Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je tiens d’abord à remercier M. le rapporteur de ses mots sympathiques. (Sourires.)

Nous sommes cohérents, monsieur le ministre : vous avez compris que nous sommes pour sortir l’énergie du secteur marchand, y compris, évidemment, avec les acteurs alternatifs, dont je considère qu’ils sont des requins qui se goinfrent et sur la bête EDF, et sur les usagers de l’électricité.

Votre raisonnement n’est pas le même, mais c’est un sujet politique, sur lequel nous pouvons être en désaccord et dont nous pouvons débattre démocratiquement.

En revanche, vous n’avez pas répondu à ma question.

Alors que le système de l’Arenh prend fin et sera remplacé par le versement nucléaire universel, personne ne sait comment le système va fonctionner – j’avais déjà donné l’alerte lors de l’examen du budget.

Aujourd’hui, sept mois plus tard, le ministre nous explique, depuis le banc de cet hémicycle, que le principe est encore en débat.

M. Marc Ferracci, ministre. Il fait l’objet de consultations !

M. Fabien Gay. Pour l’instant, il n’est pas fixé ! Personne ne sait comment les choses vont fonctionner, même à EDF, même à la CRE !

Nous avions 70 % de l’énergie nucléaire au prix de 42 euros. Nous allons vers un système libéralisé à 100 %, avec des tarifs entre 70 euros et 110 euros. Je suis prêt à parier ici que les prix augmenteront de 10 % !

À cinq mois de l’échéance, nous ne savons toujours pas comment le système va fonctionner. C’est un problème politique collectif – je rappelle que les TRVE concernent 21 millions de ménages…

Il est temps, monsieur le ministre, que vos services nous informent sur le fonctionnement de ce nouveau mécanisme et que nous en débattions.

Entre le passage de la TVA de 5,5 % à 20 % sur les abonnements au 1er août et la hausse, in fine, de 10 %, la note va être sacrément salée pour le plus grand nombre de Françaises et de Français !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 174.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 12 rectifié bis, présenté par M. Piednoir, Mme Belrhiti, MM. Brisson, Daubresse, Delahaye, Sautarel et Naturel, Mmes Dumont et Micouleau, MM. Savin et Milon, Mmes P. Martin et Lassarade, MM. Belin et Bouchet, Mmes Saint-Pé, Gosselin, Garnier, Pluchet, Hybert et Billon, MM. Lefèvre, Michallet, Margueritte, C. Vial, Sido et Genet, Mme Imbert, M. Bonneau et Mme Bellamy, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après la deuxième occurrence du mot :

électricité

insérer les mots :

reflétant les coûts complets du système de production électrique et de transport

La parole est à M. Stéphane Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. Cet amendement vise à intégrer les coûts de transport de l’électricité dans le calcul du coût complet, objet de l’article 1er de notre proposition de loi.

La raison en est assez simple.

Notre structure de distribution de l’électricité est fondée sur une construction historique, avec des injections massives centralisées autour des réacteurs nucléaires et un réseau de distribution prévu en conséquence. La prolifération des énergies renouvelables sur l’ensemble des territoires nécessite la création de sous-réseaux et l’extension de réseaux.

Puisque l’article 1er vise explicitement à établir le diagnostic du coût complet de l’électricité, il me semble que cette composante du transport mérite d’être prise en compte à sa juste mesure. Elle est importante : il suffit de penser aux budgets, aux dépenses et aux investissements annoncés par RTE comme par Enedis pour le transport d’électricité.

Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.

Mme la présidente. L’amendement n° 66, présenté par MM. Montaugé, Michau, Devinaz, Fagnen et Kanner, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Tissot, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après la deuxième occurrence du mot :

électricité

insérer les mots :

reflétant les coûts complets du système de production électrique

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Cet amendement s’inscrit dans le prolongement de celui que vient de défendre Fabien Gay.

Finalement, plus notre mix de production électrique se décarbone, plus nous restons dépendants du prix des énergies fossiles que nous utilisons dans ce mix.

Notre amendement a pour objet de prendre en compte les coûts complets du mix énergétique, afin d’instaurer une forme de stabilité et de visibilité des prix de l’électricité, en même temps qu’une maîtrise plus grande de ces derniers.

J’ai bien conscience cependant qu’il faut procéder à une refonte du calcul des prix, non seulement sur le plan national, mais aussi en tenant compte des règles européennes.

Nous n’allons pas, par exemple, continuer à dépendre du prix du gaz, que, du reste, nous importons, notamment de Russie – hélas ! cette réalité géopolitique perdure.

Le système actuel fonctionne à nos dépens, et notamment au détriment des plus modestes des Français – Fabien Gay a bien fait d’évoquer les tarifs réglementés. Nous devons en sortir.

Pour cela, il faut un système rénové qui prenne en compte les coûts complets actualisés de l’ensemble du mix de production. Tel est le sens de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Cadec, rapporteur. Les amendements nos 12 rectifié bis et 66 ont le même objet : faire mention dans la loi des coûts complets du système de production électrique. Je n’y suis pas favorable, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, ces amendements tendent à revenir sur les travaux que Daniel Gremillet, le rapporteur Patrick Chauvet et moi-même avons réalisés au sein de la commission.

Ayant fait un travail de coconstruction avec notre collègue député Antoine Armand, nous avons repris en commission un apport qui avait été adopté par l’Assemblée nationale : l’objectif de recherche de prix stables et abordables, pour l’électricité comme pour le gaz. En allant plus loin, ainsi que le souhaitent les auteurs des amendements, on créerait un irritant fort pour la suite de la navette parlementaire.

Par ailleurs, ces amendements sont satisfaits par le droit en vigueur, mais aussi par les nouvelles dispositions prévues. En effet, pour ce qui concerne le droit existant, il est déjà prévu dans le code de l’énergie de « maintenir un prix de l’énergie compétitif et attractif ». Et avec l’article 1er de la présente proposition de loi, il s’agit de conférer une base légale à plusieurs mécanismes de tarification.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Ferracci, ministre. Au-delà des arguments développés par M. le rapporteur, et que j’approuve, je souhaite réitérer les propos que j’ai précédemment adressés à M. Gay : les coûts sont en réalité composés de plusieurs briques – les coûts de transport, les coûts liés au mécanisme de capacité, les coûts d’acheminement –, et, à la fin, ce sont les coûts supportés par les fournisseurs actifs qui doivent être pris en compte. De ce point de vue, il n’apparaît pas opportun d’ajouter dans la loi une référence aux coûts complets du système de production électrique.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. On entend souvent certains propos relatifs aux réseaux électriques…

L’Opecst a indiqué, dans une note, que ces réseaux représentaient un enjeu fondamental pour les années à venir. On prévoit en effet 100 milliards d’euros dédiés au réseau de transport d’électricité, et 100 milliards d’euros pour le réseau de distribution. Ces coûts sont considérables.

Or il existe une petite musique selon laquelle une grande partie de ces coûts serait liée aux énergies renouvelables. Il convient de pondérer cette assertion, car il s’avère que bon nombre desdits coûts seront dus, en réalité, à l’électrification des usages. Il faudra, en effet, alimenter l’ensemble des bornes de recharge des véhicules électriques, et renforcer le réseau, qui est assez âgé et vétuste – on doit le dire ! Il faudra aussi prendre en compte le réchauffement climatique, qui va nous coûter très cher. Ainsi, le réseau de transport d’électricité subit des dommages lors des épisodes de canicule, notamment parce que des fils se détendent. Tout cela a un coût !

Par ailleurs, lorsque les EPR2 seront – un jour… – prêts à fonctionner, il faudra également les raccorder, et renforcer les lignes électriques à cet effet.

Les 200 milliards d’euros prévus ne seront donc pas consacrés uniquement aux énergies renouvelables, contrairement à ce que dit le RN, en particulier ! Il faut avoir le courage politique de regarder les choses en face : ces coûts seront bien liés à l’électrification des usages.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.

M. Stéphane Piednoir. Je remercie Daniel Salmon de me rafraîchir la mémoire, au cas où j’aurais oublié les travaux de l’Opecst…

Je suis quelque peu étonné par les avis du rapporteur et du ministre. En effet, la prise en compte du coût de production stricto sensu ne saurait suffire à obtenir une évaluation des coûts, ce qui est notre objectif dans le cadre du présent débat sur le mix énergétique. Je vais vous donner un exemple de coût complet : pour évaluer le coût du nucléaire, on prend en compte non pas seulement le coût de production, mais aussi le coût du démantèlement, lequel a sans doute été sous-estimé – je vous rejoins sur ce point, mes chers collègues – à un moment donné de notre histoire.

Je n’ai jamais dit que le montant de 200 milliards d’euros était intégralement lié à la création d’un réseau de distribution pour des installations de production d’énergies renouvelables. Néanmoins, une partie de ce montant sera bien dédiée à la production d’EnR.

Si mon amendement doit constituer un « irritant » pour l’Assemblée nationale, tant pis ! Celle-ci n’a pas eu tant d’égards envers le Sénat lorsqu’elle a voté un certain nombre d’amendements qui étaient totalement hors contexte, et que nous avons assez largement dénoncés dans cet hémicycle…

Il s’agit simplement de bon sens ! Loin de moi l’idée de cibler ou de défavoriser tel ou tel mode de production ; je veux simplement que le texte fasse mention des coûts complets, lesquels doivent intégrer les « externalités ». Et, concernant les réseaux, il convient que le coût de leur extension soit pris en compte.

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Je vais tenter d’éclairer quelque peu ce sujet complexe.

Monsieur le ministre, les coûts complets sont d’ores et déjà pris en compte pour ce qui concerne l’acheminement, le transport, la distribution, le mécanisme de capacité et les flexibilités nécessaires au bon fonctionnement du réseau. Et ces coûts sont répercutés sur le consommateur sous la forme d’une base d’actifs régulés (BAR).

Nous demandons que la même méthode soit appliquée pour la production d’électricité, ce qui nous permettrait de nous affranchir progressivement et complètement du prix des fossiles et de satisfaire au plus près les besoins et la demande. Car tel est bien l’enjeu ici.

Traduire les coûts de la production nucléaire ou des énergies renouvelables non pilotables sous la forme d’une BAR, c’est un choix politique. On connaîtrait ainsi l’empilement des coûts qui sont payés au final par le consommateur, en plus des taxes.

Tel est l’objet de ces deux amendements, qui vont dans le sens de l’intérêt de tous les consommateurs, y compris les industriels.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

M. Vincent Delahaye. Nos débats seraient peut-être un peu plus limpides et éclairés, y compris avec l’Assemblée nationale, telle qu’elle est composée actuellement, si l’on avait pris la peine d’établir une étude d’impact objective sur les coûts complets de chaque source de production d’électricité. Mais nous y reviendrons plus tard.

Je n’ai pas compris les arguments justifiant l’avis défavorable du rapporteur. Pourquoi ne pourrait-on pas intégrer le coût du transport dans les coûts complets ? Même si cela devait constituer un irritant pour l’Assemblée nationale, en quoi, sur le fond, ne serait-ce pas un élément important ?

Je ne dis pas que les 200 milliards d’euros prévus sont liés uniquement aux énergies renouvelables, mais que, sur les 100 milliards d’euros dédiés à RTE, 40 milliards sont fléchés sur les EnR. Pour le reste, une partie importante des crédits est dédiée à la modernisation du réseau. Il est nécessaire de tenir compte de tout cela si l’on veut faire les bons choix, et c’est ce que nous cherchons tous !

Je soutiendrai donc, à titre personnel, l’amendement de Stéphane Piednoir visant à intégrer les coûts de transport dans les coûts complets.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Nous n’avons pas dû regarder le même débat à l’Assemblée nationale ! En effet, des amendements y ont été défendus en faveur de la prise en compte des coûts complets et un accord a été trouvé avec le bloc central sur ce point, car cette question ne faisait pas débat ! C’est la volonté de saucissonner l’amendement rédactionnel en quatre qui a fait échouer l’affaire et a provoqué la sortie des députés modérés de l’hémicycle, personne ne voulant écouter…

Monsieur le rapporteur, mon groupe votera l’amendement n° 12 rectifié bis de Stéphane Piednoir, car il est évident qu’il faut prendre en considération les coûts complets de l’énergie pour prendre des décisions correctes !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 66 n’a plus d’objet.

Article 1er (début)
Dossier législatif : proposition de loi portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l'énergie
Discussion générale

6

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire arménienne

Mme la présidente. Mes chers collègues, je suis heureuse de saluer en votre nom la présence, dans notre tribune d’honneur, d’une délégation de l’Assemblée nationale d’Arménie, composée de députés du groupe d’amitié Arménie-France et présidée par M. Vladimir Vardanyan. (M. le ministre, ainsi que Mmes et MM. les sénateurs, se lèvent.)

La délégation est accompagnée par notre collègue Gilbert-Luc Devinaz, président du groupe d’amitié France-Arménie.

Cette visite s’inscrit dans le cadre des échanges interparlementaires approfondis entre nos deux assemblées et des liens historiques entre nos deux pays.

La délégation a effectué un déplacement en Dordogne, à Sarlat, à Périgueux et à Saint-Chamassy, où elle a rendu hommage à l’amiral Louis-René Dartige du Fournet, figure emblématique de la flotte française en Méditerranée, dont l’action fut déterminante, il y a tout juste cent dix ans, pour sauver plus de quatre mille Arméniens fuyant les persécutions ottomanes au cours de la Première Guerre mondiale.

Dans le contexte difficile qu’elle traverse, nous réaffirmons à l’Arménie notre soutien sans faille. Nous appelons de nos vœux un apaisement au cœur des tensions actuelles, avec la signature rapide d’un accord de paix. Cette visite rappelle la profondeur de l’amitié entre nos deux pays et la nécessité de maintenir la paix et la stabilité dans le Caucase du Sud.

Nous souhaitons à nos amis du Parlement arménien la bienvenue au Sénat français ainsi qu’un excellent et fructueux séjour. (Applaudissements.)

7

Article 1er (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l'énergie
Article 1er (suite)

Programmation et simplification dans le secteur économique de l’énergie

Suite de la discussion en deuxième lecture d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, rejetée par l’Assemblée nationale, portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l’énergie.

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l'énergie
Article 1er bis

Article 1er (suite)

Mme la présidente. Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 171, présenté par MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

la recherche d’exportations dans ce secteur

par les mots :

le développement des interconnexions

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Après avoir agité le spectre d’une pénurie, le haut-commissaire à l’énergie atomique (HCEA) nous a rappelé récemment qu’à force de tout miser sur l’augmentation de l’offre, nous prenions le risque d’une surproduction chronique à l’horizon 2035.

Deux questions se posent à nous : tout d’abord, l’électrification des usages, dont nous sommes tous conscients ici ; ensuite, le développement des interconnexions, lesquelles ne sont pas nées avec le marché européen de l’énergie en 1997, à Barcelone, mais datent de 1967, soit trente ans avant l’instauration dudit marché.

Un développement accru des interconnexions nous permettrait : premièrement, de sécuriser nos réseaux ; deuxièmement, de partager l’énergie entre États membres de manière solidaire ; troisièmement, de faire face aux pics de consommation ou aux incidents de production.

Mme la présidente. L’amendement n° 41, présenté par M. Jadot, Mme Guhl, MM. Salmon, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

d’exportations dans ce secteur

par les mots :

de solidarité électrique européenne par le développement des interconnexions

II. – Alinéa 3

Remplacer le mot :

diversification

par les mots :

réduction graduelle

La parole est à M. Yannick Jadot.

M. Yannick Jadot. Il s’agit avec cet amendement de substituer à l’objectif de recherche d’exportations d’électricité un objectif de développement des interconnexions européennes.

Je le rappelle, nous ne connaissons toujours pas les raisons du blackout d’avril 2025 dans la péninsule ibérique. On sait, en revanche, que le manque d’interconnexions entre cette péninsule et le reste de l’Europe n’a pas favorisé la résolution du problème de surtension qui s’est produit.

De la même manière, nous voulons miser davantage sur la réduction des importations de gaz plutôt que sur leur diversification. Nous avons été piégés pendant des décennies avec le gaz russe, et l’on sait ce qui s’est passé… Il ne serait donc pas opportun, me semble-t-il, que nous nous mettions dans les pattes de Donald Trump, qui pourrait, du jour au lendemain, cesser les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL), issu du gaz de schiste, lequel – vous le savez parfaitement, mes chers collègues – est extrêmement polluant.

Pour résumer : nous voulons favoriser les interconnexions plutôt que les exportations, et réduire les importations de gaz plutôt que les diversifier.

Mme la présidente. L’amendement n° 169, présenté par MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

que

insérer les mots :

la diminution et

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Il s’agit, là aussi, de réduire notre dépendance au gaz naturel.

C’est d’abord une question d’ordre juridique : en vertu du 3° de l’article L. 100-2 du code de l’énergie, nous devons réduire la part des énergies fossiles dans notre consommation. Cette question est liée à celles du réchauffement climatique et de notre souveraineté.

Oui, nous importons encore du gaz russe. Et oui, nous importons massivement du GNL américain, comme vient de le rappeler Yannick Jadot. Or le GNL est issu du gaz de schiste, dont nous avons interdit, à juste titre, la production en France. Par ailleurs, nous importons aussi du gaz qatari.

Nous proposons de prévoir, en nous inscrivant dans la durée, une baisse progressive de la consommation de gaz naturel pour ces trois raisons : juridique, climatique et de souveraineté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Cadec, rapporteur de la commission des affaires économiques. Ces trois amendements, dont la rédaction est proche, visent à ajouter à l’article 1er des mentions relatives au développement des interconnexions électriques ou à la réduction des importations gazières. Je n’y souscris pas, pour deux raisons.

D’une part, ces mentions déstabiliseraient l’équilibre instauré à l’article 1er de la proposition de loi. Dans le contexte de crise des prix des énergies, cet article fixe des objectifs de recherche des exportations, dans le secteur de l’électricité, et de diversification des importations, dans celui du gaz. Ces objectifs ont été accueillis positivement par les acteurs économiques concernés : l’Union française de l’électricité (UFE) et FranceGaz, notamment.

D’autre part, ces amendements sont en partie satisfaits par le droit proposé comme par le droit existant.

S’agissant du droit proposé, l’article 9 de la proposition de loi prévoit d’ores et déjà de relever, de 20 % à 30 %, l’objectif de réduction de la consommation d’énergies fossiles d’ici à 2030, à commencer par le gaz. Concernant le droit existant, les mécanismes de solidarité européenne évoqués sont prévus, pour l’électricité, par le règlement du 13 juin 2024 relatif à l’amélioration de l’organisation du marché de l’électricité de l’Union, et, pour le gaz, par le règlement du 13 juin 2024 sur les marchés intérieurs du gaz renouvelable, du gaz naturel et de l’hydrogène.

L’avis est donc défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Ferracci, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de lindustrie et de lénergie. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, quelle est votre stratégie dans le cadre d’un mix de production électrique totalement décarboné, affranchi de toute référence aux énergies fossiles pour l’établissement du prix de marché ?

Je rappelle que, dans le contexte particulièrement tendu que nous connaissons, ce sont les énergies fossiles, et notamment le gaz naturel, qui dictent aujourd’hui le prix de marché. Comment cheminez-vous vers un mix totalement décarboné et, si tel est bien le cas, comment le prix de marché s’établit-il ?

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. J’en reviens à notre amendement n° 171.

Je peux comprendre que le rapporteur et le ministre ne partagent pas nos avis et ne soutiennent pas nos amendements, car nous débattons ici de choix politiques, de choix stratégiques. Les visions s’affrontent, que l’on départage par le vote : c’est la base du fonctionnement d’une démocratie pleine et entière.

Pour autant, je ne comprends pas que le rapporteur, qui dit vouloir développer nos exportations d’électricité, rejette notre amendement visant à développer les réseaux et les interconnexions. C’est complètement contradictoire !

Si nous voulons renforcer nos exportations, il nous faut en effet débattre de cette question et répondre aux besoins nationaux tout en restant solidaires avec nos voisins, en dehors de toute considération de marché avec ceux-ci. À cet égard, Yannick Jadot a parfaitement raison : les raisons du blackout en Espagne ne sont toujours pas élucidées et une telle situation peut toujours se produire ailleurs. Nous sommes d’ailleurs au cœur des interconnexions au niveau européen.

Encore une fois, il me paraît contradictoire de partager cette conviction et de refuser de consacrer des moyens au développement des interconnexions et du réseau, lequel souffre – je le redis – de sous-investissement. Je pense notamment aux cas de l’Espagne et du Portugal, qui sont considérés comme une île parce qu’ils sont situés au bout du réseau.

Je peux comprendre que des avis défavorables soient émis sur certains amendements ; mais, en l’occurrence, l’explication politique est un peu courte. Je souhaite donc que M. le rapporteur révise sa position, tout du moins sur l’amendement n° 171.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 171.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 41.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 169.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 65, présenté par MM. Devinaz, Montaugé, Michau, Fagnen et Kanner, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Tissot, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« …°Promouvoir l’économie circulaire dans le secteur de l’énergie en favorisant la réutilisation, le recyclage et la valorisation des moyens de production et des déchets énergétiques. »

La parole est à M. Sébastien Fagnen.

M. Sébastien Fagnen. Cet amendement, porté par Gilbert-Luc Devinaz, vise à intégrer l’économie circulaire dans nos politiques énergétiques, pour des raisons environnementales, de renforcement de notre sécurité d’approvisionnement et de souveraineté.

En effet, l’approvisionnement en matières premières critiques est indispensable pour mettre en œuvre la transition écologique. Or notre pays souffre d’une dépendance excessive en la matière, comme l’a indiqué l’Institut national de l’économie circulaire (Inec) dans le cadre de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) sous contrainte de ressources.

Il nous faut trouver la voie d’une chaîne d’approvisionnement maîtrisée, ainsi que de retraitement de ces matières premières critiques, en intégrant l’économie circulaire dans les objectifs que nous nous assignons.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Cadec, rapporteur. Cet amendement n’est pas pertinent, car il est doublement satisfait.

Tout d’abord, l’économie circulaire est déjà visée au 2° du I de l’article L. 100-4 du code de l’énergie. C’est le droit existant.

Concernant le droit proposé, sur l’initiative du rapporteur Didier Mandelli et du président Jean-François Longeot – nos collègues de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable –, la commission a maintenu à l’article 5 de la proposition de loi une disposition visant à privilégier le renouvellement des parcs éoliens terrestres plutôt que l’implantation de nouveaux parcs.

J’ajoute que l’article 25 D de la proposition de loi, relatif aux parcs éoliens en mer, instaure une évaluation de leur durabilité, et donc de leurs conséquences sur la faune et la flore marines.

Avis défavorable.