IV. AUDITION DE MME CATHERINE BARBAROUX, DÉLÉGUÉE GÉNÉRALE À L'EMPLOI ET À LA FORMATION PROFESSIONNELLE
Puis
la commission a procédé à
l'audition de
Mme
Catherine Barbaroux, déléguée générale
à l'emploi et à la formation professionnelle
.
Mme Catherine Barbaroux, déléguée
générale à l'emploi et à la formation
professionnelle,
a considéré que la conduite d'une politique
privilégiant les exonérations de cotisations sociales posait
trois types de questions respectivement relatives à la pertinence de cet
outil par rapport aux objectifs recherchés, à son
efficacité comparée à celle des autres outils de la
politique de l'emploi, et aux moyens de son suivi et de son amélioration.
Elle a estimé que le Gouvernement avait choisi de conférer la
priorité au recours à une gamme d'outils la plus large possible
en matière de politique de l'emploi. Elle a déclaré que la
politique menée en matière d'exonérations de charges
sociales poursuivait plusieurs finalités : modifier l'ordre de la
file d'attente au bénéfice des demandeurs d'emploi les plus
fragiles (jeunes, chômeurs de longue durée), favoriser le
développement dans certaines zones géographiques ou certains
quartiers dans le cadre d'une politique d'aménagement du territoire, et
abaisser le coût du travail au travers des exonérations
généralisées.
Mme Catherine Barbaroux
a observé que ces différentes
mesures d'exonérations de charges étaient largement
utilisées par les petites et moyennes entreprises (PME) et en a conclu
qu'elles devaient par conséquent répondre à une attente.
Elle a reconnu que ces exonérations de charges sociales pouvaient
paraître complexes. Elle a rappelé toutefois que le Gouvernement
avait commencé à simplifier ces dispositifs en supprimant
l'abattement de charges sociales dont pouvaient bénéficier les
emplois à temps partiel.
Mme Catherine Barbaroux
a indiqué que le suivi des
résultats obtenus par ces différentes mesures
d'exonérations s'effectuait au moyen de trois catégories
d'instruments : des tableaux de bord budgétaires, des études
approfondies élaborées par la Direction de l'animation, de la
recherche, des études et des statistiques (DARES), ainsi que par des
sondages effectués sur des échantillons d'entreprises.
Evoquant les modalités de gestion de ces exonérations de charges
sociales,
Mme Catherine Barbaroux
a rappelé que certaines
d'entre elles étaient mises en oeuvre par l'Union nationale pour
l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et d'autres par le Centre
national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles
(CNASEA). Elle a précisé que des réunions techniques
associant ces organismes et les services du ministère de l'emploi et de
la solidarité permettaient d'assurer le suivi des dépenses. Elle
a observé, toutefois, qu'il n'y avait pas d'échanges concernant
le coût de la gestion des exonérations de charges sociales entre
les services du ministère et l'URSSAF.
Mme Catherine Barbaroux
a considéré que les entreprises
préféraient les mesures d'exonérations de charges sociales
à d'autres dispositifs d'aides encore plus complexes, comme les primes
et les conventionnements. Elle a précisé que le ministère
de l'emploi et de la solidarité continuait à mener des actions
d'information à destination des entreprises pour leur expliquer les
règles d'attribution de ces différentes aides, ainsi que leur
régime respectif. Elle a souligné que les entreprises
souhaitaient avant tout une stabilité dans le régime des aides,
ce qui expliquait la lente montée en charge des nouvelles mesures mises
en place.
M. Charles Descours, rapporteur,
a souhaité que la
délégation générale à l'emploi et à
la formation professionnelle puisse communiquer, chaque année, à
la commission, le nombre d'emplois créés par chacune des mesures
d'exonérations de charges sociales existantes. Il a remarqué que
5 exonérations sur 36 représentaient à elles seules
97 % des crédits consacrés aux allégements de charges
sociales ; il s'est interrogé en conséquence sur les
possibilités de simplifier l'ensemble du dispositif. Il a observé
que la plupart des PME étaient dépourvues de service juridique et
se trouvaient dans l'incapacité d'appréhender la
complexité des différentes mesures d'exonérations de
charges sociales mises en place. Il a souhaité connaître
l'état de la coopération entre les directions
départementales du travail, de l'emploi et de la formation
professionnelle et les URSSAF.
M. Alain Vasselle, rapporteur,
a souhaité connaître quelle
pouvait être la mesure de l'effet de levier de la politique
d'allégement des charges sociales sur l'emploi et les recettes fiscales.
Mme Catherine Barbaroux
a estimé que les résultats en
termes d'emplois créés par chacune des mesures étaient
plus ou moins disponibles selon la nature du dispositif. Elle a remarqué
que les chiffres précis pouvaient être obtenus en matière
d'alternance et d'emplois aidés, mais que cela était plus
difficile lorsque le dispositif, comme dans le cas de la réduction du
temps de travail ou de l'aménagement du territoire, avait une forte
dimension macro-économique, sans effet direct sur l'emploi, qui puisse
être distinguée clairement des effets d'aubaine ou de ceux de la
conjoncture. Elle a néanmoins estimé que la DARES, qui
travaillait dans une parfaite transparence et avec un souci reconnu
d'objectivité, était en mesure d'obtenir des résultats
intéressants.
Evoquant les formalités administratives, elle a souligné qu'il
n'y avait pas de réponse simple à des situations complexes, et a
précisé que la circulaire d'application des 35 heures, qui
comportait plus d'une centaine de pages, s'adressait non pas aux entreprises,
mais aux services. Elle a observé, à cet égard, que
l'URSSAF avait réalisé, à l'intention de ces
dernières, un dépliant de 4 pages remarquablement
pédagogique. Elle a rappelé, en outre, que, dans le cadre de la
mise en oeuvre de la loi relative à la réduction
négociée du temps de travail, les employeurs avaient pu faire
leur déclaration sur papier libre, afin de pouvoir
bénéficier des allégements de charges dans les meilleurs
délais.
Mme Catherine Barbaroux
a considéré par ailleurs que la
collaboration entre les directions départementales du travail, de
l'emploi et de la formation professionnelle et les URSSAF était
satisfaisante. Elle a rappelé qu'un comité national de pilotage
avait été mis en place, ainsi qu'un comité technique
chargé d'établir des réponses pratiques aux
différents problèmes rencontrés par les entreprises.
Mme Catherine Barbaroux
a insisté sur le nouveau rôle des
agents du ministère de l'emploi dans le cadre de la mise en oeuvre de la
seconde loi sur les 35 heures qui se trouvaient désormais dans une
" posture " d'accompagnement et non d'agrément ou de
contrainte.
Elle a rappelé, en effet, qu'à la différence du
régime résultant de la loi du 13 juin 1998, les agents du
ministère de l'emploi n'avaient plus à agréer ou à
apprécier le contenu des accords signés : la décision
du Conseil constitutionnel sur la loi du 19 janvier 2000 avait
confirmé ce point sans ambiguïté. Il appartenait à
l'administration de surveiller simplement que les partenaires sociaux avaient
appliqué correctement les quelques contraintes de la loi en
matière de validité des accords.
Répondant à M. Charles Descours, rapporteur, qui souhaitait
obtenir davantage de précisions sur la nature des contrôles
exercés dans le cadre de la loi du 19 janvier 2000,
Mme Catherine Barbaroux
a indiqué qu'ils s'exerçaient
à plusieurs niveaux.
Elle a confirmé, tout d'abord, que, dès lors que le dispositif
était déclaratif, aucun contrôle n'était
opéré à son entrée, sauf un contrôle de
" bon sens " quant à la forme de l'accord notamment, qui
conduisait d'ailleurs à une mise en garde et non à un blocage.
Elle a indiqué que, par la suite, chaque administration disposait de ses
pouvoirs propres, l'URSSAF pouvant constater de fausses déclarations ou
omissions, la direction départementale du travail, saisie par
l'inspection du travail, s'assurant du respect des aspects fondamentaux de
l'accord : respect de la durée collective du travail, respect des
engagements pris en matière de création d'emplois -sachant qu'un
accord pouvait, le cas échéant, ne comporter aucun engagement de
création d'emplois-, qualité des personnes mandatées pour
négocier l'accord.
Mais elle a considéré que le contrôle le plus efficace
restait bien celui qui engageait les partenaires sociaux signataires de
l'accord.
Elle a précisé, enfin, qu'il appartenait à la direction
départementale du travail de transmettre son rapport à l'URSSAF,
seul décideur, et naturellement au chef d'entreprise.
Répondant à M. Alain Vasselle,
Mme Catherine Barbaroux
a
déclaré qu'il subsistait des incertitudes concernant la mesure de
l'effet de levier en matière fiscale. Elle a observé que la
baisse du chômage, à laquelle on pouvait assister, constituait
néanmoins un puissant facteur d'augmentation des recettes fiscales.
En réponse à M. Charles Descours,
Mme Catherine Barbaroux
a, par ailleurs, déclaré que le nombre d'accords signés
suivait une pente ascendante depuis l'entrée en vigueur de la loi. Elle
a estimé que 3 millions de salariés étaient
aujourd'hui couverts par un accord, et que ce nombre devrait s'élever
à 4 millions d'ici la fin de l'année 2000.
Elle a rappelé que 4,3 milliards de francs étaient inscrits sur
les crédits du ministère au titre de la participation de l'Etat
au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de
sécurité sociale, et a estimé que le manque à
gagner, entraîné par la censure, par le Conseil constitutionnel,
de la taxation des heures supplémentaires, -soit 7 milliards de
francs sur un total de 63 milliards de francs- devait s'apprécier
au regard de l'évolution a priori positive des autres lignes de recettes
du fonds.