TROISIÈME PARTIE

LE MODÈLE QUI SUCCÈDERA AUX CONCESSIONS HISTORIQUES DEVRA ÊTRE PLUS PROTECTEUR DES INTÉRÊTS PATRIMONIAUX DE L'ÉTAT

I. LA GRATUITÉ : UN « PIÈGE DÉMAGOGIQUE » À ÉVITER

L'un des préalables à toute réflexion sur le modèle de gestion du patrimoine autoroutier consiste à déterminer le modèle de financement des infrastructures autoroutières. Deux options sont possibles, un financement par l'usager à travers les péages selon une logique « d'utilisateur-payeur » ou bien un financement par l'ensemble des contribuables à travers le budget de l'État.

Le rapporteur a déjà pu exposer les nombreux avantages d'un financement du patrimoine autoroutier par l'usager. La gratuité, aussi attractive soit-elle au premier abord, constitue selon lui un piège aux conséquences en chaîne aussi étendues que néfastes pour le réseau autoroutier en tant que tel mais plus largement pour la transition écologique du secteur des transports dans son ensemble.

En effet, la perspective de supprimer les péages autoroutiers à l'issue des concessions historiques, « un piège à démagogie » selon l'ancien président de l'ART Bernard Roman aurait des répercussions particulièrement problématiques.

En diminuant drastiquement le coût d'usage des autoroutes pour les usagers elle se traduirait mécaniquement par une incitation très puissante à un report modal inversé qui irait à l'encontre de tous les objectifs environnementaux que s'est fixée la France en matière de transport. En effet, la compétitivité de la voiture individuelle par rapport aux transports collectifs ferait un bon substantiel. Sauf à faire l'objet d'une augmentation massive de subventions publiques, le secteur ferroviaire, pour les longues comme pour les courtes distances, verrait sa compétitivité s'effondrer vis-à-vis de la route. Les émissions de gaz à effets de serre générées par le secteur des transports s'en ressentiraient.

Par ailleurs, sans financement par les usagers, les investissements dans les infrastructures seraient fortement exposés aux contraintes pesant sur les finances publiques, à la règle de l'annualité budgétaire et aux aléas politiques. Ces conditions conduiraient à une spirale de dégradation de l'état d'entretien des infrastructures qui, lorsqu'elle est engagée, devient très difficile à enrayer. Très dégradé, le réseau routier non concédé constitue le plus parfait exemple de ce phénomène.

Par ailleurs, la gratuité des autoroutes, compte-tenu de la situation de carrefour géographique de la France et de l'importance sur ses réseaux des trafics liés au transport routier de marchandises ou tourisme conduirait à un transfert financier substantiel du contribuable français au profit des usagers étrangers des infrastructures routières françaises qui ne contribueraient plus financièrement à leur entretien.

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