M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Anne Chain-Larché. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, aujourd’hui est un jour historique pour les plus de 500 000 élus locaux de notre pays. Le terme n’est pas trop fort, car ce débat sur le statut de l’élu et l’amélioration concrète des conditions d’exercice des mandats électifs est attendu depuis de très nombreuses années. Ce n’est d’ailleurs qu’un début.

En 1982, la loi Defferre relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions apportait la précision suivante : « des lois détermineront […] le mode d’élection et le statut des élus… »

Quarante ans plus tard, grâce à la ténacité du Sénat et du travail mené par Françoise Gatel, Mathieu Darnaud, François-Noël Buffet, Hervé Marseille et Bruno Retailleau, nous proposons ce texte ambitieux, fruit d’un travail transpartisan.

Je remercie Jacqueline Eustache-Brinio et Éric Kerrouche, rapporteurs aux côtés de Françoise Gatel, dont le travail d’orfèvre a été unanimement salué.

Concrètement, qu’apporte ce texte ? Tout simplement, de la considération ! De la considération pour ces dizaines de milliers d’hommes et de femmes, de papas et de mamans, de grands-parents, d’actifs, de retraités, qui donnent de leur temps, la journée, le soir, le week-end, pour des réunions du conseil municipal, du conseil communautaire, de syndicats divers et variés, qui sont d’astreinte, y compris pendant les vacances, à Noël, à Pâques et durant l’été. Ce sont, dans leur immense majorité, des bénévoles.

Par leurs projets, ils participent directement et activement au dynamisme économique de notre pays.

Ils subissent au quotidien la complexité croissante des réglementations, des normes toujours plus nombreuses et des contraintes toujours plus fortes, le tout avec une autonomie financière toujours plus réduite.

Ces Français n’ont pas choisi d’être élus locaux pour faire carrière. Ils sont élus, car ils ont l’amour de leur territoire et l’intérêt général chevillés au corps.

La moindre des choses – je dis bien la moindre des choses –, c’est que la République reconnaisse, encourage et sécurise leur engagement par l’amélioration du régime indemnitaire, lequel est parfois mal compris par l’opinion publique. Il s’agit d’une impérieuse nécessité pour redonner de l’attractivité à la fonction et pour « indemniser » les élus à la hauteur de leur investissement. C’est une exigence démocratique, car, comme le dit l’expression, « tout travail mérite salaire ».

Mme Anne Chain-Larché. Quant à la facilitation des conditions d’exercice du mandat, elle est un enjeu majeur si l’on veut que les élus locaux puissent concilier vie professionnelle accomplie et vie familiale épanouie et que les étudiants, les actifs et les jeunes parents aient la possibilité de s’investir dans la vie démocratique de notre pays.

Enfin, la sortie de mandat est toujours un moment périlleux pour les élus, particulièrement pour les actifs. Nous devons leur proposer un accompagnement et une valorisation des acquis pour qu’ils puissent utiliser cette expérience méritante, par la suite, dans leur carrière professionnelle.

Mes chers collègues, ce texte concret améliorera la vie de plus d’un demi-million de Français et facilitera la relève pour ceux qui veulent passer la main.

D’autres difficultés restent à régler. Je pense à un problème maintes fois soulevé par les élus et qui a des répercussions financières pour les collectivités : le décalage de trois années entre le recensement de la population et sa prise en compte administrative. En 2024, les communes perçoivent des dotations calculées sur la base du recensement de l’année 2021, ce qui, sur le terrain, fausse les réalités démographiques et pénalise fortement les secteurs en dynamique.

En adoptant cette proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local, nous transmettrions à nos collègues de l’Assemblée nationale un condensé de mesures claires, efficaces et concrètes. Nous vous invitons, madame la ministre, à vous en inspirer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Marc Boyer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Avis de tempête sur la démocratie locale : soignons le mal des maires : le titre du rapport de la mission d’information du Sénat sur l’avenir de la commune et du maire en France, dont Maryse Carrère a été la présidente et Mathieu Darnaud le rapporteur, est criant d’actualité. Si nos maires ont mal, notre démocratie va mal.

Citoyens quotidiennement dévoués au service de la collectivité et de la démocratie locale, placés en première ligne face au changement de la société et au climat de défiance qui la gagne, à portée d’engueulade, les élus locaux méritent que leur engagement soit reconnu à sa juste valeur. Ils méritent un véritable statut de l’élu – ils méritent surtout du respect.

Passer d’un climat de défiance à une juste reconnaissance, c’est là tout l’enjeu de cette proposition de loi, que motivent trois objectifs majeurs : protéger, accompagner, anticiper.

Protéger, tout d’abord : si le maire a la mission de protéger ses concitoyens, mission qu’il exerce avec dévouement et dans la proximité, le statut de l’élu a corrélativement vocation à être protecteur pour son titulaire.

Ce statut doit aussi faciliter sa vie quotidienne via une meilleure indemnisation financière. Ce sujet est peut-être tabou, mais, à mon sens, nous ne devons pas laisser croire à nos concitoyens que l’exercice d’un mandat d’élu s’apparente à du bénévolat. Pour cette raison, les indemnités des élus doivent être revalorisées à la hauteur de leurs missions. Cette augmentation, pour être effective, ne doit plus être supportée par les budgets communaux, qui sont déjà exsangues. Il revient à l’État de l’absorber en l’intégrant dans la prochaine loi de finances – nous serons vigilants à ce propos.

Trop d’élus, par souci de bonne gestion et pour ne pas grever le budget communal, refusent de voter les montants prévus dans le barème indemnitaire. Cette situation ne saurait durer !

Par ailleurs, l’article 3 de cette proposition de loi est une avancée : il tend à améliorer le régime de retraite des membres des exécutifs locaux en leur accordant une bonification d’un trimestre par mandat complet. Nous pourrions toutefois aller plus loin, car, nous le savons tous, l’exercice d’un mandat mobilise l’élu sur au moins un mi-temps, voire sur un temps complet.

M. Jean-Marc Boyer. Protéger les élus, c’est aussi et surtout sanctionner les agresseurs, les harceleurs, les tueurs. Les comparutions immédiates doivent être systématiques : il faut briser la solitude des élus.

Accompagner les élus, ensuite : il est tout aussi fondamental de le faire en améliorant les conditions d’exercice du mandat. En effet, si l’on veut que nos élus accomplissent au mieux leur mission, il convient d’améliorer les conditions matérielles d’exercice par une meilleure prise en charge des frais de transport et des frais de représentation.

Garantir la conciliation de l’exercice du mandat et de l’activité professionnelle est essentiel. À cet égard, les autorisations d’absence devraient être facilitées. L’instauration du label « employeur partenaire de la démocratie locale » est une très bonne idée ; je plaide pour que l’attribution d’un tel label se répande tant dans le secteur privé que dans le secteur public.

M. Jean-Marc Boyer. Accompagner nos élus locaux, c’est aussi favoriser et renforcer leur formation ; je pense en particulier aux élus de nos communes de moins de 3 500 habitants, ainsi qu’aux nouveaux élus des petites communes dans lesquelles le couple maire-secrétaire de mairie assure la gestion quotidienne.

Il paraît nécessaire, en complément des mesures que je viens d’évoquer, d’alléger toutes les réglementations normatives qui freinent et contrarient l’activité municipale.

Cette proposition de loi prévoit à juste titre des mesures dont la mise en œuvre facilitera la conciliation du mandat et de la vie personnelle : l’élargissement de la prise en charge des frais de garde d’enfants ou d’assistance aux personnes âgées et l’amélioration de la situation des élus en cas de congé maladie vont ainsi dans le bon sens.

Anticiper, enfin : il faut préparer l’après-mandat et sécuriser la sortie de mandat en rendant automatiques le bilan de compétences et la validation des acquis de l’expérience ; en reconnaissant, par une certification professionnelle, les compétences acquises par les élus au cours de leur mandat, sur le modèle de ce qui existe pour les responsables syndicaux ; en améliorant les modalités de calcul de l’allocation de retour à l’emploi.

Je tiens pour conclure à féliciter une nouvelle fois mes collègues du travail qu’ils ont accompli pour sécuriser l’engagement des élus, mieux encadrer l’exercice de leur mandat et, ainsi, les rassurer en leur redonnant confiance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local

TITRE IER

AMÉLIORER LE RÉGIME INDEMNITAIRE DES ÉLUS POUR RECONNAÎTRE LEUR ENGAGEMENT À SA JUSTE VALEUR

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 90 rectifié

Avant l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 37 rectifié bis, présenté par MM. Uzenat, Kerrouche, Roiron, Cozic, Bourgi et Chaillou, Mme de La Gontrie, M. Durain, Mmes Harribey et Linkenheld, MM. Redon-Sarrazy, Lurel et Gillé, Mme Narassiguin, MM. M. Weber, Marie et Kanner, Mme Conway-Mouret, M. Chantrel, Mmes Canalès, Bonnefoy, Brossel, Artigalas, Bélim et Blatrix Contat, M. Darras, Mme Féret, MM. Jacquin et Mérillou, Mmes Monier et S. Robert, MM. Ros, Temal, Tissot, Vayssouze-Faure et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2025, un rapport sur l’opportunité de créer, au bénéfice des élus locaux, un statut d’agent civique territorial.

La parole est à M. Simon Uzenat.

M. Simon Uzenat. De nombreux intervenants l’ont rappelé, cette proposition de loi vise à améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux. Pour autant, nous n’en sommes pas encore à un véritable statut de l’élu.

Notre conviction est que nous arrivons à la fin d’un système, en particulier pour les élus qui sont en activité. J’ai eu l’occasion, ces deux dernières semaines, de rencontrer près de 130 élus et d’avoir avec eux dix-sept heures de débats sur les vingt-neuf articles du texte : ils notent les avancées obtenues, mais considèrent unanimement qu’elles sont insuffisantes. Voilà qui doit être un encouragement à faire davantage.

Les élus sont nombreux à le rappeler : leur mandat représente un deuxième métier. Ils évoquent la charge mentale, le temps consacré à la fonction, les compétences requises, l’énergie dépensée, l’impact sur la vie de famille. S’occuper des vaches qui divaguent ou des conflits de voisinage, faire office de médiateur conjugal ou de super-directeur général des services, servir à la cantine : être maire, aujourd’hui, c’est faire tout cela, comme l’ont souligné mes collègues.

Certains vont jusqu’à employer les termes de « surhomme » et de « surfemme » pour donner la mesure des sacrifices professionnels, personnels et financiers consentis. Il est aisé de le démontrer s’agissant d’élus qui perçoivent 1 100 euros d’indemnités pour cinquante heures par semaine et gèrent 2 millions d’euros de budget annuel avec dix agents.

Je ne soutiens évidemment pas le Gouvernement, mais je me retrouve dans la proposition du Premier ministre consistant à « désmicardiser » le pays : dans le même esprit, désmicardisons les élus ! Je pense en particulier à ceux des petites communes. Défendre les élus, ce n’est pas défendre une corporation ; c’est au contraire oxygéner notre démocratie et garantir sa vitalité à long terme. Tous les citoyens ont vocation à devenir élus et notre responsabilité est de leur en donner la possibilité.

À cet égard, il y a urgence à aller plus loin. On entend trop de témoignages de jeunes actifs qui, à l’issue de leur premier mandat d’élu local, disent : « Plus jamais ! ». Dans le Morbihan, plus d’un élu sur cinq a démissionné depuis 2020. Nous sommes tous d’accord pour dire que le statut n’est pas suffisant ; reste qu’il est absolument nécessaire. Il faudra néanmoins, j’y insiste, aller plus loin ; telle est la raison d’être de cet amendement. Le rapport dont nous demandons la remise permettrait de préciser les contours d’un véritable statut de l’agent civique territorial, notamment au bénéfice des membres des exécutifs locaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Mon cher collègue, vous plaidez là pour une évolution considérable de l’engagement citoyen, qui fut défini par la Révolution comme la gestion d’un espace commun par des citoyens bénévoles qui s’engagent parce qu’ils sont désignés par d’autres.

Votre proposition s’inscrit dans une autre culture : vous faites allusion à la façon dont les choses se passent dans certains pays européens, où les maires deviennent des fonctionnaires.

Pour ma part, je pense qu’une telle évolution, si elle permet de sécuriser l’élu, dont le mandat est un épisode dans sa carrière professionnelle, reviendrait à transformer complètement l’esprit qui préside à l’engagement volontaire qui est le sien pendant un moment de sa vie, engagement comparable, toutes proportions gardées, à l’engagement associatif.

En outre, mon cher collègue, il semble que vous souhaitiez réserver aux grandes villes la disposition que vous avez en vue. Or, compte tenu des difficultés auxquelles elles sont confrontées par défaut d’ingénierie, les petites communes ne méritent pas d’être écartées d’un tel dispositif, que par ailleurs je n’approuve pas.

Après examen de la mesure que vous prônez, nous l’avons écartée au profit d’une défense de l’engagement citoyen tel qu’il existe aujourd’hui dans notre pays, sous la forme d’une participation à la vie citoyenne de nos communes – car c’est ainsi, précisément, que l’on fabrique des citoyens.

Mon cher collègue, vous demandez un rapport. Au-delà même du fait qu’ici nous n’avons pas une culture très développée en faveur des rapports (M. Hussein Bourgi rit.), il me semble qu’en l’espèce, avec tout le respect que j’ai pour vous, un rapport serait totalement inutile : notre collègue Éric Kerrouche, pour qui j’ai la plus grande admiration, a déjà produit sur ce sujet une proposition de loi. Cela signifie qu’en la matière nous savons tout ce qu’il est possible de savoir et de proposer.

La professionnalisation du mandat d’élu local ne correspond pas à notre vision de la France, de la citoyenneté et du civisme. Nous préférons continuer de cultiver avec ardeur et de vénérer l’engagement citoyen. Peut-être un jour la vie changera-t-elle, sous l’effet, par exemple, d’une redéfinition de ce que sont les communes…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Je précise que ma proposition concerne non pas les seules grandes villes, mais bien l’ensemble des exécutifs locaux. Par ailleurs, madame la rapporteure, vous évoquez le sort réservé dans cette enceinte aux demandes de rapport ; mais, au regard de l’entonnoir extrême que représentent les articles 40 et 45 de la Constitution, c’est l’une des seules marges de manœuvre qui nous restent.

Vous nous renvoyez à un hypothétique « si jamais un jour la vie change » ; mais on constate qu’elle a déjà très nettement changé ! Telle est, du reste, la raison d’être de cette proposition de loi. Certes, ses dispositions constituent des pas dans le bon sens, mais elles restent insuffisantes à nos yeux.

Nos collègues ont rappelé, en discussion générale, quel était le coût de la démocratie. Dans beaucoup de communes, les élus locaux sont les derniers interlocuteurs de proximité et les derniers services publics. Nombre d’entre eux témoignent de leurs scrupules à percevoir des indemnités, mais posent clairement la question : qui accepterait de faire ce qu’ils font dans les conditions actuelles d’exercice d’un mandat local ? La main ne doit pas trembler face à la crise des vocations qui s’annonce sur l’ensemble des territoires !

Une question récurrente nous est adressée, madame la ministre : l’État a-t-il la volonté délibérée que les petites communes soient fusionnées par absence d’élus en 2026 ?

Nul ne peut contester la professionnalisation des mandats locaux, madame la rapporteure. C’est une réalité : professionnalisation des attentes, professionnalisation des contraintes, professionnalisation des exigences, émanant tant des citoyens que de l’État – des collègues d’autres sensibilités politiques l’ont souligné avant moi. Nous voulons, quant à nous, engager une autre professionnalisation, celle du soutien apporté aux élus, de la sécurisation et de l’accompagnement de l’exercice du mandat. Il ne s’agit pas qu’ils puissent faire carrière : il s’agit de permettre au plus grand nombre d’assumer des responsabilités locales.

Aussi regrettons-nous les avis défavorables émis par la commission et par le Gouvernement ; avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous poursuivrons notre mobilisation pour que s’engagent les profondes transformations dont notre démocratie locale a urgemment besoin.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 37 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 37 rectifié bis
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 262 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, M. Roux et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’opportunité et la possibilité de réunir et codifier l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires relatives au statut de l’élu.

La parole est à M. Philippe Grosvalet.

M. Philippe Grosvalet. Cette proposition de loi vise un double objectif légitime : d’une part, améliorer les conditions d’exercice du mandat, notamment pour les élus par ailleurs engagés dans la vie professionnelle ; d’autre part, sécuriser le parcours des élus en favorisant leur reconversion et en valorisant les compétences acquises lors de leur mandat. En ce sens, elle répond à de nombreuses préoccupations.

Pour autant, la promesse de « créer un statut de l’élu » n’apparaît, à ce stade, que partiellement tenue. En effet, une fois que sera adoptée cette série de mesures améliorant les conditions d’exercice des mandats électifs locaux, il restera une dernière marche, fût-elle haute, à monter : non pas professionnaliser la fonction d’élu – notre rapporteure l’a dit –, mais réunir et codifier dans un seul texte l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires qui font la spécificité de la fonction élective locale.

Proposer la création d’un statut de l’élu local laisse entendre que les règles existantes non seulement seraient insuffisantes, mais souffriraient d’une sorte de déficit initial ou de lacune originelle : elles ne rendraient pas compte, au fond, de la spécificité de la fonction élective locale. Aussi, pourquoi ne pas envisager de créer, sur le modèle du code général de la fonction publique, un code de la fonction élective ?

Cet amendement a pour objet d’inviter le Gouvernement à engager ce travail de codification, même si, je le sais bien – vous l’avez rappelé, madame la rapporteure –, accéder aux demandes de rapport n’est pas dans la culture de notre assemblée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Mon cher collègue, vous avez vous-même donné la réponse : la commission ne saurait émettre un avis favorable sur cet amendement qui a pour objet une demande de rapport.

En revanche, nous adressons tous nos encouragements au Gouvernement pour qu’il s’efforce d’élaborer un vade-mecum des droits et des devoirs des collectivités locales. Cela du moins est faisable : madame la ministre, j’attends que vous disiez que vous allez le faire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. En général, nous ne sommes pas favorables aux demandes de rapport. En l’occurrence, nous partageons pleinement l’objectif consistant à garantir l’accessibilité et la lisibilité du droit applicable aux élus locaux. Qui plus est, j’ai déjà commandé des travaux visant à refondre les dispositions du code général des collectivités territoriales sur ce point. Commencer par la rédaction d’un rapport, pourquoi pas ? Il va falloir en tout cas aller vite pour obtenir des résultats.

Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Mais on sait déjà tout !

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Je trouve cet amendement intéressant, même si, de vous à moi, mes chers collègues, je ne suis pas sûre qu’il y ait besoin d’un rapport pour engager ce travail de codification.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Certes, non !

Mme Céline Brulin. Regrouper l’ensemble des droits et devoirs des élus au sein d’un même code me semble tout à fait pertinent, ne serait-ce que pour des raisons pratiques de facilitation de l’exercice du mandat – de nombreux élus nous disent qu’eux-mêmes ne connaissent pas toujours leurs droits et devoirs.

Par ailleurs, une telle codification aurait sa place, sauf erreur, dans le code général des collectivités territoriales. Si nous réfléchissons à juste titre aux besoins des élus, ce n’est pas simplement pour ajouter ici un soupçon d’indemnité, là un droit à la formation élargi, etc. : il n’y va pas d’une reconnaissance « corporatiste » – je le dis de façon délibérément caricaturale – du rôle des élus. Ce que nous voulons revivifier en créant un statut de l’élu, c’est le rôle des collectivités elles-mêmes, en donnant toute sa portée au contrat liant des citoyens à d’autres citoyens qui s’engagent pour administrer lesdites collectivités, c’est-à-dire pour faire de la politique au sens noble du terme.

Il y aurait à cet égard un grand intérêt à entreprendre ce travail de codification : nos collectivités y trouveraient à se ressourcer par une meilleure définition de ce qu’elles doivent être. Dans le mal-être que ressentent aujourd’hui les élus compte pour beaucoup la question de savoir à quoi ils servent : « À quoi puis-je être utile ? », se demandent-ils tous. Ce travail mérite donc d’être mené pour de bon.

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Comprenons-nous bien : l’amendement a pour objet une demande de rapport ; nous aurions beau l’adopter, le Gouvernement, en fait de codification, ne serait pas pour autant tenu par une date.

Je maintiens ma position : l’élaboration d’un vade-mecum serait du plus grand intérêt, mais nous n’avons pas besoin d’un rapport, mes chers collègues – vous l’avez dit vous-mêmes –, pour savoir que nous avons besoin de quelque chose qui est indispensable !

Le Gouvernement doit pouvoir s’engager, sans que nous le mettions en difficulté, sur la réalisation d’un vade-mecum, en nous donnant une date. Sur cette demande de rapport, en revanche, je maintiens mon avis défavorable, bien que l’intention soit bonne. Je ne dis pas que l’enfer est pavé de bonnes intentions – vous avez plein de bonnes intentions, madame la ministre –, mais il est temps de s’y mettre !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 90 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 90 rectifié
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Article 1er

M. le président. L’amendement n° 262 rectifié ter, présenté par Mme Bourcier, M. Capus, Mme Lermytte, MM. Chasseing, A. Marc et V. Louault, Mme L. Darcos et MM. Brault, Chevalier, Bleunven et Daubet, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2025, un rapport d’évaluation concernant la bonne intégration de la situation spécifique des élus locaux dans les formulaires administratifs et notamment ceux relevant de l’administration fiscale. À défaut de résultats satisfaisants, le rapport explore les pistes d’amélioration.

La parole est à Mme Corinne Bourcier.

Mme Corinne Bourcier. Dans leurs relations avec l’administration, notamment avec l’administration fiscale, de nombreux élus éprouvent des difficultés à renseigner précisément les documents qu’ils doivent remettre sur leur situation, du fait de l’absence de catégories adaptées. Au-delà de la surcharge administrative que cela peut représenter, il y va de la reconnaissance du mandat d’élu local.

Cet amendement vise ainsi à demander au Gouvernement la remise d’un rapport d’évaluation concernant la bonne prise en compte par l’administration de la situation des élus locaux dans l’élaboration d’un certain nombre de formulaires de renseignement. Nous souhaitons, ce faisant, faciliter la vie des élus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Ma chère collègue, j’entends bien votre remarque et je ne doute pas de l’existence de telles situations. Toutefois, aucune association ne s’est fait l’écho auprès de nous de ce type de préoccupations.

Par conséquent, la commission demande de retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Néanmoins, je vous invite à faire connaître avec précision les situations particulières dont vous avez été saisie, afin que le Gouvernement et la commission des lois du Sénat examinent ce qu’il serait possible de faire pour y remédier. (Mme Corinne Bourcier acquiesce.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 262 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 262 rectifié ter
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Après l’article 1er

Article 1er

Le tableau du deuxième alinéa de l’article L. 2123-23 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

 

«

Population (habitants)

Taux (en % de lindice)

Moins de 500

28,1

De 500 à 999

44,5

De 1 000 à 3 499

57

De 3 500 à 9 999

61

De 10 000 à 19 999

71,7

De 20 000 à 49 999

99,3

De 50 000 à 99 999

121,4

100 000 et plus

160

»