B. DANS LE CAS DES RECETTES, UNE « FAUSSE NORMALITÉ »
Les recettes consistent pour près de la moitié en des prélèvements sur le travail, comme dans la plupart des pays de l'OCDE.
Toutefois les allégements de cotisations patronales sur les bas salaires, dans le cadre de la politique de l'emploi, sont une spécificité française.
C. UN DÉFICIT SANS PRÉCÉDENT HORS PÉRIODE DE CRISE
1. Si rien n'était fait, un déficit qui pourrait atteindre 25 milliards d'euros en 2029
Le déficit de la sécurité sociale a atteint en 2024 un niveau de 15,3 milliards d'euros, sans précédent hors période de crise.
Selon les prévisions à la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2025, il augmenterait encore d'ici 2029, à politiques inchangées, pour atteindre 24,8 milliards d'euros.
Solde de la sécurité sociale : exécution et prévision
(en milliards d'euros)
Source : D'après les lois de financement de la sécurité sociale et le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2025
2. Comment en est-on arrivé là ?
Pourtant, avant la crise sanitaire, la sécurité sociale était quasiment à l'équilibre.
L'écart entre le déficit de 1,7 milliard d'euros de 2019 et le déficit de 15,3 milliards d'euros de 2024 s'explique de la façon suivante.
En 2019, la sécurité sociale avait un déficit structurel (c'est-à-dire un déficit corrigé des fluctuations de la conjoncture) d'environ 10 milliards d'euros. En effet, en 2019 le PIB de la France était supérieur d'environ 2 % à son niveau potentiel (autrement dit, à son niveau corrigé des fluctuations de la conjoncture), ce qui améliorait temporairement le solde de plus de 10 milliards d'euros. Comme actuellement le PIB est légèrement inférieur à son potentiel, entre 2019 et 2024 l'évolution du solde conjoncturel a contribué à l'aggravation du déficit pour près de 13 milliards d'euros.
Le second facteur d'aggravation du déficit entre 2019 et 2024 est que l'effort structurel sur les dépenses a été négatif de près de 20 milliards d'euros. Autrement dit, les dépenses ont augmenté de près de 20 milliards d'euros de plus que celui qui aurait découlé d'une croissance au même taux que le PIB potentiel. Cela s'explique notamment par les mesures en faveur de l'hôpital consécutives à la crise sanitaire : 13 milliards d'euros pour le « Ségur de la santé » (consistant essentiellement en des augmentations salariales) et 8,6 milliards d'euros pour les « mesures inflation » en faveur de l'hôpital. Ces mesures peuvent aussi être interprétées comme le rattrapage partiel de l'effort de réduction du déficit des années 2010.
Décomposition indicative de l'évolution du solde de la sécurité sociale en 2019-2024
(en milliards d'euros)
Source : Mecss du Sénat
En sens inverse, les mesures prises pour augmenter les recettes ont été d'environ 8 milliards d'euros, et les recettes ont spontanément eu tendance à augmenter plus vite que le PIB potentiel sur la période.
3. Retour sur les années 2010
La crise financière de 2009 a considérablement aggravé le déficit de la sécurité sociale. Dans les années 2010, dans un premier temps des mesures ont permis de quasiment résorber le déficit structurel (cf. graphique ci-dessous). Toutefois, alors que la conjoncture était favorable, du fait du faible dynamisme des recettes le déficit structurel s'est remis à augmenter en fin de période, pour atteindre en 2019 le montant de 10 milliards d'euros indiqué ci-avant, ce que masquait l'excédent conjoncturel.
Décomposition du solde de la sécurité sociale
(en milliards d'euros)
Source : Mecss du Sénat
Dans les années 2010, la réduction du déficit structurel a été permise par une action à la fois sur les dépenses et sur les recettes, pour respectivement 50 milliards d'euros et 25 milliards d'euros environ.
L'effort sur les recettes a surtout concerné le début de la période. L'effort sur les dépenses a quant à lui été également réparti sur la totalité de la période (plus de 5 milliards d'euros par an), et concentré en quasi-totalité sur les dépenses d'assurance maladie et, dans une moindre mesure, de retraites.
Mesures sur les recettes et les dépenses
(en milliards d'euros)
Source : Mecss du Sénat