V. COMMUNICATION DES RAPPORTEURS
(GESTION DES EXONÉRATIONS DE
COTISATIONS SOCIALES)
Réunie le
mardi 21 mars 2000
sous la
présidence de
M. Jean Delaneau, président,
la commission a
entendu une
communication des rapporteurs des lois de financement de la
sécurité sociale
(mission de contrôle sur la gestion
des exonérations de cotisations sociales).
M. Charles Descours, rapporteur,
a rappelé que MM. Jacques
Machet, Alain Vasselle et lui-même avaient engagé, au début
de l'année, plusieurs missions de contrôle, " sur
pièces et sur place ", dans les organismes de protection sociale,
en se fondant sur les prérogatives particulières et permanentes
accordées, par la loi, aux rapporteurs des lois de financement de la
sécurité sociale.
M. Charles Descours
a précisé que les rapporteurs avaient
été amenés à privilégier, cette
année, trois thèmes de contrôle : les difficultés de
fonctionnement dans les caisses d'allocations familiales (CAF), la gestion des
exonérations de cotisations sociales et, enfin, l'application de la
couverture maladie universelle (CMU).
Il a indiqué qu'il n'évoquerait, ce jour, que la mission
consacrée à la gestion des exonérations de cotisations
sociales, M. Jacques Machet ayant déjà présenté, le
1
er
mars, l'état d'avancement du contrôle sur les
difficultés de fonctionnement dans les CAF. Après avoir
précisé que la mission sur la gestion des exonérations
n'était pas encore achevée, il a expliqué que les
rapporteurs avaient cependant jugé utile de tenir informée la
commission de l'état d'avancement de leurs travaux, en lui
présentant un compte rendu de leurs déplacements sur
pièces et sur place.
M. Charles Descours, rapporteur,
a indiqué que, dans le souci de
préserver la nécessaire vision d'ensemble qui devait
prévaloir dans cette procédure de contrôle de l'application
des lois de financement de la sécurité sociale, les conclusions
définitives des travaux des rapporteurs sur la gestion des
exonérations de cotisations sociales pourraient être
présentées à la commission le 24 mai prochain,
parallèlement à la présentation des conclusions sur les
missions consacrées aux difficultés de fonctionnement des caisses
d'allocations familiales et à l'application de la CMU.
M. Charles Descours
a indiqué qu'une mission sur les
exonérations de cotisations était apparue nécessaire,
à la suite de l'adoption de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 2000 et de la loi du 19 janvier 2000
relative à la réduction négociée du temps de
travail. Il a rappelé que ces deux textes avaient d'abord mis en place
un nouveau dispositif d'allégement de charges, conditionné
à l'existence d'un accord de réduction du temps de travail au
sein de l'entreprise, puis un nouveau mécanisme de financement de la
compensation des exonérations de cotisations sociales.
M. Charles Descours, rapporteur,
a précisé que,
contrairement à la mission sur les CAF, les rapporteurs n'avaient pas
été alertés par des articles de presse. Il a
indiqué que l'objectif était de procéder à un
recensement des différentes exonérations de cotisations de
sécurité sociale, d'appréhender les conditions exactes de
leur gestion, tant par les organismes du recouvrement que par les entreprises,
et d'analyser les conséquences du nouveau dispositif d'allégement
de charges. Se bornant à constater que les études des
économistes convergent pour reconnaître que le coût du
travail en France, principalement non qualifié, est
considéré comme un frein au développement de l'emploi, il
a rappelé qu'il ne s'agissait pas de se prononcer sur la pertinence de
tel ou tel dispositif.
M. Charles Descours, rapporteur,
a indiqué qu'il s'était
rendu, le 15 février dernier, au siège de l'Agence centrale
des organismes de sécurité sociale (ACOSS), où il avait pu
rencontrer M. Jean-Louis Buhl, entouré de son équipe de
direction. Ce déplacement à l'ACOSS avait été
précédé par l'envoi d'un questionnaire : les
réponses écrites transmises avaient permis de compléter
l'information des rapporteurs.
M. Charles Descours
a ajouté qu'il avait auditionné des
représentants de la direction de la sécurité sociale,
tutelle de l'ACOSS et des Unions de recouvrement des cotisations de
sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), de la
direction du budget, qui rembourse à la sécurité sociale
les exonérations de cotisations compensées, de la
délégation générale à l'emploi et à
la formation professionnelle, qui est à l'origine d'une grande partie
des mécanismes d'exonération, et de la direction de l'animation,
de la recherche et des études statistiques (DARES), qui élabore
des études et des recherches statistiques sur le marché du
travail, à partir de données notamment fournies par les URSSAF.
Il a précisé que les rapporteurs s'étaient rendus, le 8
mars dernier, à l'URSSAF d'Arras. Recouvrant 13 milliards de francs,
cette URSSAF est de taille moyenne. Elle est toutefois en pointe dans deux
domaines : l'informatisation de ses activités et le développement
du partenariat avec le monde de l'entreprise. La direction de cette URSSAF
considère, en effet, que l'accompagnement des entreprises est une
tâche très importante, et que le développement des actions
de prévention permet à la fois d'assurer un meilleur recouvrement
et d'éviter des redressements pouvant avoir des conséquences
dramatiques sur les entreprises.
M. Charles Descours, rapporteur,
a
ajouté que les rapporteurs avaient pu également, à
l'occasion de ce déplacement, rencontrer des chefs d'entreprise, des
experts comptables et des responsables de la chambre de commerce et d'industrie
d'Arras, afin de recueillir le point de vue des " usagers ".
M. Charles Descours
a constaté que la délégation
avait été partout bien reçue.
Il a précisé que les auditions le 15 mars dernier devant la
commission de M. Bernard Caron, président de l'ACOSS, et M.
Jean-Louis Buhl, directeur, ainsi que de Mme Catherine Barbaroux,
déléguée générale à l'emploi et
à la formation professionnelle, avaient conclu la première
étape de cette mission.
M. Charles Descours
a examiné tout d'abord les raisons du
succès des exonérations de cotisations sociales depuis le
début des années quatre-vingt-dix. Il en a relevé trois
principales.
Première raison, une exonération de cotisations de
sécurité sociale est en elle-même " simple "
à mettre en oeuvre, par rapport à d'autres mécanismes
visant à alléger les charges fiscales et sociales sur les
entreprises (primes, aides, exonération fiscale). Elle repose le plus
souvent sur un mécanisme déclaratif : l'entreprise s'applique le
mécanisme. Ainsi cette dernière évite-t-elle les
délais d'attente pour être remboursée et n'a-t-elle pas
à constituer de dossier auprès des différentes
administrations.
Certains mécanismes d'exonération nécessitent cependant un
agrément de la direction départementale du travail, de l'emploi
et de la formation professionnelle. Les exonérations de la loi du
13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la
réduction du temps de travail, dite " loi Aubry I ", sont
soumises, par exemple, à la signature d'une convention signée
entre l'Etat et l'entreprise. En revanche, l'allégement de charges
accordé dans le cadre de la loi du 19 janvier 2000
précitée, dite " loi Aubry II ", est accepté
après le dépôt de l'accord sur la réduction du temps
de travail auprès de la direction départementale, et l'envoi
à l'URSSAF d'un formulaire spécifique.
Deuxième raison, une exonération de cotisations de
sécurité sociale est un mécanisme universel : toute
entreprise employant des salariés s'acquitte de cotisations de
sécurité sociale, alors qu'il existe nombre d'entreprises payant
peu ou pas du tout d'impôts.
Troisième raison, l'exonération de charges sociales a
probablement été considérée comme un
mécanisme échappant au contrôle de la Commission
européenne sur les aides publiques à l'emploi. Cette
argumentation n'est aujourd'hui plus valable : depuis l'annulation par la
Commission du plan " textile ", une exonération de cotisations
de sécurité sociale s'analyse selon les mêmes
critères qu'une aide directe.
M. Charles Descours, rapporteur,
a indiqué que trente-six
mécanismes d'exonération de cotisations étaient
aujourd'hui dénombrés. Il a souligné que la poursuite
d'objectifs différents expliquait la multiplication du nombre de
dispositifs, que l'on peut regrouper en trois grandes catégories : les
exonérations de charges sociales sur les bas salaires, poursuivant un
objectif d'allégement du coût du travail, les exonérations
de charges sociales ciblées sur des publics particuliers
(handicapés, exclus, jeunes, ...), poursuivant un objectif d'insertion
sociale, et les exonérations de charges sociales
" localisées ", poursuivant un objectif d'aménagement
du territoire (zones franches, zones rurales, zones urbaines, Corse,
départements d'outre-mer, ...).
Il a constaté que très peu de mécanismes
d'exonération avaient été supprimés depuis leur
entrée en vigueur, la tendance étant à la superposition de
strates successives.
M. Charles Descours, rapporteur,
a ajouté que les techniques
étaient elles-mêmes différentes. Une exonération
peut ainsi s'appliquer à 100 % des cotisations patronales, comprenant ou
non le versement transports et le versement au Fonds national d'aide au
logement (FNAL), comme elle ne peut concerner que des cotisations
spécifiques (exemple de l'exonération sur les seules cotisations
d'allocations familiales). L'exonération peut être limitée
par une réduction du taux ou un abattement forfaitaire. Enfin,
l'exonération peut être permanente ou limitée dans le temps.
M. Charles Descours
a considéré que chaque dispositif
avait sa logique et sa technique propre. Il a estimé que l'on restait
dans le domaine de " l'expérimentation permanente ", ce qui
expliquait les modifications à répétition des textes
d'application. Il a constaté qu'il n'existait pas d'unité de la
conception des mécanismes d'exonération, même si la
Délégation générale du travail, de l'emploi et de
la formation professionnelle jouait un rôle important.
M. Charles Descours, rapporteur,
a souligné que les
exonérations de cotisations représentaient un enjeu financier
important pour la sécurité sociale : 95 milliards de francs,
dont 80 milliards de francs faisant l'objet d'une compensation par le budget de
l'Etat. Il a expliqué que les exonérations de cotisations
restaient " invisibles " au regard de la loi de financement,
celles-ci étant classées jusqu'en 2000 dans la catégorie
" cotisations effectives " des prévisions de recettes
votées par le Parlement.
Il a ajouté que la plus grande partie des dispositifs
d'exonération recouvrait des enjeux financiers faibles, les cinq
principaux dispositifs d'exonération représentant 80 % des
masses financières. Il a précisé que, pour l'URSSAF
d'Arras, cinq mesures concentraient, à elles seules, 97 % du montant des
exonérations.
M. Charles Descours
a considéré que la gestion des
différents dispositifs d'exonération par la branche du
recouvrement était une tâche lourde et difficile. Il a
regretté que les gestionnaires ne soient que très peu
associés à la conception des mécanismes
d'exonération et que les études d'impact accompagnant les projets
de loi -qui doivent normalement insister sur les modifications juridiques et
organisationnelles entraînées par les dispositions
proposées- restent très lacunaires.
Il a indiqué que la gestion de ces différents mécanismes
par les URSSAF nécessitait de connaître parfaitement le droit en
vigueur (législation, réglementation), particulièrement
évolutif. Il a précisé que l'ACOSS actualisait, tous les
trois mois, un classeur juridique permettant à chaque URSSAF de disposer
d'une réglementation identique et à jour.
M. Charles Descours, rapporteur,
a rappelé que M. Jean-Louis
Buhl, en réponse à une question de M. Alain Vasselle, avait
estimé " intuitivement " à un tiers le temps
consacré aux exonérations dans le traitement des
déclarations. Il a précisé qu'il était en effet
impossible d'isoler précisément cette gestion à la fois
dans le traitement et dans le contrôle.
Il a relevé que les régimes d'exonérations de cotisations
constituaient l'un des principaux chefs de redressements opérés
par les URSSAF et qu'ils représentaient ainsi 28 % des
redressements effectués en 1998. Il a souligné que le
contrôle tournait parfois au bénéfice du cotisant,
l'entreprise n'ayant pas voulu -ou n'ayant pas su- profiter d'une mesure
d'exonération à laquelle elle avait pourtant droit.
M. Charles Descours
a insisté sur la charge pour les URSSAF que
représentent la communication et l'information des entreprises :
réalisation et envoi de dépliants, permanence
téléphonique, etc. Il a expliqué que certaines URSSAF
pouvaient hésiter à effectuer ce travail, au rebours de leur
mission traditionnelle de recouvrement.
M. Charles Descours
a évoqué le rapport conjoint de
l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection
des finances de mai 1998, pointant les insuffisances de la branche du
recouvrement dans le domaine de la gestion des exonérations. Il a
cité l'une des conclusions de ce rapport : " La gestion des
exonérations n'est pas traitée comme une priorité,
malgré ses enjeux financiers et son poids dans la politique de l'emploi.
Ainsi, elle repose sur des systèmes et des contrôles
automatisés souvent lacunaires et parfois contreproductifs. Dans les
URSSAF, elle ne bénéficie pas d'une attention suffisante,
notamment en termes de contrôle, de la part tant des directeurs que des
agents comptables. A l'ACOSS, elle souffre du caractère trop empirique
des contrôles de l'ordonnateur et trop superficiel de ceux du comptable.
Ces faiblesses sont source d'incertitudes sur le montant de la dette de l'Etat
au titre des exonérations ".
M. Charles Descours, rapporteur,
a considéré que ce
constat ne correspondait plus à la réalité. Il a
précisé que la branche du recouvrement avait fait de la gestion
des exonérations l'une de ses priorités, dans le cadre de la
convention d'objectifs et de gestion signée entre l'Etat et l'ACOSS et
des contrats d'objectifs signés entre l'ACOSS et chaque URSSAF. Il a
indiqué que l'application informatique RACINE, opérationnelle
depuis le 1
er
janvier 1998, permettait désormais de
comptabiliser -au niveau des URSSAF- les manques à gagner liés
aux exonérations, mesure par mesure. Il a ajouté que l'ACOSS
opérait une centralisation mensuelle, ce qui permettait de disposer d'un
état régulier des dispositifs, et que l'Etat procédait
à des versements d'acomptes mensuels pour les mesures supérieures
à 1 milliard de francs.
Il a relevé que la gestion des exonérations n'était pas
seulement une lourde charge pour les organismes chargés du recouvrement
: les entreprises y sont bien sûr confrontées, de même que
les administrations déconcentrées de l'Etat, lorsqu'une
exonération est soumise à un agrément administratif.
Puis,
M. Charles Descours, rapporteur,
a présenté le
nouveau dispositif d'allégement de charges lié aux trente-cinq
heures.
La loi " Aubry I " comportait un dispositif d'allégement de
charges incitatif, forfaitaire, et décroissant par année. Il
s'agissait d'une aide incitative, assortie d'un engagement de créations
d'emplois d'au moins 6 % pour l'aide offensive, ou d'un maintien d'emplois,
dans le cadre d'une aide défensive.
La loi " Aubry II " a prévu un nouveau dispositif
d'allégement de charges, permanent, comportant une aide forfaitaire de
4.000 francs par salarié et une aide variable, de 21.500 francs pour un
salarié à 1 SMIC et s'annulant à 1,8 SMIC. Ce
dispositif d'exonération est accordé aux entreprises
passées, par accord collectif, à trente-cinq heures ou à
1.600 heures annuelles. Contrairement à ce qui a pu être dit lors
des débats parlementaires, les objectifs de créations d'emplois
ne sont pas contrôlés par les URSSAF.
L'URSSAF reçoit une déclaration de l'employeur, qu'elle peut
contrôler formellement " a priori ". Elle se borne à
vérifier que l'accord a été déposé à
la direction départementale. L'URSSAF, qui n'a pas de compétence
en matière de droit du travail, ne vérifie pas si l'entreprise
est réellement passée aux trente-cinq heures.
M. Charles Descours, rapporteur,
a expliqué que les URSSAF,
grâce au formulaire rempli par l'entreprise, avaient les moyens de
comptabiliser les engagements de création ou de maintien d'emplois et
que ces informations étaient transmises aux autorités
déconcentrées de l'Etat, ainsi qu'à la DARES. En revanche,
il a rappelé que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du
13 janvier 2000, avait indiqué que " la détermination des
emplois créés ou préservés du fait de la
réduction de la durée du travail, ainsi que le contenu des
dispositions conventionnelles obligatoires, relèvent ainsi exclusivement
de l'accord conclu entre les partenaires sociaux ; ni l'autorité
administrative, ni l'organisme de recouvrement des cotisations de
sécurité sociale n'exerceront de contrôle sur
l'opportunité ou la portée des dispositifs conventionnels ".
Il a ajouté que l'engagement de créations d'emplois pouvait
être ainsi égal à zéro.
M. Charles Descours, rapporteur,
a évoqué le
contrôle du respect de l'engagement de créations d'emplois. Il a
indiqué que la loi avait confié aux directions
départementales, saisies par l'inspection du travail, le soin de
s'assurer du " respect des engagements pris en matière de
créations d'emplois ". La direction départementale peut, le
cas échéant, décider de rédiger un rapport ou un
avis adressé à l'URSSAF. C'est l'URSSAF qui suspendra
l'allégement de charges sociales. Seule sa décision faisant
grief, l'URSSAF peut être mise en cause juridiquement -il s'agit du
contentieux classique de la sécurité sociale (commission de
recours amiable, tribunal des affaires de sécurité sociale)- au
titre d'une décision pour laquelle, en quelque sorte, elle avait
compétence liée.
M. Charles Descours
a précisé que l'ACOSS avait
donné consigne aux URSSAF de suivre, dans tous les cas, les
recommandations des administrations de l'Etat.
Il a confirmé que les URSSAF n'avaient pas les moyens de comptabiliser
les créations d'emplois effectives. Il s'est demandé sur quels
critères les directions départementales allaient se fonder pour
demander la suspension de l'exonération de cotisations de
sécurité sociale, leur avis pouvant mettre en jeu la survie des
entreprises concernées. Il a considéré qu'il s'agissait
d'une des questions en suspens de l'application des trente-cinq heures.
M. Charles Descours, rapporteur,
a constaté que la connaissance
exacte de la création effective d'emplois apparaissait strictement
impossible et qu'une évaluation serait donnée par le biais de
" sondages " statistiques. Il a expliqué que la DARES comptait
procéder à de telles évaluations, dans les mêmes
conditions que pour la loi de Robien.
M. Charles Descours, rapporteur,
a rappelé que Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité, avait souligné que les
emplois créés par les trente-cinq heures pouvaient être
comptés " un par un ", ce qui justifiait la contribution
demandée à l'origine aux organismes de sécurité
sociale. Il a cité le communiqué de presse du cabinet de Mme la
ministre de l'emploi et de la solidarité en date du 10 mars 2000,
mettant en parallèle l'indiscutable processus de créations
d'emplois lié à la croissance et les effets de la
réduction du temps de travail : " Sur l'année 1999,
375.000 emplois ont été créés dans le secteur
concurrentiel, et 450.000 au total, grâce au dynamisme de la croissance,
aux créations d'emplois-jeunes et à la vive
accélération des créations d'emplois liées à
la réduction du temps de travail (plus de 170.000 emplois prévus
dans les accords) ". Il a estimé qu'une telle présentation
des faits était fallacieuse.
Enfin,
M. Charles Descours
a présenté les grandes lignes
du fonctionnement du fonds de financement de la réforme des cotisations
patronales de sécurité sociale (FOREC). Créé par
l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour
2000, ce fonds a pour mission de rembourser à l'ACOSS les
exonérations de cotisations liées à la ristourne
Juppé et à la nouvelle ristourne Aubry, soit 65 milliards de
francs prévus en 2000 et 105 milliards de francs " à
terme ". Financé par les droits sur les tabacs, les droits sur les
alcools, la contribution sociale sur les bénéfices, la taxe
générale sur les activités polluantes et une contribution
de l'Etat, ce fonds a vu l'une de ses recettes annulée par le Conseil
constitutionnel : la taxe sur les heures supplémentaires.
M. Charles Descours, rapporteur,
a précisé qu'aucune
mesure nouvelle de financement n'avait pourtant été
annoncée et que les services du ministère n'avaient pas
procédé à une réévaluation des recettes et
des dépenses du FOREC. Il a ajouté que Mme Martine Aubry
s'était bornée à expliquer que les recettes seraient plus
importantes que prévu. Il a estimé, pour sa part, que la
montée en charge du dispositif avait été quelque peu
surestimée, les entreprises attendant pour s'engager et
préférant, pour le moment, payer des heures
supplémentaires.
M. Charles Descours
a rappelé que les recettes de ce fonds
étaient réparties, dans les prévisions de recettes de la
loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, entre
plusieurs catégories :
- les recettes provenant des impôts et taxes apparaissent dans la
catégorie " impôts et taxes " ;
- la contribution de l'Etat apparaît dans la catégorie
" contributions publiques ".
Par ailleurs, les autres exonérations de cotisations demeurent dans la
catégorie " cotisations effectives ".
En conclusion,
M. Charles Descours, rapporteur,
a estimé que la
complexité des mesures d'exonération représentait une
lourde contrainte pour les entreprises et les organismes chargés du
recouvrement et que cette complexité était probablement, dans
certains cas, contreproductive.
M. Charles Descours
a considéré que la simplification
était ainsi nécessaire. Il a concédé qu'une telle
simplification était certes difficile, mais il a considéré
qu'il ne fallait pas se résoudre à l'accepter comme un
phénomène inévitable.
Il a évoqué les orientations modestes présentées
par les responsables de l'ACOSS : unification des techniques
d'exonération, regroupement des mesures, examen préalable par les
gestionnaires. Il a considéré qu'il appartenait au Parlement
d'inciter les administrations de l'Etat à prendre conscience de cette
complexité. Il a rappelé l'engagement pris par l'Etat, le
3 avril 1998, dans la convention d'objectifs et de gestion signée
avec l'ACOSS sous la rubrique " des textes clairs et adaptés aux
réalités vécues par les employeurs " :
" l'élaboration des textes législatifs et
réglementaires relatifs aux cotisations et contributions devra tendre
à une rationalisation des règles d'assiette au sein du
régime général et en liaison avec les autres
régimes de protection sociale, à une simplification des mesures
d'assiette ou de taux dérogatoires en faveur de l'emploi ". Il a
estimé que l'Etat devait respecter ses engagements.
M. Jacques Machet, rapporteur,
a insisté sur
l'intérêt du déplacement des rapporteurs à l'URSSAF
d'Arras. Il a souligné la convergence des premières conclusions
de cette mission avec celle consacrée aux difficultés de
fonctionnement des CAF : la simplification est nécessaire. Il a
estimé qu'il ne s'agissait pas d'un projet technique, mais d'un projet
politique. Il a indiqué qu'au-delà du constat, il appartenait au
Parlement de corriger la complexité législative.
M. Alain Vasselle, rapporteur,
a estimé que l'un des principaux
enseignements de ces missions de contrôle était qu'il fallait
procéder à davantage de déplacements sur le terrain, afin
d'apprécier les effets de l'application des lois. Il a souligné
le décalage entre les discours tenus par les personnes
auditionnées à Paris et la réalité concrète.
M. André Jourdain
a considéré qu'il était
également important de se rendre sur le terrain avant le vote de la loi.
Il a regretté le peu de temps disponible entre la présentation du
projet de loi en Conseil des ministres et la discussion au Sénat.
M. Jean Delaneau, président,
a considéré que s'il
était loisible d'interroger les acteurs de terrain sur
l'opportunité de telle ou telle mesure, il était difficile de
leur demander d'anticiper les difficultés d'application de textes non
encore définitifs.
M. Alain Gournac
a approuvé les propos tenus par M. Alain
Vasselle. Il a relevé qu'il était important de disposer
d'approches différentes des propos tenus devant la commission à
Paris. Donnant l'exemple de la caisse d'allocations familiales de son
département, il a expliqué qu'il avait pu facilement se rendre
compte que le principal dysfonctionnement des CAF était lié
à un manque de formation des personnels au nouvel outil informatique
Cristal. Il a concédé que le Parlement avait cédé
à la tentation de l'inflation législative, mais que les
administrations, par la rédaction de textes réglementaires et de
circulaires édictant des " règles-parapluie ",
étaient également en cause.
M. Jean Chérioux
a évoqué les propos de M. Bernard
Caron, président de l'ACOSS, visant à obliger le
législateur à annuler une règle de droit avant d'en
édicter une autre. Il a estimé qu'une telle démarche
était tout à fait intéressante.
M. Jean Delaneau, président,
a souligné l'importance d'un
suivi attentif de l'application des lois ; il a estimé, à
cet égard, qu'il serait utile de faire le point à mi-parcours sur
les emplois-jeunes, sur les postes occupés, sur les formations
reçues et sur les perspectives ouvertes aux intéressés au
terme de leur contrat.
M. Philippe Nogrix
a estimé que le problème des
emplois-jeunes dans l'éducation nationale lui paraissait
particulièrement crucial. Il a rappelé que les
collectivités locales avaient également fait appel, à des
degrés divers, aux emplois-jeunes.
Mme Nelly Olin
a déclaré avoir fait appel, dans sa mairie
de Garges-les-Gonesse, aux emplois-jeunes " de manière
mesurée ", en n'en recrutant que 75, contre 500 à Sarcelles.
Elle a indiqué que sa mairie avait été l'une des seules de
France à rédiger une charte pour les emplois-jeunes. Elle a
estimé que le problème de la formation était le plus
important.