LISTE DES RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1 : dans le projet de loi de finances pour 2026, sécuriser un niveau de recettes pour le Fonds national des aides à la pierre (FNAP) équivalent à au moins 250 millions d'euros pour permettre de poursuivre les opérations engagées. Cet effort devra faire l'objet d'une négociation entre les bailleurs sociaux et le gouvernement et pourrait conduire à envisager des modulations de la fraction de cotisation à la CGLLS reversée au FNAP ou du montant de la réduction de loyer de solidarité (gouvernement et bailleurs sociaux).

Recommandation n° 2 : engager une révision large de la politique de financement du logement social pour permettre la pérennisation des aides à la pierre après 2027 : étude de la pertinence des montants de subvention, des niveaux de loyer et d'aides personnelles ainsi que des dépenses fiscales pour atteindre le régime de 120 000 logements sociaux produits par an (gouvernement, direction de la législation fiscale, direction du budget (DB), direction générale du Trésor, direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP)).

Recommandation n° 3 : dès que la situation budgétaire le permettra, faire revenir l'État parmi les financeurs directs du FNAP par l'orientation de crédits budgétaires, pour revenir à la parité de financement prévue en 2016 lors de la création du fonds (gouvernement).

Recommandation n° 4 : mettre en cohérence le montant des aides à la pierre et l'objectif de construction pour que le montant moyen de subvention (MMS) par opération soit réaliste et mettre en place un suivi dans le temps des MMS par territoire en fonction de l'évolution des coûts de construction (gouvernement, DHUP, FNAP).

Recommandation n° 5 : engager une campagne d'apurement des restes à payer du FNAP et placer l'agrément et la demande de subvention après la délivrance du permis de construire, pour renforcer la sincérité des projets et réduire le taux de chute (DB, DHUP, FNAP).

Recommandation n° 6 : systématiser le recours aux fonds européens pour les opérations de réhabilitation et d'amélioration de la performance énergétique globale des logements sociaux, sans pérenniser ce volet dans les missions du FNAP (bailleurs sociaux).

Recommandation n° 7 : s'assurer que la répartition des aides soit équitable entre tous les territoires et véritablement ajustée aux besoins locaux, d'une part, et qu'elle prenne mieux en compte la capacité de chaque bailleur à construire, d'autre part (FNAP).

Recommandation n° 8 : mieux articuler les rôles de l'État et des collectivités territoriales pour développer une approche pluriannuelle de la programmation des crédits et permettre la reconduction d'objectifs (FNAP, DHUP, directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et directions départementales des territoires et de la mer (DDT(M))).

Recommandation n° 9 : fiabiliser l'estimation locale des besoins en logements sociaux par le déploiement d'une méthodologie partagée par tous les territoires (FNAP, DHUP, DREAL et DDT(M)).

Recommandation n° 10 : simplifier la procédure de délégation des aides à la pierre et développer ce système par une coopération accrue entre EPCI ou la mutualisation au niveau départemental des moyens d'ingénierie pour favoriser une programmation au plus près des besoins locaux (collectivités territoriales).

Recommandation n° 11 : améliorer le suivi des aides à la pierre déployées dans les territoires délégataires en fiabilisant la complétion des informations financières dans le système d'information des aides à la pierre (SIAP) (DHUP, collectivités délégataires, bailleurs sociaux).

Recommandation n° 12 : confirmer le FNAP dans sa vocation de soutien aux logements très sociaux en articulant mieux son action avec les objectifs du plan Logement d'Abord II et en maintenant la reconnaissance des particularités liées aux maîtrises d'ouvrage d'insertion (FNAP, gouvernement).

Recommandation n° 13 : développer un modèle de financement qui encourage la construction de logements de petite surface et la reconversion des grands logements, au vu de la demande actuelle dans le parc social (FNAP, bailleurs sociaux, DHUP).

Recommandation n° 14 : réformer les trois zonages de tension territoriale pour les rendre plus proches de la réalité et engager le travail de leur unification à moyen terme (gouvernement).

I. PEUR SUR LE FNAP : LES AVANCÉES PERMISES PAR LE FONDS RISQUENT D'ÊTRE MISES À MAL PAR LE MANQUE DE FINANCEMENTS

A. LA CRÉATION DU FNAP DEVAIT PERMETTRE DE PÉRENNISER LE FINANCEMENT ET D'UNIFIER LA GOUVERNANCE DES AIDES À LA PIERRE

1. Le FNAP constitue un outil efficace et pilotable pour accompagner la construction du logement social

La politique de soutien au logement, en France, passe par de nombreux dispositifs qui visent à augmenter l'offre de logements et à permettre que le plus grand nombre réussisse à se loger. Par conséquent, les aides sont multiples et concernent divers leviers et acteurs.

Historiquement, l'État a mis en place un système de financement qui reposait sur des aides à la pierre : les organismes producteurs de logement bénéficiaient ainsi de subventions et de prêts qui encourageaient la production. Ce développement est à l'origine de la politique publique du logement en France. Aujourd'hui, le Fonds national des aides à la pierre (FNAP) constitue l'héritier de cette politique ancienne qui s'explique par le besoin de reconstruction consécutif à la Seconde Guerre mondiale.

Cependant, depuis 1945, le financement de la politique du logement s'est élargi au point de concerner un public toujours plus varié et de fonctionner selon des dispositifs différents.

L'inflexion principale de la politique du logement, en 1977, a été la création des aides personnelles au logement (APL). L'État, alors, intervient non plus pour structurer l'offre immobilière mais pour corriger les effets du marché et soutenir directement les plus vulnérables. Exemple typique d'une aide « de guichet », les APL représentent 16,27 milliards d'euros en 2024, dont 13,10 milliards d'euros issus de crédits budgétaires, qui représentent 70,8 % des crédits de paiement de la mission « Cohésion des territoires ». Il s'agit d'une des aides sociales les plus redistributives en France.

Dans les années 1990, d'autres aides « de guichet », c'est-à-dire des aides versées automatiquement lorsque le demandeur remplit les conditions définies par la loi et le règlement, ont vu le jour. Il s'est principalement agi de dispositifs fiscaux à destination des investisseurs privés pour les encourager à construire des logements locatifs. Dès lors, le coût pour les finances publiques de ces aides dépend du comportement des acteurs et n'est pas directement pilotable d'année en année. Les dispositifs « Pinel », « Denormandie », « Cosse », du nom des ministres qui les ont déployés, étaient fondés sur le principe d'avantages fiscaux pour les ménages qui achetaient des logements pour les louer. Coûteux, ces dispositifs cherchant à favoriser le développement de l'offre de logement, parmi lesquels on trouve aussi le prêt à taux zéro (PTZ) à destination des propriétaires occupants cette fois, étaient estimés à 2,3 milliards d'euros4(*) de dépense fiscale dans le projet de loi de finances pour 2025.

Dans ce panorama général, les aides directes à la pierre financées par le FNAP font donc figure de dispositif historique en France, dans la droite ligne de l'approche de la politique du logement par l'accroissement de l'offre, notamment sociale, dans les années 1940 et 1950. Plusieurs aspects semblent indiquer qu'un tel dispositif est vertueux et efficient :

- les aides à la pierre constituent un dispositif d'aides « contingentées », dont le coût pour le trésor public est fixé chaque année et maîtrisé par les pouvoirs publics, à l'inverse des aides « de guichet »5(*) ;

- ces aides permettent de cibler certains types de projets et d'orienter la construction sur les produits ou les zones dans lesquelles le déséquilibre entre l'offre et la demande est le plus important, au contraire des dépenses fiscales qui ont un effet généralement uniforme sur le territoire6(*) ;

- l'effet d'entraînement de ces aides sur le secteur du bâtiment et des travaux publics est direct : l'argent public permet ainsi de favoriser le déploiement de l'activité économique, par effet de levier.

2. La gouvernance des aides à la pierre avant 2016 n'était pas durable

La création du Fonds national des aides à la pierre par décret, le 1er juillet 20167(*), a consisté à réunir en une seule instance les aides à la pierre qui suivaient auparavant deux circuits distincts. Sa création s'est fondée sur la promesse d'un financement paritaire des aides budgétaires pour la construction de logements sociaux, entre l'État et les bailleurs sociaux.

Avant 2016, deux systèmes parallèles coexistaient :

- d'une part, l'État apportait des crédits budgétaires au sein du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires » ;

- d'autre part, le fonds national pour le développement d'une offre de logements locatifs très sociaux (FNDOLLTS), créé en 2009 à l'article L. 452-1-1 du code de la construction et de l'habitation, participait au financement de l'amélioration et de la construction de logements sociaux en abondant un fonds de concours.

Le FNDOLLTS était conçu comme un fonds de péréquation alimenté par les bailleurs sociaux. Sa mission était de contribuer au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) et aux sociétés d'économie mixte, ainsi qu'à la rénovation urbaine.

L'emploi des crédits était arrêté par une commission de six membres, réunissant cinq représentants de l'État et le directeur général de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

La gestion du fonds était assurée par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et ses ressources provenaient de diverses sources qui ont varié presque chaque année et étaient définies en loi de finances. Dans sa dernière année pleine de fonctionnement, en 2015, il a ainsi bénéficié :

- d'une fraction des cotisations principale et additionnelle versées par les bailleurs sociaux à la CGLLS8(*) ;

- du produit de la surtaxe sur les plus-values de cessions immobilières9(*) de plus de 50 000 euros, plafonné à hauteur de 45 millions d'euros.

Les fonds étaient consacrés pour une fraction à l'ANRU et pour une autre au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux.

Plusieurs difficultés ont rendu nécessaires la création d'une instance unique de répartition et de versement des aides à la pierre.

En premier lieu, les crédits budgétaires apportés par l'État dans le programme 135 n'ont eu de cesse de se réduire au long des années qui ont précédées la création du fonds, alors que les fonds de concours apportés par le FNDOLLTS étaient, à l'inverse, en croissance continue.

Consommation du programme 135 entre 2011 et 2015 selon la nature des crédits

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

La source de financement budgétaire, entre 2011 et 2015, s'est considérablement réduite. En particulier, la disproportion entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement était importante : en loi de finances initiale pour 2015, 598 millions d'euros en AE avaient été ouvertes contre 279 millions d'euros en CP.

À l'inverse, la participation des bailleurs, via le FNDOLLTS, n'a cessé de croître en tendance : il devenait donc impensable que ces derniers n'aient aucun pouvoir de décision dans l'affectation des crédits d'aide à la pierre.

En second lieu, la Cour des comptes avait, dans ses notes d'exécution budgétaire, formulé des critiques récurrentes à l'encontre du fonds de concours recevant les crédits du FNDOLLTS. Ces critiques étaient de trois ordres :

- d'une part, le produit de la surtaxe sur les plus-values de cessions immobilières, qui abondait le fonds de péréquation, constituait un prélèvement obligatoire pesant sur des acteurs privés sans lien avec le logement social et ne pouvait donc pas venir en recettes d'un fonds de concours à moins de méconnaître le principe d'intentionnalité de la partie versante ;

- d'autre part, la commission qui gérait le fonds de péréquation ne comprenait que des représentants de l'État, au mépris du principe d'externalité à l'État de la partie versante qui régit les fonds de concours ;

- enfin, des ressources issues de prélèvements obligatoires étaient directement réaffectées au programme 135 sans être reversées au budget général, privant le Parlement de son rôle d'autorisation et de contrôle des dépenses relevant de ce programme et ne respectant pas les principes d'universalité budgétaire et de non-affectation des recettes.

3. La création du fonds, en 2016, s'est faite sur une promesse de financement paritaire du logement social

Face aux limites de l'organisation par double circuit, le FNAP a été créé par décret le 1er juillet 2016, en application de l'article 144 de la loi de finances initiale pour 201610(*).

Il a ainsi permis de répondre, en premier lieu, à la question du manque de représentativité des bailleurs et de collégialité dans les décisions d'octroi des aides à la pierre. En effet, comme le précise l'article 144 de la loi de finances pour 2016, « Le conseil d'administration du fonds est composé, à parité, de représentants de l'État, d'une part, et de représentants des organismes d'habitation à loyer modéré, des sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux et des organismes agréés en application de l'article L. 365-211(*), d'autre part. Il est également composé de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements et de membres de l'Assemblée nationale et du Sénat. »

Cette organisation devait refléter un financement paritaire des aides à la pierre : en intégrant dans un même fonds les bailleurs sociaux et l'État, soit les deux financeurs principaux du logement social, la promesse était celle d'un retour des participations de l'État.

En effet, la création du FNAP s'est déroulée dans la période couverte par l'Agenda Hlm 2015-2018 signé entre l'État et l'Union sociale pour l'habitat (USH)12(*), dans lequel un engagement mutuel était pris pour « maintenir des aides à la pierre à un niveau adapté aux besoins de la production ». Le même document faisait état d'un objectif de mutualisation des moyens pour « servir l'objectif de programmation de 120 000 logements locatifs sociaux par les organismes HLM ».

En 2016, année de la création du FNAP, le nombre de décisions de financement de logements locatifs sociaux a ainsi atteint un point haut de 124 226 agréments. Les engagements de l'État et des bailleurs devaient permettre de maintenir ce niveau de production.

En second lieu, la création du FNAP a permis de répondre largement aux critiques récurrentes de la Cour des comptes vis-à-vis de l'ancien fonds de concours :

- l'intentionnalité de la partie versante est respectée puisque les bailleurs, qui abondent le fonds par l'intermédiaire de leurs cotisations à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), sont membres du conseil d'administration ;

- l'externalité vis-à-vis de l'État du FNAP est une réalité puisqu'il s'agit d'un établissement public administratif doté de la personnalité juridique et que l'État ne bénéficie que d'un tiers des sièges au conseil d'administration ;

- si l'universalité budgétaire n'est pas entièrement respectée, il n'en demeure pas moins que cette exception est mieux encadrée et transparente, ce qui favorise le contrôle du Parlement.

4. Le retrait du financement direct par l'État dès 2018 et le recours aux ressources d'Action Logement

La promesse d'un financement paritaire entre l'État et les bailleurs sociaux a fait long feu. En effet, dès 2018, l'État s'est retiré de la participation au FNAP, dans un contexte général de désinvestissement dans la politique du logement.

Ainsi, plusieurs modifications ont eu lieu, correspondant à des économies budgétaires importantes, permises par un transfert de charges supportées par l'État vers les citoyens et les bailleurs sociaux.

D'une part, le gouvernement a décidé de diminuer de 5 euros par mois les APL pour l'ensemble des 6,5 millions de bénéficiaires à partir du 1er octobre 2017. Cette réduction, prise par voie réglementaire, a eu pour effet de réduire l'engagement de l'État en faveur du logement des Français les plus vulnérables et a constitué une première étape de retrait.

D'autre part, le gouvernement a mis en place dans la loi de finances initiale pour 2018 la réduction de loyer de solidarité (RLS). Cette dernière consiste à imposer une diminution concomitante des loyers des logements sociaux et de l'APL. Pour les locataires du parc social, il en ressort une baisse de loyer et une baisse d'APL qui rend la réforme indolore. En revanche, les bailleurs sociaux ont fortement souffert de ce transfert de charge : avec des loyers plus bas, leurs recettes ont diminué. Le coût annuel de la RLS a augmenté pour atteindre en 2021 un plafond qui n'a été diminué qu'avec l'adoption de la loi de finances initiale pour 202513(*).

Évolution du montant de la RLS

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des données de l'étude Perspectives de la Caisse des dépôts

Alors que la part de fonds propres nécessaire pour mener à bien la construction d'un nouveau logement social est passé, en moyenne, de 5,3 % en 2000 à 16,1 % en 2023 selon l'Union sociale pour l'habitat (USH), l'effet de la RLS a eu une incidence directe sur les capacités de construction des bailleurs.

Au niveau du FNAP, le retrait de l'État s'est d'abord manifesté par une baisse en 2017 de sa participation, avant qu'elle ne se tarisse totalement en 201814(*). La participation paritaire au financement du fonds n'a donc jamais été une réalité et l'État a fléché, pour pallier sa participation au fonds, une partie des ressources d'Action Logement vers le FNAP.

Ainsi, les conventions quinquennales conclues entre l'État et Action Logement pour les années 2018 à 2022 puis 2023 à 2027 ont prévu plusieurs versements du groupe vers le FNAP, dont le dernier a eu lieu en 2024 à hauteur de 150 millions d'euros. Le plan d'investissement volontaire, signé entre l'État et Action Logement le 25 avril 2019, a de plus prévu une participation supplémentaire de 300 millions d'euros par an entre 2020 et 2022.

Crédits versés au FNAP par Action Logement depuis sa création

(en millions d'euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Montant

0

50

50

350

350

350

300

150

0

Source : conventions quinquennales entre Action Logement et l'État et Plan d'investissement volontaire d'Action Logement

Il en ressort qu'Action Logement a pallié l'absence de financement par crédits budgétaires pendant une large période.

Recettes annuelles du FNAP depuis sa création

(en millions d'euros)

Note : les prélèvements et la majoration SRU, pour solidarité et renouvellement urbains, sont les pénalités payées par les communes qui ne disposent pas du quota de logements sociaux défini par la loi SRU ; les FAU sont les fonds d'aménagements urbains, supprimés en 2017 et intégralement transférés au FNAP.

Source : commission des finances, à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Depuis sa création, les recettes du FNAP proviennent de l'ensemble des partenaires. Certaines de ces recettes sont nommément prévues par la loi15(*) :

- une fraction de la cotisation des bailleurs sociaux collectée par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Prévue pour atteindre 375 millions d'euros chaque année, cette dernière a été réduite à 75 millions d'euros depuis la loi de finances initiale pour 2020 pour faire face à la pénurie de fonds propres des bailleurs, conséquence de la RLS ;

- des subventions et contributions de l'État par crédits budgétaires ;

- les prélèvements au titre du non-respect par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de leurs obligations de construction de logements sociaux prévus par la loi Solidarité et renouvellement urbains16(*) (SRU) ;

- les majorations des prélèvements SRU pour les communes carencées, dont le montant est fixé par le préfet et peut conduire à multiplier jusqu'à cinq fois le montant des prélèvements.

Des ressources non définies précisément dans l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation ont aussi été reçus par le FNAP depuis sa création de façon ponctuelle :

- la participation volontaire d'Action Logement, qui paradoxalement a pris une part prépondérante dans le financement du fonds.

- les crédits non engagés au 27 janvier 2022 par les fonds d'aménagement urbains (FAU), supprimés par la loi « égalité-citoyenneté » du 27 janvier 2017 ; ces crédits ont été intégralement transférés au FNAP ;

- la restitution au FNAP de crédits non consommés depuis le budget de l'État afin qu'il puisse les reprogrammer.

Provenance des recettes cumulées du FNAP depuis sa création

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Il ressort de cette analyse que, depuis sa création, le financement du FNAP est passé par des crédits budgétaires à hauteur seulement de 3 %, et de ressources issues de l'État17(*) uniquement à hauteur de 20 %.

5. Un besoin de financement patent pour 2026 et un modèle à construire pour les années suivantes

Le premier budget rectificatif du FNAP, adopté le 7 mars 2025, met en évidence que la situation du fonds ne saurait être poursuivie au-delà de 2026 à ressources inchangée.

D'une part, le maintien de la fraction des cotisations des bailleurs à la CGLLS à hauteur de 75 millions d'euros au lieu des 375 millions d'euros prévus dans la loi ampute le fonds d'une partie importante de ses ressources.

D'autre part, l'absence de financement d'Action Logement à partir de 2025 et la non-participation de l'État par crédits budgétaires depuis 2018 rend l'équation insoluble.

Pour 2025, les recettes du FNAP s'élèvent ainsi à 126,4 millions d'euros, alors que les crédits de paiement nécessaires à l'accomplissement de ses missions sont estimés à 305,2 millions d'euros.

Il en ressort un déficit prévisionnel de 178,8 millions d'euros à venir pour l'année.

En fin de gestion 2024, la trésorerie du fonds s'élevait à 286,0 millions d'euros. Son niveau s'élèverait ainsi à 107,2 millions d'euros en fin d'exercice 2025. En poursuivant à régime constant, le fonds ne serait donc plus en mesure de couvrir les besoins dès l'exercice 2026.

Évolution des ressources, des emplois et de la trésorerie du FNAP depuis 2023
et simulation pour 2026 à régime constant

(en millions d'euros)

Note : le graphe montre le passage du FNAP en 2026 à une trésorerie négative - c'est-à-dire un besoin de financement incompressible - en cas de maintien des recettes et des charges au même niveau qu'en 2025.

Source : commission des finances, données FNAP

Il apparaît donc nécessaire, aujourd'hui, de trouver des nouveaux moyens pour financer le FNAP dont les missions sont nécessaires pour maintenir l'ambition de construction de logements sociaux.

Avec près de 300 millions d'euros de charges constatées depuis plusieurs années mais seulement 100 millions d'euros de ressources prévues en 2025, le FNAP fait face à un besoin crucial de nouveaux financements pour 2026, faute de trésorerie suffisante à ponctionner.


* 4 Document de politique transversale « Rapport évaluant l'efficacité des dépenses fiscales en faveur du développement et de l'amélioration de l'offre de logements », annexe au projet de loi de finances pour 2025.

* 5 Philippe Dallier, Rapport d'information fait au nom de la commission des finances sur la répartition et l'utilisation des aides à la pierre, enregistré le 3 octobre 2018.

* 6 Il est néanmoins possible, comme cela a été fait pour le dispositif Pinel, de s'appuyer sur des zonages fiscaux pour définir le niveau de réduction ou de crédit d'impôt auquel le bénéficiaire a le droit.

* 7 Décret n° 2016-901 du 1er juillet 2016 portant création du Fonds national des aides à la pierre.

* 8 Articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 9 Article 1609 nonies G du code général des impôts, version antérieure au 1er janvier 2016.

* 10 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 11 Article L. 365-2 du code de la construction et de l'habitation.

* 12 L'USH est une association créée en 1929 qui représente 593 organismes HLM dont le rôle est triple : assurer la représentation des bailleurs sociaux au niveau national, informer, conseiller et assister les organismes adhérents ainsi qu'animer des travaux de recherche, d'analyse et d'étude sur le logement social.

* 13 Article 169 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.

* 14 À l'exception d'une participation ponctuelle de 8 millions d'euros en 2021, issue de crédits du programme 364 de la mission « Plan de relance », pour le renforcement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants (PTFTM) et pour la création de places d'hébergement.

* 15 Article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation, issu de l'article 144 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015.

* 16 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

* 17 En ajoutant le fruit des prélèvements SRU et leur majoration.

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