B. LA PERTE DE VALEUR DES PMI FACE À L'INFLATION

Représentant une masse budgétaire importante - 690 millions d'euros en 2024 - le coût lié aux PMI baisse néanmoins d'année en année du fait d'une diminution de la démographie des pensionnaires. Cette diminution est amplifiée par un niveau de revalorisation très peu dynamique, qui entraine une perte de valeur des PMI face à l'inflation.

1. Les crédits liés aux PMI sont sur une trajectoire baissière forte et durable, liée à la démographie des pensionnaires

Le montant consacré aux PMI baisse d'année en année. Cette baisse est directement causée par la baisse du nombre de bénéficiaires, dont la population en moyenne très âgée connait une érosion forte.

Évolution des effectifs et des crédits des PMI entre 2010 et 2024

Source : commission des finances du Sénat, d'après la documentation budgétaire

Le nombre de bénéficiaires de PMI est ainsi passé de 309 000 en 2010 à 143 000 en 2024 (prévision du projet annuel de performance pour 2024 de la mission « Anciens combattants ») et les crédits dédiés à la PMI sont passés de 1,766 milliard d'euro à 690 millions d'euros sur la même période.

L'actuelle pyramide des âges des bénéficiaires de PMI, s'agissant des ayants droit aussi bien que des ayants cause - indique que ce mouvement devrait continuer au cours des années à venir :

Pyramide des âges des ayants droit de la PMI en 2015 et 2023

Source : ministère des Armées

Pyramide des âges des ayants cause de la PMI en 2015 et 2023

Source : ministère des Armées

Ainsi, si les crédits liés aux PMI restent importants en termes de volume, à 690 millions d'euros, ce montant est en baisse et devrait continuer de se réduire de manière significative.

2. Une concentration des montants versés au bénéfice des blessés les plus graves et des ayants causes

La répartition des pensions est très inégale. La très grande majorité des pensionnaires ayant droits à un taux d'invalidité relativement faible : plus de la moitié des pensions sont servies à un taux de 10 à 20 % d'invalidité. Pour autant, elles ne représentent que 17 % du montant total des pensions versées aux ayants droit.

A contrario, les pensions concédées à un taux d'invalidité de 100 % ou plus représentent 3,3 % des pensionnés et 31 % du montant total des pensions versées aux ayants droit.

Répartition par taux d'invalidité des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en crédits de paiement au 01/01/202442(*).

Taux

Nombre de degré (Art. L. 125-10)

Nombre de bénéficiaires

Montant annuel en euros

10

0

33 860

26 817 120

15

0

13 058

15 512 904

20

0

15 907

25 387 572

25

0

5 519

11 126 304

30

0

12 149

29 011 812

35

0

4 028

11 552 304

40

0

6 252

19 956 384

45

0

2 752

10 171 392

50

0

4 522

18 232 704

55

0

2 144

9 699 456

60

0

2 752

13 440 768

65

0

2 679

14 145 120

70

0

1 681

9 642 216

75

0

1 899

11 394 000

80

0

1 503

9 955 872

85

0

1 418

12 149 424

90

0

1 197

11 749 752

95

0

993

11 451 276

100

0

1 603

23 044 728

100

De 1 à 9 degrés

1 015

23 629 200

100

10 à 19

509

18 207 948

100

20 à 29

255

12 481 740

100

30 à 39

175

11 056 500

100

40 à 49

138

10 265 544

100

50 à 59

85

8 013 120

100

60 à 69

55

5 351 280

100

70 à 79

29

2 987 232

100

80 à 89

18

1 888 488

100

90 à 99

23

2 896 896

100

100 degrés et plus

36

5 353 344

Total

N/A

118 254

396 572 400

Source : ministère des Armées, d'après les données de la DGFIP et du service des retraites de l'État

En conséquence, les montants moyens et médians des pensions varient du simple au double, le montant moyen s'élevant à 3 352 euros annuels et le montant médian à 1 554 euros annuels.

Enfin, les PMI sont réversibles. En 2024, on décompte 35 000 bénéficiaires ayants cause, correspondant, dans 90 % des cas, à un conjoint. Ces derniers représentent ainsi 22,8 % des bénéficiaires et 44 % du montant total des PMI versées. Les ayants causes bénéficient de pensions en moyenne plus importantes car les pensions les plus faibles ne sont pas reversées.

3. Une pension indexée sur un point PMI moins dynamique que l'inflation

Une demande forte et récurrente des associations d'anciens combattants et des associations de blessés de guerre est d'obtenir une meilleure revalorisation du point de pension militaire d'invalidité (ci-après PMI) par une indexation de ce point sur l'inflation.

Le point PMI est un point d'indice sur lequel sont indexées les deux principales rentes viagères dont bénéficient les anciens combattants : l'allocation de retraite du combattant et la pension militaire d'invalidité. Sa valeur au 1er janvier 2024 est de 15,90 euros.

L'allocation de reconnaissance est versée à tout ancien militaire en possession de la carte du combattant, dont font partie les bénéficiaires d'une PMI, selon un nombre de points fixé par la loi. Son montant en 2024 était de 826,80 € par an, montant correspondant à 52 points PMI.

Les pensions militaires d'invalidité sont attribuées en nombre de points PMI, selon le degré d'invalidité constaté par un expert médical au moment de la stabilisation de la blessure et du grade du blessé.

La valeur du point PMI est indexée sur l'évolution cumulée et constatée de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l'État. Cette valeur est calculée en fonction des mesures générales et catégorielles de revalorisation de la fonction publique, au prorata de leur incidence sur l'échelle indiciaire des fonctionnaires. En d'autres termes, la valeur des PMI est indexée sur l'évolution des rémunérations publiques.

Depuis 2022, la valeur du point PMI est révisée annuellement au premier janvier de l'année. La révision tient compte des évolutions des rémunérations publiques intervenues entre le 1er juillet de l'année n - 2 et le 30 juin de l'année n - 1. La révision du 1er janvier 2024 prenait ainsi en compte les évolutions intervenues entre le 1er juillet 2022 et le 30 juin 2023.

Du fait de cette modalité d'indexation, très peu dynamique, le pouvoir d'achat des pensionnés, à nombre de points constant, tend à se dégrader à cause de l'inflation. Si une mesure de revalorisation exceptionnelle du point PMI a été consentie en loi de finance pour 2022, cette dernière n'a, au final, pas été suffisante pour couvrir l'inflation exceptionnellement élevée constatée cette année-là. De la même manière, le pouvoir réglementaire a fait preuve de souplesse en acceptant de prendre en compte des revalorisations du point d'indice de la fonction publique intervenues en juillet de l'année n - 1 (soit une prise en compte un an plus tôt que ce à quoi aurait abouti une application stricte des modalités de revalorisation du point PMI), mais cette souplesse, même s'il faut la saluer, n'aura eu pour effet que de rendre moins forte la perte de pouvoir d'achat face à l'inflation.

Ainsi, entre 2011 et 2023, la valeur du point PMI est passée de 13,85 euros à 15,63 euros. Si le point PMI avait été indexé sur l'inflation, sa valeur au 1er janvier 2023 se serait élevée à 16,38 euros. Les bénéficiaires d'une PMI ont ainsi vu la valeur de leur pension baisser de 4,5 % sur cette période.

Si l'augmentation du nombre de points PMI de l'allocation de reconnaissance du combattant a permis de compenser les effets de l'inflation - bien que ces augmentations de points étaient présentées comme des mesures de plus grande reconnaissance envers les anciens combattants lors de leur adoption - cela n'est pas le cas pour les PMI, puisque le nombre de points d'une PMI dépend du degré d'invalidité et du grade du bénéficiaire.

Au regard des dynamiques respectives de l'évolution des rémunérations publiques et de l'inflation sur les dernières années, il n'y a pas lieu de penser que cette tendance - la perte de pouvoir d'achat des PMI face à l'inflation - s'inverse à court terme.

Cette situation est particulièrement problématique au regard des pensions les plus importantes, qui correspondent aux invalidités les plus graves, et qui sont donc des sources de revenus essentielles pour ces blessés, dont le pouvoir d'achat est directement touché par le manque de dynamisme des revalorisations.

De manière plus générale, même si la contrainte budgétaire pesant sur les finances publiques ne peut être niée, il faut regretter que la réparation légitime due aux militaires blessés pour le service de la France soit la victime collatérale d'une évolution atone des rémunérations publiques.

Recommandation n° 4 : Réfléchir à l'adaptation des modalités d'indexation des pensions militaires d'invalidité, notamment en période de forte inflation.


* 42 Pensions des ayants droit uniquement

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