemment l'utilité de ces dotations.

Ce dernier constat corrobore le témoignage des associations d'élus auditionnées par les rapporteurs spéciaux, qui ont fait état du très fort dynamisme actuel des projets d'investissement dans les territoires, ce dont on ne peut que se féliciter.

À cet égard, nul doute que des enveloppes bien plus élevées de dotations de l'État seraient également consommées dans leur intégralité.

Taux de consommation des AE et CP des dotations classiques entre 2020 et 2022

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

2. ... mais des niveaux de consommation de CP relativement faibles et en deçà des objectifs affichés pour les dotations spécifiquement dédiées aux enjeux environnementaux

Si les niveaux d'engagement des AE sont proches de 100 % pour la DRI et la dotation de rénovation thermique, la consommation des CP n'atteint pas les objectifs cible mentionnés dans les circulaires relatives à ces deux dotations.

En effet, concernant la DRI, l'instruction du 11 décembre 2020 stipulait que « le niveau de maturité repose sur la garantie d'engager l'opération au 31 décembre 2021. C'est-à-dire que, sauf très rare exception pour lesquelles une explication devra être transmise à la DGCL, les marchés doivent être notifiés au plus tard à cette date pour contribuer à la relance immédiate de l'économie. Le calendrier de mise en oeuvre devra assurer une date de livraison prévisionnelle avant le 31 décembre 2022, à l'exception de quelques projets exceptionnels par l'ampleur ou la complexité des travaux à mener (rénovation globale par exemple) ».

Or, fin 2022, seuls 48 % des CP ont été consommés sur l'ensemble des AE ouverts avec des niveaux très variables d'une région à l'autre, allant de 16 % en Corse à 95 % en Occitanie.

Un avenant à la convention de délégation de gestion du plan de relance signé par la DGCL et la direction du budget (DB) a, dès lors, prévu un échéancier de consommation des CP jusqu'à 2024. Cependant, la consigne arrêtée par la DGCL et la DB et transmise en novembre 2022 aux préfets de région fixe une échéance de consommation de la totalité des crédits au 31 décembre 2023, reportant le délai initial fixé au premier trimestre 2023.

Taux de consommation des AE et CP de la DRI entre 2021 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGCL

Concernant la dotation de rénovation thermique, l'instruction relative au soutien à la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités du 18 novembre 2020 précisait que : « l'opération proposée sera appréciée à travers son niveau de maturité et son calendrier de mise en oeuvre. Le niveau de maturité repose sur la garantie d'engager l'opération au 31 décembre 2021, c'est-à-dire que les marchés doivent être notifiés au plus tard à cette date. Le calendrier de mise en oeuvre devra assurer une date de livraison prévisionnelle avant le 31 décembre 2022, à l'exception de quelques projets exceptionnels par l'ampleur ou la complexité des travaux à mener (rénovation globale par exemple) pour lesquels une partie des CP pourront être versés début 2023 ».

Or, fin 2022, seuls 55 % des CP ont été consommés sur l'ensemble des CP ouverts avec des niveaux de reports très importants, à hauteur de 324,3 millions d'euros entre 2021 et 2022 et de 238,9 millions d'euros entre 2022 et 2023. Sur les 950 millions d'euros d'AE, les CP consommés au 31 décembre 2022 représentent seulement 31,3 % en deux ans. Dans le détail, en cumulé sur 2021-2022, le taux de décaissement des CP est légèrement plus fort pour la DSIL-RT (32,5 % des AE couvertes par des CP au 31/12/n+1) que pour le taux moyen observé pour la DSIL (27,7 % des AE couvertes par des CP en moyenne au 31 décembre n+1). La consommation des CP de la DSID-RT est en revanche légèrement moins rapide que pour la DSID classique (28,7 % contre 32,9 % au 31 décembre n+1).

Dans ce contexte, l'échéance du 31 décembre 2022 a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2023, afin de répondre aux difficultés conjoncturelles rencontrées par les collectivités.

Il parait cependant peu probable que l'intégralité des CP soit consommée d'ici la fin de l'année, l'exécution devant probablement se poursuivre en 2024, voire 2025.

Taux de consommation des AE et CP de la dotation RT
entre 2021 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGCL

Cet étalement des consommations de CP peut s'expliquer par plusieurs facteurs et notamment la conjoncture économique qui a pu ralentir la conduite des chantiers en cours.

Cependant, l'organisation administrative des préfectures pour le suivi des dossiers est également en cause. En effet, la hausse continue depuis deux ans des dotations d'investissement et, subséquemment du nombre de dossiers déposés, à moyens constants dans les services instructeurs des préfectures, a également contribué à un ralentissement des lancements des projets.

Enfin, comme évoqué supra, le manque de capacités d'ingénierie de certaines collectivités, et notamment les plus petites, a pu desservir le dépôt de certains dossiers.

Il en résulte que les délais très contraints fixés initialement dans le plan de relance paraissaient peu réalistes et tenables.

Dès lors, si la hausse des dotations d'investissement est indispensable et doit se poursuivre pour accompagner les collectivités dans leur transition écologique, elle ne peut être envisagée comme un moyen unique. Dans ce domaine, l'accompagnement de l'État ne peut se limiter au seul aspect budgétaire.